dimanche 27 novembre 2011

Mais quel embêtement, cette extralucidité des morts !

Grands Normands – sous-titré Études sentimentales – est une sorte de vagabondage littéraire auquel s'est livré Jean de La Varende, dans les années trente du siècle qui nous fuit. Le livre comprend deux douzaines de petits textes, initialement publiés ailleurs, qui parlent de Barbey d'Aurevilly, Flaubert et Maupassant. Dès la seconde page de son introduction, on tombe sur cette anecdote que je n'ai pas cru devoir garder pour moi seul (je précise que j'ai scrupuleusement respecté la ponctuation parfois déconcertante de l'auteur) :

« J'ai connu la princesse de M… Elle trompait outrageusement son confiant mari. Après la mort du prince, cette ardente personne tint, à toute force, malgré les supplications de sa famille et les pleurs de ses enfants, à épouser son dernier amant, hélas ! si jeune. Quelqu'un lui dit : “ Mais voyons… épargnez-nous ce scandale… Du temps du pauvre Guy, vous n'aviez pas de tels scrupules… ”. Le conseilleur lui proposait, en somme, de continuer… La princesse eut cette réponse : “ Du temps où Guy vivait, j'arrivais à lui cacher mes liaisons. Maintenant qu'il me voit, ce n'est plus possible ”… Je salue, bien bas, la princesse moustachue, et remariée. »

Voilà pour le sourire. Quant aux opinions, très tranchées, de La Varende à propos des romans de Flaubert, elles me déconcertent et m'incertisent, dans la mesure où elles sont à l'exact opposé de celles que je pense avoir, lui mettant Salammbô au sommet de la pyramide, alors que ce Flaubert-là, le Flaubert “peplum” m'a toujours profondément ennuyé. Le pire est que ses arguments me troublent, et que me semble bien proche le moment où, soupirant et résigné, je vais devoir relire le roman, en tentant de le faire avec les yeux de La Varende. Et en sachant, moi aussi, qu'il me verra.

C'était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar…

10 commentaires:

  1. Qu'ouïs-je ? vous considérez Salammbô comme un péplum ? Infamie !
    Mais pourquoi diable ?

    RépondreSupprimer
  2. Bon, bon, peplum est sans doute caricatural ! C'était pour l'opposer au Flaubert “normand” qui a toujours eu ma préférence – mais dont La Varende soutient que, justement, il l'est finalement fort peu, normand.

    RépondreSupprimer
  3. "Caressez votre phrase, elle finira bien par sourire" (Anatole France) Mais celle de Flaubert ressemble à "La pierreuse consciencieuse" : "Jamais la garce ne jouira".

    RépondreSupprimer
  4. Je pense que Salammbô est plutôt un roman barbare que Flaubert a écrit avec une joie d'autant plus mauvaise que l'Antiquité avait longtemps été idéalisée par les classiques.
    Il en a peut-être un peu trop fait, mais justement, on est à l'opposé du peplum qui verse à peu près, d'une manière différente, dans le même travers que celui des Classiques.

    RépondreSupprimer
  5. Votre vision de Salammbô rejoint en grande partie celle de La Varende.

    RépondreSupprimer
  6. Elle est très bien la ponctuation du monsieur, très soignée.

    "Sale mambo" ? Pas vraiment du grand Gustave. Pompeux, pompant. Du Shadok sans la voix de Claude Piéplu - autrement dit rien, du grandiloquent, un étalage de statuettes figées dans la graisse d'un vocabulaire de manuel d'histoire antique.

    RépondreSupprimer
  7. Euh, roman barbare, c'est en fait exactement ce que dit Flaubert lui-même de son roman. Il l'avait même annoncé avant de l'écrire.

    RépondreSupprimer
  8. La manière assez rustre dont le désir de Mathô s'exprime pour Salammbô m'a toujours frappé, de même que le sort des malheureuses carpes apprivoisées que Salammbô caresse au début du roman.
    Cela dit, pour ce que je connais de Mathô, il paraît avoir été un orateur habile et un diplomate peu commun.
    Flaubert l'a réduit à un sublime instinct appuyé de fulgurances fortes, et noie cette réduction dans un flux continu de détails exotiques destinés à étourdir le lecteur. Il s'est rendu à plusieurs reprises à Carthage et je le sais un lecteur assidu de Polybe. Son tour de force, c'est d'avoir mis en place une scène très réaliste, mais d'avoir construit des personnages beaucoup trop d'une pièce pour être crédibles.

    RépondreSupprimer
  9. Et la bébête qui monte qui monte guiliguili !

    En ce qui me concerne je ne suis chatouilleuse que sous les aisselles, tout le reste vous pouvez y aller ça ne m'empoisonne le moins du monde.

    Maintenant. hihi..

    RépondreSupprimer
  10. Ca c'est de la main baladeuse...
    JPB

    RépondreSupprimer

La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.