Cela se produit le soir, à peine avalée la dernière bouchée du dîner (que nous prenons tôt, par une habitude familiale qui vient de moi). Je quitte la maison pour rejoindre la Case, où se trouve mon bureau, mon ordinateur et l'un de mes deux appareils à musique. L'un des signes, l'un des "capteurs" de ce que va être la soirée - ce qu'il en reste - est précisément ce que je choisis d'écouter. Ce soir, ce sont les pièces de Rameau jouées par Tharaud, que j'écoute beaucoup en ce moment : n'y cherchez aucune signification précise, en tout cas pas trop vite.
Ensuite, comme chacun de vous, je m'installe à ce clavier. Mais, avant cela, j'ai donc parcouru le court espace qui sépare les deux habitations - et qui sont en train de devenir pleinement deux habitations, en effet...
Il y a plusieurs fenêtres éclairées, devant et derrière. Devant, toutes proches ; derrière plus lointaines : le champ, à chevaux ou à vaches, c'est selon, entre nous. Les voisins de devant, on peut raisonnablement prétendre les connaître. Ils sont gentils, peu bruyants finalement, et d'une irrémédiable stupidité.
Ceux de derrière nous sont inconnus, mais les échos qui nous en reviennent font d'eux des paysans (des vrais : avec des champs, des bêtes et des fromages de chèvre) cupides, bornés et agressifs (si besoin est : on le suppose, on n'en sait rien...), comme il y en a dans les histoires de gens qui n'aiment pas les paysans.
Je sais que je n'échangerai jamais un vrai mot avec eux, ceux de devant ni de derrière. Par désintérêt, lassitude, vague angoisse, souci de solitude, je ne sais trop. Mais, certains soirs, assez souvent, parcourant ce court espace, contemplant ces rectangles de lumière devant tout au néon, je me dis que, nous voyant transportés dans un quelconque camp de concentration, je serais, de nous tous, le premier à succomber à la violence qui nous serait faite.
Ils sont, d'une certaine manière, armés - et moi pas.
Ensuite, comme chacun de vous, je m'installe à ce clavier. Mais, avant cela, j'ai donc parcouru le court espace qui sépare les deux habitations - et qui sont en train de devenir pleinement deux habitations, en effet...
Il y a plusieurs fenêtres éclairées, devant et derrière. Devant, toutes proches ; derrière plus lointaines : le champ, à chevaux ou à vaches, c'est selon, entre nous. Les voisins de devant, on peut raisonnablement prétendre les connaître. Ils sont gentils, peu bruyants finalement, et d'une irrémédiable stupidité.
Ceux de derrière nous sont inconnus, mais les échos qui nous en reviennent font d'eux des paysans (des vrais : avec des champs, des bêtes et des fromages de chèvre) cupides, bornés et agressifs (si besoin est : on le suppose, on n'en sait rien...), comme il y en a dans les histoires de gens qui n'aiment pas les paysans.
Je sais que je n'échangerai jamais un vrai mot avec eux, ceux de devant ni de derrière. Par désintérêt, lassitude, vague angoisse, souci de solitude, je ne sais trop. Mais, certains soirs, assez souvent, parcourant ce court espace, contemplant ces rectangles de lumière devant tout au néon, je me dis que, nous voyant transportés dans un quelconque camp de concentration, je serais, de nous tous, le premier à succomber à la violence qui nous serait faite.
Ils sont, d'une certaine manière, armés - et moi pas.
En tout cas faudra sérieusement songer à maigrir dans un camp de concentration - que dis-je de redressement diététique !
RépondreSupprimeriPidiblue au bon beurre
Même pas une petite querelle de voisinnage bien de chez nous?
RépondreSupprimerUn droit de passage, un parpaing de traviole, un coq, un chien qui aboient?
...
Que c'est triste.
Des bizettes
Ah ! Rameau par Alexandre Tharaud ! Les Nouvelles suites me furent offertes par une demoiselle qui ne vous est pas inconnue. C'est un disque magnifique. Et vous avez la chance d'écouter de telles œuvres dans une habitation dédiée. Malgré vos voisins stupides et bornés, et vos transports dans des camps peu enviables, je dois avouer qu'une telle demeure a de quoi séduire.
RépondreSupprimer"Ils sont, d'une certaine manière, armés - et moi pas."
RépondreSupprimerPeut-être pas en ce moment...
Ce que je préfère chez Rameau, c'est son neveu.
RépondreSupprimer(que nous prenons tôt, par une habitude familiale qui vient de moi).
RépondreSupprimerQue nous prenons tard parce que moi j'avais l'habitude de manger entre 5 et 6 heures au Danemark et au Québec !
Tant de mépris obstiné, j'ai du mal à comprendre. Bien sûr que ni Rameau ni Bach ne suffiront, en fin de compte. Mais je mets les pieds dans un plat qui n'est le mien, excuses ...
RépondreSupprimern'est pas le mien
RépondreSupprimerMifa, vous vous trompez, il ne s'agit nullement de mépris, mais de simples constatations que n'importe qui d'autre que moi pourrait tout aussi bien faire.
RépondreSupprimerSi je rencontre une personne intelligente, je dirai qu'elle est intelligente. Si je fais la connaissance d'un abruti (qui peut par ailleurs avoir beaucoup de qualités annexes), je dirai que c'est un abruti.
Pas plus compliqué que cela...
Anange, je parlais d'être armé pour la survie en milieu hostile. Mon voisin d'en face, par exemple, est mécanicien auto. Eh bien, il est certain que, dans des conditions de détention extrême, il serait plus utile de le conserver en vie, lui, plutôt qu'un quelconque écrivain en bâtiment.
RépondreSupprimerMême chose pour le cultivateur de derrière, du reste.
Didier, je vous proposerais bien de mettre vos talents au service de la propagande, mais finalement non...
RépondreSupprimerSensationnel!
RépondreSupprimerMais c'est justement ça, le mépris.
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