Je reconnais que, lorsqu'on a passé son après-midi à Illiers-Combray, à s'occuper de Proust, la photo du Château d'If semble bizarre. Seulement, voyez-vous, il me faut noter les quelques sujets de
conversation entre Catherine et moi, durant l'apéritif qui a conclu ce
petit périple, ou plus exactement les idées de billets qui en sont
sorties. Ou qui, peut-être, en sortiront.
– Monte-Cristo : roman du mal ; Dantès n'est intéressant que lorsqu'il détruit.
– Dumas écrivain en bâtiment : ses personnages les plus intéressants (toujours dans Monte-Cristo) n'atteignent jamais à Balzac, et même en sont loin. Pourquoi ?
–
Les plus intéressants sont les possédés : Mortcerf par l'amour de
Mercedes et sa rivalité “girardienne” avec Dantès ; Mme de Villefort,
que son amour maternel monstrueux rapproche du Père Goriot.
– Le côté “bâtiment” de Dumas : Danglars ne tient pas la route face aux “possédés” par l'argent de Balzac. Pourquoi ? Creuser.
–
Le mal du roman du XIXe siècle (peut-être issu de Rousseau : creuser) :
les héroïnes “pures”, pré-TF1. Insupportables chez Dumas (voir chez
Barbey) : Valentine de Villefort, Haydée, Louise de La Vallière (Bragelonne), à peine moins caricaturales chez Balzac (Morsauf ----> Morcerf)
– Homme pas mieux lotis : Maximilien Morel (Dumas responsable de l'invention de Morel ?), Raoul de Bragelonne.
–
La Varende : bel écrivain, piètre romancier : insupportables héroïnes
“pures”, chiantes, envie de troussées à la hussarde chez le lecteur –
les faire couiner comme de vraies femelles. (Retrouver le nom de la pétasse de Nez de cuir.)
À la lecture, irrésistible pente qui ramène, par réaction purement
épidermique, à ce faux écrivain de Frédéric Dard, ce flamboyant bâtimenteur, qui a mieux que quiconque défini, et définitivement, les héroïnes dont je parle, celles qui disent : « Ta bite a un goût. »
On sent bien que, pour cette pauvre Valentine de Villefort, toute bite
aura toujours un goût – et l'on plaint ce pauvre Maximilien.
–
Pourquoi La Varende traîne-t-il après lui cette malédiction, cette
guimauve du XIXe ? Est-ce que ça le condamne (comme écrivain ? Comme
romancier ?) ?
– Parallèle esquissé entre Jean de La Varende et Renaud Camus, au sommet d'eux-mêmes
lorsqu'ils n'essaient pas d'être romanciers. – Écrivains de
vagabondage, moralistes de traverse, promeneurs essentiels (esquisser un
parallèle, par exemple, entre les Belles Esclaves de l'un et les Départements de l'autre.)
– Revenons à Dumas et à Monte Cristo
: pourquoi le comte redevient-il cette espèce de bisounours qu'est
Dantès dès qu'il s'essaie à faire le bien ? Plus bizarre : pourquoi
reste-t-il aussi sadique dès qu'il s'avise de le faire, ce bien ?
Qu'est-ce qui justifie de pousser le père Morel jusqu'au bord du suicide
avant de le sauver ?
– Question annexe mais sans
doute importante : devenu Monte-Cristo, Edmond Dantès éprouve-t-il le
moindre plaisir à faire le bien ? En a-t-il encore quoi que ce soit à
foutre des Morel ?
– Question fondamentale, dérivant
de la question annexe précédente : le comte de Monte-Cristo a-t-il quoi
que ce soit en commun avec Edmond Dantès ? Ce roman ne serait-il pas
celui de la lutte entre l'imbécile niais que vous fûtes et l'espèce de
surpuissance que les circonstances ont fait de vous ?
–
Question annexe à la question fondamentale dérivant de la question
annexe qui l'avait précédée : quel rôle joue là-dedans l'abbé Faria ?
Qui est-il ? Pourrait-il être une prolongation de l'esprit de Dantès, en
pleine transformation, c'est-à-dire un être n'ayant jamais réellement
existé ?
– Pour finir : Le comte de Monte Cristo
serait-il autre chose qu'un vampire ? Qui plus est, refusant, en tant
que Français de France, de conduire une Mercedes ?
C'est bien : j'ai des sujets de billets pour un an, au moins.
Arrêtez de réfléchir pendant l'apéro, malheureux ! Vous allez oublier de boire.
RépondreSupprimerEspèce d'andouille, j'ai dix ans de plus que vous, donc cessez de me donner des leçons !
SupprimerJ'ai écrit ce pseudo-billet avec un verre à main droite (presque fini, d'ailleurs), et il n'est pas impossible que j'aille m'en resservir un avant de venir troller sur vos blogs de merde !
(Je suis bon, là ?)
Non. Vous avez une virgule mal branlée après une parenthèse.
SupprimerEt "abruti" serait mieux allé que "espèce d'andouille". Un "connard" néanmoins aurait été trop affectif.
Et donc, ça vous a plu, Illiers-Combray ?
RépondreSupprimerOui ! J'y suis allé il y a 32 ou 33 ans, et j'envisage le raconter bientôt…
SupprimerDonc les bribes de discussion que vous rapportez datent aussi de cette époque ?
SupprimerCe n'est pas très déontologique de servir des billets décongelés à ses lecteurs...
Tss ! la conversation date d'hier soir : on ne peut pas faire plus frais !
SupprimerFaire tourner ses lecteurs en bourrique en jouant sur les mots n'est guère plus recommandable.
SupprimerDe La Varende, il faut lire "Man' d'Arc". C'est un autre genre d'héroïne. D'ailleurs, en vous lisant, je me rends compte que j'aurais dû vous l'amener, plutôt que "Monsieur de Bonneville". ça devrait vous plaire davantage. Je vous l'apporte à la prochaine beuverie.
RépondreSupprimerEn dehors de "Man d'Arc" et de la trilogie des La Barre, je préfère souvent les nouvelles de La Varende à ses romans. C'est dans "Les Manants du Roi", "Pays d'Ouche" ou "Heureux les humbles" que je le trouve au sommet de son art.
Ne l'apportez pas : je l'ai lu.
SupprimerJ'ai connu Illiers avant qu'elle ne devienne Combray. J'y ai connu une bien jolie coiffeuse à un bal,il y a plus de 40 ans de cela... Elle doit être bien vieille et moins jolie aujourd'hui.
RépondreSupprimerSinon, plus laid qu'Illiers, c'est difficile à trouver.
Je vous trouve plus laid qu'Illiers quand vous voulez !
SupprimerJe crois qu'il faut pardonner à Didier : comme disait Françoise, qui du cul d'un chien s'amourose, il paraît une rose...
Supprimer"...il LUI paraît une rose", pardon.
SupprimerMerci de le confirmer mais j'ai effectivement toujours vu en Edmond Dantès une victime qui s'était transformé en bourreau, bourreau sadique en plus, et vous aurez noter comme moi que son arme principale était d'arroser tout le monde d'argent… Un social démocrate quoi !
RépondreSupprimerIl est à la fois le bien et le mal… (c'est beau et profond ce que je viens de d'écrire…)
C'est très beau : je songe à l'encadrer.
SupprimerPourquoi ? Creuser.
RépondreSupprimerRésumé.
Voilà.
SupprimerJudith de Rieusses, la "pétasse" dans Nez de Cuir.
RépondreSupprimerAh oui, c'est ça ! Merci de rapiécer ma vieille mémoire pleine de trous…
SupprimerJe pense qu’il n’y a que vous que ça peut intéresser. J’ai fait une petite découverte littéraire dans Le Comte de Monte-Cristo dont je ne suis pas peu fier (jusqu’au moment où on me dira que je ne suis pas le premier à l’avoir signalée). Noirtier se présente au début du roman comme un ancien girondin, proscrit par Robespierre. Et vers la fin du roman, son fils prétend qu’il a été jacobin ! : Poche Gallimard : T.1, page 250 – T.4, page 13. Donc, soit Dumas ne s’est pas relu, soit il a pensé que ce n’était pas grave parce que personne ne le remarquerait (en quoi il avait raison) soit le fils de Noirtier ment ou raconte n’importe quoi. Et de toute façon, on s’en moque parce que ce roman est génial. Bonne année M. Goux. A quand votre prochain roman ?
RépondreSupprimerMais qu'est-ce qui vous prend, de venir errer dans ces catacombes ?!
SupprimerCela dit, vous commettez, je crois bien, une erreur : les Girondins ne s'opposaient pas aux Jacobins (puisqu'ils en faisaient partie, au moins à l'origine) mais aux Montagnards.
Et tous les vœux à vous aussi !
Supprimer(Pour le prochain roman, ce sera quand le dernier cas de démence covidoïdale aura disparu : autant dire que je ne suis pas près de me remettre au turbin…)