C'est fini, je ne peux plus. J'ai fait des efforts, pourtant ; ç'a duré plusieurs années : je m'armais de patience et de mansuétude, me disant que cela leur passerait et que, après tout, mes frères humains n'avaient jamais été parfaits, ni moi. Mais je ne peux plus.
Les z'élites et leurs zélotes peuvent être qui ils veulent, porter les noms les plus prestigieux du moment, j'ai pris, il y a à peine plus d'une minute, cette décision de rupture radicale, alors que, sur Causeur, j'avais commencé à lire un article de Jacques Sapir consacré à je ne sais déjà plus quoi (et m'en félicite) : à la troisième ou quatrième ligne est arrivé ce semblant de verbe : acter. Bien sûr, je l'ai déjà vu passer trente fois, ou cent trente, ou mil e tre ; mais, soudain, je n'ai plus pu ; et j'ai pris le large. Je n'en veux pas spécialement à M. Sapir qui, après tout, n'est qu'un économiste, c'est-à-dire l'équivalent moderne d'un alchimiste médiéval ou d'un haruspice antique : c'est tombé sur lui, c'est tout. La décision s'est formée en une fraction de seconde : à partir de tout à l'heure, je cesserai immédiatement de lire tout article faisant grincer ces sortes de crécelles à lépreux : acter, éponyme (quand il est mal employé, c'est à dire presque constamment), initier, etc.
Je vais me priver de pensées profondes ou au moins de vues intéressantes, dites-vous ? Non, je suis persuadé du contraire : je crois que toute personne me disant qu'une décision a été actée est une personne qui, littéralement, ne sait pas ce qu'elle dit, qui ne s'entend pas parler ; de même celle qui pense avoir initié un projet, ou sa voisine qui croit que Madame Bovary est le roman éponyme d'Emma. Ils barbotent et clabotent : ils ne parlent pas.
Je fais sécession ; parce qu'on m'a appris que le viol était une chose horrible, et que ces gens violent ma langue (et la leur : c'est un viol aggravé d'inceste) dès qu'ils ouvrent la bouche. Si j'avais les moyens de leur y enfoncer un tisonnier rougi à chaque fois qu'ils émettent l'une de leurs monstruosités insoupçonnées et satisfaites, franchement je le ferais avec plaisir. Mais ce serait tout à fait inutile : autant s'éloigner.
Une seule solution : relire Wittgenstein.
RépondreSupprimer(En allemand dans le texte).
Vous êtes sûr qu'il n'y a rien d'autre ? Cherchez bien : vous m'obligeriez…
SupprimerJe crois que vous n'avez pas tort.
RépondreSupprimerC'est en effet le rôle des véritables écrivains, romanciers et essayistes (et non des scientifiques ou chercheurs qui publient sur des thèmes d'intérêt général) que de veiller à l'intégrité et à la sauvegarde de la langue qu'ils utilisent. C'est même leur première responsabilité.
A cet égard vous devriez par exemple vous pencher sur les dangers que font courir à la langue française les néologismes débiles issus de l'Education Nationale avec l'aval de la ministre Najat Vallaud-Belkacem...
Non, désolé, c'est au-dessus de mes forces.
SupprimerPour "éponyme" et "initier", ça va de soi, mais pour "acter", je ne comprends pas..."acter = prendre acte de" : pourquoi ne pourrait-on pas acter une décision ?
RépondreSupprimerOn ne peut pas simplement parce que ce verbe n'existe pas.
Supprimer"Candidater", cette horreur beaucoup trop lue et entendue, n'existe pas non plus
SupprimerÀ la place, il faut dire : acter une candidature…
Supprimer@ Didier Goux
SupprimerMais si, "acter" est dans le dictionnaire :
http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=1905183285;
Oui, avec une signification réduite et précise (voir les autres commentaires plus bas).
SupprimerD'autre part, votre lien semble ne pas vouloir fonctionner.
@Arié: Le compte(nu) est bon, mais il y avait plus simple...
Supprimerhttp://www.cnrtl.fr/definition/acter
Amike
Devinette : il y a une faute dans l'article.
RépondreSupprimerCorrigée !
SupprimerCe genre de décision, ça m'en impacte une sans impulser l'autre.
RépondreSupprimerUrsule
Pas mal !
SupprimerSauf que vous n'en avez pas...
SupprimerQue Larousse aille se faire initier chez les Grecs !
RépondreSupprimerTant que votre sécession ne finit par en guerre civile ou en bataille Hernani.
RépondreSupprimerJe suis trop vieux.
SupprimerLes généraux qui ont combattu lors de la guère Sécession n' étaient pas des perdreaux de l'année, non plus.
SupprimerVous l'avez bien taclé, ce Sapir !
RépondreSupprimerPourtant, c'est loin d'être l'une de mes bêtes noires ! Mais, hier soir, j'étais un tantinet irrité…
SupprimerIl ne faut pas omettre (juste un doigt) la beauté, la sonorité des mots, c'est encore là l'essentiel.
RépondreSupprimerBref, que pensez vous du "bien évidemment" qui entache tous les verbiages des journalistes sportifs surtout, mais atteint jusqu'aux discours de certains politiques prétentieux dans le verbe, comme Villepin l'a été ?
Alors, là, si on se met à dresser le catalogue de toutes les taches et absurdités que l'on entend, on y sera encore le mois prochain !
SupprimerJe ne sais pas si Le Littré - Le dictionnaire de référence de la langue française - saura remettre un peu de sérénité dans vos échanges avec vos honorables correspondants, voici ce que j'y lis :
RépondreSupprimerACTER : (a-kté), v.tr. Prendre acte, en parlant de procédure, de protocole. "M. le baron Jomini propose de ne consigner dans les protocoles que les points sur lesquels la conférence sera d'accord et de ne pas acter les divergences", Confr. de Bruxelles, 1874, Protocole n°1, dans Journ. offic. 30 octobre 1874, p. 7275, 1ère col. "M. le général de Voigts-Rhetz demande qu'il soit acté au protocole que le bombardement étant un des moyens les plus efficaces...", Confer. de Bruxelles, 1874, Protocole n°1, dans Journ. offic. 1er nov. 1874, p. 7310, 3e col.
Si j'ai bien compris, Didier est confirmé dans son droit de ne consigner ici que les points sur lesquels il est en accord, quitte à utiliser le bombardement contre ceux qui ne seraient pas contents.
Bien joué, Madame Mildred ! Vous avez les cartes en mains...
SupprimerC'est cela : le verbe a un sens précis, technique, et il est idiot de le mettre à des sauces pour lesquelles il n'est pas fait.
SupprimerSur ce, je vous laisse : il faut que j'aille acter une mayonnaise.
Qu'est-ce que vous pouvez être snob, Didier ! On se croirait chez les Précieuses ridicules. On viole votre langue, rien que ça ; on ne vous prend pas en otage aussi, comme ils disent à la télé ?
RépondreSupprimeril s'agit d'un viol par les oreilles
Supprimeret ça fait mal
autant qu'un viol anal ( et carcéral)
Le site CNRTL donne une interprétation plus proche de la solennité historique voulue par Sapir pour "la fin du projet fédéraliste".
RépondreSupprimerÉtymol. ET HIST. − 1. xiiies. « dater convenablement les actes »
Vous imaginez une pierre tombale sans dates ?
Amike
Mais oui : celle de Chateaubriand, par exemple.
SupprimerAu restaurant, quand on trouve une limace dans la salade, on a le droit de ne pas être content. Mais quand quelqu'un dont le métier est avant tout de parler français écorche ma langue, je n'ai pas le droit de me plaindre. D'ailleurs, je ne me plains plus après avoir entendu, il y a quelques années, l'émission du médiateur sur la radio d'état. Aux auditeurs qui écrivaient pour demander qu'on parle un français correct à la radio, il fut répondu que ceux qui se plaignaient étaient des "personnes d'un certain âge" et que donc ... Ma seule satisfaction est de tourner le bouton. Un dernier petit plaisir avant la fin.
RépondreSupprimerC'est ça : nous sommes des pisse-vinaigre. (Ce qui, d'ailleurs, pourrait être de quelque utilité pour votre salade.)
SupprimerDéclaration d'un certain Jean-Christophe Cambadélis, dont on m'assure qu'il est quelque chose : « C'est une question à laquelle j'ai réfléchi depuis un moment. » Pur sabir.
RépondreSupprimerOui, il viendrait de publier un ouvrage nous dit-on.
SupprimerBizarre cette expression, vous faites bien de la relever. Nul doute qu'elle va en turlupiner quelques uns pendant le week-end...
On reviendra leur pourrir l'existence, sous forme de zombis.
RépondreSupprimerIl y a pire que le sabir de Sapir. Ici , un inventaire. L’auteur propose comme équivalent français à acter : entériner.
RépondreSupprimerQui signifie mettre en terrine.
SupprimerQue le Larousse aille apprendre le grec, soit... mais ce verbe est également présent dans le CNRTL (googlez cnrtl acter) avec comme référence des écrits datant des années 1800...
RépondreSupprimerSans dite écrit-il avec empressement: on peut reprocher parfois au Sapir de trottiner.
RépondreSupprimerSans dOUte...
SupprimerAutres propos ineptes d'un patriote républicain qui peut se révéler très vite insupportable :
RépondreSupprimer« Je le répète depuis longtemps : le nationalisme est une force de progrès très puissante – il assura même le succès de la révolution russe. »
Jacques Sapir. In L'Action Française n° 2934 – Du 16 juin au 6 juillet 2016. p. 9.
J'avoue ne pas comprendre ce tintamarre à propos "d'acter".
SupprimerAlors que Macron s'échine à démolir un splendide conservatoire qui s'appelle "le notariat"...
Il est des termes qui méritent l'oubli et dont l'emploi irréfléchi et répétitif qu'en font certains de nos contemporains suscite le rejet.
SupprimerMais plutôt que de les réduire en compote il me semble préférable de se moquer de ces rats aux goûts douteux.
Et pour faire bonne mesure, à mon tour d'exhumer cette expression oubliée que je me garderai bien d'utiliser :
« Acter de sa diligence. On dit proverbialement et figurément "acte de sa diligence", pour dire qu'on ne s'est point fait attendre » (Académie, 1694)
Modernisons tout cela en remplaçant votre expression désuète par : acter de sa voiture…
SupprimerQu'acter existe est une chose. Mais, jusqu'à présent, il avait une signification précise et circonscrite (voir d'autres commentaires, plus bas ou plus haut…), il signifiait : faire figurer dans les actes (d'un colloque par exemple).
RépondreSupprimerC'est l'honneur des "puristes" de nous faire partager le goût du mot juste et de ferrailler contre la dégradation de notre langue.
RépondreSupprimerAinsi Orwell écrivait en son temps :
« L'évidente dégradation de notre langue n'est donc probablement pas un processus auquel on puisse délibérément s'opposer. J'aimerais toutefois que cela soit tenté. Et pour commencer, j'aimerais bien qu'une petite douzaine de journalistes fassent campagne contre certains usages manifestement incorrects – comme, par exemple, l'affreux verbe "to contact" (contacter), ou cette manie américaine de faire suivre tous les verbes d'une préposition superflue – afin qu'on puisse voir si leurs efforts concertés parviennent à les proscrire. »
Tribune, 26 janvier 1945.
Rien à voir, mais juste pour vous remonter un peu le moral :
RépondreSupprimerhttp://www.lemonde.fr/idees/article/2016/07/08/vivre-avec-l-immigration_4966182_3232.html?xtmc=immigration&xtcr=5
Vous voilà en marche cadencée vers l'in-nocence et ses plus fidèles gardiens de l'orthodoxie... Ceci étant, l'idée que puisse naître de votre décision un dictionnaire du bon usage brocardant les chemins de traverse pris par notre langue est réjouissante et revigorante. Je serai tenté de dire : " c'est que du bonheur " !!!
RépondreSupprimerBravo Didier , vous avez fait le plus difficile mais attention car le plus dur vous attend.
RépondreSupprimer@ Sebastien Tellibag
SupprimerBonjour, Monsieur 74, Corto de son prénom.
Je pense que vous vous trompez.
SupprimerCe n'est qu'une hypothèse, mais :
SupprimerCorto74 :
http://corto74.blogspot.fr/2016/07/champion-du-monde.html
Sebastien Tellibag: commentaire (le 2ème en partant du haut) sur:
http://www.rochedy.fr/2015/03/cher-christophe-conte-marion-ne-veut-pas-non-plus-que-tu-l-embrasses.html
Mais non, pas de fiches ! Mais je lis les 2 blogs ( Didier et Corto), et je tombe sur la même phrase le même jour; alors, j'ai fait une recherche google sur "Sebastien Tellibag" et Corto fait souvent référence à son orientation sexuelle.
Supprimer"On a fait le plus difficile, mais le plus dur reste à venir", est une phrase géniale comme ce qui nous sert de Président, en lâche quelquefois. C'est la seule explication que je vois au fait qu'elle puisse être citée ici, là et même ailleurs !
SupprimerAlors l'élite, cou-couche panier !
Virée ! J'ai décidé de faire une cure drastique : plus de blog du tout. Cure provisoire ou définitive ? On verra bien…
RépondreSupprimerPour mon plus vieux dictionnaire, 1842, acter signifie " faire des actes "... On va acter cela...
RépondreSupprimer"au final" c'est un beau billet (bon, je sors...)
RépondreSupprimerJ'en veux beaucoup moins à ceux qui commettent des fautes de français , à l'écrit ou à l'oral, qu'à ceux qui utilisent exprès ce langage sale. Acter, finaliser, toute la cohorte de ces mots imbéciles, on est dans la tendance lourde qui fait sens comme dirait... je ne sais plus qui.
RépondreSupprimerMoi aussi j'abandonne aussitôt l'écoute ou la lecture de ceux qui m'infligent cela, mais je n'ai rien décidé, c'est venu tout seul, j'en suis presque triste, mais c'est comme la musique de variété type "soupe NRJ" dans les magasins, s'il y en a, je sors.
Je n'en suis pas plus fière pour autant.
Heureux les indifférents !
Un viol en ouvrant la bouche ?
RépondreSupprimerVous devez confondre...
Duga
Bouche cousue
Bon, c'est vrai, j'ai hésité avant de rédiger ce commentaire. Je ne peux m'en prendre qu'à mes mauvais goûts pour les loisirs, je regarde la télé. Une vieille Grunfig.
RépondreSupprimerUne émission de faiseurs de desserts, détient un joli record en invention de mot.
J'avoue avoir tiqué chaque fois que je l'entendais.
Ce mot degueu, est un verbatis de " patisserie". Au début de l'épreuve, la présentatrice chantait ses plus beaux encouragements; à vos marques, prêts ? Pâtissez. Merde, je crois que le mot existe, mon correcteur le connaît.
J'ai du me tromper, je vais vérifier,
Sage décision.
RépondreSupprimerEncore plus déplaisant qu'acter : "le monde dans lequel nous vivons". Je viens de le lire sur le blog de F-X Bellamy. Pour la série d'été du Figaro, sur les vertus. Dès la 6ème ligne.
RépondreSupprimerhttp://www.fxbellamy.fr/blog/2016/07/11/la-prudence-trouver-la-force-au-coeur-de-nos-limites/