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Le “il” dont il est question ici est le cardinal de Beausset, qui vient d'écrire à Chateaubriand une lettre fort louangeuse à propos de son Itinéraire de Paris à Jérusalem, tout juste paru – nous sommes en 1811. Évidemment, celui-ci ne peut s'empêcher de la reproduire, avec ce mélange de fatuité naïve et de protestation de modestie qui est l'une de ses marques de fabrique ; de celles dont on s'horripile au début des Mémoires pour s'en amuser dans la suite. Du reste, la lettre du cardinal mérite bien d'y figurer car elle n'est pas d'un mauvais lecteur. Et voici ce qu'écrit le prélat, à propos du passage de l'auteur en Égypte :
« Que je vous sais gré, monsieur, d'avoir voué à la juste exécration de tous les siècles ce peuple stupide et féroce, qui fait, depuis douze cents ans, la désolation des plus belles contrées de la terre ! On sourit avec vous à l'espérance de le voir rentrer dans le désert d'où il est sorti. »
Fichtre ! Sa Pourpritude n'y va pas avec le dos de l'ostensoir ! Ignoreriez-vous, Éminence, que la plus pure lumière est sortie de ce peuple péninsulaire que vous calomniez si injustement ? Que nous leur sommes redevables de tout ce qui se fait de beau et de bon en nos contrées, mais qu'il convient de les absoudre énergiquement des haines et violences qui ne furent jamais que par nous propagées ? Hmm ?
Encore sous le choc de ce jugement cardinalice, m'est alors venu le désir de le relire, cet Itinéraire. D'autant que je suis bien sûr qu'il est, lui, sagement rangé dans ma bibliothèque : je l'y ai aperçu, voici quelques jours, tandis que je cherchais un certain Manuscrit, trouvé à Saragosse et reperdu au Plessis-Hébert.
Voilà une excellente idée. Vous allez pouvoir alimenter votre blog avec des citations islamophobes de la plus belle eau pendant plusieurs semaines. Et sans risques : ce n'est pas vous qui le dites, c'est Réné.
RépondreSupprimerAristide : un vrai réactionnaire qui se respecte n'emploie jamais islamophobe, qui fait partie de ce que j'appelle les mots de l'ennemi.
RépondreSupprimerSinon, oui, je devrais pouvoir…
RépondreSupprimerObjection retenue votre honneur.
RépondreSupprimerSinon, vous n'avez jamais pensé à écrire le dictionnaire Goux à l'usage des vrais réactionnaires ? Je suis sûr que ça se vendrait bien.
RépondreSupprimerComme si je n'avais déjà pas assez de boulot…
RépondreSupprimerIl me semble que vous eussiez mieux fait de demander combien c'était payé !
RépondreSupprimer"Ignoreriez-vous, Éminence, que la plus pure lumière est sortie de ce peuple péninsulaire que vous calomniez si injustement ? "
RépondreSupprimerIl semble l'avoir copieusement ignoré. Quel ingrat !
"un vrai réactionnaire qui se respecte n'emploie jamais islamophobe"
RépondreSupprimerOui, le vrai réactionnaire emploie le néologisme de Chateaubriand : "turcophage"...
Bonjour,
RépondreSupprimerTiens... "les mots de l'ennemi"... c'est une marque déposée... par vous même ! (j'ai recherché ce terme sur google et suis donc logiquement tombé sur votre billet du 16 avril 2009)
De l'importance d'être constant...
;o) @+
Tiens, dans le même ordre d'idée, avez vous vu le " DNA project"? On Genetic généalogy : dnaancestryproject: demandez votre kit et entrez les résultats dans la base.... Je vous laisse savourer l'ironie des choses... Geargies.
RépondreSupprimer"Chateaubriand oppose un idéal de liberté enraciné aussi bien dans la démocratie athénienne que dans une théologie de la libération."
RépondreSupprimer(extrait de la 4ème de couverture de l'édition en Folio-Classique).
Que vient faire "théologie de la libération" dans cette affaire ?
Baraglioul : ah, très bien, ce turcophage !
RépondreSupprimerNap : voilà, c'est tout moi, ça : pas très malin mais obstiné.
Pascal : ça anachronise à mort, en effet ! Au dos de l'édition Garnier Flammarion, il y a une appréciation de Proust sur Chateaubriand, c'est déjà mieux.