dimanche 30 août 2009

Pour rester dans le ton (club des poètes)


Que les chiens sont heureux

En leur humeur badine

Ils se sucent la pine

Ils s'enculent entre eux

Que les chiens sont heureux



Théophile Gautier

samedi 29 août 2009

Le pittbull fugueur a encore frappé

Oui, on se moque, je sais. On se moque de Renaud Camus, on se moque de Céline qui ne le mérite pas. N'empêche...

N'empêche que le pittbull maison, à savoir le Seigneur Ottokar, était censé égorger tout ce qui bouge. Or, Or... Or, on décide de mettre en présence les quatre ou cinq bestiaux présents soudain dans la maison. Non seulement tout se passe merveilleusement, mais en plus Ottokar, censément mâle dominant, tombe rigoureusement amoureux de Swann. Lui lèche la face ; la bite ; le trou du cul ; se montre incapable de l'abandonner de plus de cinquante centimètres. Bergotte le prend assez mal, forcément : elle tente d'attirer l'attention du seigneur Otto : n'y parvient nullement ; de plus, Swann, son maître absolu, se désintéresse absolument d'elle, elle le prend encore plus mal – tout le monde finit par grogner, Catherine se fâche, tout le monde se calme. L'Irremplaçable est très forte.

Il n'empêche, on se moque. Ottokar est censé être fugueur. Pas avec nous : il est tombé raide amoureux de Swann et ne le quitte pas d'une demi-patte – pas prêt de le perdre, celui-là.

Quant à Orage, il se fout à peu près de tout, y compris de nous. C'est le vrai sage de cette maison.

Demandez le journal de Plieux (avant-dernière édition) !

Ici.

vendredi 28 août 2009

Aujourd'hui, grande rencontre inter-meutes (buvette gratuite)

C'était presque devenu une affaire d'État, à force, les jours s'ajoutant aux jours. L'indispensable Céline était persuadée que, se rencontrant avec les deux nôtres, les labradors de Renaud Camus n'allaient rien avoir de plus pressé que de les étriper, ou, à tout le moins, de leur ouvrir la gorge. Lorsqu'ils sont arrivés, ce matin, nous les avons donc enfermés dans leur habituel chenil. Puis, un peu plus tard, nous avons fait descendre Swann et Bergotte – ainsi que Mila, le lévrier de ma sœur.

Bien entendu, les trois chiens se sont précipités vers l'enclos clos, afin de faire connaissance avec les nouveaux arrivants. Concours de reniflages de part et d'autre du grillage, remuements de queues, mais ni grognement ni hérissement pileux. Ce que voyant, l'Irremplaçable propose une confrontation inter-meute en direct live. Céline prévient qu'en cas d'étripage généralisé, il ne faudra pas compter sur elle pour s'interposer : elle tient à ses deux mains. Et on ouvre la porte...

Hormis les traditionnelles parties de truffe-à-cul, il ne s'est évidemment rien passé. Un ou deux grognements sans conviction, peut-être, que Catherine a fait cesser d'une tape sur le museau, histoire de bien signifier qui était le patron. Emporté par son enthousiasme, le sieur Orage, à un moment, a prétendu faire la démonstration de ses talents sodomites sur la personne de Swann – lequel a pris la chose avec bonne humeur, mais sans complaisance douteuse.

Bref, il nous semble que, dès la fin des visites de ce jour, nous allons pouvoir réunir tout ce petit monde, dans une ambiance de saine et canine camaraderie.

Madame se meurt, Madame est morte !

Donc, c'était le 20 août dernier. La veille, il avait fait une chaleur de bête. Le soir, au moment de l'apéritif (pris à l'intérieur, car le jardin lui-même était très inhospitalier), l'Irremplaçable et moi-même nous laissons aller à de l'humour douteux. En gros, la chaleur étant ce qu'elle est, nous nous disons que, peut-être, le thermomètre va débarrasser le monde de ma grand-mère (99,5 ans) ou de Mme Camus (98,5 ans).

Le lendemain, vers midi, une dame m'appelle de Royat, pour m'informer de la mort de la mère de Renaud Camus. Elle ne sait où le joindre, sa voix trahit la vieille dame qu'elle est, elle est tellement perdue qu'elle commence à me raconter la moitié de sa vie, ses rapports avec Mme Camus, etc. Tout en lui répondant, je réfléchis à ce que je vais devoir faire. Peu de solutions, en fait une seule : j'ai le numéro de portable de Camus, il va donc bien falloir que je lui apprenne la triste nouvelle. Vachement réjouissante perspective, isn'it ?

Ayant enfin réussi à rompre le contact avec Mme XXX de Royat, j'annonce la nouvelle à Catherine, qui, bien entendu, me laisse me démerder avec mon annonce. Genre : c'est une histoire entre mecs. Elle n'a pas tort. Je compose le numéro, avec le vague espoir que la communication ne passe pas – elle passe. Je suis tellement secoué que j'appelle Renaud Camus “Renaud” (ce qui ne semble pas le surprendre outre mesure) et lui annonce sobrement (j'espère) la nouvelle. Coup de bol, si je puis me permettre, il est déjà au courant. Je manque de très près – soulagement tel – lui dire que “ouf !”, quel bonheur qu'il soit déjà au parfum ; je ferme ma gueule in extremis.

Catherine, juste après, me dit : « Tu ne vas pas le dire sur le blog, j'espère ? ». Moi : « Ben non, évidemment ! » Et, deux heures plus tard, un visiteur (lecteur de Camus) me balance la question que personne encore, depuis trois semaines, n'a eu l'idée de poser : « Au fait, elle est toujours vivante, la mère de Renaud Camus ?» Moi, silence, semi-borborygme, puis : « Ben... j'en sais rien, hein... Elle l'était encore dans le Journal 2006... »

Et nous attendons des gens, ce même jour, qui vont dormir dans le lit de... Enfin, dans le lit des personnes qui passent par ici, quoi...


(La photo de Pierre est de Renaud Camus, et elle est toute récente. Life goes on, si on veut...)

mardi 25 août 2009

Du regret de l'argentique – et des rires afférents

L'histoire nous est revenue, alors que nous arpentions la vieille ville d'Albi (magnifique, plutôt bien préservée, c'est-à-dire pas trop massacrée : il est possible qu'on y revienne) avec Mifa. Remontant paresseusement du jardin à la française qui se trouve au pied du palais des archevêques, et parce qu'un petit couple de crétins sollicitait d'un autre couple de crétins qu'il les prît en photo vaguement enlacés, et sourires de circonstance, l'Irremplaçable s'est souvenue de ce qu'elle faisait, à la glorieuse époque de l'argentique – comme on dit.

Lorsqu'un couple de touristes la requérait pour le prendre en photo, elle acceptait avec empressement (empressement qui, pour ceux la connaissant, aurait dû paraître suspect, mais bon). Les deux connards prenaient la pose... s'il s'agissait de Japonais, c'était encore mieux... collait encore au plus près aux schémas préétablis...

Et Catherine prenait soigneusement en photo leurs pieds, leur rendait leur appareil avec un large sourire, acceptait leurs remerciements avec une mansuétude n'appartenant qu'à elle – et nous pouffions en nous éloignant, comme de sales gosses.

Le numérique a tué tout cela.

lundi 24 août 2009

Secoue-toi, gros tas de vide !

On va se raconter l'histoire d'un écrivain en bâtiment, doublé d'un folliculaire à temps partiel : du lourd, comme on voit. On va même l'appeler Maurice, tiens, juste pour lui titiller un peu l'engluement neuronal.

Donc, comme n'importe quel souchien décérébré, Maurice est parti en vacances. Le premier août, pour être sûr de son fait. Il a choisi de villégiaturer dans le Gers, que plus France profonde-et-moisie on ne peut pas. Comme il se prend pour moins ensablé du bulbe qu'il ne l'est, il s'est emporté toute une pile de devoirs de vacances, avec de vrais morceaux de Loulou-et-Babette dedans (tirez-vous, les moins de cinquante carats !) : six doubles pages à écrire sur les grands scandales de la télévision, pour le respectable hebdomadaire qui lui refile sa Blédine deux fois par jour ; un synopsis bourré de péripéties et de rebondissements à s'en pisser parmi – la moitié du livre afférent devant être écrite au soir du retour, prévu le premier septembre.

Pour l'instant, après trois semaines d'hébétude de haute époque, avec échauguettes et fenêtres à meneaux, Maurice a troussé en tout et pour tout une vague esquisse de projet de velléité de synopsis. Tout à l'heure, après le déjeuner, il s'est dit que, là, maintenant, illico, il fallait vraiment qu'il attelle le i-bœuf à sa @charrue et qu'il fasse mine de s'intéresser à l'autre épave de Gainsbourg foutant le feu à son billet de 500. Au lieu de, on peut le voir écroulé dans un fauteuil d'emprunt, parcourant de ses yeux larmoyants un livre déjà lu.

Promis, demain je m'y mets.

dimanche 23 août 2009

Vishnou la paix !

Nous autres, Occidentaux GTI à double arbre à came chrétien en tête, avons – c'est bien connu sur tous les marchés bio de la planète et dans les ashrams les plus crasseux – totalement abdiqué, et depuis longtemps, toute trace de spiritualité bienheureuse. On ne pense qu'à flinguer, humilier, rançonner tout ce qui ne nous ressemble pas. Et, du coup, bêtement, on en a perdu le sens de la vie, dites donc. Même notre religion (de toute façon pourrie-caca), on l'a paumée en route : c'est pour ça qu'elle ne nous inspire plus que des horreurs mercantiles et mortifères – comme dans les atroces boutiques de Saint-Sulpice, voire à Lourdes. Ah ! Lourdes ! putain, la marrade ! Le goût de chiottes des cathos, c'est pas croyable, j'le crois pas – ta Sainte Mère en stuc et dorures à poil dans la vitrine !

Pendant ce temps, pendant qu'on saccage tout, et ne pense qu'à bouffer et engraisser, de gentils peuples-au-regard-si-pur et au-sourire-si-doux perpétuent de bouleversantes traditions et continuent de construire de merveilleux temples, témoignant par leur élégance naturelle d'une foi respectueuse du monde et d'une spiritualité intacte. Nos amis indiens sont comme ça, par exemple – et heureusement qu'il se trouve des madones laïques pour nous ouvrir les yeux. Sinon, les cons d'Européens malfaisants comme nous autres continueraient de ricaner et de répandre leur haleine pestilentielle, laquelle finirait par recouvrir le zéphir de pure rosée de nos angéliques frères lointains.

Prenez Fromage Plus, par exemple : voilà un type vraiment pas fréquentable, un bloc de malfaisance, une créature nazoïde qui, à coups de contre-vérités ignobles que-l'on-croyait-à-jamais-révolues, tente de nous faire croire que les séraphins bronzés et crève-la-dalle qui peuplent ce monde merveilleux – hors le chancre Europe, il va de soi – n'ont qu'une idée en tête, qui est de se précipiter dans les galeries marchandes qu'ils n'ont même pas été foutus d'inventer tout seuls. Abject, non ?

Cela dit, bon : le fromage, c'est bien une invention de chez nous, ça, non ? Ça veut tout dire, je m'excuse...

Une école anglaise comme une autre


Le déni de réalité va devenir un métier à temps plein...

samedi 22 août 2009

vendredi 21 août 2009

Le Sourire de France-Hélène

France-Hélène ne ressemble pas à ça, pas du tout. D'abord, elle a les cheveux plus courts, alors, hein, camembert... Ensuite, j'ai oublié de la regarder de dos, durant la journée et demie qu'elle a passée à Plieux, mais je suis certain qu'elle est bien mieux – plus personnelle, si vous voulez.

J'ai connu France-Hélène en 1975 (fin d'année), à Orléans. Elle arrivait de Châteauroux (mais pas Berrichonne, Dieu merci : accent chantant de plus au sud). Elle venait alors de s'installer dans un studio de la rue Porte-Saint-Vincent, avec une autre Castelroussine (une vraie, celle-là), bizarrement prénommée Monique : moi, c'est Monique qui me faisait bander (on avait tous à peu près vingt ans, pour vous situer l'affaire et les fautes de goût éventuelles).

J'ai rapidement compris (malgré mon jeune âge et la compacité de mes érections d'alors) que je pouvais me mettre la Monique sur l'oreille, en gros : elle mouillait plus loin et plus exotique, la gueuse. En revanche, presque tout de suite, je suis devenu ami avec France-Hélène : durant environ un an ou un an et demi, j'ai passé l'essentiel de mon temps libre (c'est-à-dire de mon temps) dans ce studio, quatrième étage, juste en face du seul (alors) bar à putes d'Orléans – mais, à cette époque, je ne m'intéressais pas encore aux putes.

[J'ai oublié de dire que, à ce moment, le studio était partagé en tiers par un certain Alain, gauchiste “pure époque” accomplissant son service militaire à la base aérienne d'Orléans-Bricy (où mon père, dans le même temps, gagnait l'argent du ménage (le sien)), lequel partageait en outre la couche étroite de France-Hélène (ils étaient bêtement petits et minces tous les deux), et pour qui je nourrissais une véritable admiration girardienne sans le savoir.]

Bref, m'est revenu, la revoyant hier après 25 ans (minimum, on n'a pas réussi à se mettre d'accord là-dessus), le souvenir de soirées de fous-rires, de discussions probablement imbéciles (nous n'avions pas vingt ans) – et surtout de cet irrésistible sourire qui était le sien. Qui EST le sien : elle a poussé le portillon de Plieux, hier peu après midi, et beaucoup de choses m'ont été rendues. Pus tard, dans la soirée, on s'est demandé pourquoi on avait passé un quart de siècle sans se voir. Bien entendu, on n'a pas trouvé de réponse satisfaisante.

La Teuf à quatre euros

Il y a une heure environ, à peine rentré de Lectoure où j'étais de corvée de caddie, il me faut m'occuper de deux femmes, une mère et sa fille – cette dernière lectrice du journal de Renaud Camus. (Peu avant, Dieu avait manifesté envers elle son céleste courroux en octroyant à l'Irremplaçable un groupe composé de six adultes et cinq jeunes enfants...) La visite se passe plutôt bien, la lectrice semble en effet connaître déjà beaucoup de choses sur Plieux et son illustre occupant ; la mère, elle, notamment dans la salle des Nuits répétera bien quatre fois : « C'est tout de même très spartiate ! » Certes, Madame, certes.

Et puis, lorsque je les quitte, après les avoir raccompagnées jusqu'à la petite porte de la cour, elles me tendent la main l'une après l'autre. Afin de glisser dans la mienne chacune une pièce de deux euros. J'ai remercié bien poliment, avec une légère mais gracieuse inclinaison de la tête, en retenant le rire que je sentais monter dans ma gorge. Puis, sans vergogne aucune, j'ai empoché mon pécule, bien décidé à le dépenser seul, en faisant le garçon – y a pas de raison.

jeudi 20 août 2009

Petits délires racistes matutinaux

« Voilà 40 ans que le dragon médiatique nettoie les cervelles au nom de l'amour, de la tolérance et du pacifisme le plus niais. À tel point que nous n'avons même plus besoin d'éminences grises pour modeler nos pensées, puisque nous vivons le temps de la reprogrammation conceptuelle permanente du Spectacle par le Spectacle et des individus par eux-mêmes. Nous avons appris à laver nos propres cerveaux sans l'aide de personne. Nous avons appris à penser précisément ce qui est attendu, au moment où c'est attendu. À voter convenablement. Et à la mettre en veilleuse, consciencieusement, au cas ou les évidences se feraient trop pressantes à nos yeux. À nos vilains yeux, toujours réactionnaires.

« Si la question islamique est si fréquemment évoquée sur la réacosphère, c'est parce qu'elle symbolise à elle seule cette espèce de carrefour du pire où se croisent renoncement, lâcheté politique, aveuglement dogmatique, esprit munichois et déclin civilisationnel. La question islamique, c'est une synthèse. »


Court extrait d'un long et remarquable billet du toujours impeccable Hank. Lequel, dans le même, nous signale l'arrivée dans la blogosphère d'une très jeune femme qui me semble à ce point prometteuse que je l'ai immédiatement intégrée à ma blogroll.

Quant au titre que j'ai choisi, il fait référence à Nicolas qui, en commentaire de l'un de ses propres billets, parle de mes “délires racistes”.

Nous sommes tous des délirants, mes frères, sachez-le : rien de ce que vous voyez n'existe.

mercredi 19 août 2009

Finalement, on mangera autre chose que des pâtes

Vers trois heures et demie, j'ai décidé de laisser la garde de la maison à l'Irremplaçable et d'aller acheter du pain frais à Lectoure : il eût été sacrilège de déguster le fromage de tête et la mousse de foie apportés par Emma et Pluton avec une vieille croûte racornie, vous êtes d'accord ? Sauf que je me suis aussitôt retrouvé lesté – devinez par qui... – d'une liste de courses à faire “pendant-que-tu-y-es”, longue comme le nez de Tonnégrande. Le tout par 38° à l'ombre, et il y a très peu d'ombre sur les trottoirs de Lectoure, la ville est connue pour son avarice ombreuse.

Bref, entre variées autres choses, sur ma liste se trouvait écrit “pesto”. C'était pour la sauce des pâtes que l'Irremplaçable Lucullus avait prévu de nous faire manger après l'apéro. Arrivé à l'épicerie : pas de pesto. Je téléphone à Catherine qui me dit de prendre du basilic frais à la place. Je me rends donc chez le marchand de fruit et légumes, situé à un litre et demi de sueur de l'épicerie fine : plus de basilic frais. Derechef, j'empoigne mon téléphone, enfonce la petite touche idoine : “plus de crédit”, m'annonce cet appareil borné, sectaire et journalophobe. Un court instant de flottement peut-être, un voile de désarroi ; mais il en faut plus pour désarçonner le commissionnaire en bâtiment.

« Qu'à cela ne tienne, me dis-je in petto, je vais pousser jusqu'au distributeur de la Caisse d'Épargne, où, après avoir bouffé ma carte magique, ce connard d'écureuil va tout me remettre en ordre de marche. » En gros, hein. Un boisseau de transpiration plus au sud, devant l'écran du machin, je réalise que, une fois de plus, j'ai oublié mon propre numéro de portable. Et que je ne peux pas le demander à l'Irremplaçable, puisqu'aussi bien je n'ai toujours pas un radis de crédit.

Je me suis déversé sur le siège de mon auto et suis rentré à la maison – Catherine a décidé qu'on laisserait les pâtes au placard et qu'on se contenterait du fromage de tête et de la mousse de foie : ça me va.

mardi 18 août 2009

Voyez mes poils... voyez mes ailes...

La nuit tombe ici comme nulle part ailleurs. Pas plus lentement, mais avec une sorte de majesté dédaigneuse. Elle connaît nos fenêtres et sait qu'elle va s'y déployer toute à son aise, avec lenteur, flamboiement de couleurs, distinction de lumières, etc. (“Etc.” par impuissance ou découragement à dire ce que l'on voit en effet.)

Elle, la nuit, ne tombe pas, en vérité : elle s'étend, s'éploie, se dépose, s'apaise ; et prétendrait sans doute nous endormir si l'on se laissait faire.

C'est alors qu'elles sortent, ou plutôt entrent. Par cette fenêtre, ou cette autre ; virevoltent en saccades à peine saisissables, découragent la vigilance des chiens couchés, et même celle des humains sirotant. Elles tracent des signes dans l'air lourd, aussitôt effacés, mettent de la netteté et de la vibration dans ce magma. Par elles, nous devenons encore plus immobiles et pesants. Elle repassent encore, amies des fenêtres, des ouvertures, de l'air noir, des trouées invisibles dans la muraille. Elle nous vérifient mammifères, elles disparaissent oiseaux – les chauves-souris.

lundi 17 août 2009

Ils sont malins, nos chiens !

Il n'a pas fallu deux jours à Swann et Bergotte pour comprendre que quand la cloche sonnait, à l'extérieur, cela signifiait que des visiteurs étaient à la porte et qu'eux-mêmes allaient se retrouver enfermés dans la cuisine, le temps de la visite – ce à quoi ils consentent avec une mauvaise grâce patente.

Quelques jours plus tard, ils avaient accompli un progrès décisif. Désormais, lorsqu'ils entendent le bruit de la grosse clé dans la serrure, ils bondissent sur leurs pattes et se précipitent vers la porte de la dite cuisine : ils ont compris que l'Irremplaçable ou moi refermions la porte derrière les visiteurs et que le moment de leur délivrance était venu.

Pour ceux qui ne seraient pas allés sur le blog de Catherine (ce qui est très mal), la photo, prise par elle, représente Bergotte dans sa position favorite, à la chattière de la porte d'entrée, guettant le retour de ses maîtres, partis pousser le caddie à l'Intermarché de Lectoure – où l'on ne trouve strictement rien de ce qu'on y vient chercher. “C'est à cause des touristes”, s'entend-on expliquer. Ah ? Ils vous ont pris par surprise, les touristes ? C'est la première année qu'ils débarquent dans le Gers en juillet et août ? Guignols, va !

Aujourd'hui, on va donc tenter notre chance au Champion de Fleurance – une vraie vie d'aventuriers, en somme.

dimanche 16 août 2009

samedi 15 août 2009

Journal de Plieux (en attente)

Aujourd'hui, votre héros (moi) a parcouru 775 km sous une chaleur de bête. Arrivé à Plieux, une visite, vers sept heures et quart : un lecteur camusien et son fils – camusien aussi : on les a gardés jusqu'à dix heures. Ils sont repartis ravis et avec 140 € de livres : vous en pensez quoi, Pascale G. ? Bref, le journal de la semaine, ce sera demain...

vendredi 14 août 2009

Solitude et misère morale du rewriter embusqué

Une fois n'est pas coutume : aujourd'hui, sur ce blog, on va massacrer la langue française. Simplement en reproduisant le début d'une grosse daube de 15 000 signes, que l'on m'a chargé de ramener à 5 000 et qui semble avoir été rédigée par un logiciel de traduction sud-coréen (au moins). Lisez-moi ça, mes agnelets :

La saga de l’été c’est de présenter de magnifique amitié dans le show-biz. Et l’une des belles complicités qui est formidable avoir est bel et bien le duo Aznavour-Sayan. Comme l’indique le titre de l’un des nombreux albums de Charles Aznavour « Colore ma vie » est un titre qui leur va si bien à tout deux. Tant, l’un à donner de la lumière que l’autre de l’énergie afin qu’ils accomplissent ensemble une carrière exemplaire. Une amitié rarissime basée sur la confiance qui dure depuis plus quarante ans. L’un, n’est pas à présenter. Il est incontestablement l’un des plus grands auteurs-compositeurs-interprètes que la chanson française ait connus « Monsieur Charles Aznavour ». L’autre, est un homme de l’ombre mais qui a une très grande importance pour l’artiste. Autant professionnel que privé puisqu’il sillonne les chemins du monde entier ensemble depuis plus d’une quarantaine d’années. Ensemble, ils ont traduit en chansons les plus beaux rêves des gens. Ils ont aussi énormément voyagé. Dans la vie comme dans les affaires, ils sont indissociables. Aujourd’hui, âge de 83 ans, Charles Aznavour s’amuse toujours autant sur une scène. Levon Sayan est toujours émerveillé de voir son ami être une bête de scène depuis tant d’années. Il est le témoin d’un vrai déferlement à chacune de ses apparitions. Malgré le succès qui n’a jamais cessé de grandir, tout deux ont vécu ça humblement.

Hein ? C'est pas du brutal, ça ? Il y a des jours où on n'a pas l'impression de voler l'argent qu'on nous donne, je vous le dis. En même temps, on rit beaucoup, il ne faut pas croire. Par exemple, dans l'interminable interview annoncée par ce “chapeau”, je me suis amusé à essayer de comprendre quel pouvait être le sens de certaines questions, ainsi que leur rapport (même lointain) avec la réponse les suivant : je n'y suis pas arrivé à tous les coups...

jeudi 13 août 2009

De l'inconvénient d'avoir deux maisons

Ça se passe comme ça. On rentre chez soi, et on s'aperçoit que les accessoires les plus basiques (et néammoins indispensables) sont manquants. Ainsi, avant-hier soir, au moment d'aller faire dormir la bête... plus de couette (“douillette”, en québécois) : elles sont toutes deux à Plieux, où je ne suis plus. Qu'à cela ne tienne, je m'arrange avec les patchworks de l'Irremplaçable.

Le lendemain matin, envie d'un café... plus de cafetière : elle est à Plieux, ainsi que les couettes. Soit : on peut se passer de café, surtout si on sait que l'on va en trouver du tout fait au bureau, ce qui se trouve être en effet. Il reste, après la douche, à s'habiller.

Or, plus de pantalon. Le jean dans lequel on entrait il y a deux mois refuse obstinément de se fermer (le confit et la saucisse de canard auraient-ils produit leur effet prévisible ? Sans doute.) Celui dans lequel on s'est rapatrié est sale comme un caillera, un autre se trouve au studio, et nul n'a envie de monter six étages pour récupérer un grimpant – de toute façon, on est au Plessis, que faire ?

Soudain, au fin fond de l'armoire, l'œil repère un pantalon inconnu ; une sorte de jean hésitant entre le bleu et le noir. Le cerveau (relié à l'œil en question) se dit qu'il doit s'agir d'un pantalon appartenant à l'Irremplaçable, et égaré dans ces parages. Or, non. Le décintrant, on constate qu'il correspond à notre longueur de jambes, l'enfilant qu'il ferme implacablement. Donc, c'est bien l'un de nos pantalons. À nous, perso. Sauf qu'on ne le reconnaît vraiment pas ; on est certain de ne l'avoir jamais enfilé. Qu'est-ce qu'il fait là, dans cette armoire ?

Dix jours à Plieux peuvent rendre fou n'importe qui, la preuve : j'ai depuis deux jours les fesses enveloppées dans un pantalon que je n'ai jamais vu. C'est limite fout-la-trouille.

lundi 10 août 2009

Et rien n'est plus délicieux que la pipe d'un mort aimé

À Véronique et Olivier Deprez,
pour avoir regardé ensemble.

C'est ce qu'on lit ; dans l'une des feuilles A4 qui composent la plupart des œuvres de Jean-Paul Marcheschi, nées de la bougie et du feu (la bougie qui agonise en cire liquide, le feu qui nettoie, noircit, annule, annihile, mais n'efface jamais complètement ; le feu qui, en rendant invisible (ou au moins illisible) l'écriture la renforce, lui confère une présence dangereuse, puisque partiellement “pas là”) : celle-ci dans l'une des Morsures de l'aube, celle de la salle des Pierres, Dante et Béatrice.

La phrase nous fait bondir au second étage, à la salle des Vents, sorte de mausolée offert au mort aimé en question, à lui dédiée officiellement. Avec rebondissement dans l'écriture (non brûlée, celle-là) de Renaud Camus, terriblement lisible, et pourtant, quand même, opacifiée par sa propre cire : le mot sida ne sera jamais prononcé, L'inauguration de la salle des Vents se fera sans lui, alors qu'il – le nom, le mot, la maladie, l'innommable – structure le roman, le travaille, le dessoude (au sens argotique du terme) ; ce roman où rien n'est inventé mais où tout est transporté dans le domaine de l'irréel (ou du réel le plus brut, donc indicible tel quel), élevé d'un étage, avec retombée lourde au pied de l'édifice. Des morts lointains, des morts proches dont on s'éloigne pour venir dresser la carte, des vivants qui, chutant, alourdis de tout le passé, auraient dû raisonnablement mourir et qui prefer not to. Et puis cette mort qui, presque contemporaine, n'entre pas dans le livre, forme le centre invisible et attractif, le trou noir, la matière invisible, comme l'œil de Dante dans la Morsure de l'aube du premier étage – le père.

dimanche 9 août 2009

La monomaniaque du monochrome

Il y a plusieurs sortes de visiteurs, forcément ; on commence, après neuf jours, à les découper en lamelles de plus en plus fines – quoique encore assez épaisses. Pour l'instant, cernons ces deux : ceux qui sont tombés là par hasard et ne posent donc aucune question, assommés par avance de cette visite qu'ils n'ont pas choisie, résignés à sa durée ; et ceux qui s'intéressent, veulent tout savoir.

Il va de soi que la seconde catégorie paraît préférable, et j'en suis a priori d'accord. Ce ne se vérifie pas toujours, témoin le trio qui échut cet après-midi à l'Irremplaçable, cependant que, moi, je pilotais un délicieux lecteur de Renaud Camus, le genre qu'on a presque envie de payer tellement il vous rend la visite agréable. Le trio de Catherine : un homme n'ayant pas ouvert la bouche une seule fois, une adolescente incapable de desserrer les dents et une femme balançant les questions en rafales : c'est elle qui, ce soir, nous intéresse.

D'emblée, elle annonce à l'Irremplaçable qu'elle est déjà venue à Plieux, il y a 15 ans, lors d'une exposition (elle ne se rappelle plus laquelle, bien entendu). Elle veut revoir LE monochrome, et s'étonne de ne pas le rencontrer dès les salles du rez-de-chaussée (où il n'y a jamais eu le moindre monochrome). À ce stade, Catherine pense encore avoir affaire à un être humain normal, et poursuit la visite.

La situation commence à s'assombrir (presque autant que les Marcheschi du dit rez-de-chaussée) au premier étage, lorsque la petite boulotte en question réclame avec une insistance accrue SON monochrome : il ne faut pas se foutre de sa gueule, elle est venue ici il y a quinze ans, il y avait un monochrome, elle le veut, elle y a droit, elle a payé, quoi, merde. – À ce stade, l'Irremplaçable (tout en me maudissant d'avoir conservé le meilleur client) commence à comprendre qu'elle est tombée sur un os, à la fois mou et inassimilable par l'organisme.

S'il n'y avait que le monochrome fantôme, elle s'en arrangerait sans doute. Seulement, mais : la visiteuse ne tarde pas à préciser ses exigences de visiteuse. Son mâle et son adolescente continuant de se taire obstinément, la voilà qui affirme que ce qui l'intéresse, c'est « de connaître la vie des écrivains ». Bon. Ça tombe bien, on en a un dans cette maison même. Sauf que... Sauf qu'il n'est pas là, justement. Et, Violette (appelons-la Violette), il ne faut pas la prendre pour une conne. Lorsque Catherine lui apprend que Renaud Camus vit tout le temps à Plieux, elle repère tout de suite l'arnaque :

- Oui, enfin, n'emppêche que, là, justement, il est pas là !
- Euh... non, il est en voyage...
- Ben alors, pourquoi vous nous dites qu'il est tout le temps là ?

À ce stade, avec la patience et la mansuétude que vous lui connaissez, l'Irremplaçable se retient de lui dire quelque chose comme : « Toi aussi, connasse, tu vis tout le temps chez toi, et pourtant, là, tu es en vacances ailleurs que dans ton clapier de merde. » Voyez l'ambiance qui se profile. De toute façon, la blondasse-qui-s'intéresse-aux-écrivains est déjà repartie vers d'autres contrées et veut savoir des choses essentielles :

– Et comment i fait quand i va à Paris ?
– ???
– Ben oui, s'il est écrivain, i doit bien aller à Paris ?
– Euh... oui, peut-être... Mais je ne comprends pas très bien votre question...
– Ben il y va comment ? I prend le car à Lectoure pour Agen, ou alors i va jusqu'à Agen en voiture et i prend directement le train ?
(L'Irremplaçable, perdant pied ) : – C'est que... Peut-être qu'il va à Paris en voiture...
- Ah ? Ben d'accord, mais vous nous avez dit qu'il était en Scandinavie. Alors, il la gare où, sa voiture, pour aller prendre l'avion ? Parce qu'il prend l'avion, forcément ! En tout cas, vous nous dites qu'il vit tout le temps là, n'empêche que, là, il est pas là ! Et le monochrome ? Je suis sûr qu'il était à cet étage ! C'est comme son bureau, je m'souviens très bien qu'il était au premier, pourquoi maintenant il est au deuxième ?

Je garantis la rigoureusitude de l'échange ci-dessus : vous auriez vu l'air hagard de l'Irremplaçable au sortir de l'épreuve, vous n'en douteriez pas plus que moi. Elle avait bien mérité son godet de blanc de Gascogne.

samedi 8 août 2009

Journal de Plieux, parution immédiate

Comme l'auront compris même les plus ensuqués de la pensarde, l'Irremplaçable et moi nous trouvons à Plieux depuis exactement une semaine. J'avais, dès avant notre départ de Normandie, décidé d'y tenir une sorte de journal, et de ne le donner à lire (éventuellement) qu'une fois rentré at home. Cédant à la demande générale de Catherine, ce sera finalement une publication hebdomadaire – sur le “Bungalow” pour ne pas encombrer ce blog-ci, où, probablement, je continuerai à publier d'autres textes concernant Plieux, mais non directement liés à “la vie comme elle va”. Enfin, bon, on verra, tout cela n'est pas très clair dans mon esprit (ben tiens !...). Donc, pour la première livraison du Journal de Plieux, c'est par ici.

vendredi 7 août 2009

Calme bloc ici-bas chu d'un désastre obscur

Pour Pascale et Agnès.

On est là, bien tranquille, on sirote un verre de tariquet, puis un autre – une deuxième bouteille est au frais, qui attend –, on devrait être parfaitement détendu, le temps des visites est clos depuis déjà une demi-heure, la soirée et la nuit semblent s'accorder pour nous complaire.

Seulement, il est là, à nous toiser depuis son socle, entre la cheminée perpétuellement froide et la porte ouvrant sur le vide. Plus exactement, ils sont là : l'humain au sourire tantôt indulgent tantôt sarcastique, dont toute la partie droite de la tête est mangée par la lèpre du masque, lui-même s'essayant au sourire malgré son œil unique, inconscient sans nul doute de ses accointances de traits avec Nyarlathotep, le “Chaos rampant” sorti des rêves de Lovecraft.

Le visage d'homme, la partie droite (pour le buveur de tariquet) de ce Calme bloc, nous est apparu dès le premier soir, une fois la nuit presque tombée, car les créatures de Marcheschi, celles-ci au moins, s'accommodent assez mal du plein soleil et ne prennent vraiment figure que sous la lumière leur tombant de la poutre maîtresse.

Le lendemain, sous l'effet du même breuvage, la partie gauche du bloc a pris forme à son tour, avec sa bouche fendue en accent circonflexe retourné, son nez asiate, mongoliforme, et cette fente unique de l'œil droit. Catherine y vit un masque, et moi une créature non-humaine mais vivante, l'un de ces Grands Anciens créés par le hibou de Providence (Rhode Island).

Le surlendemain, il m'apparut que l'œil droit de Nyarlathotep (j'avais arbitrairement décidé que le Calme bloc devait procéder du “Chaos rampant”, plutôt que de Chtulhu ou de Yog-Sothoth) pouvait aussi être l'œil gauche d'un troisième personnage, mi-boudeur, mi-furieux, au menton fuyant, dont on ne distinguerait que le profil en demi-lune. Ainsi, au fil des soirs, les créatures se multipliaient, tout en restant étroitement imbriquées, enchevêtrées, prisonnières (ou garantes ?) les unes des autres, toutes procédant de chacune et réciproquement.

Il y a une dizaine de minutes, ayant déjà commencé d'écrire ce billet, je suis allé vérifier l'orthographe exacte de Nyarlathotep ; et me suis alors avisé que, chez Lovecraft, le premier avatar du “Chaos rampant” n'était autre que le Pharaon noir – ce qui nous ramenait en droite ligne à Jean-Paul Marcheschi, sculpteur du Calme bloc.

Depuis, mes chevilles sont dans un état de tumescence inquiétant. Et je songe à mettre la pédale douce sur le tariquet, de crainte de voir, soir après soir, en face du canapé, se multiplier les entités métalliques et luisant sous la lumière.

jeudi 6 août 2009

Finalement, ils l'auront bien cherché

En lisant ce savoureux billet de Fromage plus, je me disais que, finalement, l'avenir de ce pays allait peut-être se révéler irrésistiblement drôle. L'avenir en lui-même, non, bien sûr. Mais la tête que ne tarderont plus trop à faire nos bons petits bisounours de souche, avec ou sans roulettes aux pieds, ça, oui. Il suffit d'attendre que notre futur devienne leur présent : ce ne sera pas long.

mercredi 5 août 2009

Écrivain en forteresse

À huit heures ce matin, il faisait déjà 20°, et terriblement celsius encore : on devrait souffrir cet après-midi, surtout si les visites sont nombreuses. On compte sur les murailles pour conserver la fraîcheur de la nuit, mais on n'est sûr de rien.

Avant même notre départ, j'avais décidé de tenir un journal de notre séjour ici – nous sommes arrivés depuis cinq jours et j'en ai déjà deux de retard dans mes écritures : le bâtiment s'est nettement amélioré, mais l'écrivain est toujours aussi piètre, comme on voit....

mardi 4 août 2009

La Barque des ombres et la Carte des vents

« Or à présent tout s'est apaisé, les œuvres sont là, les salles sont vides, le temps est étale, le paysage entre familièrement par les fenêtres, des jours entiers se passent sans qu'un seul visiteur fende cet air absent, foule ces dalles sans écho, s'avance entre ces livres, s'approche de cette barque ou se penche en avant pour déchiffrer tant bien que mal ces écritures hâtives, aux trois-quarts consumées par le feu. »

*****

« Non c'qu'est marrant c'est qu't'as des jours où l'mec i fait visiter lui-même, tu vois, c'est lui qui s'tape tout l'bla-bla genre servante du châtiau et tout, “ et les minots vous touchez pas les tableaux, siouplaît, vous criez pas, vous courez pas ”, et ça c'est quand même assez nul quelque part, bon, surtout si tu vois que déjà c'est quand même sa baraque, au mec, que c'est là qu'i crèche et tout, et ch'ais pas mais moi j'trouve que c'est quand même assez limite, comme plan, genre bon alors maintenant j'vous montre mon pieu, messieurs-dames, et alors oui c'te table c'est là qu'je bosse, enfin ch'ais pas mais moi ça m'gêne un peu, quelque part, même si bien sûr chacun i fait comme i veut hein... »

Renaud Camus, L'Inauguration de la salle des Vents, Fayard, pp. 104 & 154.

lundi 3 août 2009

Les blancs ruisseaux de Chanaan

À Renaud Camus, maître des fenêtres.

Samedi soir, vers sept heures et demie, un vent violent s'est levé avec une soudaineté presque surnaturelle. Nous étions, l'Irremplaçable et moi, installés dans la salle dite “des pierres”, au premier étage du château de Plieux, attendant un hypothétique visiteur qui n'est jamais venu. Peu après, le ciel s'est couvert de gros nuages gris, avant de se faire si parfaitement lactescent que j'eus soudain l'impression d'être devenu l'un des aveugles dont parle José Saramago dans son roman, L'Aveuglement.

Car si les fenêtres permettent très souvent de voir le ciel, elles nous donnent rarement l'occasion de ne voir que lui. Or, c'est ce qui se produit lorsque l'on est assis dans le canapé de la Salle des Pierres. Si bien que, d'un coup, la fenêtre photographiée par Catherine s'est transformée en une sorte de rideau de scène, d'une extraordinaire densité lumineuse, mais dont on sentait bien qu'il ne pouvait s'ouvrir sur rien d'autre que lui-même, sur toujours plus de lui-même.

Quelques minutes plus tard, cette lumière presque métallique s'est nuancée de gris pâle, mais uniquement dans l'un des petits carreaux supérieurs, si bien que la fenêtre parut se faire tableau, s'offrant comme une reproduction inversée de la Stèle noire, ce quasi monochrome de Marcheschi dans lequel elle se reflétait – et où s'agitaient aussi les tentacules pétrifiés de l'invisible arbre mort.

Durant ce temps assez bref, le Calme bloc, sur son socle, nous observait de son sourire incertain, à demi dissimulé derrière son énigmatique et inquiétant masque lovecraftien, changeant et puis encore que sais-je.

dimanche 2 août 2009

Apéritif dans la Salle des pierres

Amicalement dédié à Pascale G. :
nous avons décidé de passer outre
les embûches et les chausse-trapes...