samedi 1 février 2025

Tous au bistrot !

 


Grill-room et taverne au programme de janvier.

vendredi 24 janvier 2025

Jean-François Kahn à la veillée

Rue Hérold, plus ou moins parallèle à celle du Louvre. Le Matin de Paris occupait le bâtiment juste à droite. Le Big Buddah était sur le même trottoir, presque au bout de la rue.

 Mort de Jean-Francois Kahn. Combien de temps nos sœurs metooffettes vont-elles mettre pour nous déterrer, le concernant, une vieille histoire de tripotage fessier sur stagiaire de rédaction ? Je suppose que la présidente de l'officine, avec son terrifiant “sourire à visage humain”, comme Muray disait de Ségolène Royal, doit déjà être en train de remuer la poussière de ses dossiers et de faire appel à la mémoire (trop longtemps refoulée, comme de juste) de tout le cheptel journalistique femelle de ces quarante dernières années.

Mais laissons là ces folles nourries de crème, comme aurait pu les épingler Maître François.

Penser à Jean-François Kahn — chose qui ne m'arrive à peu près jamais quand je suis dans mon état normal — a ramené à ma mémoire la figure de Bernard Veillet-Lavallée, journaliste d'une vingtaine d'années plus âgé que moi. Il travaillait au Matin de Paris, rue Hérold, tandis que je tenais assise au Big Buddah, à six ou sept portes de là, dans la même rue. 

Après le bouclage du journal, il n'était pas rare de voir ce Bernard-là venir s'échouer au comptoir du petit restaurant en question, dont le patron était un autre Bernard, Leroy-Deval, mon ami de grands ris et de franches lippées, d'origine vietnamienne comme son nom tendrait à l'occulter.

Je n'ai pas choisi le verbe “s'échouer” par hasard : Veillet-Lavallée était un splendide et précieux ivrogne. Et il n'était pas si rare de le voir (et de l'entendre...) s'écrouler sans sommation de son tabouret de bar pour s'affaler sur le carrelage, d'où il fallait se mettre à deux pour le relever.

(En ces mêmes temps, au Big Buddah, décidément bien achalandé, on pouvait aussi croiser un tout jeune Claude Askolovitch, frais émoulu du CFJ voisin et encore plus fraîche recrue du Matin. C'était alors un joyeux compagnon, ne répugnant pas à lever le coude si l'ambiance y était, assez éloigné, au moins dans mon souvenir, du pontifiant dispensateur de bonne pensée qu'il est ensuite devenu.) 

Mais revenons à mes deux Bernard. À cette époque où Kahn fut brièvement directeur du quotidien de la rue Hérold — ce devait être en 82 ou 83, il faudrait vérifier —, Veillet-Lavallée était pour lui une sorte de bras droit, et encore plus lorsqu'il est parti avec lui créer L'Événement du Jeudi. Du coup, on le voyait moins au Big Buddah, mais il lui arrivait d'en retrouver le chemin, certains soirs, ce qui me faisait toujours plaisir : j'aimais bien le personnage. 

Un jour que je lui demandais ce qu'il faisait exactement au sein de l'hebdomadaire nouvellement créé, il m'avait expliqué, un peu bredouillant, mi-goguenard, mi-sérieux, que Jean-Francois Kahn avait dix idées par jour : huit aberrantes, une bonne et une géniale, et qu'il lui était à charge, de façon toute officieuse, d'orienter son bouillonnant patron vers les deux dernières, tout en opérant d'habiles diversions pour qu'il oubliât les huit autres. 

C'était au milieu des années quatre-vingt. Vers la fin de la décennie, le Big Buddah a fermé définitivement. Bernard Veillet-Lavallée ne lui a pas survécu longtemps : il est mort en 1990.

Quant à l'autre Bernard, Leroy-Deval, il a fini par aller s'installer au Vietnam, pays qu'il n'avait jamais connu, étant né en France comme tout un chacun. J'espère pour lui qu'il y est encore, et bien vivant.

lundi 20 janvier 2025

Une gloire inattendue

 


Dans les années 1430, Maître Guillaume était un très ordinaire répétiteur de droit, à Paris : personne n'a jamais jugé bon de laisser le moindre témoignage de ce qu'a pu être son enseignement. Comme de juste, il logeait dans le quartier des écoles ; plus précisément à la collégiale Saint-Benoît-le-Bétourné dont il était l'un des modestes chapelains. L'église était ainsi qualifiée car son chœur était orienté à l'ouest et non à l'est comme il est d'usage. Elle était située rue Saint-Jacques, à droite quand on vient de la Seine, entre le boulevard Saint-Germain et la rue des Écoles.

Ce n'est pas non plus son nom de baptême qui risquait de distinguer notre clerc obscur : en ces temps de fin de guerre de Cent Ans, un Parisien sur cinq se prénommait Guillaume. D'où la forge de divers diminutifs pour les différencier, dont nous avons gardé les traces : Guillemin, Guillaumin, Guillermot, Guillot, etc. À l'instar de 99% d'entre nous, Maître Guillaume aurait donc dû s'évanouir sans laisser la moindre trace de son bref passage sublunaire.

Or il advint que, vers 1435 ou 36, il prit en charge un tout jeune enfant, François de Montcorbier, dont il était peut-être vaguement parent, mais rien n'est moins certain. Qu'on ne songe pas à une adoption au sens moderne du mot : il s'agissait plus d'avoir à sa disposition un petit domestique gratuit, chargé d'allumer le feu dans l'âtre les matins frisquets et qu'on envoyait faire les courses à la supérette du coin. En échange, Maître Guillaume entreprit de pourvoir à l'éducation du petit François.

Ce fut à la fois un succès, un échec et un triomphe. 

Un succès car François de Montcorbier devint, au début des années cinquante de son siècle, bachelier puis maître ès-arts, c'est-à-dire licencié ; un échec parce qu'il tourna plus ou moins caillera, au point d'être, à l'orée de la décennie suivante, condamné à la pendaison, peine qui fut commuée en un bannissement de dix années hors de Paris.

Ce fut aussi un triomphe, mais posthume. Car François de Montcorbier, entre ses études et sa condamnation terminale, s'était mis à écrire des vers, encore des vers ; des ballades surtout. Et, quand il fut question de les signer, afin de rendre hommage à celui qu'il appelait son “plus que père”, François décida qu'il quitterait son nom de Montcorbier au profit du sien.

C'est ainsi que le nom de Maître Guillaume de Villon commença à monter au firmament glorieux. À la date où nous sommes, il n'en est toujours pas redescendu.

samedi 18 janvier 2025

Dépénalisons l'assassinat conjugal !

Comme elles sont rafraîchissantes, les pensées saines de Rémy de Gourmont, qui lui vaudraient pourtant la géhenne s'il avait la fâcheuse idée de ressusciter demain matin :

Qu'une femme tue son mâle, ou un mâle sa femelle — qui cela peut-il émouvoir ? Et qui cela peut-il intéresser hormis les statisticiens et quelques philosophes ? Je veux bien que l'on me protège contre les ennemis inconnus, l'escarpe ou le cambrioleur, — mais contre moi-même, vices ou passions, non. L'intervention de la justice en de tels cas est absurde.

S'il avait existé un genre de MetooLittérature au carrefour des XIXe et XXe siècles, j'en connais, dans les parages du Mercure de France, qui se seraient fait méchamment épurer. Même si le bon Rémy, lorsqu'il envisage le surinage conjugal, fait preuve d'un exemplaire sens de la parité et d'un souci louable de la plus scrupuleuse réciprocité.

 

dimanche 12 janvier 2025

Des impératifs wokiformes dans les séries télé


 J'ai déjà noté ailleurs qu'ici (journal de ce mois de janvier, entrée du 7 : un peu de patience, quoi…) que, dans la première saison de Departure, série canadienne et netflicarde, le pilote de l'avion s'écrasant dans l'Atlantique nord était bigame : un couple à voile, l'autre à vapeur, pour faire bon poids. Amusante particularité qui n'apporte rien à l'intrigue générale, et qui reste en soi assez peu crédible, même avec beaucoup d'indulgence post-moderne. 

Dans le premier épisode de la seconde saison — où l'avion de la première a été remplacé par un train —, on nous fait découvrir dès les premières minutes un couple de lesbiennes, en revenant plusieurs fois sur ces deux greluches, qui n'arrêtent pas de rire bêtement, sans doute pour qu'on comprenne bien, stupides armoires à préjugés que nous sommes, à quel point c'est merveilleux et ô combien épanouissant d'être ce qu'elles sont. 

Or, la première de ces deux demoiselles meurt au bout d'un quart d'heure (mini-spoiler : dans le déraillement du train), et la seconde, n'ayant rigoureusement aucun rôle prévu par les scénaristes, disparaît définitivement avant même la fin de l'épisode initial. Il est caricaturalement visible qu'elles n'ont été placées dans leur voiture ferroviaire, et filmées avec tant d'application et d'insistance, que pour “cocher la case” homosexuelle, afin que les producteurs soient bien en règle avec les diktats en vigueur. 

Lesquels diktats ne sont rien d'autre qu'une sorte de nouveau Code Hays, tout aussi imbécile que son ancêtre, lequel fut et reste abondamment moqué par tout ce que nos contrées comptent d'esprits forts.
 
Mais chaque génération de crétins a le code qu'il mérite, n'est-ce pas ?

mercredi 8 janvier 2025

Du “respect humain” à géométrie variable


 Comme prévu dès hier — ce n'était pas très difficile —, les antifascistes en chambre et les Jean-Moulin de boudoir s'en donnent à cœur joie dans le dépeçage de cadavre encore tiède. Au moins, pendant qu'ils gesticulent devant l'écran, ils ne sont pas à se ruiner la santé dans les bistrots : restons positifs. Il se passe pourtant de bien curieuses choses, il est des morts dont le pouvoir était jusqu'ici insoupçonné…

Ainsi, tout soudain, eux qui traitaient depuis des mois les Israéliens d'héritiers de Hitler, voilà nos amis gauchistes saisis par une sainte indignation devant l'antisémitisme de Jean-Marie Le Pen.

Autre chose divertissante : depuis des lustres, tous ces irréprochables concessionnaires à vie du Camp du Bien nous somment d'appeler, par respect humain (moi aussi je peux jargonner, quand je veux...), les nains des personnes de petite taille, les clodos des sans-abri, les aveugles des non-voyants, les sourds des mal-entendants et les culs-de-jatte des personnes en situation de non-jambisme, mais cela ne les empêche nullement de célébrer à son de trompes la mort du “Borgne”. 

De l'indignation réversible et du respect humain à géométrie variable...

dimanche 5 janvier 2025

À ne pas revoir là-haut

 


Hier soir, pour rester dans le climat “Grande Guerre” où nous avait plongés la veille le remarquable À l'Ouest, rien de nouveau (film allemand de 2022) proposé par le gang des Netflicards, nous avons regardé le film d'Albert Dupontel intitulé Au revoir là-haut : mauvaise idée.

Rien ne tient debout, dans ce film : personnages masculins caricaturaux — en particulier le “salaud” interprété par Laurent Laffitte —, féminins inconsistants et superflus, situations téléphonées, coïncidences cousues de fil blanc, invraisemblances historiques, etc. Je pourrais détailler tout cela, mais je me suis suffisamment ennuyé durant deux heures en regardant la chose, je ne vais certainement pas lui consacrer une demi-heure supplémentaire aujourd'hui.

Albert Dupontel, pour qui j'éprouve une certaine sympathie en raison de ses deux ou trois premiers films, a tiré celui-ci d'un roman, prix Goncourt 2013, écrit par un certain Pierre Lemaître, qui a par ailleurs co-signé l'adaptation de son opus magnum : encore un romancier dont je ne risque pas d'ouvrir les chefs-d'œuvre, même dans un moment de distraction. 

Car il me paraît évident que toutes les faiblesses, invraisemblances et absurdités vues hier sur l'écran devaient déjà se trouver entre les pages du livre. Ainsi que le climat frelaté de faux merveilleux qui met fâcheusement en valeur la vague niaiserie de l'ensemble.

Prix Goncourt, n'est-ce pas ? J'aurais dû me méfier : chez Drouant, rien de nouveau...

mercredi 1 janvier 2025

2024 côté cour

 


En décembre, gelés,

Que de temps nous passâmes,

Quasi ensorcelés,

À la Ferté-Vidame !