Le Causeur de ce mois de mai n'est pas excellent seulement parce qu'il signale l'existence de quelques ouvrages littéraires particulièrement remarquables. Il l'est aussi en raison du mini-dossier qu'il consacre à Alain Finkielkraut, à l'occasion de cette élection triomphale dont je ne fus pas le dernier à me doublement réjouir. Il s'ouvre sur un article de Dame Lévy au titre tendrement ironique : Habemus papam ! Si la première partie de mon “doublement” vient du fait que nul, à mon sens, n'était plus digne de l'Académie que ce pontife-là, la seconde est bien exprimée dans le chapeau qui coiffe (c'est dire s'il fait bien son métier de chapeau) cet article :
« Ses ennemis ne le critiquent pas, ils le calomnient. Ils ne réfutent pas sa vision du monde, ils la caricaturent. Ils ne contestent pas ses idées, ils insultent sa personne. Leur défaite a comme un goût de miel. »
C'est exactement cela. Il est peut-être puéril, ce plaisir que nous ressentons à voir s'affaisser les crêtes et pâlir les ergots de la volaille modernœuse, mais il est trop rare pour que l'on se prive de lui. On le prolongera, l'intensifiera, l'approfondira en lisant l'article de Jean Clair (académicien saluant son nouveau confrère) à qui j'ai emprunté son titre pour ce billet. Il y est question d'un instituteur communiste, d'un juif polonais naturalisé, d'un Flamand homosexuel, de Picasso et des foires de Champagne, entre autres choses. On y croisera Pierre Dumayet et Jean Amrouche, mais aussi Manuel Valls, L'Homme qui rit ou le Joker de Batman ; et, bien sûr, Finkielkraut, avec qui, deux pages plus loin, Natacha Polony se reconnaît des liens de filiation ancienne.
Par contraste, lorsqu'on aborde, ensuite, le dossier principal de ce numéro, Les jeunes sont-ils vieux ?, on acquiert cette certitude jubilatoire, que c'est bien un authentique jeune homme qui vient d'être ennobli d'immortalité.
C'est du propre ! À cause de gens comme vous l'Accadémie est envahie par des métèques. Heureusement que les gauchistes vigilent. Du verbe vigiler.
RépondreSupprimerEh ! oh ! je n'y suis pour rien, moi ! Je sais irrésistible ma montée en puissance dans la République des Lettres, mais je n'en suis pas encore à "faire" les académiciens…
Supprimer"c'est bien un authentique jeune homme qui vient d'être ennobli d'immortalité"."M'illumino d'immenso" disait l'autre. On se calme, on se calme ! Le chapeau de Levy est remarquable de justesse. Votre billet aussi.
RépondreSupprimerL'article de Jean Clair est vraiment très bien. Si je peux, dans quelque temps, je tâcherai de le mettre en ligne.
SupprimerPuisque vous parlez de Jean Clair : lisez donc ses “Considérations sur l'état des Beaux Arts”, parues au alentours de 1980, considérations qui lui valurent d'être viré du centre Georges Pompidou pour être mis dans ce placard doré qu'est le Musée Picasso (Picasso ? Mais si : vous savez ce mauvais peintre qui en faisait six par jour… (des croûtes of course))
RépondreSupprimerJe le note. On lira aussi son Journal d'un atrabilaire, qui est très bien.
Supprimer"La journée sera sombre et pluvieuse. Il tombe des cordes. Me voilà ramené à mon enfance, lorsque je me trouvais privé de pouvoir sortir et de rejoindre mes copains, prisonniers dans la chambre. Derrière les vitres, poudrées de petits cristaux de pluie, grandit dans une lumière assombrie mon envie de lire et d'écrire."
SupprimerLes premières lignes de "La langue maternelle" dans "Les derniers jours" de Jean Clair.(Gallimard, 2013) Savoir habiller sa mélancolie d'une élégance rare, on appelle ça le style.
C'est curieux, en commençant de lire la citation, j'ai eu la vague impression que vous me citiez moi…
SupprimerJe devrais peut-être consulter ?
Jean Clair, Alain Finkielkraut et Olivier Bardolle avec son recueil "La vie des hommes" sont des auteurs de chevet contemporains qui (me) donnent encore envie de croire à une indépendance d'esprit dans les lettres françaises. Cette liberté de ton m'incite à ouvrir "En territoire ennemi".
SupprimerBon ouikend
Ah oui, très bien aussi, Bardolle ! Lu il y a quelques mois, en ce qui me concerne… mais que je vais reprendre, tiens !
SupprimerJe profite de votre allégresse légitime pour l'enfler de la mienne ! Ce fut un jour rare, un jour ou l'on apprend une bonne nouvelle aux informations, que le jour ou j'appris que ce cher Finkielkraut était élu... Qu'il est juste qu'après tant de calomnies et de stupidité subies, qu'il recueille enfin l'hommage de ceux dont l'avis compte vraiment. Par contre, je n'ai pas de Jean Clair dans mon dressing... Euh , dans ma bibliothèque; mais ce que vous en dites aiguise ma curiosité... Merci pour vos billets et bravo pour votre succès !
RépondreSupprimerBec
Foncez sur Jean Clair !
SupprimerJe ne lis pas Causeur - on ne peut tout acheter ou etre abonné à tout - et donc tant pis. ceci dit, je ne sais pas ce qui me réjouit le plus: l'élection de Finkielkraut ou bien la nique faite ainsi aux bien-pensants par cette respectable institution.
RépondreSupprimercet "anoblissement " permettra-t-il aux gauchistes et autres flicards de la pensée de réfléchir et d'imaginer que Finkie n'est peut-être pas aussi nauséabond qu ils le pensent ?
J'espère que votre question était ironique…
SupprimerIl est mort, le métèque.
RépondreSupprimerL'Académie n'est qu'un cimetière monumental dont les membres, pour la plupart, n'ont d'immortels que leurs noms recensés dans Wikipedia.
Combien d’œuvres majeures, d'idées nouvelles, de découvertes rayonnantes ont été produites par ces 40 momies, après leur entrée dans ce mausolée?
Contrairement aux Académies antiques, ils n'illuminent plus le monde par la lumière de leur pensée, tout juste reste-t-il un lumignon tel ces lampes posées devant les tombes italiennes.
Mais que vous y attachiez de l'importance ne m'étonne pas de vous, qui m'apparaissait tourné vers le passé et ne regardant qu'avec effroi l'avenir par dessus votre épaule.
Et allons-y de notre petit couplet convenu, ressassé et parfaitement imbécile sur l'Académie ! Vous avez raison, ça fait toujours du bien, de redire dans son coin ce qui rabâche depuis Mathusalem, ou au moins son fils…
SupprimerLes poncifs ne sont pas toujours faux. Concernant l'Académie française il est tout de même difficile d'y voir autre chose qu'une récompense honorifique un peu ridicule. Ce n'est certainement pas un vrai lieu de savoir, d'échanges, de création, et Finkie n'y gagne intellectuellement rien. Si la chose était plus sérieuse Renaud Camus y serait déjà, mais en même temps l'idée de porter aux nues quarante bonshommes est-elle vraiment sérieuse ? Surtout quand on s'aperçoit que la plupart de ces quarante sont des inconnus n'ayant produit qu'une œuvre très mineure, voire aucune œuvre.
SupprimerL'académie est une institution. Il en faut. Mais rien n'oblige à être dupe. C'est un peu comme si on croyait que François Hollande est vraiment le chef de la France ou bien, sous prétexte qu'il envoie de jeunes Français mourir au Mali, qu'il est un "chef de guerre", comme certains journaux ont cru bon de l'écrire.
Mais qui a prétendu que l'Académie devait être ce que vous dites, à savoir un "lieu de création" ? D'ailleurs, c'est quoi, un "lieu de création", en dehors du bureau ou de l'atelier de celui qui tente de créer quelque chose de pas trop informe ?
SupprimerQue la plupart des académiciens depuis près de quatre siècles n'aient produit que des œuvres mineures (mais y êtes-vous allé voir ?), c'est bien normal, dans la mesure où 99 % des choses qui se publient en un siècle disparaissent à jamais dès le suivant : pourquoi voudriez-vous qu'il en allât autrement pour les académiciens ? Du reste, regardons-y de plus près : je suis bien certain que la proportions de noms ayant résisté au temps est bien plus élevé à l'Académie qu'en dehors d'elle.
Le travail des académiciens est de DECORTIQUER LA LANGUE française : l'étudier, l'analyser, en long, en large, en travers, c'est leur mission primordiale.
SupprimerAlain Finkielkraut est là à sa juste place. En tant qu'érudit, penseur, amoureux de la langue, et en tant qu'homme qui fait du bien à l'humanité. Leur désir n'est pas de produire des best-sellers, leur désir est d'être des tâcherons de la langue. Et de la pensée par conséquent.
Hitler et Staline étaient terrifiés par l'homme qui pense, par l'homme qui parle : en tant que brutes épaisses et sadiques, et avec l'appui d'autres brutes, ils se sont délectés de détruire la pensée en même temps que les corps qui la supportent. Ils ont choisi, ou ils ont fabriqué, un trait dans l'homme (ennemi du peuple, ou juif, ou intellectuel, etc..) pour légitimer son élimination.
On s'en fout que Finkielkraut soit pro-israélien ou que tel autre soit pro-ce qu'il veut.
Sa victoire est la victoire des hommes grands par rapport aux imbéciles et aux brutes. Il est réjouissant de voir que le bien et la liberté ont gagné sur la très meurtrière étroitesse de vues.
Pour moi sa victoire est aussi celle de Renaud Camus, dont on peut dire qu'il est martyrisé parce qu'il pense et parce qu'il parle.
Si d'aucuns veulent tirer un fil qui irait directement de Finkielkraut à Camus et à Dieudonné, ça les regarde. Il y a plein d'autres pelotes, dont on peut tirer d'autres fils.
Un point Godwin en 5 coups au sujet de Finkielkraut et l'académie, fermons la boutique
Supprimer@ Marco Polo
SupprimerLes nues n'ont pas grand chose à craindre qu'on leur porte 40 académiciens dans l'état physique où ils sont. Quoique...
Dénudé
Duga
Non, non, le point Godwin risque d'être atteint au moment du discours de réception de Finkielkraut, puisque l'on s'est brusquement aperçu que l'écrivain dont il doit faire l'éloge, Félicien Marceau, n'était pas seulement un auteur de romans charmants, ironiques et sentimentaux, et de pièces de théâtre amusantes, bref une personnalité "consensuelle" et inoffensive (même Guy Bedos était à son enterrement, c'est dire !), mais a aussi été dans sa jeunesse belge, sous le nom de Louis Carette, un compagnon de route de Léon Degrelle, dont on a pu dire qu'il était "le fils qu'Hitler aurait aimé avoir". J'imagine que l'on n'a pas fini d'exploiter cette histoire antédiluvienne pour chercher des crosses nauséabondes à Finkielkraut !
SupprimerEn tout cas, l'élection de Finkielkraut honore l'Académie, car on ne peut pas dire que la liste des derniers "immortels" était franchement enthousiasmante : Dabadie, Rufin, Sallenave, Amin Maalouf, Xavier Darcos, Dominique Bona, Dany Laferrière...
Putain d'Adèle ! J'ignorais que Darcos fût de l'Académie ! Ça me fout un choc…
SupprimerSinon, rappelons aussi que Marceau est l'auteur d'un Balzac et son monde tout à fait remarquable.
Quoi ! Natacha Polony serait une ancienne fille de Finkie ? Il me tarde de lire l'article de Jean Clair !
RépondreSupprimerCalmez-vous, calmez-vous de grâce !
SupprimerFinkie a des ascendants Polo...nais
SupprimerDésolé
Duga
Ensuite ils recevront Renaud Camus, puis Zemmour, Soral, puis Dieudonné, ce ne sera plus l'académie mais le grand conseil fasciste!
RépondreSupprimerBen et moi ? Sachez qu'aucun cénacle nazi n'est vraiment complet si je n'y suis point !
SupprimerC'est vrai, je vous avais oublié...
SupprimerEncore qu'il est difficilement envisageable de voir un jour Finkie siéger avec Soral, Zemmour ou Dieudonné dans même conseil, vu son soutien inconditionnel à l'état d'Israël.
SupprimerOh, avec Zemmour, ils devrait pouvoir y arriver !
SupprimerJean clair c'est ici (et pas maintenant )
RépondreSupprimerhttps://www.youtube.com/watch?v=xk5MtJ0-bYo
Votre lien.
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