jeudi 29 septembre 2011

Kangourou, mon gentil petit kangourou…

Suzanne se demande pourquoi je parle autant de Trenet dans mon journal d'août. D'abord, c'est pas de ma faute : c'est Jérôme Vallet qui a commencé. Ensuite, si on parle de Trenet, c'est parce qu'il est ce qu'il est : le meilleur, le seul. Aucun chanteur ne tient face à lui, de même qu'aucun bidouilleur de bande dessinée n'existe face à Hergé : c'est comme ça – ça ne se discute pas.

On peut parfaitement discuter de tel ou tel chanteur – Brel, Ferré, Brassens, Nougaro même, Aznavour que j'adore et qui berce mon enfance, Félix Leclerc le plus grand et le plus discret, etc., et d'autres. Il n'empêchera jamais que Trenet sera toujours au-dessus de tout le monde. Exactement comme Hergé écrasera tout dessinateur de petits mickeys de par sa simple existence. 

Voilà ce qui se passe : L'époque invente une expression nouvelle, que Modernœud s'empresse de baptiser “art”. Bien entendu, il ne s'agit pas d'art, mais juste de chanson, de BD, de… Mais, alors, à l'intérieur de ces petites sottises, que sont la BD, la chanson, etc., déboulent un Hergé ou un Trenet. C'est-à-dire une sorte de génie qui a décidé de s'emparer de ce nouveau mode d'expression pour exprimer ce qu'il est. Et, soudain, un Trenet ou un Hergé, simplement parce qu'ils existent, juste parce qu'ils sont Trenet ou Hergé, deviennent des créateurs – et sont les seuls.

Qui est Hergé, à part Hergé ?  Quel crétin s'intéresse à la bande dessinée ? Qui est Charles Trenet, à part Charles Trenet ? Quel abruti écoute de la chanson française ?

mercredi 28 septembre 2011

Ça vous rappellera vos vacances pourries…


Août a beau être un mois particulièrement stupide, il possède néanmoins son journal.

mardi 27 septembre 2011

Un vérificateur de mots peut-il être condamné pour négationnisme ?

 Chez Aristide le Vénérable – dont je vous encourage vivement à lire la série de cinq billets qu'il vient de consacrer à l'éducation – le vérificateur de mots m'invite insidieusement à taper le mot suivant dans le petit rectangle prévu à cet effet :

SHOATINE

Shoatine ? Comme sonatine ?Et pourquoi pas concertotenkopf, pendant qu'on y est ? Mes frères philosémites, il est temps de nous dresser contre le négationnisme rampant et abject de Blogger ! Dieu sait pourtant si se dresser contre un rampant n'est pas chose commode.

Miracle ! des pneus neufs…


Depuis dimanche soir on nous clame, de çà mais aussi de là, que le Sénat a basculé à gauche. Curieuse erreur d'optique : en réalité, c'est la gauche qui a basculé en sénat. On peut s'attendre à un boum sur les déambulateurs écodurables et les goûters citoyens. Quant à l'avenir radieux, on sait désormais à quoi il risque de ressembler. Et on comprend mieux pourquoi le parti socialiste se préoccupe si fort des questions de retraite.

(Si vous en voulez davantage…)

lundi 26 septembre 2011

Pourquoi Troy Davis devait mourir

Je demeure, quoi qu'il m'en coûte parfois, opposé à la peine de mort ; de manière sans doute trop viscérale pour être tout à fait recevable, mais enfin c'est ainsi. Il reste que, certains jours, je trouve bien encombrants, borgnes et stupides ceux que cette position m'impose comme “alliés”. Ce que j'ai pu lire çà et là, notamment sur les blogs de gauche mais aussi dans la presse, à propos de l'exécution de Troy Davis, m'a conduit à penser que, toute honte bue, Modernœud restait bel et bien le plus efficace supplétif des partisans de la peine capitale, notamment aux États-Unis, avec ce coassement psittaciste qui est le sien et qui se résume à la prononciation rituelle d'une poignée de mots magiques : racisme, pauvreté, crypto-fascisme américain, etc. – vous compléterez fort bien la liste sans moi, elle n'est pas si longue et elle est multi-usages. 

Puis, hier, je suis tombé sur un assez long billet démontant un à un les pauvres arguments que je lisais en boucle depuis quarante-huit heures. Un texte au titre brutal, que j'ai fait mien malgré ma répugnance envers la peine de mort. Quoiqu'il en soit, ne serait-ce que pour s'extirper un court moment de la pleurnicherie convenue et de l'indignation automatique, c'est un article qui me semble mériter d'être lu avec attention. En voici un très court extrait, pris en son début :

« Il est à peu près impossible de recevoir la peine de mort de nos jours – à moins que vous ne fassiez quelque chose de complètement fou, comme tirer sur un flic devant des douzaines de témoins sur le parking d’un Burger King, seulement quelques heures après avoir tiré sur une voiture de passage au sortir d’une fête.
« C’est ce que Troy Davis fit en août 1989. »



dimanche 25 septembre 2011

Y a-t-il des tilleuls en paradis ?

Comme presque toutes les décisions graves et douloureuses, celle-ci fut prise très vite, un soir du mois dernier : dès qu'il aurait fini de perdre ses dernières feuilles, le tilleul qui occupe désormais tout l'espace entre la maison et la Case serait abattu. Parce qu'il devient trop gros, envahissant, disproportionné à son modeste environnement. Justement, depuis deux ou trois jours, il a commencé de jaunir, sans bien sûr savoir qu'il allait laisser choir sa feuillée pour la dernière fois de son existence. Et voilà que, par ce début d'agonie, je me sens moins assuré du forfait que nous méditons : ces quelques feuilles pâlissantes me sont un reproche ; encore discret, mais on sent bien que la pression va aller s'aggravant. Alors, je m'arme, me cuirasse et me caparaçonne. Lorsque mes yeux se portent vers l'arbre, je ne manque pas de lui adresser les plus vifs reproches quant aux saletés qu'il épand à plaisir sur la terrasse et dans les gouttières, d'un bout du printemps à l'autre de l'automne. Je lui assure que nous serons bien soulagés lorsque, lui disparu, nous pourrons enfin voir un bout de ciel au-dessus du jardin – et je feins de ne pas entendre les protestations piaillées des oiseaux qui comprennent bien que leur restaurant d'hiver est promis à déménagement. Je me comporte comme la Françoise de Proust, qui insultait le poulet du dimanche lorsque celui-ci ne se laissait pas tuer assez facilement à son gré. Et, sachant que le voisin d'en face viendra récupérer et débiter le colosse pour se chauffer de lui cet hiver, je tâche de ne pas trop écouter la petite mirlitonnade de Brassens qui tente de me coloniser la mauvaise conscience :

Comme du bois de caisse, amère destinée,
Il périt dans la cheminée…

samedi 24 septembre 2011

Le végétal est l'avenir de la cité


J'avais d'abord pensé déposer simplement la phrase qui me sert de titre chez les modernœuds, où elle aurait eu toute sa place.  Et puis, je me suis dit qu'un petit commentaire ne saurait nuire. Le végétal serait donc l'avenir de la cité. On imagine sans peine le choc que cette sentence a pu provoquer sur un aussi simple esprit que le mien, moi qui restais sottement persuadé que les cités s'étaient en grande partie édifiées contre le végétal, contre la nature en général, afin de séparer l'homme de son état antérieur – et de l'en séparer définitivement. L'auteur de cette sentencieuse modernerie – appelons-le Louis-Marie Guignoletto, pour lui apprendre –  n'est pas le premier couillon venu, puisqu'il est président du Conseil de développement d'une assez grande ville française. Il a été interviewé par ce mensuel qui s'intitule Notre temps et qui s'adresse aux préretraités, retraités et autres futurs morts de-dans-pas-longtemps, mais toujours dans la bonne humeur et un idéal de solidarité : je me demande encore avec une certaine stupéfaction comment un tel torche-fouinedé a pu atterrir entre mes mains, mais passons. 

Donc, Louis-Marie Guignoletto, du haut de sa présidence, se pose des questions essentielles, telles que : quels sols inventer (c'est moi qui souligne) pour économiser l'eau ? Quels arbres privilégier au cœur des cités ? De quels végétaux entourer le tramway ? Dans les temps anciens, l'homme en proie à ce type d'interrogations vertigineuses portait un nom simple et connu de tous : il était jardinier. Ensuite, il a muté en horticulteur. De nos jours, un Louis-Marie Guignoletto est “docteur en sciences de la terre”, il organise des colloques, fonde des associations (c'est marqué dans le journal), invente des sols et psychanalyse le tramway pour savoir auprès de quelle plante il s'épanouirait le mieux dans sa nature profonde de tramway – son grand rêve restant in fine de pouvoir enfin “concilier ville et végétal”.

Il va de soi que Louis-Marie Guignoletto ne circule qu'à vélo et qu'il est payé sur les deniers publics.

jeudi 22 septembre 2011

Le retour de GI Joe plein d'points

À la mémoire d'Olivier P.

Il y a maintenant quelque temps que je serre les fesses et compte les jours. Simultanément. Les fesses par peur du gendarme, les jours en raison d'une hâte calendaire à voir arriver le 9 octobre. Car, en ce jour de 2011, il y aura trois ans révolus que je circule sur les routes avec trois malheureux points sur mon permis de conduire, suite à certaine soirée malencontreuse mais néanmoins fort agréable. Par conséquent, ayant muté depuis lors en un conducteur modèle, respectueux des interdits routiers et de la maréchaussée chargée de les faire appliquer, je ne me tenais plus de parvenir enfin à ce 9 octobre qui me verrait récompensé de mes efforts et de ma vertu. 

Et l'angoisse montait gentiment. Le week-end dernier, par exemple, au volant de mon “véhicule de remplacement” dénué de limiteur de vitesse, j'ai parcouru sept cents kilomètres environ, le nez rivé sur mon tableau de bord – ce qui est très dangereux – afin de ne pas dépasser les allures fatidiques. Hier matin encore, je me disais qu'il me restait dix-sept jours à tenir…

Qui m'a inspiré, hier soir, d'aller relire de vieux et miens billets dans les tréfonds de ce blog ? Bien m'en a pris quoi qu'il en soit, puisque je me suis avisé que si le 9 octobre 2008 était bien la date à laquelle la préfecture d'Évreux m'avait rendu mon permis de conduire, après six mois de suspension, la condamnation correspondante avait, elle, été prononcée par le tribunal de Versailles un mois plus tôt, soit le 8 septembre 2008. Par conséquent, voilà déjà quatorze jours que je roule avec un permis gonflé à bloc de ses douze points – et je ne le savions point. J'aurais pu traverser la Champagne et les Ardennes à des vitesses frôlant la démence, au lieu de traîner la gomme tel un socialiste allant voter au premier tour de la primaire. Mais enfin, me voilà redevenu un citoyen à part entière. Et ça, c'est bon.


Le titre, un peu énigmatique pour les nouveaux venus ou les amnésiques, j'en conviens, trouvera son explication dans ce billet, ainsi que, par ricochet si je puis dire, dans cette petite vidéo québécoise. Quant à la dédicace, certes un peu solennelle pour un aussi anodin billet, c'est qu'Olivier Porret, victime de la même mésaventure que moi quelque temps auparavant, avait su se montrer très encourageant et réconfortant à l'occasion de ma “chute” – d'où ce modeste signe fraternel de notre petit monde sublunaire.

lundi 19 septembre 2011

Des jurons dans la ville des sacres


Retour des lointaines et passablement pluvieuses Ardennes, où nous fûmes superbement reçus par Nefisa-ma-nièce dans la très belle maison familiale du XVIe siècle, nous avons fait une halte à Reims pour y revoir la cathédrale. Je voulais aussi visiter le palais du Tau, qui se trouve être l'ancien palais archiépiscopal, afin que nous puissions tout à notre aise y faire nos dévotions royalistes à la Sainte Ampoule qui s'y trouve présentée. Mais le palais en question a ce mauvais goût d'être fermé le lundi, ce qui m'a amené un juron sonore en bord de lippe. Ensuite, nous avons réussi à ressortir sains et saufs de la ville des sacres, malgré l'absence de Roselyne pour nous guider.

Bref, on est bien rentré, le chat nous attendait et n'a pas manqué de nous faire savoir ce qu'il pensait de notre défection de presque trois jours. Nous avons également récupéré les deux gros poilus au chenil, et il ne nous reste plus qu'à attendre calmement qu'il soit une une heure décente pour songer au traditionnel apéritif de retour.

Mais, tout de même, ils pourraient envisager de fermer le palais du Tau un autre jour que le lundi.

samedi 17 septembre 2011

Liliane, fais les valises, on file à Sedan


La faculté nous ayant fermement ordonné, à l'Irremplaçable et moi-même, une cure anti-blog de trois jours, nous partons pour les Ardennes séance tenante et serons probablement de retour lundi en début d'après-midi. D'ici là, les commentaires seront fermés un peu partout : des brassards de deuil sont à votre disposition à l'accueil et une cellule de soutien psychologique ne devrait pas tarder à être mise en place. Tâchez de survivre.

vendredi 16 septembre 2011

Salvador Allende ou : le 11 septembre, même les mythes s'écroulent


« (…) une des autres cibles du gouvernement Allende fut la presse et la liberté d’expression : attaques contre les journaux El Mercurio, La Segunda, Tribuna, Mañana, etc. ; nationalisation de la maison d’édition Zig-Zag ; tentative de prise de contrôle de la Compagnie Manufacturière de Papiers et de Cartons afin de s’assurer du monopole de la production de papier pour censurer la presse d’opposition ; tracasseries multiples contre la chaîne de télévision Canal 13 ; harcèlements et agressions sans fin à l’encontre de journalistes d’opposition jusqu’à des cas de tortures ou d’enlèvements. Les derniers mois du régime marxiste virent s’installer une répression généralisée et des assassinats fréquents d’opposants, mais aussi de travailleurs et de défavorisés (comme le dénoncera d’ailleurs l’extrême-gauche chilienne). En novembre 1972, se trouvant dans l’incapacité de mater des soulèvements d’ouvriers et de mineurs dans différentes provinces du pays, Allende appela l’armée à participer à son gouvernement et intégra trois militaires de haut rang à son cabinet pour donner l’illusion à la population de la recherche d’un apaisement social. (…) »

Je ne découvre qu'aujourd'hui ce long, fourni et remarquable article, publié le 11 septembre dernier sur un site dont j'ignorais encore l'existence il y a une demi-heure. L'ironie de l'affaire est que j'ai pu le découvrir grâce à l'obligeance de mon schtroumpf rouge préféré, j'ai nommé le camarade CSP, qui l'a mis en lien dans son dernier billet. Bien entendu, notre zébulon en-pointe-dans-les-luttes feint de croire qu'il s'agit là d'une justification des exactions commises par la junte de Pinochet, alors que tout est centré sur les méfaits du gouvernement Allende.

Enfin, bref, j'encourage vivement chacun, mis en humeur par l'extrait que j'ai donné plus haut, à aller le lire in extenso. Ou ne varietur. Ou nihil obstat. Enfin, un truc en latin.

mercredi 14 septembre 2011

Va chemine, va trottine, va petit âne…

On s'interroge souvent de savoir pourquoi et selon quel mode les parents ont soudain perdu tout semblant d'autorité sur leurs enfants. On le fait avec gravité, pesamment, comme Modernœud fait désormais toute chose malgré son gros nez rouge et sa perruque de paille, on colloque, on table-ronde, on interroge les astres, les pédopsychiatres dansent autour du feu de camp, les sociologues jouent à chat, etc. : tout se passe normalement, sauf qu'on ne trouve pas de réponse vraiment satisfaisante.

Pourtant, elle est là, évidente, simple et tranquille. Il suffit de déambuler durant une vingtaine de minutes dans les rues rectilignes de Levallois-Perret : lorsque vous aurez croisé votre quatrième adulte, mâles et femelles confondus, juché sur une trottinette, elle vous apparaîtra – et vous vous étonnerez de ne l'avoir pas aperçue plus tôt.

Ensuite, bien sûr, il reste à se demander pourquoi et selon quel mode Modernœud a un jour décidé de se vautrer dans le plus pitoyable des infantilismes et de revendiquer hautement son abaissement – si je puis dire. Et, là, c'est pour le coup que l'on se retrouve vraiment pieds joints au bord du gouffre.

mardi 13 septembre 2011

Couver l'enfant grandi de son œil maternel

Le bas du rez-de-chaussée de l'immeuble abritant mes coupables activités professionnelles est de nouveau en train de se recouvrir de tags, depuis qu'a eu lieu la rentrée “scolaire” au lycée le jouxtant. Au milieu de cette forêt renaissante, je suis tombé sur celui-ci, tout modeste, dans un recoin de fenêtre, ne se poussant nullement du col, à peine sûr de sa propre existence – un tag chuchoté, si l'on veut :

Sabrina
Nique ta maman

Comment qualifier cela, cette euphémisation, cet adoucissement du réel ? D'insulte light ? D'imprécation bisounours ? De blasphème câlin ? Ou plus simplement faut-il y voir une déclaration d'amour à la limite de l'autisme ?

Autiste, autiste était mon âme
À cause, à cause d'une femme…

Confit en dévotion

Malgré ses brevets d'athéisme dûment paraphés, et avec son petit autel portatif voué au culte de l'Autre, qu'il déplie dès que l'occasion s'en présente, tel un bateleur ses tréteaux, Modernœud n'est rien d'autre que la version abâtardie, chue hors de toute transcendance, d'un chrétien à la façon ancienne et point encore tout à fait disparue. Il ressemble à un chrétien comme un canard sans tête parvient encore à ressembler, un temps, à un canard.

lundi 12 septembre 2011

Art Spiegelman donne une leçon aux blogueurs


Hier, fin de soirée, j'ai attrapé au vol, sur Arte, un documentaire consacré à Art Spiegelman ; émission sagement chronologique, mais faite essentiellement d'un long entretien avec l'auteur, coupé d'interventions souvent pertinentes d'autres personnes – donc intéressante. À un moment, parlant de la renommée planétaire qui a fondu sur lui après la publication de Maus, et de ce qu'elle a pu changer pour lui, Spiegelman a soudain marqué une courte pause avant d'ajouter, moins pour la caméra que pour lui-même, semblait-il :

« Ce dont je suis le plus fier c'est d'avoir résisté à la tentation d'avoir un avis sur tout… »

Puis, regardant de nouveau en direction de son interlocuteur invisble de nous, et avec un sourire :

« Je ne suis pas devenu l'Élie Wiesel de la bande dessinée ! »

dimanche 11 septembre 2011

Pendant ce temps, par les plaines de la Manche…

Le château de Belmonte, sis au sommet du village portant ce nom, qui vit naître le poète Luis de Leòn et se trouve dans la province de Cuenca, le château de Belmonte est malheureusement – malheureusement pour la rêverie – un peu trop jeune pour pouvoir s'enorgueillir d'avoir joué son rôle dans la Reconquête de la terre d'Espagne sur l'engeance sarrazine – mais peut-être une seconde chance lui sera-t-elle donnée un jour prochain. Néanmoins, dès à présent, il devrait être encore assez orgueilleux pour impressionner une horde de blogueurs polémicards et les dissuader de nous suivre plus avant dans cette Castille qui m'est chère. 
C'est pourquoi, fuyant les criailleries du siècle, je me dirige vers lui, sur les pas de Don Quichotte et de Sancho Pança, dont je me suis brusquement décidé, hier, abandonnant pour un temps DeLillo et tous les autres, à lire enfin la deuxième partie de leurs mirobolantes équipées. Nous sommes d'abord passés par El Toboso, afin d'y rendre hommage à Dame Dulcinée, qui nous reçus fort mal de par la malignité d'un quelconque enchanteur. Puis, après avoir terrassé le chevalier des Miroirs, dompté les deux féroces lions destinés au roi de toutes les Espagnes et fait goberge quatre jours durant chez le bon Don Diègue et son fils poète, nous sommes repartis à travers cette Manche où les nuits sont plus profondes que partout ailleurs, probablement à cause du silence qui les ouate. Si Rossinante marche bon train et si nul géant ne se dresse, si encore aucun convoi ne nous bloque aux portes d'Aranjuez, nous espérons dormir demain soir à Tolède. D'où nul ne recevra de carte postale : je n'y suis pour personne.

samedi 10 septembre 2011

Que faire ? s'interrogeait Lénine. Et encore, il n'avait pas de blog…

C'est ce qui s'appelle se prendre dans ses propres filets. Un jour, vous décidez d'ouvrir un blog – idée qui, en soi, aurait dû suffire à vous alarmer sur votre santé mentale. Dans la foulée, vous choisissez de le faire sous votre nom véritable et de laisser les commentaires ouverts et totalement libres, sauf si certains devaient vous expédier dans l'un des culs de basse fosse que Modernœud creuse à plaisir. En réalité, vous n'avez rien choisi du tout, les deux choses se sont imposées à vous de manière tout à fait spontanée et naturelle – vous n'y avez même pas pensé, en fait ; et d'autant moins, dans le cas de la seconde proposition, que vous étiez fortement persuadé n'avoir jamais de commentateurs, ou alors vraiment très peu. En tout cas pas prou. Sauf qu'ils ont débarqué, les commentateurs. Pas par wagons, mais tout de même. Pour les neuf dixièmes d'entre eux, vous n'avez qu'à vous en féliciter, ou au moins vous en réjouir. Demeurent les dix pour cent.

Ceux-ci se divisent encore en deux. D'abord les trolls authentiques et assumés ; on s'en débarrasse en fin de compte assez facilement et sans même avoir à sortir le chevalet de torture du grenier. Il reste les autres, ceux qui commencent par vous laisser une phrase ou deux par jour, généralement en rapport avec le sujet de votre billet, et que vous accueillez sans méfiance car ils ne disent pas que des sottises, et même en profèrent assez peu. Généralement il s'agit de personnes n'ayant pas elles-mêmes de blog, ai-je cru remarquer. 

Puis, leur babillage s'intensifie et s'éparpille tout à la fois, menace de virer à la logorrhée. Désormais, se sentant chez vous comme chez eux, si le sujet du jour ne les inspire pas plus que cela, ils ne se gênent pas pour parler d'autre chose – et entre eux de préférence. Bientôt, lorsque vous vous levez matin, vous les retrouvez là, au milieu de votre salon, poursuivant leur petite conversation de la veille, les pieds sur la table basse. Certains s'étonnent que vous n'ayez pas encore mis le café en route. Un peu plus tard ils vous signaleront sans trop de précautions oratoires qu'il est déjà passé midi et qu'il commencerait à faire faim…

Légèrement agacé de cette présence continuelle et encombrante – ils semblent vissés au canapé que vous aimeriez bien, de temps en temps, offrir à vos hôtes de simple passage –, vous vous permettez deux trois fines allusions destinées à leur faire comprendre que vous n'auriez rien contre un peu de calme et d'espace, pensant être tout à fait clair. Lettre morte. 

À partir de là, vous devrez vous résigner à l'un ou l'autre des palliatifs que vous aviez rejetés au départ de cette belle aventure : activer la si mal nommée modération des commentaires, voire radicalement fermer ceux-ci, comme le fit tout à l'heure l'ami Georges dans sa grande sagesse – mais aucune n'est pleinement satisfaisante, bien entendu. Si vous avez la chance d'avoir une Irremplaçable à domicile, vous pouvez aussi la laisser monter au front afin de ventiler les fâcheux façon puzzle : elle fait cela très bien.

Il restera que vos squatteurs auront réussi à vous faire faire ce que vous ne vouliez pas, à vous contraindre. Et il n'est pas interdit de penser que certains iront encore s'offrir la posture du martyr de la liberté d'expression ou ironiseront sur votre “reniement”, alors même que ce seront eux, au bout du compte, qui vous y auront poussé.

vendredi 9 septembre 2011

Murray Perahia sur la file de gauche

Le problème, lorsqu'on écoute de la musique tout en étant aussi sourd que je le suis, c'est qu'on n'est jamais bien assuré de ce qu'on entend. On ferait mieux, alors, de garder pour soi ses impressions, mais ce billet constitue la preuve que je n'ai pas encore atteint ce niveau de sagesse. Le mal-entendant qui se mêle de l'ouvrir s'expose généralement à deux sortes de regards en retour, qui ont tendance à s'exclure mutuellement : mi-incompréhensif, mi-consterné s'il vient de proférer une énorme sottise ; légèrement ironique lorsque, au contraire, il a énoncé une évidence, présenté un pont aux ânes comme une précieuse découverte personnelle. Ni l'un ni l'autre n'est agréable à endosser (endosser un regard ? Mon pauvre ami…), j'ai pourtant décidé de braver l'un et l'autre.

Ce matin, peu après le péage de Mantes-la-Jolie, je me suis retrouvé aux prises avec le concerto n° 24 de Mozart – K 491 si ma mémoire est bonne. Dès les premières mesures, en fait toutes celles qui précèdent l'entrée du piano, j'ai été frappé par la ressemblance entre ce mouvement initial et le début de l'ouverture de Don Giovanni. À tel point que je me suis demandé comment cette parenté avait pu ne pas me sauter aux oreilles plus tôt, lors de précédentes écoutes : même brutalité minérale de l'orchestre, même abrupt, même impression écrasante de destin programmé, de tragique irrémédiable. Lorsque le piano s'est mis en jeu, l'évidence s'est rapidement obscurcie, mais sans disparaître jamais complètement jusqu'à la fin du mouvement.

Et bien entendu, une fois de plus, je me suis découragé de ne posséder aucun des outils qui m'auraient permis d'étayer ou de rejeter ce rapprochement qui s'était imposé avec tant de force durant quelques minutes. J'étais, à ce moment, si bas dans ma propre estime que j'ai failli manquer l'embranchement de l'A 14.

jeudi 8 septembre 2011

Tu joues gagnant, tu sors Placé

Est-ce que les écologeâtres ne commenceraient pas un peu à nous séouler avec leur indignation surjouée et leur judiciarisme compulsif ? C'est vraiment une insulte, Coréen national, vous croyez ? Et, si oui, l'insulte est où, d'après ces bons apôtres élevés sous la mère ? Dans “Coréen” ? Mais alors, ils sont racistes, asiatophobes – et c'est très vilain.  Dans “national” ? En ce cas, tout ce qui comporte ce mot devient une insulte. Fête nationale ? Gros mot ! SNCF ? Injure ignoble ! Etc.

Le plus drôle est sans doute ce qu'on nous apprend ou rappelle sur ce blog : qu'il y a encore cinq ou six ans, l'ami Jean-Vincent se présentait lui-même comme “le Chinois de Jean-Paul Huchon”. Et ça le faisait rire, en plus ! Il paraîtrait même que le surnom lui serait resté chez les Verts, pour des raisons pas toutes reluisantes. Mais aujourd'hui, Jean-Vincent ne rit plus, il se fâche même tout rouge, crie au racisme et dégaine le gros bâton judiciaire que lui tendent obligeamment ses petits camarades.
La conclusion me semble s'imposer d'elle-même : M. Placé n'est ni un Coréen ni un Chinois, c'est un guignol.

mardi 6 septembre 2011

Je voudrais te consoler du mal que tu m'as fait


Ygor Yanka est de retour. De retour où ? Lui-même ne le sait sans doute pas encore très bien, mais enfin le fait est qu'il est là, quelque part entre les contours de sa propre existence. Et si le mauvais rêve est loin d'avoir perdu ses pouvoirs, du moins a-t-il commencé d'en ressaisir les rênes.

Son tout nouveau blog a bien évidemment pris place dans ma blogroll à peine sorti des limbes. Il l'inaugure par un texte d'une densité noire, mais dans lequel pourtant quelques entrebâillements de lumière se devinent. Enfin, je crois.

lundi 5 septembre 2011

Nom de roman : Les Noms

 Certains romans, à traverser, sont comme une grande place, dans une ville où l'on serait débarqué de la veille, à l'architecture presque incompréhensible, et peuplée de gens qui parlent dans une langue opaque, ou même certainement dans plusieurs langues. On s'y sent radicalement isolé, il y aurait une certaine appréhension diffuse. Pour autant, nulle envie de s'échapper avant de l'avoir pleinement arpentée : il faut s'emplir de l'étrangeté qu'il y a à être là, faire le compte un peu maniaque de toutes les énigmes qui se refusent, s'efforcer de discerner les rapports qui se diluent à peine repérés.

C'est justement l'effet que produit sur moi, après 350 pages lues sur 450, ce roman de DeLillo : Les Noms. À la lettre, je ne sais pas ce que je fais là, mais n'éprouve nullement l'envie de le quitter. Je lis des phrases, j'écoute parler des gens et, d'une certaine façon, je savoure mon incompréhension. Tout se passe en Grèce, où je ne suis jamais allé, et il n'est pas impossible que le roman utilise l'alphabet grec dont j'ignore à peu près tout, ce qui expliquerait beaucoup de choses. En réalité, la seule question qui vaille est de savoir si, à la dernière page du livre, je parviendrai à en ressortir.

dimanche 4 septembre 2011

Le sens de la nuance des antisémites d'extrême gauche


Parfois l'indignation dont nos ânes gauchistes font profession prend de drôles de couleurs. Tenez, juste pour se mettre dans la saine “ambiance pogrom” qu'un simplet excité instaure en commentaire de ce billet, un court extrait :

« Keski les emmerdes les « sionistes démocrates et faux partageux »? Certainement pas de chier insolemment tous les jours au visage des populations qui sont là confinées dans la misère et la précarité des camps, sous la menace des armes de Tsahal dans une gigantesque prison à ciel ouvert quand ce n’est pas directement dans les geôles obscures de l’armée d’occupation et de colonisation totalitaire Israélienne elle même… »

Enfin, après avoir bavé durant quelques paragraphes, notamment pour reprocher aux ‘indignés” israéliens de ne même pas réclamer la disparition de leur propre pays (c'est vrai qu'ils sont d'une timidité, ces juifs !), notre palestinolâtre rouge brun conclut, toujours sans paraître s'aviser de l'existence, dans sa propre langue, de ce signe de ponctuation appelé communément virgule  :

« L’Israélistan est une base militaire avancée en veille maintenue là en prévision d’autres assauts dans moult autres régions du monde. »

Eh oui, nous y voilà, mon bon Steph K. : la juiverie s'apprête à déferler sur le monde à partir de sa base avancée d'Israël ! C'est limpide ! Couru d'avance ! 

Cela dit, il me semble que quand on a la cervelle en capilotade à ce point-là, on devrait éviter les lectures trop rapprochées des Protocoles des Sages de Sion : à la longue, ça attaque sévèrement l'arrière-bulbe.

40 ans, ça peut vous faire toute une vie


« Et puis je suis devenu un homme. En fait, j'avais quarante ans. Je me suis rendu compte que je voyais l'âge de quarante ans d'un point de vue d'enfant.
– Je connais cela, dis-je. C'était l'âge de mon père, quarante ans. Tous les pères avaient quarante ans. Je lutte sans cesse contre l'idée que j'approche de son âge. En tant qu'adulte, je n'ai eu que deux âges. Vingt-deux ans, et quarante. J'ai eu vingt-deux ans jusque bien au-delà de trente. Maintenant j'ai commencé à en avoir quarante, deux ans avant l'événement véritable. Dans dix ans, j'aurai toujours quarante ans.
– C'est à votre âge que j'ai commencé à sentir la présence de mon père en moi. C'étaient des moments irréels.
– Vous sentiez qu'il vous occupait. Je sais. Tout à coup il est là. On a même l'impression de lui ressembler.
– Des moments très brefs. J'avais le sentiment d'être devenu mon père. Il m'envahissait, m'emplissait.
– Vous entrez dans un ascenseur, et voilà que vous êtes lui. La porte se referme, et c'est fini. Mais désormais vous savez qui il était.
– Demain, dit Kathryn, nous ferons les mères. »

Don DeLillo, Les Noms, Babel, p. 111-112.

samedi 3 septembre 2011

De Riton-la-pipe à Jamel-Debbouze

Je sais, c'est difficile. Riton-la-pipe – dont nous parlions hier –, c'est ce qu'il y a de plus nauséabond, dans le souvenir de cette France d'avant. C'est San-Antonio, une photo noir et blanc, des gamins en culottes courtes et tous terriblement européens, etc. Alors que Jamel c'est la France d'aujourd'hui, en couleur, souriante, sympa, ouverte sur l'ouverture, citoyenne à s'en pisser parmi. Jamel, c'est la France de demain même si t'en veux pas, connard de commis charcutier.

Néanmoins, Jamel, c'est aussi la France qui aime le Maroc. Pas le peuple : le roi. Ce Mohammed VI dont on nous dit qu'il n'est pas forcément le démocrate forcené qu'on aimerait voir en lui. Par exemple, il y a des filles qui ont des choses à dire sur ce qui se passe au Maroc. Celle-ci, par exemple. On laissera de côté la vomition des écolos présents à cette tribune, mais on me fera le plaisir d'écouter cette jeune femme d'un bout à l'autre.

Jamel, l'homme rigolo à la main dans la poche, celui qui est aussi-français-que-toi-et-moi, qui a joué le rôle d'un combattant de la dernière, d'un libérateur du territoire avec une seule main (c'est dire le niveau de crédibilité de ce film de propagande stalinoïde), qui peut parler des banlieues parce qu'il y a vécu quelques années avant de devenir millionnaire en euros, vient de dire qu'il aimait d'amour Martine Aubry. Il y a cinq ans, il aimait Ségolène Royal du même amour. : peu importe. Il nous dit surtout que si on vote pour qui on veut, c'est-à-dire pour qui lui ne veut pas, Sa Majesté va s'exiler. Personnellement, j'en tremble. Je me souviens, j'avais déjà tremblé quand cet abruti de Noah avait dit la même chose, avant de n'en rien faire : je ne veux pas que la France perde ces sommets personnifiés – pour rien au monde – mon pays dépend d'eux, rendez-vous compte.

Et surtout pas Jamel Debbouze. Parce que Jamel, contrairement à ces résidus antéfrançois dont je crains de faire partie, est vachement partie prenante de la démocratie – en général – et des démocraties – en particulier.  L'homme à la main dans la poche, par exemple, tient beaucoup à ce que s'établisse la démocratie en Tunisie, ou en Égypte, ou en Libye. Et surtout, il trouve que la France devrait cesser de martyriser les immigrés dont il essaie de nous faire croire qu'il fait partie. Ça lui fait mal, à Jamel, de voir à quel point nous tyrannisons nos Arabes.

En revanche, il semble tout à fait mythridatisé pour ce qui concerne le sort des Marocains qui osent ouvrir leur gueule en ce moment, juste sous ses oreilles. Et qui, si j'ai bien compris, le paient au prix fort. On a l'impression que les gueulardes du genre de Zineb Razhoui, ça ne l'empêche pas de digérer tranquillement, notre milliardaire aubryesque. Il est vrai que Jamel organise, sourire aux lèvres et main dans la poche, des festivals du rire à Marrakech : en effet, il y a de quoi rire, surtout à Marrakech. Il est possible que Jamel n'ait jamais eu l'occasion de rencontrer Zineb, après tout : ils ne vivent pas tout à fait dans le même monde, excusez-le, notre gnome amusant.

Il lui reste d'être un garçon sensible : si on ne vote pas bien, ça lui fera tellement de peine qu'il nous a déjà menacés de s'expatrier. Il n'a pas dit où, notez.  Mais on devine que ce sera vers un pays où, contrairement à cette France où il est né par hasard, on respecte les droits de l'homme, du citoyen, de l'immigré, du milliardaire-qui-passe-à-la-télé,  du manchot qui joue les combattants et les libérateurs, etc. Le Maroc, par exemple. Ce pays merveilleux dont le prince est un enfant – et où on peut placer son argent sans trop risquer de le perdre.

Petit con.

vendredi 2 septembre 2011

La visite inopinée de Riton-la-pipe

Claude Guéant (à droite sur notre photo, de dos et coiffé d'une jolie casquette) a tenu à accompagner lui-même ses amis roms à la station RER de Saint-Denis.

Je ne vois même pas pourquoi je reviens sur cette pantalonnade, tellement chacun y a été dans son rôle, et principalement nos amis modernœuds qui nous ont tout à trac ressorti les heures les plus sombres de notre histoire de la poche de leur petit blazer, au prétexte qu'une poignée de Roms en situation irrégulière – si j'ai bien compris – avait été véhiculée de Saint-Denis à Bobigny dans des voitures appartenant à la RATP. Je voulais faire remarquer d'emblée que, pour aller de Saint-Denis à Bobigny, et à part l'A86 si l'on est voituré, la RATP est encore ce qu'il y a de plus commode, mais je voudrais d'abord ouvrir une petite parenthèse.

Est-on bien certain que ce qu'on appelle couramment, et sans y penser plus que cela, les heures les plus sombres de notre histoire constitue effectivement les heures les plus sombres de notre histoire ? À chacun sa réponse, bien entendu, mais pour ma part je sais très bien que si on me donnait le choix entre la France de Pétain, toute émaillée qu'elle fût de vert-de-gris, et celle de la grande peste du XIVe siècle avec Guerre de cent ans en option, je n'hésiterais pas une seconde – et d'autant moins que, dans la France du Maréchal, je pourrais retrouver de la famille connue, susceptible de me nourrir. Fin de la parenthèse.

Donc voilà, les fâchistes ont encore frappé, les lou-ou-ou-ou-oups regardent vers Paris, etc. Encore une fois, je n'aurais même pas songé à écrire une ligne là-dessus si, me laissant porter par le vent des blogs, je n'avais atterri sur un dont le taulier faisait remarquer qu'ils n'avaient pas eu droit aux wagons plombés mais que ce devait relever de la simple distraction – ou quelque chose d'approchant. Basculant aussitôt en mode cynique et nauséabond, je me suis dis z'in petto qu'il ne devait bien y avoir qu'eux, les wagons, pour ne l'être pas, plombés. Me demandant d'où j'avais pu tirer une pensée aussi abjecte – mettez-vous à ma place –, j'ai cherché et j'ai trouvé. C'était une remontée de San-Antonio qui, dans un de ses romans – Si Queue-d'Âne m'était conté, je crois bien – évoque un prostitué travesti, poétiquement nommé Riton-la-pipe, dont il dit qu'il avait le fion plus vérolé qu'une roulotte de romanos. (On ne disait pas Roms, à l'époque, encore moins Rroms, en attendant le futur Rrrrroms.) 

De “romanos” à “Roms”, il n'y avait qu'un demi-pas, et pas une beaucoup plus grande distance entre “vérolé” et “plombé”. L'explication vaut ce qu'elle vaut, et je reconnais volontiers que mes glissements sémantiques ressemblent foutrement à des dérapages – lesquels ne risquent pas d'améliorer mon image au sein de ce grand champ de fleurs aux mille parfums suaves qu'est le peuple de gauche.

jeudi 1 septembre 2011

Comment planter sa zone à la primaire socialiste ?


C'est avec une certaine jubilation que je relaie cet appel à la conscience citoyenne de tous mes camarades nauséabonds, les crypto-fafs, les extrême-contre, les désencartés névrotiques, les compagnons de route ne menant nulle part, et tous les autres : il est nécessaire, vital, d'aller massivement voter aux guignolades d'octobre. D'abord parce que ce sera fort amusant, puisqu'on vous demandera de signer un truc par lequel vous affirmerez la main sur le cœur (pensez bien qu'il se trouve – même le vôtre – à gauche, ne vous trahissez pas bêtement) que vous sanglotez d'émotion et d'enthousiasme devant les idéaux de gauche, que vous êtes au bord de vous pisser parmi rien qu'en y songeant, etc. : on n'a pas tous les jours l'occasion d'être félon et parjure. Mais surtout, vous aurez l'occasion  de propulser sur le devant de scène progressiste celui qui ne s'attend à rien moins, de faire porter tous les espoirs de la gauche à des épaules qui tolèrent à peine le poids du tweed. Pour arriver à ce résultat mirobolant, il suffira de glisser dans l'urne le bulletin portant ce nom si beau et si gros d'avenir :


Jean-Michel Baylet