La conversation, sous mon billet d'hier matin, a quelque peu dévié, en partie du fait de Dorham (Dorham est un formidable dévieur de conversation, ce qui n'est pas sa moindre qualité : il a dû être aiguillage ferroviaire dans une vie antérieure…). Je n'y ai pas participé pour la raison simple qu'elle ne me concerne pas. Étant, à ce jour, incroyant, je vois mal ce que je pourrais avoir à dire sur le Christ, sa nature divine ou non, sur le fait de savoir qui est catholique et qui ne l'est pas, etc.
Néanmoins, je sais ce que je pense du blasphème et des blasphémateurs. Au mieux, des sales gosses. Au pire, si l'on se mêle de croire à Satan, de pauvres diables gesticulants et assez ridicules, pris dans la main de leur Maître. Le blasphème ressortit à la foi, bien évidemment, mais à une foi dégradée, dévoyée, hystérique, dostoïevskienne, écumante et impuissante, girardienne. Pour comprendre le blasphémateur, il faut lire et relire le Paradis perdu de Milton : le blasphémateur incarne la chute, mais dans sa version “théâtre de boulevard” ; les blasphémateurs sont toujours ridicules, au moins à notre époque où ils ne risquent rien. Il me semble impossible de blasphémer sans déchoir et s'abîmer, après Sade. Il reste que tout blasphémateur est un croyant qui ne se supporte plus. Un athée parfait, un incroyant tranquille ne blasphème pas : il passe outre. Mais y en a-t-il ? Qui parvient à écarter l'inquiétude ? Rejeter Dieu, c'est encore l'admettre, non ? Je pense à ces pantins gesticulateurs qui – disent-ils – se font “débaptiser”, ce qui est très tendance. Mais se faire débaptiser (si la chose était possible), c'est clamer avec force que l'on croit à la puissance du baptême. De même que se faire démobiliser est reconnaître l'existence de l'armée.
Bien sûr, il y a aussi le blasphémateur de circonstance, celui qui a compris, pour parler aussi vulgairement que lui, qu'il y avait “du pognon à s'faire” ; et c'est très précisément ce que tentent, un peu chaque jour, les minables théâtreux dont on parle ces temps derniers.
Mais pourquoi en parle-t-on ? Parce qu'il existe des gens regroupés sous le nom de Civitas. Qui sont assez stupides pour se laisser entraîner sur le terrain des blasphémateurs subventionnés ; qui organisent des processions, qui gémissent en chœur, se flagellent en rond – et font de quelques cadavres progressistes des martyrs de la culture, des christs-en-croix de la laïcité, des saint Sébastien de la liberté d'expression. C'est la bêtise à front de taureau contre une autre qui lui ressemble trait pour trait. Le singe affronte le singe, et chacun se prend pour l'homme. Alors que, pendant ce temps où ils font les guignols, ils devraient plutôt voir les blasphémateurs pour ce qu'ils sont réellement – du rien qui fait du bruit – et prier pour eux ; en silence.
Euh... Dorham est un dérailleur professionnel, non ?!
RépondreSupprimerSinon, tu as tout à fait raison pour Civitas : a priori, ses membres et ceux qu'il mobilise doutent tout autant de leur foi que les blasphémateurs puisque leur blasphème les hérisse ! Mais on touche à un autre pb qui est le mélange terrifiant, en France, entre la foi et la politique, entre le trône et l'autel... En fait, Civitas se fout de la foi et du Christ, ce qu'il veut, c'est en arriver à une théocratie où la règle de conduite soit sa loi morale... Un peu comme les islamistes ? A ses yeux, même l'Eglise et les évêques ont tort : bref, à l'ère du libre examen, civitas donne l'exemple, avec la bénédiction des héritiers de Mgr Lefebvre qui prêchent Maurras, mais pas l'Evangile ! (mais ce n'est pas étonnant : étant en rupture de banc, ils ne peuvent avoir de mission ecclésiastique et n'ont donc pas les grâces nécessaires pour apporter la vérité...)
Cela me rappelle toujours ce mot terrifiant de justesse de Frossard : les intégristes veulent faire la volonté de Dieu, qu'Il le veuille ou non !
Tout à fait d'accord avec vous, Didier. Ces blasphémateurs ne sont que des bouffons qui se font de l'argent sans autre risque que de s'attirer l'inimitié de gens qui ne comprennent pas que, plutôt que de les fustiger ou de les combattre, le meilleur service à leur rendre est de les ignorer, comme on ignore un pauvre type qui se donne en spectacle sur la voie publique.
RépondreSupprimerCependant, il y a les blasphémateurs et leurs spectateurs. Les premiers feraient mieux d'aller à la Mecque faire des spectacles anti-Islam, ce serait bien plus amusant. Les seconds participent de ce mouvement de haine de soi qui pousse nos modernes crétins à scier les branches sur lesquels ils sont assis alors qu'ils feraient mieux de s'occuper de ceux qui abattent l'arbre qui les porte.
Je suis moi-même athée (ou agnostique, comme ils disent, vu que je n'ai rien contre ni pour la religion), cela ne m'empêche pas de me considérer comme culturellement catholique. J'ai du mal à saisir quel plaisir on peut trouver à cracher sur ses racines.
PS : je partage en fait tout à fait le point de vue de Dorham ! mais comme tout bon commentateur, je me suis précipité pour déposer ma crotte avant de lire ce que les autres avaient dit !
RépondreSupprimerDonc en fait, c'est Léon qui a raison !
Je ne saurais mieux dire et ne ferai rien dérailler, Antoine, promis... J'ajouterai juste ceci : je m'étonne qu'un authentique croyant puisse penser qu'un blasphème puisse constituer une réelle offense à Dieu. (ça fait beaucoup de "puisse" ; désolé !) Il y a une forme de folle prétention derrière cela. Comment imaginer que nos pitoyables gesticulations, nos gros mots d'enfants de chœur puissent causer quelque mal que ce soit à l'être qui est tout et toutes choses ? En fait, à travers Dieu, les intégristes ne défendent qu'eux-mêmes : leur amour propre. Le christianisme est pourtant entièrement tendu vers le rejet de l'amour de soi... Va comprendre Charles !!!
RépondreSupprimerQuant aux blasphémateurs... Pfff, en effet, Didier, je dirais même plus, en effet...
Ah, et bien sûr, se faire "débaptiser" est impossible. Il faudrait que l'Eglise y consente mais cette procédure n'existe tout simplement pas. Mais bon, à tous ces anti-Dieu de pacotille, il reste encore le Jour du Jugement Dernier. Ils pourront tout à fait de choisir de se faire bouter hors du peuple chrétien à ce moment là... Rien n'est perdu...pour qui sait attendre !
RépondreSupprimer"Qui blasphème Dieu loue Dieu." (Maître Eckhart)
RépondreSupprimerA part ça, d'accord avec Dorham. Le sacrement du baptême est indélébile, une fois qu'on l'a reçu c'est pour la vie. C'est un don que l'on reçoit, on peut refuser ce don mais pas annuler l'acte. Les dons de Dieu sont sans repentance. Il ne peut pas revenir sur sa parole sinon il serait infidèle.
C'est bien: Voila un texte que j'aurais pu écrire à la virgule près. Je vais pouvoir continuer à me reposer!
RépondreSupprimerOh mince... on est tous d'accord : c'est pas drôle ici !
RépondreSupprimerSinon, je pense que le blasphème atteint Dieu, comme une preuve de rejet de son amour... mais reste à connaître l'intention du blasphémateur, s'il agit en connaissance de cause et s'il domine la portée de son acte... Et là : les manifestants jugent au for externe qq chose qui relève de l'interne et de la relation avec Dieu... En revanche, ils ne manifestent pas à chaque fois qu'ils manquent de charité et offensent donc Dieu par leurs péchés ! Autrement dit, Civitas est une machine à regarder la paille dans l’œil de l'autre pour éviter de voir la poutre que nous avons tous... "Vu" comme ça, cette attitude est fort peu évangélique...
Mais je ne voudrais pas donner l'impression que je vois mieux la paille qui est dans l’œil de Civitas que... bref, on peut poursuivre l'apologue et j'attends donc celui qui verra mieux la paille qui est dans mon oeil que...!
Le maître de ce blogue a bien raison : aux provocations des subventionnés, il eût fallu opposer la conspiration du silence. Qu'au leu d'un scandale, ils fassent un bide ! S'interroger sur la sincérité de ces histrions importe peu: ils exploitent un filon, voilà tout.
RépondreSupprimerQuant à Dorham, je lui voue une haine inexpiable, car il a commenté un mien commentaire ainsi qu'il suit : "Bof. Oui. Bof". Il a reconnu la pertinence de mon propos, mais entre deux "bof" d'un mépris insondable. Vous trouvez ça chrétien, vous ?
Je n'ai pas vu ces pièces et je pense que c'est le cas de beaucoup de manifestants et aussi de contributeurs à ce blog, mais je crois que c'est faire injure à leurs auteurs, aux programmateurs de théâtre, aux metteurs en scène, aux spectateurs, en les réduisant aux scènes de blasphème.
RépondreSupprimerTout ce monde passerait son temps, exposerait ses goûts, son art,pour uniquement présenter des blasphèmes, allons, allons.
Pirée,
RépondreSupprimerVous avez la rancune tenace, ce qui est fort peu chrétien. Je me souviens de ce commentaire. Ce jour là, j'étais d'accord avec vous mais j'avais une petite objection et j'avais la flemme de l'exposer. Nul mépris là dedans, rien que de la paresse. La paresse étant un péché, je vous présente mes excuses. Mieux, je vous tend l'autre joue...
Antoine,
Ste Catherine de Sienne a écrit dans ses "Dialogues" de très belles choses sur le mal que peut faire l'homme à Dieu. De fait, tout le vice qu'il déploie est en fait un mal qu'il se fait à lui-même. Un blasphème salit celui qui le profère et non Dieu - trop grand, trop haut, trop "intouchable" - qui en est le destinataire.
De la même façon, l'homme ne peut faire aucun bien à Dieu. Le seul bien que l'homme puisse faire à Dieu est de suivre l'exemple du Christ en destinant ses bonnes actions à son prochain. Le seul bien que l'on puisse faire à Dieu, écrit Ste Catherine de Sienne, passe nécessairement par le bien que l'on fait à son prochain...
Je trouve ce discours d'une implacable logique et - accessoirement - d'une grande beauté.
(Reste bien sûr la question de la prière qui est une chose différente et très compliquée ; n'étant pas prêtre ni docteur, je ne me lancerai pas là-dedans)
Léon,
RépondreSupprimernon, rien...
Dorham...
RépondreSupprimerOui?
Mais encore?
Vous auriez de la rancune envers moi?
Et en matière de paille, dieu sait qu'Antoine en connait un rayon.
RépondreSupprimerFrapper l'aute joue de mon prochain ? Je ne suis pas le docteur Cahuzac. Frère Dorham, faisons la paix !
RépondreSupprimerSalut Didier.
RépondreSupprimerÇa fait quelques temps que je vous suis et je peux désormais conclure : vous êtes un sophiste ; vous savez parler et, sachant parler, vous croyez savoir.
Or, cet article illustre bien que vous n'avez aucune connaissance précise sur ces questions graves, ni théologique, ni historique, ni même factuelle.
Je mettrai ça sur le compte de vos chevilles et de la masturbation rhétorique aujourd'hui tellement à la mode. Plutôt que de la rhétorique, on aimerait un peu d'intelligence.
Salut Didier.
Appelez moi quelques serviteurs zélés de l'Inquisition, ils sauront les mettre au pas par des arrachages d'ongles pour commencer et ensuite selon l'humeur du tourmenteur.
RépondreSupprimerTancrède, vous ressemblez à Gide...
RépondreSupprimerGeargies
sans rapport mais je m en voudrais si vous n'aviez point vu cette vidéo:
RépondreSupprimerhttp://corto74.blogspot.com/2011/12/les-arabes-ne-seront-jamais-integres.html
( clin d'oeil a Grandpas )
les gens de civitas sont tellement ridicules qu'ils en sont blasphématoires
RépondreSupprimerIl paraît que pour blasphémer, il faut croire.
RépondreSupprimerSinon, le blasphème n'est pas valide.
Enfin, je crois....
Tancrède est trop choupinet ! je viens de l'aller lire sur le R&N et je retrouve dans ses textes la quintessence de ce dont il accuse le taulier ! son article sur l'infaillibilité pontificale est d'une rare indigence ! Je comprends qu'il réclame ici de l'intelligence : on cherche toujours chez les autres ce qui nous manque.
RépondreSupprimerUn excellent billet plein de bon sens, de logique et de coups pieds au cul. Vous vous êtes remis à boire ou à fumer ?
RépondreSupprimerEt de coups de pieds voulais-je écrire.
RépondreSupprimerPirée,
RépondreSupprimerPaix acceptée. Contresignée.
Léon,
Pas du tout...
Je trouve votre billet un peu léger, Didier. C'est un vieux truc, ça, de renvoyer les gens dos à dos, en montrant qu'il sont les deux faces d'une même médaille, ou les deux mêmes singes qui se font des grimaces, mais c'est trop facile et, le plus souvent, ça empêche de penser. Il faut au contraire chercher les différences, distinguer, discriminer, si j'ose dire. Or il est bien évident ici que les théatreux de merde dont il est question sont les agresseurs et qu'ils provoquent les catholiques. Evidemment, on peut réagir par le mépris et l'indifférence, mais pourquoi faudrait-il se priver de témoigner, de dénoncer le caractère abject de ces "oeuvres d'art" ? Parce que le Christ a dit qu'il fallait tendre l'autre joue ? Cela me fait penser à tous ces athées, ou Juifs, ou Musulmans, ou agnostiques, qui reprochent aux chrétiens de ne pas se comporter aussi idéalement que le Christ, comme s'ils avaient le droit de dire aux chrétiens comment ils devraient l'être, alors qu'eux-mêmes, par définition, s'y refusent. C'est bien ce que vous faites, à la fin de votre billet, en exigeant que les jeunes de Civitas prient au lieu de manifester. Mais qui êtes-vous pour dire aux chrétiens ce qu'ils devraient faire en tant que chrétiens ? C'est un peu comme si j'allais dénoncer un Juif parce qu'il n'a pas récité sa prière en touchant sa Mezouzah...
RépondreSupprimerOn a bien le droit de penser que Civitas ferait mieux de manifester pacifiquement (ce qu'ils font d'ailleurs, je crois), ou de ne pas manifester, parce que c'est contre-productif (par exemple), mais leur recommander de prier alors qu'on se présente soi-même comme sans religion, c'est vraiment une petite vilenie.
Gaston : vous avez parfaitement raison pour ce qui est de ma dernière phrase, inutile et prétentieuse. J'ai du reste failli la virer hier après-midi, après avoir relu le billet. Mais comme elle avait déjà été lue par à peu près tout le monde, ça n'avait plus grand sens, donc elle est restée.
RépondreSupprimerIl ne faut surtout pas juger Dieu sur les balbutiements de ses maladroits serviteurs. Expliquer quoi que ce soit par Dieu, c'est céder à une solution de facilité car Dieu n'explique rien, c'est là sa force. Il reste muet, si seulement nous pouvions convaincre l'être humain d'en faire autan.
RépondreSupprimerUn peu de science éloigne de Dieu, beaucoup de science y ramène disait Marcel Proust et Il est beaucoup plus difficile de ne pas croire que de croire en Dieu, les vrais athées sont presque introuvables.
Je crois que la citation est plutôt de Louis Pasteur. En tout cas elle ne peut pas être de Proust, qui ne se souciait, à ma connaissance, ni de sciences ni de Dieu.
RépondreSupprimerLouis Pasteur et Francis Bacon d'après ce que je sais.
RépondreSupprimerDonc en fait surtout Bacon vu les dates. De toutes façons, je suis toujours pour le bacon.
RépondreSupprimerLa formule est de Pascal, il me semble. Ou alors il l'a encore piquée à quelqu'un d'autre.
RépondreSupprimerC'est Marcel qui a piqué la formule à Pascal qui l'a refilé à Francis,- qui l'a donné à Louis qui se l'est faite piqué par Léon…
RépondreSupprimerLa formule est de Francis Bacon. C'est l'Amiral qui a raison.
RépondreSupprimerFrancis Bacon (philosophe)