Elle vient tout juste de s'arrêter, cette pluie merveilleuse, alors que je comptais un peu sur elle pour me fournir un semblant d'inspiration – plutôt : un soutien pour l'inspiration née d'elle. Il pleut presque sans interruption depuis la nuit dernière, le ciel est aussi plombé qu'une roulotte de Roms ; et on ne parvient pas à s'en lasser. C'est la saison où les Normands, les Picards, les Lorrains, les imprécis du Val de Loire et les montagneux de l'extrême-sud du Nord – tous les authentiques glébeux de France, en fait – sourient de pitié condescendante en songeant à l'inamovible et stupide soleil des gens du Midi. La pluie du sud n'en est jamais vraiment une, elle reste par là-bas une sorte de langue étrangère. Elle est soit absente soit torrentielle, m'as-tu-vu et dévastatrice. Elle se pousse du col pour faire oublier ses manquements, et elle est incapable de tenue, de retenue, un peu comme les gens qu'elle noie à saison fixe. C'est une pluie affligée d'un accent.
La vraie pluie, la nôtre, la pluie de France, la patiente, épouse nos humeurs, nous modèle sans nous faire de mal réel. Et les gens à ciel bas, au fond, lui sont reconnaissants – plus ou moins, c'est selon. Au moment de l'année où le pays redevient leur nue propriété, ils songent avec un haussement d'épaules à ces malheureux dont les contrées sont bordées de plages, c'est-à-dire par l'enfer, et encore plus ou moins pullulant de leurs occupants attitrés : les touristes. Ils triomphent, fenêtres ouvertes, taiseux par nature, s'emplissant de cette symphonie pointilliste – qui leur a un peu manqué pendant trois mois, ils ont peine à se l'avouer mais c'est vrai. De peu de durée, leur sourire.
Car, au printemps, avril ou mai, et parfois juin, la pluie produit exactement les mêmes sons d'insectes, bruissants, charnels, innombrables, un peu souriants, dans le tilleul planté devant la maison, l'arbre qui défend et accueille. Mais plus personne n'a envie d'ouvrir les fenêtres. Et c'est avec des rictus d'impatience, des grincements d'envie que l'on scrute la carte de la météorologie nationale, qui nous annonce soir après l'autre que “hormis sur le pourtour méditerranéen, la dépression installée au-dessus de... ” Dieu comme on les envie et déteste, alors, ces méditerranéo-pourtouristes, aux extrêmes pointes de mai, tandis que l'implacable pluie d'octobre s'attarde dans les feuilles du mai suivant, et que même le tilleul semble trouver ça très drôle, imbu de son vert pâlot et déjà promis aux chenilles.
Beau lyrisme intempériel.
RépondreSupprimerLe seul reproche que j'adresse à la pluie, c'est qu'elle favorise le mildiou qui détruit avec une remarquable constance les tomates de mon jardin normand. Même en mai pluvieux je ne parviens pas à envier le sud. C'est vous dire la gravité de mon cas, Dr Goux. A mon avis, c'est génétique.
RépondreSupprimerMerci pour cet hommage à la pluie, même si vous le réservez à celle d'automne.
Didier, rassurez-vous bien vite:
RépondreSupprimeril pleut sur nos plages. A l'ouest, rien de bien nouveau.
Vous ne le croirez pas, mais j'ai vu hier un petit plant de tomate qui poussait contre un mur parapet (de nonne)en bordure de plage. Je ne sais pas comment il est arrivé là (un reste de sandwich à la tomate qui a pris de la graine?) ni comment il a pu survivre. J'aurais dû le prendre en photo et l'envoyer à Catherine.
RépondreSupprimerPour ma part, j'aime bien les "pluies violentes", en ville, m'asseoir en terrasse (couverte !) et regarder les gens courir...
RépondreSupprimerL'avantage de ce genre de billet, c'est qu'il prête moins le flanc à la polémique interminable...
RépondreSupprimerSinon, j'aime aussi beaucoup les grosses pluies d'orage, lorsqu'on a étouffé toute la journée et que, vers le soir, la température choit aussi vite que l'eau.
Et si on est à une terrasse, c'est encore mieux, en effet.
La terrasse de la Comète est géniale pour ça (les gros orages) : elle est au carrefour de deux artères en "forte pente", dont la Nationale 7 qui se transforme "en fleuve". Très impressionnant.
RépondreSupprimer"L'avantage de ce genre de billet, c'est qu'il prête moins le flanc à la polémique interminable..."
RépondreSupprimerC'est d'autant plus curieux que tout le monde a des expériences directes de la pluie alors que c'est loin d'être le cas de la plupart des sujets polémiques.
Preuve qu'on passe son temps à
discuter sottement de sujets sans importance et que l'on connaît mal.
La burqa est très pratique sous la pluie.
RépondreSupprimerHop ! Polémique lancée.
Et moi, comme d'habitude, même pas le droit à un petit coucou (sauf à signaler ma parano^^).
RépondreSupprimerJe viens pluuuuuuuus!
C'est vrai que la burka est bien pratique.
RépondreSupprimerEt hop ! polémique éteinte...
Carine, il faudrait arrêter de fumer les plants de tomates que vous ne connaissez pas...
RépondreSupprimerIl n'empêche que la burqa est mieux que la kippa quand il pleut.
RépondreSupprimerEt hop !
Je propose une burka ET une kippa.
RépondreSupprimerŒcuménisme vaincra !
Reste à savoir ce qu'on met à l'extérieur. Je propose qu'on mette la kippa sur le dessus (objectivement : sinon on ne pourrait la voir) mais je vais me faire engueuler par les propalestiniens : pour un blogueur gauchiste, ça la fout mal.
RépondreSupprimerLa kippa AU-DESSUS de la burka ? Oh, madoué, ce virage à droite qu'il nous fait, le Nicolas !
RépondreSupprimerOui, mais c'est après avoir dit que la burqa était mieux sous la pluie.
RépondreSupprimerDonc, virage centriste : c'est pas beaucoup mieux...
RépondreSupprimerAh merde...
RépondreSupprimerGens du Nord, je vous laisse la pluie qui semble vous convenir. Ici, septembre radieux comme d'hab et octobre à l'avenant...
RépondreSupprimerAlors, jaloux?
Ah ! le bruit que la "tornade" faisait en tombant sur les toits de tôle, on l'entendait arriver, encore au sec, et tout à coup on ne s'entendait même plus respirer, cernés par un rideau de pluie épaisse. En classe, les profs s'arrêtaient de parler, évidemment, le temps qu'elle aille plus loin.
RépondreSupprimerEt ça, c'était une pluie du sud (avec plage facultative).
De l'eau, du tilleul, vous êtes malade ? Je fais diversion pour ne pas jouer la sudiste vexée. D'ailleurs je m'en fous, je ne suis pas du sud.
RépondreSupprimerL'avantage de ce genre de billet, c'est qu'il prête moins le flanc à la polémique interminable...
RépondreSupprimerOui encore que.
C'est quoi cette image nauséabonde:
le ciel est aussi plombé qu'une roulotte de Roms ?
Sinon pour bien connaître le sud, je sais que le soleil peut être triste à en chialer.
Finalement je crois que je n'aime ni l'exès de l'un, ni l'obstination de l'autre.
Je suis pour un entre-deux cevenol ou ardéchois.
Orage, Mifa et Mère Castor : en fait, j'ai écrit cela par jalousie pure et simple...
RépondreSupprimerFredi Maque : ah oui, tiens, ma roulotte de Roms (empruntée à San-Antonio) a échappé à Nicolas !
empruntée à San-Antonio)
RépondreSupprimerIl a, comme vous je crois, travaillé un temps à France Soir.
Mais vous étiez trop jeune probablement pour l'avoir croisé.
Ces plaisanteries sur la burqa sont particulièrement déplacées, venant d'un normand ostentatoire, soi-disant défenseur de notre culture et de nos traditions, alors qu'il a été photographié pas plus tard que ce matin avec ses copines en burqa, lui-même habillé comme ça. Ils allaient soi-disant ramasser des champignons. La BAT(brigade antiterroriste) est sur le coup.
RépondreSupprimerJe préfère le ciré à la burka, mais bon, ces sudistes et leur accent à la con ont parfois de curieuses préférences...
RépondreSupprimerPour répondre aux billets de Didier Goux nous pourrions, comme dans un film d'Alain Resnais, puiser dans l'oeuvre du bon Georges, (pas lui, l'autre) lui piquer quelques vers:
RépondreSupprimerParlez-moi de la pluie et non pas du beau temps
Le beau temps me dégoute et m'fait grincer les dents
Le bel azur me met en rage
Car le plus grand amour qui m'fut donné sur terr'
Je l'dois au mauvais temps, je l'dois à Jupiter
Il me tomba d'un ciel d'orage
Mais je l'entend d'ici monter sur ses grands chevaux:
-Je ne vous parle pas d'une pluie d'orage! Mais d'une pluie bien à nous: celle qui bouche l'horizon d'octobre à avril, avec laquelle on se lève et se couche! Dont on s'étonne de l'absence!
Car chez ces gens là, on ne dit pas "tiens v'la la pluie", ce serait parler pour ne rien dire.
Très exeptionnellement quand le ciel se fatigue de pisser sur les vaches on entend quelqu'un risquer un "cest t'y pas qui fffrait beau?".
Pour finir saluons cette jolie formule:
RépondreSupprimerAu moment de l'année où le pays redevient leur nue propriété
Suzon, Suzon, tant d'humour à la fois, c'est presque insoutenable !
RépondreSupprimerC'est un joli texte. On est habitué aux jolis textes de votre part, alors on ne pense même plus à dire comme on a eu deux minutes de plaisir à en lire un nouveau. J'aime bien la dernière phrase. Lue à voix haute, elle est balancée comme il faut.
RépondreSupprimerNous resterons à la maison :
Rien ne nous plaît plus que nous-mêmes
Par ce temps d’arrière-saison.
Carco
(pauvre petit Georges, il lui sera beaucoup pardonné car il souffre beaucoup)
RépondreSupprimerSi tu savais, ma Suzon…
RépondreSupprimer@Pluton
RépondreSupprimerC'est quoi ça "leur accent à la con"?????
J'habite le sud et n'ai aucun accent, non mais!
Il est vrai que je n'y suis pas née.
Je m'adresse à lui, et je lui dis : arrête ton blog. Commence quelque chose.
RépondreSupprimerMa pauvre Suzon, il faudra bien te faire à l'idée, un jour, qu'il est possible à des esprits aventureux et téméraires, de tenir un blog ET de faire autre chose (c'est mon cas, je ne sais pas si c'est le tien) aussi.
RépondreSupprimerNe te fâche pas, Georges, je sais. Et il est très bien, ton blog, si si.
RépondreSupprimerMa foi, vous peignez trop bien vos pluies normandes pour donner envie de vous contredire. D'ailleurs, même si j'attends parfois avec impatience dans mon sud les déluges d'automne, je n'en tire que très rarement du plaisir.
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