lundi 7 avril 2014

Un grand merci, Monsieur Faguet !


Ce volume consacré au XIXe siècle, des Études littéraires d'Émile Faguet (1847 – 1916), je l'ai commencé par sa fin, parce que j'étais impatient de voir ce que cet académicien bien oublié avait à dire de Balzac ; je l'ai trouvé d'une sévérité excessive, et surtout cédant un peu trop à la propension courante (mais peut-être ne l'était-elle pas en cette année 1887, date de l'écriture de cette étude ?), qui consiste à opposer Honoré, gros balourd à peu près stupide, à Balzac, créateur de génie à la puissance inégalée. Néanmoins, quelques remarques judicieuses et deux ou trois vues pénétrantes m'ont empêché de refermer sans appel le volume passablement défraîchi (publié sans date visible par Boivin et Cie, anciennement librairie Furne, rue Palatine à Paris…) que j'avais entre les mains ; je l'ai repris à son début, c'est-à-dire à Chateaubriand.

Il me faut donc adresser un grand merci à M. Faguet pour ces pages-là. Longtemps, j'ai vécu comme presque tout le monde, c'est-à-dire fort paresseusement, dans cette idée instillée par l'école qu'il fallait certes visiter les Mémoires d'outre-tombe et la Vie de Rancé, à la rigueur l'Itinéraire de Paris à Jérusalem, mais que l'on pouvait sans remords laisser tout le reste de l'œuvre à sa vénérable poussière. Esprit dénué de la moindre originalité, c'est bien ce que j'avais fait. Et soudain Faguet vint. En quelques pages, à mes yeux au moins, il fit reprendre des couleurs aux Natchez, de bonnes joues aux Martyrs ; de là me prirent des désirs d'Amérique, des nécessités de rédemption. Comme dormait dans le rayon le plus bas de ma bibliothèque, celui où les lecteurs de presque soixante ans ne descendent plus qu'avec d'extrêmes prudences, un volume contenant les Natchez, réaugmentés de René et d'Atala, c'est par eux que je vais revenir à Chateaubriand, séance presque tenante.

Pour le coup, injustice collatérale, ce pauvre M. Faguet devra patienter un peu dans les limbes où je l'ai replongé ; à moins que je ne me livre à un délicat panachage entre l'Enchanteur et son exégète.

9 commentaires:

  1. Furne a été le dernier éditeur de Balzac....

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    1. Encore une chose que j'ai dû savoir et que je m'étais empressé d'oublier !

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  2. Elle m'a l'air bien passionnante, votre bibliothèque

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  3. J'ai hâte de connaître votre avis post-lecture. Personnellement je révère les Mémoires de Chateaubriand, mais ses romans me tombent des mains.

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    1. Le début des Natchez et Atala (j'en suis là…) me plaisent plutôt bien ; on y rencontre un Chateaubriand peut-être moins corseté dans sa gloire que dans les écrits ultérieurs. Mais enfin, cela ne suffira pas à déprécier les Mémoires

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  4. (Daudet a des mots assez méchants (mais assez drôles) sur Faguet dans ses Souvenirs littéraires.)

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  5. Tiens, me voilà quelques années en arrière. Au lycée, en plus du traditionnel Lagarde et Michard, j'avais les quatre siècles de Faguet. Malheureusement, ils dorment dans un carton (suite à plusieurs déménagements).

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.