vendredi 19 juin 2015

Relire Revel


C'est à quoi j'encourage tout un chacun, y compris ceux qui ne l'ont jamais lu, même si je me rends bien compte que le sous-titre du volume atterri tout à l'heure dans ma boîte aux lettres pourrait avoir un effet révulsif sur certains de mes charmants visiteurs. Dans ce cas, pourquoi ne pas commencer par quelques Plats de saison ? Il s'agit d'une collection lancée par les éditions du Seuil en 1990, dont le nom dit clairement le projet : Journal de la fin du siècle. Il s'agissait, chaque début d'année, de publier le journal tenu par une “personnalité” (écrivain, historien, etc.) durant les douze mois précédents. En 2000, c'est donc Revel qui s'y est collé. Le résultat est aussi savoureux que certains des plats qu'il décrit, lorsqu'il lui arrive de déjeuner dans un restaurant digne de ce nom. Le regard sur l'époque est d'une ironie parfois féroce, les épinglages politiques hautement épicés et le dégonflage de baudruches d'une efficacité souveraine. Bref, on s'amuse beaucoup, et en plus on rajeunit : 2000, c'était encore l'époque de l'inénarrable et pompeux Jospin, entouré de sa gauche dite “plurielle”, c'est-à-dire incohérente et foutraque. Rien que d'écrire ces mots, j'ai l'impression de parler du Précambrien.

11 commentaires:

  1. Je n'ai eu qu'à le ressortir de ma bibliothèque !

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    1. Chanceuse ! Remarquez, j'ai trouvé mon exemplaire, en parfait état, pour 0,41 €…

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    2. Mais ne pourrez pas savoir si les anciens possesseurs du livre n'ont pas craché dans leurs doigts pour en tourner les pages !

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  2. Aaah!

    "La Grande Parade", je l'avais chroniqué pour un journal d'étudiants, du temps où je l'étais moi-même.

    Je me souviens que quelques dents avaient grincé...

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  3. Je lisais Revel de son vivant, moi ; j'aimais bien, je ne partageais absolument pas ses analyses farfelues, il ne m'a jamais fait changer d'avis sur quoi que ce soit ( contrairement à d'autres); mais j'aime bien lire les polémistes de talent - vous savez bien que le talent n'a rien à voir avec les idées qu'il défend; ce qui en fait la valeur, c'est la forme, pas le fond.

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  4. Assez bon livre. Je l'avais fait lire à un copain gauchiste qui l'avait trouvé bêtement journalistique. Il aurait voulu plus de théorie, moins d'exemples. C'est au contraire ce qui fait la valeur de Revel : les exemples.

    Dans le genre journalistique j'avais aussi trouvé très réussi "La gauche sans le peuple", d'Eric Conan.

    Je ne crois pas qu'il y ait des livres si vrais, si démonstratifs, du côté de la gauche, qui montreraient l'horreur de ce qu'est la droite. Enfin, si, il y a des livres qui dénoncent assez bien les dérives libérales, mais celles-ci sont autant de gauche que de droite.

    A mon humble avis, monsieur Arié n'a pas bien lu Revel. Il me paraît très difficile de soutenir que cet auteur accumule les "analyses farfelues". Tout au plus peut-on les juger un peu molles, parfois, ces analyses, car Revel est un modèle de pondération. C'est pour cela que mon copain gauchiste s'était retranché derrière l'argument de mauvaise foi d'un "travail journalistique". N'ayant rien à objecter sur le fond, il discutait la forme.

    Ce qui demeure gênant, chez Revel, c'est bien sûr son libéralisme, et cette idée que le libéralisme ne serait pas une idéologie. La vraie et la seule alternative au socialisme, c'est le conservatisme, car socialisme et libéralisme sont des progressismes, et d'ailleurs finissent toujours par s'entendre. Je sais bien qu'il existe des "libéraux-conservateurs", mais ce mélange, toujours plus souhaitable que d'autres, j'en conviens, ne me paraît pas théoriquement très fondé.

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    1. Jean-Claude Michéa, lui, parle de "la triste évolution des gauches occidentales modernes" et de "l'idée que toute critique radicale de la logique capitaliste conduisait inéluctablement à la misère généralisée".
      Michéa cite Pascal Lamy : "Lorsqu'il s'agit de libéraliser, il n'y a plus de droite en France. La gauche devait le faire, parce que ce n'est pas la droite qui l'aurait fait." Et Michéa continue : "C'est évidemment dans ce contexte singulier - et sous le magistère florentin d'un François Mitterrand - que "la lutte contre le racisme et contre toutes les discriminations" ... allait logiquement prendre la place de "l'archaïque" lutte des classes et devenir le nouvel évangile de l'intelligentsia "éclairée"."

      La culture de l'égoïsme - Christopher Lasch, Cornelius Castoriadis - Postface : Jean-Claude Michéa

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    2. Vous parlez d'or : Michéa est l'un de mes maîtres ! Assurément l'homme le plus intelligent de France (après moi et Didier Goux).

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  5. Rebutant Revel. Revel recalé.

    « Les Européens ont raison de blâmer la liberté de vente des armes à feu qui subsiste aux États-Unis. Mais ces vitupérations seraient plus convaincantes s'il n'était pas aussi facile de se procurer des armes en Europe, où elles font l'objet d'un marché noir florissant.
    (...)
    Si regrettable soit-elle, la vente officielle d'armes aux particuliers en Amérique permet au moins ou, plus exactement, rend obligatoire d'enregistrer le nom de l'acquéreur, qui doit payer aussi une licence, et de relever ses empreintes digitales. »

    Jean-François Revel, L'obsession anti-américaine. Chapitre cinquième : La pire société qui fut jamais, pp 157-158. Plon. 2002.

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