Lisant, depuis deux jours, le Vous avez dit métèque ? de Gabriel Matzneff (recueil de chroniques allant de 1958 à 2007, offert par Juan Asensio juste avant que je m'explose le genou...), j'y trouve tout à l'heure ceci, en date du 29 mars 1973 :
« Les gens qui prêtent un livre ou un journal sont des monstres. Les amis qui prêtent mes livres sont des monstres. (...) Des monstres dont les intentions sont bonnes, certes, mais des monstres quand même, et qui iront en enfer, comme les pavés du proverbe. On ne prête pas les livres d'un auteur à qui l'on veut du bien, on ne prête pas un journal qu'on affectionne, on les fait acheter. »
Me voilà donc un monstre, selon les critères matznéviens. Car je fais cela. Depuis longtemps, mais notamment depuis 2006, année où j'ai découvert les livres de Renaud Camus et m'en suis institué le prosélyte, souvent maladroit sans doute, mais acharné. J'ai prêté à tout va. J'ai fourré maint volume entre les mains de gens qui ne me demandaient rien, considérant que la pêche aux lecteurs ressemble à celle aux poissons : si l'on appâte un peu la veille, la bourriche se remplira mieux.
Il est bien gentil, Gabriel, mais quel est l'intérêt de dire à un ami, une relation de travail, un membre de sa famille, à qui vous voulez : « Tiens, tu devrais bien acheter et lire ce livre ! », si l'on sait bien qu'il en aura oublié jusqu'au titre dès que vous aurez tourné le dos ? Alors qu'en appâtant, comme je disais, en lui confiant tel ou tel ouvrage, on se dit qu'il va peut-être mordre à cet hameçon qu'on lui tend ; et que, en découvrant d'autres, ensuite, ayant le même parfum, le même attrait, la même secrète ressemblance, il les engloutira alors de lui-même – et il sera pris.
J'ai donc prêté, depuis trois ans, beaucoup de livres de Renaud Camus ; on m'en a rendu également beaucoup – moins toutefois que je n'en ai prêté, comme il est de règle. Si bien que la théorie de Matzneff se trouve une seconde fois battue en brèche, me semble-t-il. Car, ces livres non revenus, il va de soi que, demain ou à la Trinité, je les rachèterai.
Donc, l'auteur n'y aura, financièrement, rien perdu.
« Les gens qui prêtent un livre ou un journal sont des monstres. Les amis qui prêtent mes livres sont des monstres. (...) Des monstres dont les intentions sont bonnes, certes, mais des monstres quand même, et qui iront en enfer, comme les pavés du proverbe. On ne prête pas les livres d'un auteur à qui l'on veut du bien, on ne prête pas un journal qu'on affectionne, on les fait acheter. »
Me voilà donc un monstre, selon les critères matznéviens. Car je fais cela. Depuis longtemps, mais notamment depuis 2006, année où j'ai découvert les livres de Renaud Camus et m'en suis institué le prosélyte, souvent maladroit sans doute, mais acharné. J'ai prêté à tout va. J'ai fourré maint volume entre les mains de gens qui ne me demandaient rien, considérant que la pêche aux lecteurs ressemble à celle aux poissons : si l'on appâte un peu la veille, la bourriche se remplira mieux.
Il est bien gentil, Gabriel, mais quel est l'intérêt de dire à un ami, une relation de travail, un membre de sa famille, à qui vous voulez : « Tiens, tu devrais bien acheter et lire ce livre ! », si l'on sait bien qu'il en aura oublié jusqu'au titre dès que vous aurez tourné le dos ? Alors qu'en appâtant, comme je disais, en lui confiant tel ou tel ouvrage, on se dit qu'il va peut-être mordre à cet hameçon qu'on lui tend ; et que, en découvrant d'autres, ensuite, ayant le même parfum, le même attrait, la même secrète ressemblance, il les engloutira alors de lui-même – et il sera pris.
J'ai donc prêté, depuis trois ans, beaucoup de livres de Renaud Camus ; on m'en a rendu également beaucoup – moins toutefois que je n'en ai prêté, comme il est de règle. Si bien que la théorie de Matzneff se trouve une seconde fois battue en brèche, me semble-t-il. Car, ces livres non revenus, il va de soi que, demain ou à la Trinité, je les rachèterai.
Donc, l'auteur n'y aura, financièrement, rien perdu.
Oui mais en même temps tous ces arbres coupés, j’veux dire, c'est hyper grave irresponsable pour la planète!
RépondreSupprimerVous avez doublement raison.
RépondreSupprimerJe suis un peu comme vous. Quand j'ai aimé un livre, j'ai envie de le faire goûter à quelqu'un d'autre, de partager le plaisir. Je ne regrette pas les livres qui ne reviennent pas, je les rachète.
RépondreSupprimerJe n'ai jamais prêté, par contre, mes journaux d'écrivain. La première fois que j'ai entendu parler de R.Camus, c'était lors de l'"affaire", et j'ai acheté chez un bouquiniste un tome de son journal, et ensuite celui de l'année. J'engage ceux qui ne le connaissent pas à se promener sur
Vaisseaux brûlés, le meilleur hypertexte que je connaisse.
Bien vu!
RépondreSupprimerJe fais pareil, je rachète quand on ne me rend pas.
Et je ne râle pas parce que je me dis que mon prêt a été pris pour un cadeau et c'est bien (sauf que quand même, en cas de cadeau, le paquet cadeau compte^^)
Le raisonnement devrait être le même a propos du téléchargement de musique et de films: quand on a aimé, on achète d'autres parties de l'oeuvre, ou même le titre ou le film en question. Donc personne n'y perd.
Y'a pas à dire, vous aimez cette pièce du château! Moi aussi, tous ces livres...ça fait rêver!
RépondreSupprimerOrage
On me prête rarement des livres.
RépondreSupprimerJe les rends encore plus rarement.
La deuxième phrase explique peut-être la première, les gens sont si radins.
Moi, je n'offre (je suis donc un sacré salopard) que les livres qui ne m'intéressent pas ou alors ceux qui m'ont incroyablement marqué.
RépondreSupprimerVous aurez compris dans quelle catégorie je range le bouquin de Matzneff (qui en plus m'a été envoyé en SP !, je cumule donc les monstruosités).
Au fait, vous savez que j'ai des problèmes avec Fayard, qui ne m'a JAMAIS envoyé un seul exemplaire des livres du maaaaaaaaîîîîîître Camus (et de n'importe quel autre auteur qu'il publie) alors si vous pouviez faire quelque chose, hein, au nez et surtout à la barbe de Valérie Scigala, pour que Fayard alimente en beaux livres le très fin exégète que je suis (y compris des livres camusiens), vous gagneriez ma reconnaissance éternelle !
Suzanne et Marine : je fais pareil que vous, bien sûr. Ainsi, pour rester avec Camus, le Répertoire des délicatesses du français contemporain ou encore l'Éloge du paraître sont des livres que j'ai déjà dû racheter bien trois fois en trois ans. L'irritant de l'affaire, c'est que, le jour où vous avez besoin (ou simplement envie) de vous y référer, il n'est JAMAIS dans votre bibliothèque !
RépondreSupprimerJuan : vous me prêtez, auprès de Fayard, une influence que je n'ai pas ! Et je suis fort mal placé en ce domaine, moi qui n'ai jamais demandé (sauf pour motifs strictement professionnels) un livre en service de presse.
RépondreSupprimer@Didier Goux:
RépondreSupprimeroui, c'est à vous que je parlais en disant je fais pareil. Ne me répondez pas "je fais la même chose" :)
Ah, je pensais que vous répondiez à Suzanne ! c'est le serpent qui se mord la queue ! (En quoi je ne tiens nullement à l'imiter.)
RépondreSupprimerIl va bien ce Matzneff: est-ce qu'on me rend jamais les bouteilles de vin que je prête?
RépondreSupprimerLe prêt d'un livre qu'on a aimé, qui nous a intéressé ça s'apparente pour moi en quelque sorte à un don, ne serait-ce que par la pensée vis à vis de l'auteur, et plus concret envers celui ou celle à qui on prête.
RépondreSupprimerC'est probablement obscur ce que je dis, mais ça va à l'encontre complète du geste monstrueux envers l'auteur. :))
Le souhait de faire connaître l'auteur justement ne peut guère s'apparenter à une monstruosité. Et puis comme les autres je rachète si on ne me rend pas.
Henri : mais si, voyons ! si vous me prêtez une bouteille, je vous la rendrai. Plus légère, certes...
RépondreSupprimerFlèche : il reste que les mots ont (ou devraient conserver) un sens. si je dis à quelqu'un : "je te le prête", j'entends qu'il comprenne qu'il ne s'agit pas d'un don et agisse en conséquence.
@Didier : vous dîtes : "si je dis à quelqu'un : "je te le prête", j'entends qu'il comprenne qu'il ne s'agit pas d'un don et agisse en conséquence"
RépondreSupprimerBien sûr, mais on ne pourra jamais faire en sorte que les personnes n'entendent pas toujours ce qu'on leur dit ou ne veulent pas entendre, de même qu'il n'est pas possible d'empêcher les gens de parler à tort et à travers.
Je peux vous assurer que parfois j'aimerais bien !
C'est une belle démarche que la votre Didier. Je pratique aussi pour quelques romans que je rachètent sans cesse afin de les prêter de nouveaux à d'autres !
RépondreSupprimer:-))