On nous répète à l'envi que se méfier a priori des étrangers, les tenir pour suspects et potentiellement dangereux tant qu'ils n'ont pas dûment donné la preuve de leur innocuité, on nous répète que c'est très mal, que cela fait de nous de patentés suppôts du nazisme, dont la nauséabonderie délétère devrait d'ailleurs suffire à faire fuir n'importe quel étranger aux narines tant soit peu délicates – mais passons.
Il est donc entendu que l'étranger est notre ami, qu'il ne vient vers nous que dans l'espoir de s'enrichir culturellement à notre contact ; le présupposé reste vrai même lorsque l'étranger est une demi-douzaine et que chacun tient négligemment à la main la chaîne de sa mobylette : la perspective d'un réel déplaisant ne doit en aucun cas faire pâlir l'image sainte que l'on nous somme d'adorer, ou au moins d'accueillir comme un autre nous-même, voire un nous-même amélioré.
C'est d'ailleurs ce qu'ont fait les Indiens des Indes occidentales lorsque les Colomb, les Cortès et autres Pizarro ont débarqué dans leurs îles puis sur leur continent : accueil bienveillant, ouverture à l'autre, curiosité interethnique, rien n'y manquait. On sait le résultat de cette largeur d'esprit : massacres, épidémies, réserves. Si ces braves emplumés avaient pu bénéficier des apports du fascisme, du repli sur soi, de la xénophobie agissante et des heures les plus sombres de toute histoire, qu'eussent-ils fait, voyant débarquer ces peu nombreux étrangers cuirassés et coiffés de casques ridicules ? Ils les auraient gaillardement massacrés jusqu'au dernier avant même qu'ils ouvrent la bouche, puis auraient envoyé caravelles et galions par le fond, tandis que les squaws auraient préparé un grand barbecue festif sur la plage pour arroser ça. Et ils étaient tranquilles pour au moins un siècle, à chasser le bison et scalper les voisins. Au lieu de ça, ils ont préféré jouer aux progressistes, aux multicul', aux vous-n'aurez-pas-ma-haine : c'est bien fait pour eux.
La règle sera donc la suivante, et elle est d'or : soyez xénophobes, mes frères, par principe et résolument ; cela peut vous sauver la vie, et accessoirement le pucelage de vos filles, comme l'histoire des hommes le montre d'abondance. Et ce n'est qu'une fois prouvée sa bénévolence que l'étranger pourra, très éventuellement, être convié à dîner à la maison. Mais on aura garde de ne mettre à sa disposition, à table, que des couteaux aussi peu affutés que possible. Parce que, tout de même : un étranger reste un étranger. Parole de Geronimo.
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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.