mardi 10 octobre 2023

Mange ce que veux !

 

À Marco P.

J'aimerais “rebondir” sur mon dernier billet ; ou, si l'on préfère, le prolonger. J'y disais que, dans le domaine du goût, ou de la gastronomie, pour parler plus pompeusement, j'étais d'un libéralisme sans frein, confinant à un laxisme qui pourra sembler scandaleux à certains ; à tout le moins irrecevable. C'est tout à fait exact.

J'estime que, dans ce domaine, le haut commandement appartient aux papilles gustatives de chacun, et que rien ni personne ne devrait songer à contraindre leur autorité. Si un quidam apprécie davantage son foie gras lorsqu'il l'arrose d'une canette de coca plutôt que d'un flacon de sauternes, parfait, grand bien lui fasse ce mariage : ce n'est pas moi qui irai jouer les puristes et lui faire la leçon.

En commentaire du billet sus-évoqué, je me suis amicalement moqué de Marco Polo, qui s'était croisé en faveur de la cuisine allemande : pure gaminerie de ma part puisque, en réalité, je lui accorde parfaitement le droit, comme à n'importe qui d'autre, d'accéder à l'orgasme gustatif selon le vecteur culinaire qui lui convient. L'important, entre deux individus normalement civilisés, est que les désaccords de leurs respectives papilles ne les empêchent pas de prendre langue.

Je n'ai pas toujours été d'une aussi exemplaire “sagesse”. Je me souviens par exemple de notre dîner de noces – noces civiles pour l'heure –, pris en 1994 à l'Auberge des Templiers (photo), sise à Boismorand dans le Loiret. Agapes en comité restreint : en dehors des jeunes époux, n'y participaient qu'Élodie, fille et témoin de la mariée, Kent, témoin de votre serviteur, et sa femme.

À la table immédiatement voisine de la nôtre, dînaient en tête à tête Alain Delon et sa compagne de l'époque, superbe grande femme brune d'origine batave ; et prénommée Rosalie comme la baïonnette, si ma mémoire ne me trompe pas. J'avais été vaguement scandalisé de la voir accompagner son très-excellent repas de cette boisson qui a, ou avait, pour nom Gini, un genre de soda à peine ingérable seul, à mon goût. Rosalie et ses pratiques de table me laisseraient aujourd'hui parfaitement zen.

Mais enfin, tout de même, du Gini

14 commentaires:

  1. Vous avez bien sûr parfaitement raison : comme l'a bien montré le prussien Emmanuel Kant, il ne saurait y avoir de jugement universel concernant ce qui est "agréable" (contrairement, pensait-il, à ce qui concerne le "beau"). Les goûts culinaires sont donc toujours irréprochables sur un plan strictement rationnel. Cependant, comme vous le notez finement, l'usage du Gini choque un peu, quand même. C'est probablement culturel. Même si tous les goûts sont rationnellement acceptables, il reste que, moralement, boire du Gini en accompagnement d'un mets délicat, relève de la pure barbarie.
    Merci pour la "spéciale dédicace".

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    1. C'est bien agréable de savoir qu'on a les philosophes de son côté : ça évite de rester sur son Kant-à-soi.

      (Oui, je sais, je sais…)

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  2. Mon libéralisme gastronomique a plus de limite que le vôtre, sans doute à cause de mon fond communiste. Par exemple, j'ai toujours eu envie d'étrangler les imbéciles qui ajoutent du sel avant d'avoir goûté au plat. Quant à ceux qui ajoutent des sauces "toutes faites" à des plats qui n'en méritent pas, comme de la moutarde avec du cassoulet, ils n'ont que mon mépris sauf s'ils paient la boisson.

    J'ai bu beaucoup de Gini dans ma jeunesse : peut-être étais-je victime de la publicité faite par Gainsbourg ? Mais j'ai totalement oublié le goût. Mais jamais en mangeant... Je croyais que Delon était une espèce d'idole des réactionnaires...

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    1. Il y a déjà un petit moment que Delon n'est plus une idole pour qui que ce soit (le "privilège" du grand âge…). Et puis, ce n'est pas lui qui buvait du Gini mais Rosalie.

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  3. Ravi d'apprendre que vous avez au moins des orgasmes gustatifs...

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  4. Oui tout à fait d'accord avec vous. J'ai consacré de nombreux billets à raconter tout ça...

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    1. À qui parlez-vous exactement ? Avec qui êtes-vous d'accord ?

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    2. Je répondais à un commentaire, supprimé depuis, qui notait le rôle madeleine de Proust de ce qu'on mange...

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    3. Ah oui, c'était mon vieux troll gâteux qui tentait de se faire passer pour vous...

      DG

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  5. J'ai passé quelques jours à cette auberge des templiers à Boismorand en août dernier. Magnifique adresse, excellence du service, on est vraiment coupé du monde extérieur, belle carte des vins. Très France très bourgeoise, bien élevée...Mais cela ne répond pas à la question, qui est Kent? qui est son épouse??

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.