Dans ce qu'on pourrait appeler des Chroniques des temps asilaires, je consigne
ceci, que Catherine a lu chez Ternette : en Allemagne, les boîtes de
nuit vont pouvoir rouvrir… mais il sera formellement interdit d'y
danser. Dans un semblable esprit, on pourrait laisser rouvrir les bistrots
mais y prohiber toute boisson, rouvrir les églises mais gare à celui qui y
serait surpris en train de prier, rétablir les maisons closes mais avec
une stricte observance des distances de sécurité, etc.
Dans
le même genre, Catherine est passée tout à l'heure chez
l'horloger-bijoutier de Pacy afin qu'il installe une pile neuve dans le
boitier de ma montre. Eh bien, il faudra y retourner demain pour
récupérer la montre en question. Pourquoi ce délai absurde ? « Désolé,
Madame : c'est le protocole… » Il y a donc, quelque part, dans un
ministère inutile, un dérisoire crétin qui a jugé nécessaire que les
montres passent désormais vingt-quatre heures dans le tiroir du
réparateur avant que d'être rendues à leurs propriétaires. Sinon, gare à
la recrudescence du petit Chinois !
Et la restitution,
elle va s'opérer comment, demain ? L'horloger va me tendre ma montre au
bout d'une longue pince métallique, préalablement passée à l'étuvée ? Il
va la déposer sur le pas de sa porte et se barricader derrière son
rideau de fer avant que j'aie le droit de m'approcher de sa boutique ?
Et après quel délai, dûment prévu et homologué en haut lieu, aurai-je latitude de
passer la montre à mon poignet sans provoquer l'ire de la maréchaussée
aux aguets ?
Dieu sait que je ne suis nullement ennemi
d'une existence délicatement saupoudrée d'inattendu, de cocasse, de
saugrenu et même de complet absurde. Mais tout est dans le “saupoudrée” :
si l'absurde devient la règle, et une règle dont on se sert pour me
taper sur les doigts du matin au soir ; si la cocasserie est reçue et
acceptée avec un sérieux confinant à la dévotion ; si l'inattendu se mue en prévisible et que le saugrenu se fait obligatoire, il va advenir un moment, pas très
éloigné d'ici, où les survivants au petit Chinois vont commencer, du
fond de leurs douillettes cellules capitonnées, à regretter amèrement
leur immunité et à envier leurs chers et si paisibles morts.
Il fait ça parce qu'on le contraint à faire ça ! Qui est "on" ? Je l'ai dit : un obscur crétin dans un ministère quelconque.
RépondreSupprimerPour les fonctionnaires amateurs et pondeurs de décrets ubuesques, la période que l'on traverse est un peu l'équivalent de Noël pour les enfants gourmands.
Je crois qu'il s'agit d'une illustration de notre esprit cartésiano-administratif, pour lequel tous les cas de figure doivent avoir été prévus... si bien que personne ne peut les connaître tous.
RépondreSupprimerJe crois que, là, on penche plus vers Kafka que vers Descatres. Voire carrément vers le Père Ubu.
SupprimerN'allez pas à Pacy que pour chercher votre montre, pour participeriez pour pas grand chose au réchauffement climatique.
RépondreSupprimerOK, OK : je prendrai du pain en plus…
SupprimerVous venez de relater en ce court billet exactement ce que je ressens en cette période qui devient de plus en plus absurde.
RépondreSupprimerTous les ministères semblent en effet en pleine ébullition pour rédiger des protocoles horlogers, réglementer les jeux autorisés et interdits dans les cours de recreation, écrire de nouveaux cerfas à tamponner, définir les avions qui peuvent voler ou pas, choisir les plages ou nous pouvons nous promener (sous surveillance gendarmesque quand même) et tout cela en teletravail. Cette productivité délirante frise l'orgie.
Oui ! soudain, l'obscur employé de bureau peut se donner des allures d'autocrate. Il aurait bien tort de ne pas profiter de ce délicieux moment.
SupprimerJe crains qu'il ne s'agisse d'un retour de bâton: nous sommes le seul pays où tous les ministres sont l'objet de plaintes en Justice ( logique, quand on attend tout de l' État... ), aussi tout le monde cherche à se couvrir :" Je l'avais prévu, c'est vous qui n'avez pas respecté le réglement !".
SupprimerOui, il doit y avoir de ça, en effet.
SupprimerJe m'attends toujours quand je fais la queue pour un achat à entendre la chanson de Brel :" au suivant".
RépondreSupprimerhttps://youtu.be/-UzdCWHwzgk
Là, ce serait vraiment la double peine !
SupprimerLes églises sont rouvertes depuis cette nuit. Je suis curieux de voir le 'protocole' un prie dieu enlever sur deux ? De la javel dans le bénitier ? Hum tout barre en sucettes. 32° en mai et a chaque jour sa nouveauté administrative étatique.
RépondreSupprimerMettez donc votre téléphone dans le coffre de votre voiture.
Si vous l'attrapez par réflexe vous voilà a vous déplacer en vélo. Ou à cheval par chez vous ;.)
Par chance, je n'ai pas de téléphone – pas de portatif, veux-je dire.
SupprimerEt pas de vélo non plus, du reste.
Vous en aurez forcément bientôt : Orange n'entretient plus les câbles des téléphones fixes: ce sera le tél portable et la fibre téle pour tout le monde, et la disparition progressive de l' ADSL et des cabines téléphoniques ( sauf pour s'abriter de la pluie)
SupprimerJe me passerai très bien du téléphone.
SupprimerOrange n'entretient plus les câbles des téléphones fixes
SupprimerOui, ça fait déjà plusieurs années que la suppression du "cuivre" a été annoncée, la plupart des téléphones fixes passent par la fibre sous VOIP moyennant une "box" quelconque.