Puisque nous en étions aux chansons qui me font un étrange effet, je pourrais aussi parler de Porque te vas, chantée, avec un accent un peu bizarre, un peu “impur”, par la jeune Jeanette — qui est aujourd'hui une bien vieille dame.
J'ai, comme à peu près tout le monde, découvert cette chanson à la fin de 1976 ou au début de la suivante — j'étais parisien de très fraîche date —, en allant voir le film de Carlos Saura, Cría Cuervos, qui, par son retentissement, a fait de cette ritournelle, sortie fort discrètement quelque temps plus tôt, un “tube” quasi mondial.
(Ma mère étant, sur ces entrefaites, venue passer une semaine dans le deux-pièces de la rue de Patay, 21, que je partageais avec Denis Barthès, mon ami orléanais des lycées Pothier puis Benjamin-Franklin, pour je ne sais quelle formation qu'elle devait suivre, j'étais retourné voir le film avec elle, mais probablement, cette fois, en version doublée.)
Presque 50 après, je ne me rappelle à peu près rien de Cría Cuervos, sauf une scène : on y voyait la très jeune Ana Torrent (elle a aujourd'hui 57 ans...) assise dans un canapé, posant le disque de Jeanette sur son petit électrophone et écoutant religieusement Porque te vas.
Pour autant que je comprenne encore un peu l'espagnol, les paroles de cette chanson ne valent pas grand-chose. Si l'on tient à être indulgent, on les dira anodines. Et je ne suis pas sûr que la mélodie soit beaucoup plus relevée. Pourtant, chaque fois que je l'entends, ce qui n'arrive pas tous les jours, ni même tous les ans, elle me plonge dans un état spécial que j'aurais bien de la peine à définir — la preuve : je n'essaie même pas. Mais, comme dans le cas de So far away, c'est un effet qui se prolonge bien au-delà du temps de la chanson ; parfois plusieurs heures.
Effet durable, mais que je pressens fragile, prêt à s'évaporer si j'en venais à trop le solliciter, C'est au point que, si d'aventure l'occasion de revoir le film de Saura m'était un de ces jour donnée, je crois bien que je me défilerais. Par crainte irraisonnée de casser quelque chose.
De voler sa jeunesse à Jeanette et son enfance à Ana.
Arrêtez de faire croire que c'est un vieux film alors qu'Ana a à peu près mon âge...
RépondreSupprimerOui, mais vous, vous êtes un homme !
SupprimerJe vous rappelle ce qu'a dit un jour Simone Signoret : « J'ai dix ans de plus que Montand, puisque nous avons le même âge et que je suis une femme… »
Vous nous faites une crise de nostalgie, c'est grave. Bientôt vous nous direz que "c'était mieux avant". Mettez-vous au rap d'urgence, ou à Nakamura. Soyez de votre temps, quoi !
RépondreSupprimerJe crois que, comme traitement, j'aurais une légère préférence pour les électrochocs, nettement moins violents que ce que vous préconisez.
Supprimercria cuervos y te comen los ojos... une ode à la parentalité ! capthaka. (moi aussi j'ai le droit de la ramener un peu, pas que vos lecteurs idolâtres)
RépondreSupprimerJe crois que le proverbe dit : Cría cuervos y te sacarán los ojos.
SupprimerC'est pourtant vrai que vous avez un côté fleur bleue... ☺️
RépondreSupprimerBien sûr ! Comme toutes les grosses brutes fascistes...
SupprimerDG
Mélancolie en écoutant Barbara : moi j'me balance, musique du film la fiancée du pirate. Je l'ai vu quelques années après sa sortie, et j'ai adoré.
RépondreSupprimerC'est juste parce qu'elles ne sont plus là, Barbara et Bernadette Lafont
Hélène
Ah oui, évidemment : dans la nostalgie, la mort joue son petit rôle...
SupprimerDG
Yep . L’été 76. Le chaud été 76 a laissé aussi des traces dans ma playlist. Je peux dire sans hésitation que ce fut mon été préféré.
RépondreSupprimerForcément il y a un ou deux crin crin de l'époque associé. Pour moi il s’agit de la face B du 45 tour,comme on disait, d'hôtel California : New kid in town.
La musique est une saleté de piège à tourbillon de nostalgie.
En fait, c'est surtout la musique primaire, la chansonnette, qui fait cet effet là : je ne connais personne dont la nostalgie serait déclenchée par la messe en si ou par le XVe quatuor de Ludwig Van...
SupprimerDG
Si ces petites ritournelles vous font cet effet, je n'ose imaginer ce que peuvent produire chez vous une tasse de thé accompagnée d'une madeleine ...
RépondreSupprimerLa Dive
C'est bien pour éviter un tel cauchemar que, très jeune, j'ai remplacé le thé par le chablis, et les petits gâteaux de fiote par saucissons, rillettes, cervelas et jambons.
SupprimerDG
Et vous fîtes bien...
Supprimer"les paroles de cette chanson ne valent pas grand-chose. Si l'on tient à être indulgent, on les dira anodines. Et je ne suis pas sûr que la mélodie soit beaucoup plus relevée"
RépondreSupprimermystère alchimique, 2 ingrédients dégueulasses combinés donnent un résultat satisfaisant, pour ma part, la combinaison qui marche pour moi avec deux ingrédients infâmes est les gin-tonic, pris séparés, c'est horrible, ensemble ça marche bien!!
À l'inverse, j'ai eu un ami qui, dans sa jeunesse, carburait au gin : y ajouter une seule goutte de tonic vous aurait fait de lui un ennemi mortel...
SupprimerDG
Dans le même ordre d'idée il y a le "Picon-Schweppes"...
Supprimer