« On trouvait naturellement dans ce milieu des gens très différents, non seulement par les degrés variables de leur flamme révolutionnaire, de leur “amour” envers le peuple et de leur haine envers ses “ennemis”, mais plus généralement par leur façon d'être, aussi bien extérieure qu'intérieure. Toutefois, dans l'ensemble ils se montraient assez étroits, bornés, intolérants, et professaient une doctrine plutôt simpliste : l'humanité c'est nous, et avec nous les “humiliés et offensés” de tous bords ; tout le mal est à droite, tout le bien à gauche ; toute la lumière est dans le peuple, dans “sa sagesse traditionnelle et ses espoirs” ; tous les malheurs viennent du régime et de cette bande d'incapables au pouvoir (que l'on semblait même assimiler à une peuplade spéciale) ; il n'y a de salut que dans la révolution, la constitution ou la république…
« Tel était le milieu auquel je m'intégrais à Kharkov. »
Ivan Bounine, La Vie d'Arséniev, Bartillat, pp. 250 – 251.
Remarquons qu'un certain parti dont les suffrages augmente ces dernières années ne renierait pas ce slogan qui fait du peuple la source du bien, et du régime actuel et des hommes au pouvoir la source de tout mal. Slogan populiste qu'on trouve d'ailleurs partagé par les extrêmes qu'ils viennent de la gauche comme de la droite.
RépondreSupprimerPour ma part, je suis persuadé qu'il y a une sagesse et une lumière dans le peuple mais que celle ci consiste précisément à le laisser à sa place et à son labeur, à ne point vouloir le réformer et l'éduquer, et à ne surtout pas vouloir le mettre à la tête de l'Etat.
Qu'il y ait une "lumière" dans le peuple est en quelque sorte ce qui ressort, et magnifiquement, du roman de Bounine ; qu'il ne faille pas le déifier est la seconde leçon qui semble s'en dégager.
SupprimerA dsl, le peuple par définition, par construction, par logique ne peut jamais être au pouvoir.
SupprimerMais les castes en lutte au sommet de la stratification sociale utilisent. le peuple pour prendre le pouvoir.
ex : la bourgeoisie utilise le Tiers Etat pour prendre le pouvoir au roi et à l'aristocratie.
les bourgeois russes utilisent les moujiks et les ouvriers pour prendre le pouvoir au tsar et à l'aristocratie..
La lutte des classes n'existe qu'au sommet du pouvoir
Observateur
Je ne connais pas cette œuvre, n'ayant rien lu de cet auteur, mais je subodore, au vu de deux indices principaux (le contexte des derniers articles du blog, et le fait que Bounine emploie l'imparfait), que c'est un symptôme qui lui est passé ?
RépondreSupprimerCe semble lui être assez vite passé en effet (il a émigré dès 1920). Néanmoins, le narrateur de ce roman n'est pas forcément lui, même s'il semble (le roman) très autobiographique.
SupprimerAlors là, vous me la coupez ! Ainsi tout le malheur d'un peuple peut venir d'une "bande d'incapables au pouvoir" ? Mais qui lui a donné le pouvoir à cette "bande d'incapables" ? Vous ne nous en dites rien.
RépondreSupprimerEh ! Je ne suis pas Bounine, moi !
SupprimerJe suis médusé. Le peuple aurait décidé que Lénine et sa clique dirige le pays ?
SupprimerVous êtes drôlement russe, comme gars, ces temps-ci.
RépondreSupprimerEn effet, je le suis. J'aimerais que l'on lise les écrivains dont je parle, et d'autres si possible.
Supprimervous vous y mettez. C'est bien.
RépondreSupprimerC'était juste pour vous attirer dans mon piège…
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