lundi 28 août 2017

Les moines et leurs règles


C'était il y a bien des années. En ces temps, le rewriting de FD ne se composait que d'hommes : nous formions comme une sorte de petite fraternité de moines copistes, à la fois enjoués et studieux. Une fin d'après-midi – car ces conversations ne peuvent éclore qu'à ce moment-là de la journée, et de préférence vers la fin de l'automne –, nous en arrivâmes, Dieu sait comment – défaut de travail peut-être ? –, à ce pont aux ânes masculin qui peut s'énoncer comme suit : « Si d'aventure un magicien nous transformait en femme pour une unique journée, que ferions-nous de ces vingt-quatre heures ? »

Chacun, aussitôt, y alla de sa résolution. (Nous avions d'un commun accord admis qu'il était exclu de nous transgenrer autrement que sous les pleins et les déliés d'une créature hautement désirable.) Les projets fusaient :

« Moi, je veux faire tirer leur langue au maximum de mecs sans rien leur accorder : ça me soulagera.

– Moi, je me cantonnerai dans le lesbianisme : l'idée de me prendre une… enfin, bon : lesbienne exclusive !

– Moi, c'est l'inverse : je veux me faire enfiler autant que je pourrai : j'arriverai peut-être à comprendre ce qu'elles nous trouvent…

– Eh bien moi, je…

– Moi, par contre… »

Au bout d'un certain temps, seul Dominique Qu.-F. (je me sens tenu de respecter l'anonymat de ce valeureux travailleur du verbe) n'avait rien dit, et semblait même se désintéresser de la discussion, pourtant primordiale si l'on songe au nombre incroyablement élevé de magiciens farceurs qui circulent dans les rédactions des journaux populaires. Finalement, l'un de nous lui posa la question, sans doute à peu près en ces termes : « Et toi, tu ferais quoi ? »

Dominique prit alors un air qui oscillait entre le vaguement désabusé et le franchement malheureux, soupira et laissa tomber : « Moi, si je devais être une femme pendant vingt-quatre heures, je trouverais encore le moyen d'avoir mes règles… »

Il était l'heure de sortir le whisky des placards.

28 commentaires:

  1. Hihihihihihi…
    (Parfait.)

    RépondreSupprimer
  2. "Il etait l'heure de sortir le whisky des placards."

    Cette petite phrase me provoque un peu de nostalgie. Si au début de ma carrière, dans les années 70, on sortait facilement quelques flacons du placard, force est de constater qu'aujourd'hui cela ne se fait plus guère. Sous prétexte de securité au travail, ou plutôt d'hygiénisme et de moralisme, il serait difficile de consoler Dominique aujourd'hui.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai connu aussi la fin de cette époque et l'arrivée du nouveau puritanisme hygiénique. En outre, maintenant, même si on arrivait à tirer une bouteille d'un placard, il faudrait descendre dans la rue à chaque cigarette destinée à accompagner le breuvage…

      Supprimer
  3. C'est quand vous nous donnez à lire ce genre de billet que nous sentons vraiment que nous sommes sur un blog littéraire !

    RépondreSupprimer
  4. Amusant, que chacun s'imaginé d'office comme une belle femme (voir l'illustration du billet ) et non comme un vrai boudin.

    Un peu comme tous ceux qui s'imaginent "vivant sous Louis XIV ", et forcément à la cour de Versailles, et non comme l'immense majorité des paysans crevant de faim.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Voilà encore bien une idée de progressiste républicanolâtre ! Sauf en quelques années bien repérées du début du XVIIIe siècle (petit âge glaciaire), les paysans français ne mourraient pas de faim sous Louis XIV. En tout cas, nettement moins que leurs homologues russes sous Lénine et Staline au XXe siècle, voire que leurs compañeros vénézuéliens actuels.

      Supprimer
    2. "Sauf en quelques années " : c'est mieux que rien...
      (et je ne vois pas trop ce que Staline, Lénine et le Venezuela viennent faire là-dedans )

      Supprimer
    3. Personne ne vous amis au courant de certaines famines organisées, en Russie communiste, qui ont fait des millions de morts, en particulier en Ukraine ? Et on ne vous a pas touché mot non plus de la pénurie généralisée qui frappait ce merveilleux paradis socialiste qu'est l'actuel Vénézuela ?

      Supprimer
    4. Si,si, je suis vaguement au courant. ..Mais je parlais du siècle de Louis XIV, et de rien d'autre.

      Supprimer
    5. Oui, mais comme c'était pour en dire une sottise, je me suis permis d'élargir un peu le cadre…

      Supprimer
    6. J'avais simplement voulu faire remarquer que, quand on se projette dans l'imaginaire, on se situe toujours parmi les privilégiés. J'aurais aussi bien pu dire que ceux qui croient à une vie après la mort et en parlent s'imaginent toujours au paradis, jamais en enfer.

      Supprimer
  5. Pour échapper aux menstruations de leur épouse, les maris afghans leur demandent de faire ventouse sur le carrelage de la cuisine.
    J'essayerais bien ce truc-là.

    RépondreSupprimer
  6. Mais vous Didier, vous feriez quoi ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je me suis posé la question… et incapable de me rappeler quelle connerie j'avais bien pu inventer pour tenir ma partie dans ce concert !

      Supprimer
  7. Faut toujours respecter les règles.
    Au fait, le whisky, c'était du Jack ou du Johnny ?

    Désolé
    Duga

    RépondreSupprimer
  8. J'ai en effet tapé quelque chose d'approchant.

    RépondreSupprimer
  9. Moi qui croyais que c'était une photo de Catherine...

    RépondreSupprimer
  10. Bravo Didier, vous avez bien répondu en ce qui concerne la soi-disant famine sous Louis XIV !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Renseignez-vous un peu sur les (et non "la") grandes famines sous Louis CIV :

      http://www.lepoint.fr/culture/2007-01-17/les-grandes-famines-autant-de-morts-qu-en-fit-la-guerre-de-14/249/0/25154

      Supprimer
    2. Je ne parlais pas des famines résultant des guerres, des épidémies et des mauvaises récoltes...ce sont des choses qui sont arrivées à bien des époques.
      En revanche la famine russe fut organisée pour exterminer la paysannerie russe !

      Supprimer
  11. Ben vous savez, à 67 ans, femme ou homme, on n'attire que très moyennement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ca dépend, ça dépend...

      Hugh Hefner créateur de Playboy) : le 31 décembre 2012,à 86 ans, il épouse Crystal Harris, 26 ans, de soixante ans sa cadette;

      Supprimer
    2. Je ne suis pas certain que vous parliez de la belle attirance en évoquants Heffner.

      Supprimer

La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.