Pour toucher du doigt la dégringolade de l'époque (je ne sais si vous avez déjà essayé de toucher du doigt une dégringolade : c'est une expérience unique), il suffit parfois de comparer les discours des ludions qui s'agitent à notre avant-scène avec ceux des hommes qui ont présidé à nos destinées, quand nous avions encore des destinées. Il me semble inutile d'aller fouiller les entrailles du net pour y trouver des extraits exacts de la sanie verbale répandue par l'actuel chef de l'État dès qu'il ouvre la bouche : chacun l'a bien présente dans les narines. C'est du style : « C'que les Français i' veulent, c'est... » Glissons.
Comparons avec les trois premières lignes du discours prononcé par Charles de Gaulle le 14 décembre 1963, pour l'inauguration de la maison de la Radio :
À tant d’idées, de mots, d’images, de sons, lancés sur des ondes merveilleuses, à toutes ces rafales de suggestions déclenchées vers la foule secrète des esprits, bref à la radio, fallait-il une maison ?
Je vous laisse savourer le drapé classique de la phrase (un peu trop drapée, la phrase, ergoteront certains...), les rafales de suggestions et la foule secrète des esprits, pour m'arrêter un instant sur ce “bref”, qui me ravit absolument, parce qu'il me paraît être d'une ironie non seulement parfaite mais encore bi-directionnelle, si je puis dire.
Car qu'entend-on dans ce bref, qui claque comme un guichet désinvolte, presque dédaigneux ? D'abord le tribun rassurant ceux qui l'écoutent : « Je sais bien que vous ne comprenez pas du tout où je veux en venir, mais vous allez voir, ça se résume à un truc tout simple : la radio. » Dans le même temps, on perçoit le demi-sourire que de Gaulle s'adresse à lui-même, moqueur : « Mais qu'est-ce qui t'a pris, vieux phraseur, de te lancer dans cette période imbitable, alors que tout le monde n'attend que le point final pour se ruer sur les petits fours ? »
Bref à la radio, fallait-il une maison ? La chute, par surcroît, dans son “ramassé” brutal et saugrenu, est d'une irrésistible cocasserie, il me semble.
Et encore, vous n'avez pas le son... la voix...
Comparons avec les trois premières lignes du discours prononcé par Charles de Gaulle le 14 décembre 1963, pour l'inauguration de la maison de la Radio :
À tant d’idées, de mots, d’images, de sons, lancés sur des ondes merveilleuses, à toutes ces rafales de suggestions déclenchées vers la foule secrète des esprits, bref à la radio, fallait-il une maison ?
Je vous laisse savourer le drapé classique de la phrase (un peu trop drapée, la phrase, ergoteront certains...), les rafales de suggestions et la foule secrète des esprits, pour m'arrêter un instant sur ce “bref”, qui me ravit absolument, parce qu'il me paraît être d'une ironie non seulement parfaite mais encore bi-directionnelle, si je puis dire.
Car qu'entend-on dans ce bref, qui claque comme un guichet désinvolte, presque dédaigneux ? D'abord le tribun rassurant ceux qui l'écoutent : « Je sais bien que vous ne comprenez pas du tout où je veux en venir, mais vous allez voir, ça se résume à un truc tout simple : la radio. » Dans le même temps, on perçoit le demi-sourire que de Gaulle s'adresse à lui-même, moqueur : « Mais qu'est-ce qui t'a pris, vieux phraseur, de te lancer dans cette période imbitable, alors que tout le monde n'attend que le point final pour se ruer sur les petits fours ? »
Bref à la radio, fallait-il une maison ? La chute, par surcroît, dans son “ramassé” brutal et saugrenu, est d'une irrésistible cocasserie, il me semble.
Et encore, vous n'avez pas le son... la voix...
Comparer De Gaulle et Sarkozy... On a échappé à De Gaulle et Ségolène Royal...
RépondreSupprimerOui, c'est tout simplement fabuleux, je suis bien d'accord avec vous. J'aurais simplement mis une virgule après le "bref".
RépondreSupprimerEt dire que certains achèteront peut-être mon disque uniquement parce qu'on peut y entendre ce discours de De Gaulle…
Bref !
Délicieux.
RépondreSupprimerIl y a un coté "on emballe, on ferme, on met le tout dans une maison et hop, on règle le problème". La maison de la radio pour les idées comme les catacombes pour tous ces morts. La gestion de l'encombrement ou le monde moderne
Georges, personnellement, je serais même allé jusqu'au "deux points".? Mais j'ai choisi de respecter le texte trouvé sur le net (ce qui n'est nullement une garantie, je vous l'accorde).
RépondreSupprimerOui, je sais que vous avez une dilection pour le deux points, et je reconnais qu'il se justifierait ici. (Je n'ai pas trouvé le texte, même avec votre lien, qui ne débouche sur rien, malheureusement.)
RépondreSupprimer« L'humanité est composée de plus de morts que de vivants », il me semble qu'une maison de la Radio, c'est un peu ce constat là, aussi.
C'est vrai qu'il est gouailleur le vieux.
RépondreSupprimerhttp://www.ina.fr/art-et-culture/architecture/video/I00011630/extrait-du-discours-du-general-de-gaulle.fr.html
Merci pour le lien.
RépondreSupprimerJe ne vois vraiment pas ce que la "gouaille" vient faire ici, et je trouve à la fois grossier et imbécile d'appeler De Gaulle "le vieux".
J'ai pas compris, là.
RépondreSupprimerIl dit quoi au juste sur la maison de la Radio, De Gaulle.
Parce qu'à la question : Fallait il une maison à la radio ?
La réponse est Non.
Y'a plus d'respect !
RépondreSupprimerQuelle photo !
RépondreSupprimerQue ne dirait-on pas si Sarko, pour un discours, venait à se pavaner ainsi !
O tempora o mores...
Pour le plaisir d'entendre une voix sans fautes d'orthographe, oui, j'aimerais, et tant pis pour le sens : c'est toujours le même dans ces voix-là depuis qu'on a émigré du Jardin de l'Eden !
RépondreSupprimer@ Georges:
RépondreSupprimerDe rien.
Pour ce qui est de la "gouaille", okay, goguenard si vous préferez. Les petits sourires, l'intonation, son attitude générale envers les médias (cf. Peyrefitte)...
Pour ce qui est du "vieux", un peu d'humour que diable! J'ai beaucoup d'admiration pour le Général. Mais promis, la prochaine fois pour vous faire plaisir j'y mettrai une majuscule.
L'histoire n'étant qu'une longue dégringolade depuis l'Age d'or, je me prends, à vous lire, à regretter que n'existent plus de traces des discours inauguraux du bon Charlemagne.
RépondreSupprimerEt voilà, c'est chaque fois la même chose, c'est inévitable, automatique : vous leur donnez un exemple de la pourriture ambiante (par comparaison), et ils vous répondent « oh hé, c'était toujours mieux avant, hein, on nous la fait à nous ! ».
RépondreSupprimerEt vous voudriez qu'on ne les traite pas de bande d'abrutis ?
"Et vous voudriez qu'on ne les traite pas de bande d'abrutis ?"
RépondreSupprimerNon. L'être n'est pas gênant.
Cependant, abruti ou pas, j'ai du mal à penser que la grandiloquence dix-neuvièmiste du vieux général ne serait pas déplacée aujourd'hui.
Bien que n'étant ni "progressiste" ni jeune (j'attaque le 3e âge demain), je suis cependant conscient de me priver de joies ineffables en ne refusant pas en bloc mon époque.
LE DISCOURS EN QUESTION :
RépondreSupprimerÀ tant d’idées, de mots, d’images, de sons, lancés sur des ondes merveilleuses, à toutes ces rafales de suggestions déclenchées vers la foule secrète des esprits, bref à la radio, fallait-il une maison ? Oui !
Car, pour étendues que soient ses limites, dispersées ses sources et variées ses émissions, la radio est une œuvre humaine, autrement dit collective. Sans doute, se nourrit-elle de la capacité des individus. Mais, pour être valable, il lui faut l’effort conjugué des équipes. Et c’est pourquoi ce bâtiment complexe et imposant, mais unitaire et circulaire, est le signe de l’organisation, de la concentration et de la cohésion, qui sont nécessaires à son audience et à son influence.
Ah, quelles responsabilités incombent à ce vaste ensemble !
Après la parole, le dessin, la scène, l’écriture, l’imprimerie, la photo, le cinéma, voici que la radio, à son tour, s’est saisie du contact direct avec les intelligences, les sensibilités et les volontés. Par tout ce qu’elle projette de vivant et d’émouvant, et par la façon qui est la sienne, péremptoire et immédiate, elle est, par excellence, le moyen d’information adapté à notre époque mécanisée, agglomérée et précipitée.
Mais, comme ce qui est utile aux âmes ne l’est qu’en vertu d’une grande cause et comme nous avons choisi la nôtre, il faut que la radio française, tout en captant sans parti pris et en répandant sans exclusive les courants de l’événement, de l’art, de la science et de la politique, concoure à la liberté, à la dignité et à la solidarité des hommes.
Cette responsabilité humaine est en même temps nationale.
Par le fait que la Radiodiffusion-Télévision française jaillit de notre esprit, s’exprime en notre langue, tient à notre technique, évoque les gens et les choses de chez nous, elle assume un rôle unique de représentation. L’idée que nous nous faisons de la France et l’idée que s’en font les autres dépendent maintenant, dans une large mesure, de ce qui est, à partir d’ici, donné à voir, à entendre, à comprendre, et qui frappe, au même instant, une innombrable multitude.
Dans cette vie de société qu’instituent désormais entre les citoyens et entre les pays, tant et tant de communications, il s’agit que la France apparaisse comme elle est, je veux dire aux prises avec ses peines et ses problèmes, mais vivant pleinement son siècle, dans un grand effort de progrès, et bienveillante à l’égard de tous les peuples de la terre. Car, si la réalité d’un fait ou d’un moment particulier peut prendre parfois les traits du doute, de l’amertume et de la division, la vérité totale et profonde de la France, c’est la foi, l’espoir et la fraternité.
Telle doit être l’inspiration de notre radio française.
"A la radio fallait-il une maison?"
RépondreSupprimerC'est un bunker bien-pensant et bien gauchiste qu'on a!
La maison de la Radio a aujourd'hui remplacé le bunker de la place du Colonel Fabien.
RépondreSupprimeril y a quand un petit coté "Vive Fécamp port de pèche et qui entend le rester" sur ce discours là, de "Notre Vieux"
RépondreSupprimerJe me disais que le "bref" pouvait conclure une envolée ironique, mais en fait non : de Gaulle savait ce qu'il devait à la radio.
RépondreSupprimer"et qui frappe, au même instant, une innombrable multitude."
RépondreSupprimerC'était avant l'audimat qui permet aujourd'hui de nombrer les multitudes et de leur ôter ce côté à la fois universel et vague où se complaisaient les esprits d'antan.
Tout ça est pompeux, cher M. Goux.
Si ça peut vous consoler de Sarkozy, pourquoi pas?
Après tout, la vie est peut-être plus rassurante quand on la regarde dans le rétroviseur?
C'est vrai, ça, quand on pense qu'on force nos gamins à regarder dans le rétroviseur en étudiant Molière, Du Bellay ou même, horreur ! Tacite.
RépondreSupprimerMais il faut bien reconnaître que Jules César avait moins d'ampleur dans le style que le Général, et que Cicéron en avait bien davantage.
(Bon, je retourne à ma photocopieuse)
Rassurez-vous Mifa, cela fait bien longtemps qu'on n'afflige plus notre jeunesse avec Tacite, ni avec Du Bellay d'ailleurs... J'irais même jusqu'à affirmer que, s'il y a un danger auquel on prend garde de ne pas exposer notre jeunesse, c'est bien la lecture de tout ce qui entretient un rapport, fût-il extrêmement distant, avec la littérature. On ne sait jamais, ils pourraient se mettre à aimer, les cons.
RépondreSupprimerTout ça pour finir avec NRJ !
RépondreSupprimer:-)
Ah, le coup du rétroviseur, ça faisait longtemps qu'on nous l'avait pas fait, celui-là !
RépondreSupprimer"Ah, le coup du rétroviseur, ça faisait longtemps qu'on nous l'avait pas fait, celui-là !"
RépondreSupprimerHeureux de vous faire renouer avec un vieux coup. Ce qui importe, c'est qu'il ait été bon.
Sérieusement (c'est à dire en revêtant mon costume d'abruti total), je pense (oui, je sais, c'est un bien grand mot...) qu'il est (sans commentaire)totalement vain de comparer les mérites respectifs de telle et telle époque. Tout passé est mort, qu'on y voit l'âge d'or ou les heures les plus sombres. Il nous nourrit cependant. Ce qui compte, c'est l'avenir. C'est difficile à admettre pour le réactionnaire de base. Vu que pour lui on fonce dans le mur, il n'a pas toujours l'impatience de le vivre. Les plus joyeux (dont M. Goux quand il est en forme) souhaitent pourtant qu'advienne l'apcalypse et qu'on n'en parle plus comme disait Céline (repris par Sardou).
Personnellement, je ne vois pas les choses comme ça. Les époques ne sont, seront ni n'ont été bonnes ou mauvaises. Chacune a son lot de problèmes et y répond en bricolant des solutions plus ou moins heureuses. Les individus font pareil.
Demander à Sarkozy d'être un fin lettré me paraît aussi vain que de demander à un poète de conquérir de haute lutte un grand parti afin d'accéder à la présidence. Chacun son boulot. Les intellos voudraient un président intello. Les charcutiers ont au moins la décence de ne pas exiger qu'il s'y connaisse en saucisse.
Ben oui mais, on pourrait demander sans forfanterie aucune, qu'un président de droite soit au moins énarque...
RépondreSupprimerRegardez Georges. Il n'est pas charcutier, et pourtant, il s'y connaît, en saucisses ! Il peut certifier par exemple que Dorham est une saucisse pur porc, rien qu'à l'odeur, et que Nicolas est une saucisse d'âne, rien qu'à la forme de ses phrases.
RépondreSupprimerLa saucisse d'âne devrait trouver une place assez confortable dans ton cul, seule partie de toi qui pourrait, à la limite, servir à quelque chose, à part le cerveau qui pourrait faire passer une mauvaise vinaigrette.
RépondreSupprimerGeorges s'y connait en saucisses.
RépondreSupprimer[rien à ajouter, c'est suffisant…]
:-)