
Et nous parlions, un apéritif en appelant un autre, des retours de bâton hallal qui attendaient le président. On se disait que se faire élire en partie par ce genre d'agiteurs de drapeaux exotiques impliquait soit un renvoi (blurp !) d'ascenseur immédiat, soit de sérieux problèmes dans les semaines et les mois à venir : ces Français-à-part-entière ne semblent pas déterminés à la patience. Mais il est vrai qu'ils ont diablement souffert durant les cinq ans de fascisme larvé (larvé ? LARVÉ ???) qu'ils viennent de subir. Bref, il est question qu'ils touchent rapidement les dividendes de leur vote – et je suis d'accord avec eux, de ce point de vue : la France ne les intéresse pas ? Pas plus que l'Algérie, la Turquie, le Maroc, etc. ne me font bouger une oreille ni une couille, et, donc, s'ils ont pris la peine de faire élire un type qui a promis de leur offrir ce pays sur une sorte de plateau (je sais que j'en rajoute un peu, je sais, mais pas plus qu'un peu…), il s'agirait que les choses bougent – le changement c'est maintenant (double geste avec les petits bras).
Et c'était le sujet de notre discussion, à la Nauséabonde irremplaçable et à moi-même. Comment va-t-il faire, ce président, qui a choisi comme patron de campagne Manuel Valls, dont, il n'y a pas si longtemps, les blogosphéreux de gauche nous expliquaient qu'il était en réalité de droite ?
(En réalité est une expression typiquement de gauche : elle sert à dire que la réalité que vous voyez n'est pas la réalité. Par exemple, si vous pensez bêtement que les communistes avalisent cent millions de morts et l'éclipse totale de l'Europe au XXème siècle, c'est que, en réalité, vous n'avez rien compris au communisme et que, en réalité, vous êtes un sympathisant pro-nazi.)
Reprenons. Je rappelais à Catherine que Manuel Valls était, pour les “vrais” socialistes (fonctionnaires, “profs” (c'est-à-dire “simplets” si l'on se réfère à Blanche-Neige), ou chômeurs de longue durée), une saloperie de droite dont on se demandait comment le PS pouvait le garder en son sein. Je peux vous retrouver les références chez nos amis progressistes, si vous voulez.
Mais voilà que ce Valls est devenu directeur de campagne (avec le succès que l'on sait), que l'on parle de lui comme Premier ministre possible (il ne le sera pas : trop marqué à droite), et qui pourrait fort bien être nommé ministre de l'Intérieur pour rassurer la police.
Je m'égare. Nous parlions, Catherine et moi, de ces gentils Français-comme-vous-et-moi déployant leurs drapeaux de joie, de bonheur et de diversité multi-mes-choses, et nous nous disions que ce pauvre président, à la première explosion prévisible, allait avoir bien du mal à calmer les enthousiasmes violents de vitalité de ces nouveaux citoyens, sauf bien sûr, s'il consentait – et il y consentira – à lâcher quelques centaines de millions d'euros supplémentaires où douze plans Marshall ont déjà été engloutis en pure perte. À ce moment, Catherine me fit cette remarque, violemment synthétique :
Hollande ne pourra pas donner du travail à tous ceux qui n'en veulent pas.
En effet. La phrase était tellement superbe que nous nous sommes tus, impressionnés par notre propre lucidité. Et je crois bien qu'on a repris un verre.