Je n'ai nullement l'intention de perdre mon temps à ferrailler à propos de cette polémique stupide, qui a au moins le mérite d'occuper l'esprit en surchauffe de nos amis progressistes en attendant leur réveillon citoyen. Vous trouverez cette navrante historiette un peu partout, et notamment ici. Mais, justement, restez donc un peu sur cet article d'Atlantico, plus précisément sur son sous-titre, parfois appelé “chapeau”. Pour ceux qui ont la flemme de s'y reporter, il dit ceci :
Jugée raciste, elle est distribuée aux maternelles d'Aubervilliers.
On ne chipotera pas sur le fait qu'il est impossible de distribuer une comptine à une maternelle, alors qu'il est si simple de la distribuer dans une maternelle ou encore aux enfants des maternelles. C'est sans importance, dans la mesure où c'est toute la construction de la phrase, pourtant courte, qui est viciée. Telle qu'elle est écrite, elle signifie exactement ceci : « Cette comptine ayant été jugée raciste, elle a donc été distribuée dans les maternelles. » L'apposition de “jugée raciste” montre clairement une relation de cause à effet : c'est parce que la comptine a été jugée raciste qu'on s'est décidé à la distribuer ; le racisme de l'immonde comptine a été l'élément déterminant, le facteur déclenchant de l'opération distributive. On doute que ce soit ce qu'Atlantico ait voulu dire. C'est d'autant plus sot qu'il était très facile d'énoncer clairement ce qu'il y avait à dire ; il suffisait d'intervertir les deux propositions en conservant exactement la même structure :
Distribuée aux maternelles d'Aubervilliers, elle est jugée raciste.
Le plus déprimant de l'affaire, et le moins inattendu, n'est pas que les soutiers d'Atlantico se soient pris les pieds dans le tapis syntaxique : ils le font tous les jours, avec une constance qui force le respect ; c'est que nous sommes, j'en ai la certitude, de moins en moins nombreux à sursauter à ce genre de bévue que, voilà quelques décennies, n'aurait pas commise un élève des collèges même de niveau moyen. Et, bientôt, nous aurons totalement disparu. Heureusement, les antiracistes sourcilleux seront toujours là. Pour Chang le petit Chinois, je suis moins sûr.
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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.