Durant ces cinq jours où je fus exclusivement nourri de l'incomparable gastronomie hospitalière, j'en suis arrivé à une conclusion que je juge irréfutable. Il doit exister, quelque part en France, probablement en des infrastructures souterraines afin de prévenir d'éventuelles insurrections paysannes contre elle, il doit exister, disais-je, une école particulière de cuisine, dans laquelle on forme les futurs marmitons hospitaliers. Ce n'est pas possible autrement.
Le but principal de l'enseignement qui leur est dispensé, leur Premier Commandement en quelque sorte, est de leur apprendre à surtout ne jamais réussir un plat, ni même à ne le rater qu'à demi. Un plat mangeable, c'est l'avertissement ; deux, le blâme ; trois, le renvoi définitif. C'est moins facile qu'un vain peuple pourrait le penser.
Essayez par exemple, en dehors de toute formation rigoureuse, de transformer un honnête steak haché en une sorte de feuilleté de contreplaqué, à peine entamable au couteau : seuls les plus inspirés y parviendront peut-être. Ou bien, prenez un filet de poisson parfaitement frais (les services sanitaires sont au taquet 24 heures sur 24) et concoctez-lui une sauce qui puisse faire croire qu'il a été pêché il y a trois mois et conservé ensuite dans une remise bien chauffée : humiliant échec garanti.
Il reste maintenant à déterminer à quels signes aussi discrets que mystérieux ces gâte-sauces démoniaques se reconnaissent entre eux.
Et si, parfois, une puisssnce encore plus diabolique qu'eux-mêmes les contraint à ingérer ce qui sort de leurs chaudrons.
Mais que diable aussi alliez-vous faire à l'hôpital ! Cinq jours en plus !
RépondreSupprimerPose d'un pace maker... et un petit pneumothorax en prime !
SupprimerDG
Un bon rétablissement.
SupprimerOn va tâcher, merci.
SupprimerDG
Je suppose que ce type de mets se mange avec les doigts, ce que semble indiquer le port à l'envers de la fourchette (photo). En effet, entrée à la Cour de France avec Catherine de Médicis, l'utilisation de la fourchette a longtemps été perçue comme synonyme d’excentricité et de danger, s’attirant même les foudres du Clergé qui y voit « l’instrument du diable » incitant au pêché et à la gourmandise. Ici, aucun risque de succomber à la gourmandise !
RépondreSupprimerS'il est bien un endroit où la graille est redoutable, c'est bien celui là. Cela fait parti du plan pour raccourcir le temps d'hospitalisation. Aucun doute. M'étonnerait que vous restiez deux heures de plus pour la truite sauce Nantua du menu de midi.
RépondreSupprimerVous voilà bionique, reposez vous et allez y mollo, menu lectures obligatoire.
Aller mollo est assez dans ma nature, bionique ou pas.
SupprimerDG
Je viens de passer 2 mois en clinique post opératoire et je m'y suis fait une forte renommée quant au sujet de la bouffe infâme qu'on m'a servi. Certaines personnes m'avaient charge de réclamer et râler auprès de la direction sitôt ma sortie !!! Les repas sont réchauffés et c'est vrai que les steacks hachés ont une sacrée gueule !!! Je les ai tous délaissés tellement c'est répugnant. Les pâtes, le riz, tout est recuit....
RépondreSupprimerJe pense sérieusement qu'ils ont mis au point une sauce spéciale à goût de vomi dont tous les plats sont aspergés.
J'ai des frissons dans l'échine rien que de penser que je pourrais y retourner...
Daniel DURET
Exact ! (Pour la sauce "spécial vomi") Quel que soit le menu officiel, les plateaux qui s'approchent dégagent toujours la même envoûtante fragrance...
SupprimerCela dit, deux mois à ce régime, je vous tire mon chapeau !
DG
Hospitalisé un premier mois vers octobre 2021, j'ai perdu 15 kg (au fond, ça ne fait que 10%...). Par contre, je n'ai rien égaré lors de mes séjours ultérieurs sauf une partie de l'aorte et des poumons (mais ça ne pèse rien). Pendant toutes ces périodes (11 semaines en huit mois), je me suis toujours demandé comment ils faisaient pour TOUT rater. Même les pommes et les bananes...
RépondreSupprimerD'où ce billet, qui me semble proposer la seule explication cohérente.
SupprimerDG
"la seule explication cohérente."
RépondreSupprimerBen non, voilà une excellente occasion de placer une de mes anecdotes favorites.
La bonne réponse à ce genre de question hautement métaphysique m'a un jour été donnée par... mon charcutier!
Ce qui fait la qualité d'un produit ou d'un service ce n'est pas le vendeur ni le producteur mais... la clientèle!
Si la clientèle accepte de bouffer de la merde elle en aura plus que son content, si au contraire elle rechigne et même refuse, il y aura toujours des plus entreprenants pour se décarcasser à trouver le bon produit.
Le problème de la "gastronomie hospitalière" c'est que la clientèle des fournisseurs ce N'EST PAS les malheureux patients, c'est le service gestion hospitalière qui fait de son mieux pour gratter un bénéfice substantiel sur les 20 € du forfait!
Et il en est parfaitement satisfait! :-D :-D :-D
Sérieusement ? Mon explication de cuisine secrète et souterraine ne serait pas la bonne ? Alors, là, vous me sciez !
SupprimerDG
Bon rétablissement!
RépondreSupprimerOn va faire ce qu'on va pouvoir...
SupprimerDG
Aussi loin que remonte l’existence de l’hôpital, remontent également les effluves de ses cuisines.
RépondreSupprimerJe vous souhaite plein de courage pour ce sale moment !
Hélène
A priori, le sale moment (qu'il ne faut d'ailleurs pas noircir à l'excès) est censé être derrière moi...
SupprimerDG
Ouais, c'est l'horreur, au moyen age on brûlait des gens pour moins que ça, malheureusement les temps ont changé... j'ai passé trois mois à l’hôpital après un AVC, et curieusement je refais du gras depuis que je suis rentré chez moi. j'ajouterais qu'ils doivent avoir aussi cours spécial "choix des pires conserves" : le jour du cassoulet, pas de William Saurin, les moins mauvaises, mais un truc immonde dont l'odeur reste dans la chambre, pareil pour le jour choux et saucisses... et le choix des fruits ! à l'étage des AVC dont, étonnamment la plupart sont hémiplégiques, pas de pommes, poires ou abricots qui se mangent d'une main, mais des oranges et des kiwis, sans doute leur façon de participer à la rééduc "si t'aimes pas la peau, sors toi les doigts du c..."
RépondreSupprimerCe que vous dites confirme très clairement mon hypothèse d'une école secrète...
SupprimerDG
Ca ne donne pas envie. Bon rétablissement! Vous allez pouvoir tondre des hectares de pelouse avec ce cœur à assistance électrique.
RépondreSupprimerPour l'instant, je reste interdit de tondeuse : quatre semaines au moins. Ce qui me va fort bien !
SupprimerDG
La dernière fois que j'ai été hospitalisé (peut-on dire "cliniqué" ?) fibrillation auriculaire en ce qui me concerne, il y a 5 ou 6 mois j'ai été mis, à l'insu de mon plein gré, comme de celui du personnel et de celui du chef-diététicien toqué, mis donc au régime carottes râpées / coquillettes sans sel et jambon du même métal, complété par yaourts nature et aspartame (à déguster avec une cuiller jetable en bois de bambou tout comme les couverts utilisés plus haut) Le tout servi avec une cruche d'eau Durobinet, tiède et chambrée.
RépondreSupprimerAu(x) dire(s) de plusieurs personnes rencontrées au hasard des attentes de brancardiers, je n'étais pas le seul... client... impacté par ce dysfonctionnement (ou pas ?) gastronomique.
J'aurais donné ma chemise d'hôpital pour un steak haché carbonisé et ses patates mi-cuite, mas AVEC DU SEL...!
J'ai dans mes relations un marmiton hospitalier, mais son rêve, sa véritable ambition, c'est de réussir dans la patisserie hospitalière..
RépondreSupprimerEt je crois me souvenir que ma mère, lors d'une hospitalisation, craignait plus particulièrement les sauces, comme vous..
Galatine
"..il doit exister, disais-je, une école particulière de cuisine, dans laquelle on forme les futurs marmitons hospitalier"
RépondreSupprimerTout compte fait, ça colle avec la philosophie ambiante qui envahit toutes les strates de la société.
’’vol au dessus d’un nid de coucous”
Hélène
Le principal avec le streak en plâtre recyclable et durable, c’est qu’ils ne vous ont pas servi de bière — en sapin ou même de houblon de type « mort subite ».
RépondreSupprimerSanté quand même et bon rétablissement !
GJG
Bon, je vois qu'en gros nous avons tous la même expérience...
RépondreSupprimerReste à trouver cette école secrète et à la dynamiter !
DG
Lors de mon dernier séjour à l'hosto, j'ai attendu quinze jours afin d'être autorisé à me nourrir par la bouche... autant vous dire que mon premier potage de légume sans légume avait un goût cinq étoiles cuisiné par Bocuse himself ! hélas, avec la guérison, l'homme retrouve vite le goût du luxe. Bonne guérison et arrêtez le marathon.
RépondreSupprimerheu... le coup du potage c'est captainhaka, j'ai oublié de signer. capthaka.
RépondreSupprimerÉvidemment, tout est relatif...
SupprimerDe même, j'imagine qu'après trois jours de désert avec une gourde vide, le verre d'eau tiède et boueuse qu'on vous offre à l'oasis doit être un vrai nectar.
DG
Il y a pire que la bouffe dans les hôpitaux si même les anglais le déplore : https://urlz.fr/rpll
RépondreSupprimerJ'espère qu'ils ont fait venir l'ergothérapeute pour vous apprendre à tenir une fourchette
RépondreSupprimerÀ l'issue de mes trois semaines à l'hôpital d'Orléans, la diététicienne est venue me trouver pour me demander ce que j'avais pensé des repas ; elle a été ébahie de ma réponse, puisque, apparemment, j'étais bien le seul à avoir aimé.
RépondreSupprimerOn peut considérer que les gens râlent facilement ou bien que j'ai un goût déplorable ; pour ma défense et pour rejoindre M. CaptainHaka, je n'avais rien pu manger, pendant trois ou quatre jours, que de la perfusion (je ne recommande pas : insipide), ceci, expliquant peut-être cela.
A contrario, il me souvient que j'avais été incapable de finir un simple demi-poussin (à cette taille-là, ce n'est pas digne d'être appelé "poulet") dans un autre hôpital : ni beurre ni sel et cuit à la vapeur.
Ce témoignage hautement enrichissant posé, je vous souhaite un excellent rétablissement.
K.