L'une des caractéristiques de Simenon est son utilisation fréquente des phrases interrogatives. Un exemple, pris au début de la seconde partie du Veuf, roman de 1960 (mais on en trouverait cent autres dans l'ensemble de l'œuvre). Simenon commence ainsi :
« Sa nouvelle vie n'était pas très différente de l'ancienne, dont elle avait conservé à peu près le rythme. »
Suit une description en sept ou huit lignes de la routine en question , du veuf de fraîche date. Soudain, changement de paragraphe, et vient ceci, comme isolé , presque indépendant de ce qui précède et de ce qui va suivre :
« Peut-être passait-il plus de temps dans son fauteuil que du vivant de Jeanne et lui arrivait-il d'y perdre conscience de la fuite du temps ? »
Ensuite, le récit reprend son cours précédent : « Les jours se suivaient, calmes et vides en apparence, etc. »
Mais cette courte phrase interrogative, insérée là, suffit à créer quelque chose comme une menace encore très floue mais bien réelle ; un commencement de faille si minuscule que l'auteur lui-même ne paraît pas assuré tout à fait de son existence. Il se pourrait que l'idée, le soupçon d'un possible “glissement de terrain” psychique chez son personnage lui soit venue au moment même où sa main commençait à tracer la phrase.
Devant la forme interrogative que prend alors celle-ci, on s'attendrait presque à le voir ajouter, relevant la tête et se tournant vers son lecteur : « Qu'est-ce que vous en pensez, vous ? »
Mais le lecteur, c'est bien connu, n'est nullement là pour penser.
Ah tiens quelques Simenon pour ma retraite vivaraise, bonne idée ça !
RépondreSupprimerMerci de me l'avoir soufflée ! 😉👍
Mon conseil est d'alterner : un Maigret, un "roman dur", un Maigret, un dur, etc.
SupprimerDG
Ou alors, Simenon est gâteux. Si le couillon passe plus de temps sur son fauteuil, c'est parce qu'il a vieilli.
RépondreSupprimerOu alors, peut-être Simenon, par ses formes interrogatives, se met-il à la place de son personnage qui se pose lui-même la question ?
Dans certains cas, assez souvent d'ailleurs, la phrase interrogative remplit la fonction que vous suggérez. Mais pas dans mon exemple.
SupprimerDG
lui arrivait-il d'y perdre conscience de la fuite du temps ? Pour sûr oui. mais bon un mec qui fume la pipe et porte une Omega faut se méfier de ses rapports avec le temps et l'espace.
RépondreSupprimerOui, mais si c'est une Oméga 3, ça devient excellent pour sa santé.
SupprimerDG
J'ai un TOUT SIMENON, le 10, regroupant romans, nouvelles et Maigret (idéal pour alterner !).
RépondreSupprimerAcheté d'occasion, uniquement pour "Betty" après avoir vu le film de C.Chabrol.
Il ne me reste plus qu'à lire les 7 autres...
B.
C'est celui que je viens de relire très bonne cuvée, je trouve.
SupprimerDg