On pourrait parfois se demander, nous autres, les membres de plein droit
du réactionnariat international, si, au cœur de notre incessante
déploration du monde tel qu'il s'écroule, de la civilisation comme elle
se désagrège, et ainsi de suite, ne viendrait pas se lover
discrètement, au contraire de la pose que nous prenons, le désir plus ou
moins bien camouflé de voir réellement ce monde s'abîmer en effet,
l'envie pas toujours bien contrôlée que disparaissent pour de bon les
anciens parapets et, ainsi, de contempler avec une certaine satisfaction
nos survivants allant s'écraser au pied des falaises, coupables à nos yeux d'avoir traité nos alarmes par le mépris ou le brocard. En une phrase :
ne feignons-nous pas de nous alarmer d'une chose qu'en réalité nous
appelons de nos vœux ? Ce serait humain, d'ailleurs : quel extrême
vieillard n'accueillerait avec des tressaillements de joie et de
gratitude l'annonce du météore qui s'apprête à pulvériser la Terre,
ou, au moins, à en éradiquer toute vie consciente ? Au moment de lâcher
son dernier râle, la mort des autres, mieux : leur disparition générale,
à la suite de la sienne, serait son dernier rêve vraiment doux.
Ce serait humain et un rêve vraiment très doux de voir tout le monde mourir?
RépondreSupprimerDisons que certains n'ont pas la même conception de la joie de vivre et de la réactionnaire attitude.
Il ne s'agissait pas tant d'une "conception" que d'une interrogation…
SupprimerPetite anthologie de la méchanceté ordinaire...
RépondreSupprimerAnthologie, vraiment ?
Supprimerje crois que le monsieur voulait dire entomologie, c'est comme quand les insectes ils lancent un météore sur la terre et paf.
SupprimerPropos de quelqu'un qui n'a pas d'enfants.
RépondreSupprimerC'est justement parce qu'il y a quelque chose après nous que la volonté de rester fidèle à ce qui nous a précédé a un sens. L'idée de transmission, pour faire simple.
J'avais pensé à cette objection, qui est d'ailleurs la seule recevable, à mon sens. (Non, pas tout à fait la seule, tout de même…)
SupprimerCela dit, dans mon esprit, il s'agit de choses qui ne se passent pas, ou pas souvent, au niveau de la conscience. C'est plus profond, plus bas.
Triste tableau du réactionnaire ! Météore est masculin, non ?
RépondreSupprimerMerde, vous avez raison ! Je cours corriger, ventre à terre et le rouge au front…
SupprimerPlaisir de pouvoir faire inscrire sur sa tombe:" Je vous l'avais bien dit".
RépondreSupprimerC'est un peu ce qui ressort des lignes de Louis-Ferdinand Céline... un ré-actionnariat nihiliste.
RépondreSupprimer"Pour moi, l'avenir ressemble plutôt à la chute de l'empire romain. Ces décadents ont été submergés par les grandes migrations, qui ont engendré les « royaumes romains barbares ». Le latin s'est perdu au profit d'une foule de langues, et l'Europe a plongé dans une perte de mémoire de 1000 ans. "
RépondreSupprimerUmberto Eco
Didier, ce sont des choses que l'on souhaite quand on entre dans la vieillesse et que l'on se détache de tout ce qui, avant nous était désirable... C'est une façon de marcher vers la mort en regrettant de moins le monde et ses tourments, en s'éteignant.
Marco Polo a raison: le pire cauchemar des parents est d'imaginer un lendemain de catastrophe et son enfant de deux ans errant en pleurant dans les décombres en appelant ses parents morts.
À ce propos, je recommande la lecture du premier volet de la nouvelle trilogie de François Taillandier : L'Écriture du monde, dont "l'action" se situe précisément à l'époque dont parle Eco dans l'extrait que vous citez.
SupprimerLe parallèle entre la chute de l'empire romain et ce qu'il se passe en Europe ne me paraît pas dénué de sens. Décadence et corruption sont deux thèmes d'actualité, que la démocratie fait perdurer. Des amis de gauche m'avaient répondu à la question: pourra-t-on un jour chasser du pouvoir les revanchards et corrupteurs de tout poil? Ces amis m'avaient répondu "impossible, car sinon ce serait le fascisme". Cette réponse m'avait Un peu fait froid à la moustache. J'en avais déduit que pour eux, tout allait pour le mieux, et les brebis galleuses n'etaient que des exceptions.
SupprimerLa satisfaction d'avoir (eu) raison justifie-t-elle la fin ?
RépondreSupprimerEntend-on encore la position de l'Église sur la PMA ? Qui s'émeut du sort des bébés congelés -pas ceux qui font la une des faits divers- en attente d'insémination ? (Pardon cher Didier de plomber le billet, mais vous m'avez remué, là).
Mais sait-on jamais si l'on a (eu) raison ?
SupprimerMais si, mais si, certains ont trouvés d'excellentes réponses à ces questions :
Supprimerhttp://tvanouvelles.ca/lcn/infos/lemonde/archives/2014/03/20140324-141715.html
C'est pour cela que l'on peut effectivement, même si l'on a des enfants, rêver fugacement, avec quelque remords, à la fin d'un monde frelaté. C'est un bien vieux rêve que Noé et Loth ont fait bien avant nous...
C. Monge
La seule question qui vaille est de savoir si l'humanité aura le temps, avant l'extinction de toute vie sur terre ( elle a quand même 2 ou 3 milliards d'années devant elle...) de coloniser une exoplanète vivable pour elle et d'y poursuivre son aventure.
RépondreSupprimer( à côté de ça, regretter un monde où le stationnement auto était gratuit et où on pouvait fumer au bistrot me semble un peu moins important...)
Désolé, mais votre histoire d'exoplanète me semble parfaitement dénuée d'intérêt.
SupprimerJe viens de consacrer le dernier billet de mon blog à réponde à votre article (avec lien y renvoyant).
SupprimerCurieux que vous ne voyiez pas le rapport entre ce souhait "consolateur" de la fin de l' humanité coïncidant avec sa propre mort, et la possibilité, pourl'humanité, de continuer son aventure après la disparition de la Terre.
L'histoire d'exoplanète est en effet sans intérêt ici. L'extinction de toute vie sur Terre dans 2 ou 3 milliards d'années... Autant dire jamais... Autant dire que cette planète est éternelle.
SupprimerBah l'univers a aussi une fin, à moins de trouver un exo-univers...
SupprimerSchlouf
Après nous, le déluge !
RépondreSupprimerInondé
Duga
Je citerais simplement ce poète persan de Hodjviri
RépondreSupprimerLa vie est un rêve dont la mort nous réveille.
Il y a donc toujours de l'espoir
Vous tentez là de propager un pessimisme qui convient à la communauté qui veut nous persuader que toute lutte est vaine, et c'est pouquoi vous serez tondu à la libération.
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RépondreSupprimerSuperbe texte ! Et superbement dit.
SupprimerMerci beaucoup.
En effet, joli détournement d'une parole qui fut tout sauf réactionnaire !
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