vendredi 17 janvier 2014

Le charme discret des conventions obsèques


Ce fut notre occupation de la matinée. Probablement victime de la mauvaise influence de mon père, Catherine avait décidé que nous devions nous soucier dès maintenant de nos morts respectives, sans embarrasser quiconque, le moment venu, de nos deux passages de vie à trépas. 

Le jeune homme de l'agence ante mortem était charmant et compétent, et non dénué d'humour, ce qui l'a probablement un peu aidé dans son contact avec nous. (La postière venant remettre le courrier a eu l'air un peu surpris, pénétrant dans l'échoppe, de nous trouver tous les trois en plein esclaffement…) Après avoir pris les divers renseignements dont il avait besoin pour que la fête fût conforme à nos souhaits, il s'est mis à nous détailler la chance que nous avions de souscrire à un si mirifique contrat et les avantages que nous ne tarderions pas à en retirer, pour peu que le hasard s'en mêlât. Le moindre n'était pas le fait que, si nous options pour le paiement étalé sur vingt ans, l'assurance comprise dans le forfait se chargeait de régler les mensualités restantes en cas de calanchage prématuré. « Notre intérêt bien compris serait donc de mourir le plus rapidement possible après signature ? », me suis-je enquis, craignant d'avoir mal compris. Il n'a fait aucune difficulté pour l'admettre. De même m'a-t-il confirmé – je me posais la question depuis un moment – qu'il était tout à fait possible d'être inhumé dans un simple linceul, façon médiévale, et non ridiculement costardé et cravaté comme c'est désormais l'usage. Nous avons également appris que, contrairement à ce que nous pensions, il était toujours permis de disperser les cendres du défunt dans une forêt, la mer, etc., mais qu'il était en revanche interdit de partager ces mêmes cendres entre plusieurs personnes : démence légère du législateur.

Tout cela a été promptement réglé, à la complète satisfaction des deux parties, et nous sommes, les deux futurs morts prélogés, ressortis de ce bar à bières sans comptoir de fort bonne inhumeur.

36 commentaires:

  1. Cela me fait froid dans le dos à la simple idée de savoir qu'un boutiquier me regarde d'un regard concupiscent lorsque je passerais devant chez lui.comme Louis de Funes dans le " Mouton à cinq pattes"

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    1. Ou avec un centimètre de couturière, comme le croque-mort de Lucky Luke.

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    2. Mais dans ce cas-là, l'intérêt de l'assureur est que son client vive le plus longtemps possible ; il va donc plutôt se réjouir de sa bonne forme et l'engager à l'entretenir le plus longtemps possible (et au moins pour la durée du contrat) : c'est tout de même moins déprimant...

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    3. Regardez donc le mouton à cinq pattes et nous verrons, quant au centimètre du croque mort de Lucky Luke, je l avais oublié celui là.

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  2. De ce charme discret des conventions obsèques, absolument modernes, « la mort n'en saura rien ».
    Vers emprunté au « Guetteur mélancolique » d'Apollinaire.

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  3. votre billet est tellement amusant que je me suis dit qu'il fallait absolument rendre vos écrit "viraux" sur facebook.
    Je suis donc allé voir et...il y a beaucoup de Didiers Goux... désolé, mais il y en a un notamment qu'est comment dirais-je pas piqué des hannetons ! En marcel devant une limousine américaine de 10 m, c'est tordant.

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  4. Partager les cendres ? Vous pensez à la cérémonie. Pensez à amener vos Tupperware pour rentrer avec votre part des cendres de mémé.

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  5. Attention quand même au piège classique: en général, vous souscrivez pour des obsèques à un certain tarif; mais si vous mourez dans 20 ans et que le tarif a doublé entretemps, vos héritiers y seront de leur poche pour la différence.
    Effectivement, mieux vaut ne pas trop attendre.

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    1. Pas du tout ! Il nous a bien été spécifié que les obsèques auront lieu au tarif prévu dans le contrat.

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    2. Et si ce n'est pas le cas vous porterez plainte ?

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    3. Sauf en cas d'accident de la route doublement et simultanément mortel, le survivant portera plainte, et comment !

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  6. je savais bien qu'on pouvait me disperser à la baille. c'est pas une bonne nouvelle pour les poissons, neptune et ceux qui boivent la tasse au large d'hoedic, mais l'idée me plait.
    je vais de ce pas mettre cela noir sur blanc pour le cas ou je finisse légume, après un coup de batte de certains modernistes , de façon qu'on m'estourbisse sans ménagement , puis hop vogue dans la boite Nesquik

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  7. On parie que le type a prévu de déposer son bilan dans 10 ans ?
    (Et de s'enfuir à Tel-Aviv, clin d'oeil aux copains).

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  8. Les commentateurs sont des escrocs ici. Tout le monde donne son avis mais personne n'est mort.

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    1. Mais si, on est mort, la preuve, on est tous moisis !
      Bec

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    2. Je suis mort mais je ne suis pas moisi, j'ai eu la décence de me faire momifier...

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  9. Ayant du mal à décider si je désire une tombe ou me faire incinérer, je ne saurais rien souscrire. N'importe comment ça ne me tente pas. C'est aux vivants d'enterrer les morts...

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  10. Hé ho ho! faites pas l'andouille… je vais lire quoi moi? il n'y aura plus que des bloggeurs de gauche! L'horreur!

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  11. Si j'avais su en me rendant sur votre blog que les nouvelles seraient si bonnes, je serais venu plus tôt !

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  12. Robert Marchenoir17 janvier 2014 à 19:08

    Je n'ai jamais rien compris à ces histoires d'obsèques organisées à l'avance, et je soupçonne fort qu'il s'agisse d'une grosse arnaque.

    Pour moi, le seul intérêt, c'est de se mettre d'accord à l'avance sur les modalités et le prix de l'opération, et que l'organisateur de pompes funèbres s'engage. Cela suppose donc que l'intéressé paye intégralement ses obsèques à prix fixe.

    En contrepartie d'une avance de trésorerie, le prestataire a) fait son affaire de toute augmentation de prix susceptible d'intervenir d'ici au décès, b) renonce à exercer le chantage sentimental auprès des proches qui fait tout le sel de son métier, et lui permet de facturer à un prix ahurissant des prestations tout à fait banales (menuiserie standard, manutention).

    Penses-tu ! Encore une belle enculade à la française : ces gens-là exigent des paiements périodiques jusqu'à votre mort ? C'est bien ça ? J'ai bien compris ? Si c'est le cas, ça n'a aucun intérêt, sauf pour des gens à l'article de la mort et pris à la gorge financièrement.

    Autant se renseigner auprès d'un organisateur de pompes funèbres, choisir les prestations souhaitées sur catalogue, mettre de côté la somme nécessaire avec une provision pour l'inflation, et rédiger un petit mémo à l'intention de ses héritiers en indiquant où acheter, quoi acheter et à quel prix.

    Trop simple apparemment pour le marché franchouillard, où c'est toujours : pile je gagne et face tu perds.

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    1. Non, vous avez mal compris (ce qui est normal puisque je n'ai rien expliqué…). En fait, c'est comme quand on achète une bagnole. Votre enterrement, par contrat, vous est facturé X euros si vous le payez comptant, ce qui est tout à fait possible et prévu. si vous choisissez de payer sur 10 ou 20 ans, vous paierez plus cher, puisque vous aurez en plus le coût de votre crédit. Mais vous paierez vint ou trente euros par mois, si bien que vous ne sentirez rien. Et si vous clabotez avant terme, l'assurance comprise dans le tarif pour lequel vous avez signé contrat se charge des mensualités restant dues.

      De plus, ce contrat a valeur testamentaire, c'est-à-dire que ni les pompes funèbres ni les héritiers ne peuvent revenir dessus.

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    2. Robert Marchenoir17 janvier 2014 à 19:46

      Mouais. Et quelle est la réduction sur le prix catalogue ? Parce que ce n'est pas du tout comme quand on achète une bagnole... c'est même exactement le contraire !

      Quand on achète un bagnole à crédit, on prend livraison de la bagnole tout de suite, et on la paye ensuite, petit à petit ! Quand on achète des obsèques à crédit, on donne d'abord l'argent... très longtemps... et ensuite on meurt.

      D'autre part, si je vais voir un croque-mort aujourd'hui et que je lui signe un contrat, il est sûr que c'est lui qui aura le pognon. Si j'attends de mourir, le croque-mort n'est pas du tout sûr que c'est lui que mes héritiers iront voir. Ca vaut de l'argent, ça...

      Je suis persuadé que tout ça est un énorme rideau de fumée derrière lequel les prestataires s'engraissent prodigieusement.

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    3. En fait, Bob milite pour un service public des obsèques. C'est bien lui...

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  13. La mise en bière c'est un sujet qui devrait intéresser Nicolas

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  14. Vous pouvez aussi programmer la publication d'articles de blogs post-mortem pour continuer à vous foutre de la gueule des modernoeux tout en suçant les pissenlits par la racine.

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    1. J'y ai déjà songé ! Mais, pour mener à bien ce petit projet, mieux vaut claquer d'un cancer un peu longuet que d'une crise cardiaque massive…

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  15. Robert Marchenoir17 janvier 2014 à 19:33

    J'ajoute que si l'on veut simplifier encore plus la chose pour l'entourage éploré, il suffit d'ouvrir un livret bancaire réservé à cet effet, et d'y verser son épargne-obsèques. Les intérêts versés viendront compenser l'augmentation des prix. En cas de décès, la banque, à ma connaissance, doit libérer une somme correspondant aux frais d'obsèques avant le règlement de la succession par le notaire.

    Pourquoi confier à autrui ce qu'il est si simple de faire soi-même ? Pourquoi donner de l'argent à un assureur pour qu'il le place, alors qu'on peut aussi bien le placer soi-même ? L'intermédiaire sollicité (pompes funèbres, assureur) va forcément se servir au passage -- et probablement pas qu'un peu.

    La loi de l'assurance, c'est qu'il ne faut s'assurer que pour les événements très incertains, ou ceux qui sont probables et coûteux mais qu'on n'est pas sûr de pouvoir financer.

    C'est ainsi qu'il ne faut PAS s'assurer contre le vol, SAUF si on a absolument besoin des objets suceptibles d'être volés et qu'on n'est pas du tout sûr d'avoir assez d'argent pour les remplacer. En effet, le vol est très probable, la valeur des objets volés en général faible -- et je ne parle pas des limitations et exclusions de remboursement qui sont innombrables.

    Typiquement, la grosse enculade c'est l'assurance contre le vol du portable (fort risque de survenance, faible valeur), ou la "prolongation de garantie" d'appareil électro-ménager (fort risque de panne, faible coût de la réparation ou même du remplacement, comparé à la prime d'assurance).

    Si vous placez vous-même sur les méchants marché financiers ultra-libéraux mondialisés anglo-saxons et juifs le montant de votre "prolongation de garantie" ou de votre "prime d'assurance contre le vol du portable", vous allez pouvoir remplacer assez rapidement votre frigo ou votre portable, même si le premier ne tombe pas en panne et qu'on ne vous vole pas le second.

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    1. Mais c'est exactement la même chose ! L'argent que je vais verser tous les mois sera géré par un organisme financier qui s'est engagé, avec les intérêts que va générer mon argent, à payer mon enterrement au pris qu'il coûtera à l'époque, dans 5, 10 ou 20 ans. De son côté, l'intérêt de l'entreprise de pompes funèbres est évidemment de s'assurer dès maintenant ma pratique, de se fabriquer une "clientèle captive".

      J'ajoute que l'aspect financier n'est pas à prendre seul en compte. Nous avons également indiqué précisément ce que nous souhaitions et ne souhaitions pas. C'est-à-dire que si, au moment de ma mort ou de celle de Catherine, la mode est d'exposer le corps pendant trois jours avec une plume fluo dans le cul, ce ne sera pas possible avec nous. De même – pardon d'entrer dans les détails… – que nos corps ne seront pas "exposés" pour la famille, les amis, etc. Simplement parce que nous avons précisé que nous ne le voulions pas. De même la sempiternelle question : « messe ou pas messe ? » est-elle d'ores et déjà réglée – et réglée dans les deux sens du terme. Etc.

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    2. Robert Marchenoir17 janvier 2014 à 19:57

      C'est la même chose, sauf que... ça dépend du prix auquel on vous vend le binz. Et il y a toutes les chances pour que ce ne soit pas seulement 10 ou 15 % de plus, mais 50 ou 100 %.

      Evidemment que l'intérêt est aussi de figer la prestation, mais en quoi est-ce que cela justifierait une marge de 50 % pour le croque-mort ? Ca ne lui coûte rien du tout, à lui, de figer à l'avance le type du cercueil.

      Quant aux dernières volontés, elles peuvent parfaitement être transmises par testament.

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    3. OK; OK,; j'annule tout, j'efface ma signature (que je n'ai d'ailleurs pas encore donnée) ! Je vais aller me jeter du haut du pont de Tancarville ou de celui de Brotonne, avec un parpaing en guise de collier : comme ça, l'affaire sera réglée.

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    4. Allez, allez, pour détendre l'atmosphère un petit lien vers ce sketch dont toute la fin relate l'achat du cercueil pour le défunt : Le Cancer

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    5. Didier, vous pourriez avoir un peu de panache tout de même, faites vous exploser dans un endroit utile (Assemblée Nationale, Sénat, siège de FO ou de la CGT) pour que votre mort soit utile.

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  16. Ce qu'il faudrait, c'est pouvoir tester avant les différentes formules (enterrement 1 ère ou 2 ème classe, incinération avec ou sans dispersion des cendres, etc.) pour décider laquelle on préfère, mais aucune agence de pompes funèbres ne le propose.

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  17. C'est la mort à crédit, en somme... (La mort à crédit est le titre d'un truc de Céline, Dion ?)

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  18. Tout de même Didier, si vous pouviez retarder votre dernière heure le plus possible, cela nous arrangerait.

    Essayez de partir après Jegoun quand même....

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