C'est que je me suis contraint à une expérience devant laquelle je renâcle le plus souvent, parce que je suis un garçon assez douillet : j'ai regardé – et même pis : écouté – le journal de huit heures proposé par France 2. On y a parlé assez longuement du chaos tunisien, avec interviews complaisantes de jeunes révolutionnaires enthousiastes qui, le cul bien au chaud dans notre belle France, encourageaient vivement leurs frères restés au pays à aller toujours davantage au casse-pipe (je résume, hein…). Ensuite une ou deux minutes sur le congrès du Front national, parce qu'il était difficile tout de même de s'en abstenir totalement (le présentateur du journal a parlé dans son “chapeau” de la prise de pouvoir de Marine Le Pen…).
Et, enfin, LE sujet du jour, appartenant à cette catégorie dans laquelle la télévision adore barboter sans fin : l'émotion pure, tournant à vide, se contemplant elle-même. C'était bien sûr à l'occasion du retour des corps des deux jeunes hommes tués au Mali il y a quelques jours. Avec l'obscénité compassée qui est la sienne en ces circonstances, la télévision nous a montré à satiété et sous les angles les plus avantageux la douleur “de toute une ville” (mensonge ! je suis bien certain que, dans ce bled dont le nom m'échappe en ce moment, il se trouve de mauvais esprits dans mon genre pour n'en avoir strictement rien à battre de la mort de deux types qu'ils ne connaissaient ni d'Ève ni d'Adam).
Mais bref. À la toute fin de ce torrent de guimauve mortuaire, on nous a appris que, en guise d'hommage aux disparus, les familles avaient souhaité que la traditionnelle et digne minute de silence soit remplacée par une minute de bruit.
C'est à ce moment que le fantôme de Philippe Muray a passé dans les cintres de notre petit théâtre d'éploration, et que je l'ai très nettement entendu ricaner.
Et, enfin, LE sujet du jour, appartenant à cette catégorie dans laquelle la télévision adore barboter sans fin : l'émotion pure, tournant à vide, se contemplant elle-même. C'était bien sûr à l'occasion du retour des corps des deux jeunes hommes tués au Mali il y a quelques jours. Avec l'obscénité compassée qui est la sienne en ces circonstances, la télévision nous a montré à satiété et sous les angles les plus avantageux la douleur “de toute une ville” (mensonge ! je suis bien certain que, dans ce bled dont le nom m'échappe en ce moment, il se trouve de mauvais esprits dans mon genre pour n'en avoir strictement rien à battre de la mort de deux types qu'ils ne connaissaient ni d'Ève ni d'Adam).
Mais bref. À la toute fin de ce torrent de guimauve mortuaire, on nous a appris que, en guise d'hommage aux disparus, les familles avaient souhaité que la traditionnelle et digne minute de silence soit remplacée par une minute de bruit.
C'est à ce moment que le fantôme de Philippe Muray a passé dans les cintres de notre petit théâtre d'éploration, et que je l'ai très nettement entendu ricaner.
Il est interdit de ricaner pendant les minutes de bruit.
RépondreSupprimerAh. J'ai raté la minute de bruit parce que désormais, j'essaye systématiquement d'éviter le bruit des infos-télé. D(h)ommage.
RépondreSupprimerJe l'ai vu aussi, et j'ai trouvé ça étrange. "bruit pour qu'on ne les oublie pas". Applaudissements et sifflets, comme au théâtre.
RépondreSupprimerEn Italie, ce n'est pas une tradition d'applaudir les cercueils ?
RépondreSupprimerMerci pour ce billet hautement jouissif. Notez que bruiter une apparence de parole, une absence de sens, donc bruiter le néant, est chose déjà assez répandue et même quotidienne dans le poste.
RépondreSupprimerDidier Goux,
RépondreSupprimerJ'ai lu dans le journal de Renaud Camus que vous sembliez infomé sur la possible parution du journal de Philippe Muray. Vous sauriez nous en dire plus la dessus?
Merci pour vos derniers billets et celui-ci, particulièrement émoustillant !!
RépondreSupprimerNicolas : y a un permis spécial pour les fantômes.
RépondreSupprimerSophie K. : d'où ma cession de rattrapage.
Suzanne : vous pariez que tout le monde va s'y mettre, désormais ?
NV : je ne sais pas, il faudrait demander à Dorham, notre Ritalalacon assermenté.
Le Plouc : exact, en fait ces gens sont simplement cohérents avec eux-mêmes et en phase avec l'époque – rien à redire.
Aurélien : aucune nouvelle, non.
Pluton : rions en attendant vendredi…
Non ! Pas Dorham! Surtout pas! Quand on lit ses réponses, on ne comprend plus rien à la question!
RépondreSupprimerStupéfiant, je complète le dossier sur Ilys..
RépondreSupprimerApplaudir n'est pas assez festif, la prochaine fois la foule à l'unisson chantera du Carlos :
RépondreSupprimerAttention les p'tits loups
Vous êtes prêts pour le tirelipimpon ?
Ouais !
L'été dernier, désoeuvré,
J'suis parti faire dl'humanitaire
Bronzer ma carte de crédit
A Niamey dans le Niger
Moi j'ai pas peur des militaires
Dans un palace en bambou
J'ai rencontré Banana
La fille du roi du vaudou
Qui m'a fait un truc extra
Mais qu'est-ce qu'elle t'a fait Banana ?
(Refrain)
Tirelipimpon sur le Chihuahua
Tirelipimpon avec la tête avec les bras
Tirelipimpon un coup en l'air un coup en bas
Touche mes castagnettes, moi je touche à tes ananas !
Voilà t'y pas un bien bel hommage !
Mais vous m'avez piqué mon billet! (Comme quoi...)Cette liturgie apostolique et émotionnelle me gonfle à me faire éclater la cervelle tellement elle bout de rage face à cette dictature invisible: Insidieuse parce qu'inattaquable, fugace, opportuniste, modeuse, friqueuse, strasseuse.
RépondreSupprimerCet instant de télé je l'ai pris comme un superbe instant d'humour noir.
Et j'ai pensé alors à la provocation cruelle de Murray concernant les touristes! Ceci dit étant en Tunisie juste avant que ça n'éclate, je fais donc partie de ceux-là! D'où la complexité de Murray que je lis davantage comme moraliste du "grand siècle" que comme sociologue ou politique. Ce n'est pas l'autre qu'il convoque mais une part de chacun, sa propre pulsion de vie dévoyée dans la grégarité du spectacle. Ceci dit, se foutre de soi-même est le meilleur des privilèges, celui que nul ne pourra jamais vous ravir. Rire et danser dans une prison, c'est la classe! Parvenu vers la fin de la lecture de "La chartreuse de Parme", je découvre que ce roman si intemporel dit tout celà, qu'il illustre déjà notre époque et anticipe ce qu'écrit Murray.
Je vais faire une réponse simple pour NV.
RépondreSupprimerItalie = pas de minute de silence.
Italie = honneurs rendus avec applaudissements nourris.
Ah ne regardant pratiquement jamais aucun JT j'ai moi aussi raté cette minute de bruit.
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