dimanche 16 juillet 2017

Les nuages qui passent… là-bas…


L'azur est une sorte de barque renversée. Sur son fond défilent des îles frangées, des continents mouvants, des mammifères marins, des enclumes à demi fondues, des visages malades et patients. Au moment où j'allume la deuxième cigarette, l'Espagne se sépare de l'Alaska, poussant devant elle un Portugal dubitatif et frileux, vers le Kamtchatka qui semble s'en foutre, tout à son attirance de l'Est qui l'aspire à goulées régulières. L'Alaska ne l'entend pas de cette oreille, et ses côtes mâchouillées se muent en un profil de rocker agressif, à la banane ostentatoire. La péninsule ibérique prend le large, mais le rocker devient une sorte de goule, dont l'œil est braqué sur Valence et qui avance sa lippe pour aspirer la Catalogne, tandis que l'Asie glacée file au large. La côte des Asturies se morcelle, se convulse, l'Andalousie se tord sous la succion, la Sibérie s'éloigne sans se déformer, et l'Espagne revient vers l'extrême nord de l'Amérique. Un peu plus tard, un éléphant de mer s'adoucit en main ouverte et s'apprête, devenu Dieu, à tendre son index nonchalant vers un Adam invisible, dont le bleu est peut-être l'élément naturel. Enfin tout se défait, et l'on pourrait sans doute en concevoir une espèce de frayeur, si on restait assis là.

15 commentaires:

  1. Que j'aimerai voir un beau ciel aussi poétique. Mais les seuls nuages que nous avons vus hier soir étaient malheureusement les fruits malsains d'un immense incendie cataclysmique.
    Et a plus de 30 km, quelle odeur...
    Un peu de rêve a fait du bien.
    Merci pour ce billet plein de rêves.

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    1. C'est l'avantage de vivre en Normandie : les incendies de forêt y sont exceptionnels…

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    2. Heureusement que là ou le feu n'st pas passé, il nous reste quelques merveilles. Comme les calanques, les cigales et pourquoi pas quelques glaçons et de l'eau fraîche pour l'apéro anisé au bord de l'eau dans une petite crique isolée (il y en a plus qu'on ne pense)

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    3. C'est vrai, hier le ciel était Gris fumée et rougeoyant, l'odeur des pins cramés .... affreux.

      Sur le ciel bleu de ses journées blanches, Didier se fait du cinéma .... pour paraphraser Nougaro 🙂
      C'est joli votre rêverie.

      Hélène dici

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  2. "Nous sommes sur la véranda de notre maison à Shanghai, il fait nuit. C'est la première fois que je vois les étoiles toutes ensemble en voûte dans le noir : si nombreuses, et lointaines, et pressantes au fond de ce gouffre, que je me mets à crier et pleurer. Comme personne ne peut me calmer, mama m'emporte hurlante chez la voisine, la jeune Anglaise qui nous a prêté les ours en peluche de son enfance.
    Sheila me prend sur ses genoux, devant le ciel étoilé, me parle doucement et m'offre une petite bouteille vide sans bouchon dont le goulot m'intéresse. Je regarde le flacon, j'hésite. Vais-je troquer ma terreur contre l'attention portée à cette bouteille, sur les genoux de la grande fille ? Oui, je décide que oui, et l'envoûtement cesse; plus de cris, plus de pleurs, je m'occupe de ma petite bouteille."

    La nuit étoilée - Extrait de : "Le Tournesol de Davos" de Lika Spitzer

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  3. Bel exercice de style. Mais je crains que ce ne soit qu'un exercice de style.
    Aïe! Pas sur la tête

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  4. attention malheureux, cela pourrait être repris par des gauchistes pour confirmer que les nations, les frontières sont mouvantes, contingentes, aussi superflues qu'un vent d'est et qu'au fond venir d'Alaska ou du Zambèze, tout cela au fond est pareil...

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    1. Vous avez raison, j'aurais dû me montrer plus prudent !

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  5. Allez savoir pourquoi, mais le jour où j’ai découvert le mot paréidolie fut un des plus beaux jours de ma vie. J’exagère à peine.

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    1. Et moi, je suis très frustré de l'avoir ignoré jusqu'à ce jour.

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  6. Vous êtes débordé, ou vous vous êtes, enfin, offert un hamac. :.)

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  7. Moi j'y vois le projet imminent de notre excellent tenancier de traverser l'Atlantique en compagnie de son épouse pour aller visiter la belle-famille...

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.