vendredi 19 mars 2010

Il faudrait avoir trois jambes de bois pour ne pas danser la Polska (I)

Elle se prénommait Janina et portait un nom emphatiquement polonais, que je préfère ne pas dévoiler ici, vu la teneur hautement scabreuse du petit récit qui va suivre. Janina est devenue Madame Goux en 1985 et l'est restée jusqu'en 1993, si j'ai bonne mémoire. Flash back.

Janina et moi nous sommes rencontrés sur ce qui s'appelait alors Le Réseau. De petits malins s'étaient avisés, en ces années-là, que les personnes qui appelaient en même temps l'horloge parlante avaient la possibilité de converser entre elles, dans les blancs laissés par les annonces horaires. C'est ainsi que cette bonne vieille horloge était devenue un salon plutôt convivial et assez intensément sexuel – un “lieu de drague”, pour tout dire. Le code était simple : dès qu'un blanc survenait, les quelques hommes en ligne se présentaient et annonçaient ce qu'ils recherchaient : femme, homme, raton laveur, etc.. Les femmes restaient en embuscade silencieuse, ne se manifestant que lorsqu'une voix (ou un prénom, ou autre chose) attirait leur attention. Alors, l'émoustillée demandait à l'inconnu son numéro de téléphone (jamais l'inverse !) et ils n'avaient plus qu'à poursuivre leur conversation par les voies ordinaires. C'est ainsi qu'un soir (une nuit ?), je me suis retrouvé à parler avec Janina. La conversation a été fort longue, se teintant d'un érotisme de plus en plus dense sur la fin – à tel point que je me demande si nous n'avons pas baisé par téléphone, ce premier soir : je crois bien que oui. Contrairement à ce qu'on pourrait penser elles ne sont pas rares, les femmes qui aiment s'envoyer en l'air au téléphone. Et c'est un peu comme le sexe en vrai : plus fatigant pour l'homme car il doit parler presque tout le temps, se creuser la cervelle pour enchaîner les salaceries en crescendo, afin que Madame puisse grimper en mayonnaise de son côté.

Par la suite, étalées sur plusieurs semaines, Janina et moi avons eu plusieurs conversations de ce type, mais nous éloignant toujours plus de l'érotisme initial (l'amour c'est simple comme un coup de fil, mais ça va un moment) pour le remplacer par des confidences babillardes à caractère plus ou moins amical.

Et voilà qu'un soir, elle m'avoue n'aller pas bien. Je m'enquiers, évidemment. Elle m'apprend que sa mère, demeurée en Pologne, est au plus mal et qu'elle craint de ne pas pouvoir la revoir avant sa mort. Car, étant venue en France avec un passeport touristique et étant demeurée à Paris (où elle avait un travail tout ce qu'il y a de plus stable), Janina ne pouvait pas remettre les pieds en Pologne. Sauf – car le rideau de fer commençait à se gondoler sérieusement – si elle épousait un Français, auquel cas les autorités jaruselskiennes ne s'opposeraient pas à son retour dans le monde libre. Et Janina de me demander si, par hasard, dans mes relations, je ne verrais pas quelqu'un susceptible de lui rendre le service de l'épouser.

Je m'entends alors répondre : « Ben, si... Moi ! »


(À suivre...)

17 commentaires:

  1. Mmmh je ne connaissait pas "le réseau" - L'avez-vous alors épouser ? Nous attendons suite. Question de mayonnaise vous comprenez ! Bien à vous ! KTOvox

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  2. Mais Je viens de comprendre: Didier Goux, c'est Barbe-Bleue !

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  3. Georges : amusant mais dangereux, le réseau : c'est comme ça qu'on se retrouve marié huit ans avec une grosse Polonaise.

    KTOvox : C'était encore avant le minitel : l'âge de pierre, quoi. Pour la suite, demain ou dimanche, selon mon courage et mes autres occupations.

    Suzanne : non, moi, c'est Moustache-Bleue : une branche dissidente...

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  4. Excellent, j'attends la suite !

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  5. Bordel ! Un mariage blanc ! Voila Didier Goux qui favorise l'immigration illégale. On aura tout vu.

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  6. La Fiancée qui venait du froid

    Paul se marie avec Zosia pour éviter à cette jeune émigrée polonaise les prisons de son pays. Mais Zosia n'est pas sans charme...

    Toute ressemblance avec des personnages existant ou ayant existé serait fortuite et indépendante de la volonté de l'auteur.

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  7. @Nicolas : blanc, c'est vite dit... Vivement le prochain épisode !

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  8. Une grosse Polonaise, vraiment? Je veux dire était-elle déjà grosse au départ?
    J'attends la suite avec impatience, ne nous cachez rien!
    Orage

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  9. J'espère que la consommation n'est pas restée virtuelle, ce serait dommage !
    :-))

    [Aaaah, les polonaises ! Il a fallu tout un rideau de fer pour les tenir au calme ! :-)) ].

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  10. Janina est devenue Madame Goux en 1985 et l'est restée jusqu'en 1993, si j'ai bonne mémoire. Flash back.

    Vous étiez alors le studieux jeune homme que l'on voit sur votre page d'accueil en-dessous d'ombre agissante?
    Le temps passe trop vite n'est-ce pas?

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  11. Les blancs de l'horloge parlante...J'ai cru jusqu'à ce jour que c'était une légende urbaine.

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  12. Tzatza : en trois épisodes, je pense. Et dès demain si je suis courageux et inspiré...

    Nicolas : relisez mieux : mon mariage servait à favoriser le RETOUR de Janina dans sa Pologne de merde, pas à la faire venir...

    Malavita : on est dans la blogosphère. Donc il n'y a ni personnage existant, ni ayant existé...

    Pluton : demain, en principe...

    Orage : je l'ai très peu connue. Mais, oui, elle ressemblait à une vraie Polonaise – donc grosse.

    En même temps : bonne sous l'homme et aimant cela. Une seule soirée, mais amusante et jouissive...

    Poireau : la suite demain...

    Fredi : le studio jeune homme n'est pas moi. Il est lui.

    Icila : non, non : j'ai tiré deux ou trois coups, grâce à cette horloge...

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  13. Dès qu'un blanc surgissait... Un mariage blanc... Je souligne juste, hein, et je m'eclipse.. Cékoi ce bungalow? Ç'a l'air intéressant ...

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  14. A l'époque du regretté Maréchal,
    jamais vous n'auriez rencontré cette call girl,
    vu que le téléphone rose était interdit

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  15. On songe vaguement à Balzac avec Ève Hanska... Si vous avez qqchose de Balzac (le ventre et la bouille pleine), on ne sait pas encore si votre plombière de Wałbrzych ou d'Ostrów Wielkopolski avait d'Ève la beauté, le charme, la pomme ou la dent. Eûtes-vous de beaux enfants et vécûtes-vous z-heureux ?

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  16. Geargies : ouais, y a beaucoup de "blanc" dans mon histoire. Sauf la mariée, qui ne l'était pas, en blanc.

    Yanka : attendez donc le troisième épisode ! Sinon, on ne peut pas dire que ma première épouse était une beauté, non...

    Tonnégrande : quoi ? Pas de téléphone rose à Vichy ? Bon, c'est décidé : je passe à la Résistance...

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.