En “complément de programme” à mes matutinales lectures ou relectures céliniennes, je viens de parcourir deux biographies du personnage, Sa Seigneurie Nauséabond le Magnifique. La première est signée d'un certain Émile Brami et s'intitule Céline à rebours. Je l'ai achetée sur les conseils de l'ami Beboper,
conseils que j'aurais été mieux avisé de ne point suivre. Si le livre
s'appelle ainsi que je viens de l'annoncer, c'est que son auteur, n'ayant
sur Céline rien à dire qui n'ait déjà été écrit cinquante fois, a eu
cette idée mirobolante : raconter la vie de son personnage en commençant
par la fin et en rembobinant l'écheveau. Cela apporte quoi ? Rien.
C'est un truc. Un gimmick. De plus, je n'ai pas trouvé que le livre soit
si bien écrit que l'a jugé Beboper. Mais enfin, c'est, de ce point de
vue-là, à peu près correct.
Il n'en va pas de même pour le Céline, entre haines et passion
de Philippe Alméras, gros volume qui traîne dans ma bibliothèque depuis
des lustres et que j'ai repris ces jours-ci. Celui-là est écrit en
moldo-valaque universitaire, ce qui rend sa lecture assez pénible. Cela
donne des phrases comme celle-ci : « Le terme de séquence que j'ai
proposé pour l'analyse des pamphlets leur va d'autant mieux qu'il n'y a
pas de solution de continuité du “roman” au “pamphlet” [Chose que, si ma mémoire est bonne, Philippe Muray avait dite avant lui],
dans sa neutralité et sa connotation de film, cela bouge constamment et
de mal en pis. » Ou comme cette autre : « On a souvent rapproché le
sort de Drieu et de Brasillach de celui de Céline. L'un et l'autre ont
trouvé des refuges, etc. » L'un et l'autre ? Alors qu'il vient de citer
trois noms ? Ça n'a l'air de rien, pris isolément, mais multipliez ce
genre de lourdeurs de style et de fautes de langue par cinquante ou cent
: l'œil finit par ne plus accrocher à la page, la lecture devient
quasiment impossible. D'autant que, pour épaissir son volume, M. Alméras
ne répugne pas aux digressions oiseuses. Était-ce bien la peine, par
exemple, de nous débobiner la biographie du père d'Elizabeth Craig,
maîtresse de Céline à qui Voyage au bout de la nuit est dédié ?
Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Le livre fut publié par Robert
Laffont en 1994, centenaire de la naissance de Céline : un “coup”
éditorial, donc. Il se range dans une collection qui s'appelle
(s'appelait ?) comiquement Biographies sans masque. Ce qui semble sortir du même tonneau pléonasmique que la vérité sans mentir ou encore un ciel pur sans nuage.
À moins que M. Laffont n'ait considéré qu'avant son intervention toutes
les biographies n'avaient pour but que de conserver leurs différents
masques aux personnages qui en étaient les sujets.
Bref,
je le répète : la peste soit des Céliniens et de leurs gloses, que
Belzébuth se saisisse à jamais des Brami et des Alméras !
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