Je ne sais pas si, par chez nous, on lit beaucoup l'Espagnol Ramón Gómez de la Serna ; moi, en tout cas, je le fais depuis hier. Deux livres en “panachage” : un roman d'abord, La Femme d'ambre, et ensuite les greguerías. Qu'est-ce qu'une greguería ? Si l'on en croit Valery Larbaud, qui possédait de nombreux dictionnaires, le mot signifie tout à la fois cri confus, clameur indiscernable, brouhaha, criaillerie, ramage, jacasserie, mais sans qu'aucun de ces mots français ne rende pleinement les nuances de l'original castillan. C'est pourquoi l'éditeur (Cent Pages), sagement, a choisi de conserver celui-ci en titre. Mais de quoi s'agit-il ? D'une phrase, ou plutôt d'une affirmation, parfois saugrenue mais pas toujours. Rendons la parole à Valery Larbaud : « La greguería est spontanée, inarticulée, irrépressible, plus physiologique peut-être qu'intellectuelle, ineffablement intime. » Nous voilà bien avancés… Mais alors, comment doit-on se comporter lorsqu'on tombe sur l'une d'elles ? Larbaud : « L'important, la seule chose nécessaire, c'est de savoir l'accueillir, c'est de ne pas la refouler, de ne pas la mépriser, de l'exprimer aussi complètement, d'aussi près que possible, avec tout ce qu'elle contient d'expérience, de prescience, de rappels, d'échos, de prolongements, de vie fragile et passagère. » Bien, bien… Présente-t-elle des dangers, des étocs cachés vicieusement sous la surface ? Larbaud : « Bien des lecteurs dont l'éducation littéraire est achevée considèrent avec stupeur les greguerías. Ils ne comprennent pas de “quelle façon elles sont une surprise”. Ils y cherchent d'instinct une “maxime”, une “pensée”, une épigramme. Ils s'attendent à y trouver de “l'esprit”, un bon mot, une réflexion morale ayant un caractère universel et permanent. Ils cherchent la “pointe”. Et comme ils ne trouvent rien de tout cela, la greguería leur paraît un défi au bon sens, une naïve platitude, le comble du trivial, la chose, entre toutes, qui ne valait pas la peine d'être écrite. »
C'est pour toutes ces raisons, qui n'en sont pas, que j'ai unanimement décidé tout seul de mettre fin aux davilanas du dimanche pour, dès après-demain, vous proposer à la place des greguerías. Elles seront elles aussi livrées en bottes de douze, et leur choix dépendra uniquement de mon bon plaisir du moment. Pour vous mettre en appétit – ou vous le couper radicalement –, en voici une première :
L'épine dorsale est une canne que nous avalons à la naissance.
Qu'y a-t-il de commun entre Johnny et vous ? Vous changez tous deux de "compositeur" quand il faut relancer l'intérêt du public.
RépondreSupprimerQuant à l'épine dorsale, précisons qu'elle n'a rien à voir avec la canne de Jeanne.
Qui elle-même n'a aucun point commun avec la cane de Jeanne.
SupprimerLes greguerias, ça sonne très chic et ça nous changera un peu de ces pompeuses davilanas qui se voulaient universelles.
RépondreSupprimerVous avez mon aval cher Didier, je me réjouis d'ores et déjà de tester ce nouveau petit jeu intellectuelo-littéraire !
Mais c'est plus chic encore avec l'accent tonique sur le i…
SupprimerCette première greguería évoque beaucoup ce qu’écrit Éric Chevillard.
RépondreSupprimerTiens, oui, vous avez raison. Chevillard, copieur !
SupprimerEt pour faire dans la "gregueria" et illustrer ce qui arrive à Davila", je propose le célèbre - parce que spontané, inarticulé, irrépressible, etc - : un clou chasse l'autre !Expression sans doute saugrenue, mais pas toujours.
RépondreSupprimerle quorum ayant été réuni, "j'ai unanimement décidé tout seul ", de renvoyer ce davila sans son, afin qu'il puisse se refaire une voix.
RépondreSupprimerLa séance est levée.
Hélène dici
Dans son quoi ?
SupprimerBon d'accord, c'est tombé à plat ^^
SupprimerSamson et Dalila .... ok je sors.
Hélène dici
Trop subtil pour moi, il faut croire !
SupprimerBen oui quoi! Dalida et Veronique Sanson.
SupprimerFaut vous tenir au courant de la culture populaire...
"Davila sans son" :
SupprimerSans son : Samson et
Davila : Dalila.
Cette gregueria(?) paraît frappée au coin du bon sens.
RépondreSupprimerJe veux dire pour ceux qui l'ont correctement avalée,pas ceusses qui l'auraient avalée en deux morceaux ou par les voies naturelles inférieures,ce qui peut laisser contrefait.
Vendémiaire.
Cette première "greguería" pourrait être commise par Davila, si elle était plus précieuse dans sa rédaction.
RépondreSupprimerJe ne lui trouve pas beaucoup de saveur en ce qu'elle ne donne pas à penser, ni à sourire, ni à pleurer. L'image est facile, la comparaison triviale. Il aurait fallu plus de vigueur dans l'expression et de courage dans la formulation.
Ça tirerait presque un peu sur le surréalisme, et je n'ai pas beaucoup de sympathie pour ces faiseurs mondains, croque-morts de l'art occidental.
Ça sent l'huile.
Bien d'accord. Espérons que les prochaines greguerías seront d'un meilleur cru, sinon notre ami Didier risque de nous faire regretter les davilanas dominicales, que j'attendais toujours avec impatience.
SupprimerCherchez pas midi à quatorze heures...une canne,une glotte et le dos bien droit,c'est pourtant pas difficile...
SupprimerVendémiaire.
Un canard dit à sa cane: “ris cane, ris cane…”
RépondreSupprimerUn canard dit à sa cane: “ris cane… et la cane a ri !
Je trouve cela bien meilleur malgré l’absence du “n” doublé...