Jules Vallès, furieux à juste titre… |
Indéfectible voulant dire en gros “qui durera toujours”, l'assertion me paraît pour le moins hasardeuse : je suis à peu près sûr que même des doigts gourds parviendraient sans trop de peine à dénouer ce lien-là. À moins qu'on ne choisisse de le faire disparaître façon nœud gordien.
Mais ils sont comme ça, nos universitaires, toujours assurés d'avoir une quelconque importance, au point d'en devenir indispensables. Ils doivent s'imaginer plus ou moins qu'après leur mort ils seront accueillis en paradis par les sanglots de reconnaissance et les tremblements de gratitude de tous les écrivains sur lesquels ils auront tristement grouillé leur vie durant, tels des bataillons de larves sur une charogne baudelairienne.
Pour en revenir à notre Bellet, j'aurais bien aimé que l'on tranchât les fils dont il avait embobiné Jules Vallès – Lilliputien diplômé d'un Gulliver créateur – avant qu'il n'envahisse de sa présence et n'inonde de ses commentaires les deux volumes de la Pléiade consacrés au glorieux communard. Car tout de même : sur un livre de deux mille pages, en annexer à soi seul six cents uniquement pour y répandre ses petites notes et notices, n'est-ce pas faire preuve d'un cruel manque de savoir-vivre – et je m'efforce là de rester poli ?
Bien entendu, ce qui s'étale dans ces notes, c'est le cocktail hélas habituel désormais : un dé d'information intéressante dilué dans deux grands verres de cuistrerie absconse, les deux impeccablement mélangés au shaker. Je ne donnerai qu'un minuscule et anodin exemple. Dans le chapitre XXVI de son Bachelier, Vallès parle à un moment “des gymnases antiques, des jeunes Grecs, de la robe prétexte”. Là, appel de note. Mi-résigné, mi-agacé, le lecteur saute à la fin du volume. Il tombe sur une note composée de deux phrases. La première :
« La robe ou plutôt la toge prétexte est la toge blanche, bordée de rouge, que portaient à Rome les jeunes patriciens jusqu'à la puberté. »
Eh ! Voilà notre lecteur tout prêt déjà à absoudre M. Bellet des péchés dont il l'avait chargé ! Car le rappel lui semble utile et sobre, tout le monde ne se souvient pas forcément de ce qu'était la robe prétexte… Malheureusement, enivré par sa propre acuité intellectuelle, Bellet y va d'une seconde phrase :
« Mais Vallès joue aussi sur le mot : tout se passe comme si un pré-texte grec s'imposait comme écriture moderne. »
Vous avez évité hier les préliminaires de M. Roussel à la lecture de Barrès pour tomber aujourd'hui dans les griffes de M. Belet qui s'impose entre vous et Vallès. A quoi vous sert donc votre belle expérience de lecteur blanchi sous le harnais?
RépondreSupprimerLa Dive
D'après mon expérience, il est infiniment plus difficile de "résister" aux notes qu'aux préfaces…
SupprimerCertainement pas ! Je possède une édition de Balzac sans aucune note, et je puis vous assurer, sans m'vanter, que je parviens tout de même à comprendre quelques trucs…
SupprimerMa règle personnelle est la suivante : un roman doit se suffire à lui-même et, par conséquent ne souffre JAMAIS la moindre note.
Qui NOUS sont ? Qui NOUS sont ? Parlez pour vous, mon bon !
SupprimerJ'avais en effet rectifié comme un grand.
SupprimerCe M. Bellet me fait penser aux gens qui inondent les billets des blogs de leurs commentaires.
RépondreSupprimerLa différence étant que, contrairement à celle des volumes de la Pléiade, la lecture des blogs est gratuite…
SupprimerNote : Contrairement à la description faite par le sieur Roger Bellet, la robe prétexte, qui comme chacun sait est aussi le titre du second roman de François Mauriac, n'est point bornée de rouge mais d'une lisière pourpre.
RépondreSupprimerNote de note : Il faut savoir que le code HTML des couleurs RVB du web attribue le code hexadécimal #800080 à la couleur pourpre et la valeur #FF0000 au rouge.
J'espère que ces précisions seront ajoutées, lors d'une prochaine réédition de Vallès dans la Pléiade…
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