C'est très bien, Wodehouse, et fort drôles sont les mésaventures mettant aux prises ce jeune crétin de Bertie Wooster et son génial butler, l'illustre Jeeves, vraiment très bien. Mais l'humour à ce point anglais et à ce point toujours égal à lui-même, voilà qui finit par lasser un peu. Et quand on veut se déshumoriser, le plus simple, le mieux et le plus radical est encore de se tourner vers l'Allemagne, pays qui, comme on le sait, est peuplé d'Allemands, dont certains écrivent de gros livres implacablement sérieux.
C'est pourquoi je n'ai pas hésité, hier entre déjeuner et dîner, à tirer de leur rayonnage germanique Les Buddenbrook, premier roman de Thomas Mann, écrivain assuré de ses moyens et talent et qui n'a pas peur de se montrer un peu ennuyeux lorsque cela lui paraît nécessaire. Mais, personnellement, l'ennui ne m'ennuie pas, ce n'est donc pas lui qui me fera reculer. De toute façon, elle reste passionnante et dense, cette histoire d'une opulente famille d'une ville de la Hanse – Lübeck apparemment, mais je n'en jurerais pas – confrontée, sur trois ou quatre générations, à une inexorable décadence.
Quoi qu'il en soit, c'est sans importance : si je suis venu raconter cela qui ne présente pas le moindre intérêt, c'est surtout pour faire plaisir à M. Fredi Maque, dont la vue et la délicatesse étaient offensées par la photographie des quatre répugnants pitres en phase civilisationnelle terminale qui, depuis trois longs jours, s'étalait en ouverture de ce blog, pourtant si digne d'habitude.
Il faut bien reconnaître que, de ce point de vue, Herr Mann correspond davantage à l'idée que les impénitents traditionalistes persistent à se faire de l'homme. Ce qui, au vu de son nom, est bien la moindre des choses.
Ayant visité les lieux et lu le roman, je pense que c'est bien Lübeck et que les vacances se déroulent à Travemünde, station balnéaire assez sympathique.
RépondreSupprimerà ma grande surprise, Thomas Mann emploie l'expression "tip top" que je croyais beaucoup plus récente et pas du tout allemande. J'ai lu le livre avec le dictionnaire ouvert sur mon téléphone en permanence, c'est très riche comme langue !
Travemünde est bel et bien cité dans le roman, en effet.
SupprimerPour ce qui est de la langue, on perd beaucoup à la traduction, de l'aveu même… du traducteur.
Petit bras !
RépondreSupprimerÀ la place, vous pouvez toujours lire (ou relire) Wodehouse.
RépondreSupprimerLe 11 novembre où finalement on se décide - après quarante ans de réflexion - à inhumer Maurice Genevoix au Panthéon, vous, vous faites l'éloge des livres de l'ennemi ? Bravo !
RépondreSupprimerJe trouve scandaleux que la France du vivre-ensemble honore un vieux mâle blanc même pas pédé ! D'autant que tout le monde sait bien que ce sont les tirailleurs sénégalais et les goumiers marocains qui ont, à eux seuls, gagné la guerre de 14.
Supprimer"même pas pédé": ne le calomniez pas, vous n'en savez rien !De son temps, l'outing n'était pas à la mode. D'ailleurs, je soupçonne beaucoup d'hétérosexuels purs et durs de faire de faux outings,juste pour se rendre populaires.
SupprimerPour votre pénitence vous me direz trois Pater, deux Ave, et vous regarderez ce film réalisé par Caroline Puig-Grenetier :
Supprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=RfB3KT2oYcA
Élie Arié : La même idée m'est venue (à propos des fausses sorties de placard) ! De même, acceptant très momentanément les âneries de la psychanalyse, je me demande s'il n'existe pas des homosexuels hautement revendiqués qui seraient en fait des hétéros refoulés…
SupprimerMildred : bien que refusant en général, par principes, de regarder les films de bonnes femmes, je vais peut-être faire une exception pour celui-là.
Ayant visité les lieux et lu le roman, je pense que c'est bien Lübeck et que les vacances se déroulent à Travemünde, station balnéaire assez sympathique.
RépondreSupprimerà ma grande surprise, Thomas Mann emploie l'expression "tip top" que je croyais beaucoup plus récente et pas du tout allemande. J'ai lu le livre avec le dictionnaire ouvert sur mon téléphone en permanence, c'est très riche comme langue !
@ Fredi Mann : Vous avez lu "La Montagne Magique" ?
RépondreSupprimer@ Didier Goux : Tiens,vous ne nous avez jamais dit ce que vous avez pensé de Somerset Maugham, dont vous nous aviez annoncé la lecture ... Moi, j'aimais bien, mais j'avais dans les 11-12 ans.
RépondreSupprimerFredi Maque : si d'aventure il passe par ici, Jacques Etienne vous dira mieux que moi tout le bien qu'il faut penser des romans de Wodehouse.
RépondreSupprimerElie Arié : Je les trouve très agréables, ces nouvelles, et pas toujours dénuées d'une certaine profondeur. En tout cas, elle me paraissent totalement inadaptées à un enfant d'onze ans, fût-il aussi brillant et précoce que vous.
Vous devriez, c'est un superbe roman que LA Montagne magique ! On s'y emmerde bien un peu, de temps en temps, mais quoi de plus normal que de s'emmerder, quand on est confiné dans un sanatorium ?
RépondreSupprimerMerci d'avoir répondu à la vox populi en ajoutant rapidement un billet et une photo de Thomas Mann au dessus de la photo des 4 gugusses précédent. Des esprits chagrins pourraient vous dire que Thomas était lui aussi attiré par les hommes, mais je doute qu'il ait trouvé quelques attraits que ce soit à vos quatre énergumènes. Lisons le dans ses mémoires parler de ses émois en mars 1919 : « [J’ai revu] le jeune élégant qui ressemble à Hermès et qui m’avait fait si forte impression il y a quelques semaines (…) Son visage, allié à sa légère silhouette de jeune homme, a par sa joliesse et sa folie quelque chose de divin. » Un peu plus élégant non?
RépondreSupprimerUn peu plus, en effet…
SupprimerLe superbe film Mort à Venise, de Visconti, est tiré de la nouvelle éponyme de Thomas Mann; je crois qu'aucun doute n'est permis
SupprimerCe n'est pas parce qu'un romancier met en scène un homme ayant des pulsions homosexuelles qu'il l'est forcément lui-même.
SupprimerD'autre part, j'ai toujours trouvé le film de Visconti particulièrement emmerdant, voire ridicule par endroits (vers la fin, Dirk Bogarde maquillé comme une vieille tante de Gay pride…).
Oui, et qui meurt du choléra sur sa chaise-longue du Lido avec la teinture de ses cheveux qui lui coule sur la figure, sur fond de 5ème symphonie de Mahler : très réussi, à mon avis.
SupprimerNon seulement Thomas Mann était homosexuel (secret et torturé, comme l'époque le voulait, et on voit mal en quoi rappeler ce fait relèverait d'un "esprit chagrin") mais il était aussi un fin humoriste, comme en témoigne abondamment son chef-d'œuvre "Joseph et ses frères".
RépondreSupprimerIl me semble tout de même un peu réducteur, voire abusif, de dire d'un homme qu'il EST homosexuel, lorsque ce même homme a été marié un demi-siècle et a fait six enfants à sa femme. Ou alors, quel don fantastique pour la duplicité !
SupprimerOn peut mettre des émojis sur votre compte? Genre "visage qui roule par terre en rigolant"? Mais restons-en plutôt à Thomas Mann humoriste méconnu. Certes pas dans Le Docteur Faustus et quelques autres œuvres, mais ailleurs il peut devenir le roi du pince-sans-rire.
SupprimerCe côté pince-sans-rire est déjà perceptible, par endroits, dans Les Buddenbrook.
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