jeudi 12 janvier 2023

Des risques de la lecture en automobile, y compris à l'arrêt

Mais qu'as-tu donc dit, Graham, qu'as-tu donc dit ?

 Il y a parfois des frustrations qui vous tombent dessus sans s'être annoncées. Je me trouvais tout à l'heure à Pacy, dans la voiture – moteur coupé pour sauver la planète –, attendant Catherine qui naviguait entre église et pharmacie – médecine du corps, médecine de l'âme. J'empoigne le second volume de L'Esprit des lettres de Jacques Laurent, que j'ai assigné à résidence sur la banquette arrière afin qu'il m'aide à combler ce genre de menus temps d'attente. J'en étais arrivé à l'article qu'il écrivit juste après la mort de Colette, en 1954 donc ; et je tombe sur ce paragraphe, qui se trouve être le deuxième (c'est moi qui souligne) :

« Mon intérêt, dans les lignes qui suivent, se limitera aux funérailles de Colette. Il n'est pas question du refus, pour une fois digne, de l'archevêché, ni de la sotte intervention de Graham Greene. C'est bien le caractère national des funérailles qui me retient. »

Monsieur Laurent, je vous le dis rondement et sans fioriture : vous m'emmerdez considérablement ! C'est que, depuis plus d'une heure que j'ai lu votre incise malencontreuse, je ne pense plus qu'à cela : quelle fut-elle donc, cette “sotte intervention de Graham Greene” que vous passâtes si cavalièrement sous silence, la pensant, je suppose, connue de tous ? Pas moyen, au moins dans l'immédiat, d'éclaircir la chose ! Et, la découvrirait-on, cette intervention, est-il bien sûr que nous la jugerions aussi sotte que M. Laurent nous le dit ? Allez savoir ! Peut-être y trouverait-on matière à discussion – voire à débat, comme on dit si imbécilement de nos jours.

Le seul avantage des interrogations entre lesquelles je me débattais, faisant presque tanguer l'habitacle qui m'hébergeait, c'est que Catherine, soudain, se trouvait de nouveau assise à ma droite dans la voiture et que j'avais perdu toute conscience du temps, lequel en avait profité pour s'enfuir sans m'en apercevoir.
 
Mais tout de même…

15 commentaires:

  1. Vous trouverez la réponse ici mais je n'y comprends pas grand chose (je suis spécialisé dans l'utilisation de Google pas dans les conneries des protestants ou anglicans et autres catholiques dont au sujet duquel l'archevêque de Paris avait interdit des machins religieux aux obsèques de Colette ce qui avait mis Green en colère. Mais c'est à la dixième page de ce bordel. Je peux vous envoyer une copie d'écran par mail...

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  2. U NE LETTR E D U CARDINA L FELTI N
    Récemment, M . Graham Green crut devoir adresser une
    lettre ouverte à Mgr Feltin pour regretter que l'Archevêché
    n'ait pas accordé des obsèques religieuses à Colette. S. Em. le
    Cardinal Feltin a répondu à M . Graham Green par une lettre
    qu'a publié le Figaro Littéraire. Cette lettre pleine de dignité
    et de précision a été justement admirée par tous les catholiques
    En voici le texte :
    Monsieur,
    Dans le dernier numéro du Figaro Littéraire, vous m'avez
    adressé une lettre ouverte : « A propos des obsèques de Colette ».
    Je n'ai pas l'intention d'ouvrir une polémique, mais j'a i le
    devoir de vous répondre au moins par quelques brèves remarques.
    Vous oubliez que l'Eglise catholique, apostolique et romaine
    est une société qui, comme telle, a ses lois, et vous semblez
    ignorer en particulier celle qui concerne les obsèques religieuses.
    Avant d'en discuter, il eût été bon de la connaître :
    I
    o
    Un baptisé peut avoir droit à des funérailles religieuses,
    à condition que par son attitude il n'ait pas renoncé à cette
    société dont il était devenu membre par son baptême. Quand
    il l'a quittée volontairement et librement, l'Eglise ne veut
    pas lui imposer ses rites ; la loyauté s'y oppose ;
    2° Que d'autres, dans des circonstances analogues, aient
    été parfois enterrés religieusement, c'est vrai ! Mais ou bien
    ils avaient donné avant leur mort des signes de repentir, ou
    bien l'Eglise elle-même avait pu être trompée sur leur situation réelle. Ce n'était pas le cas ;
    3° Si quelques-uns ont été scandalisés par cette décision,
    ce ne sont pas les « esprits avertis ». Ceux-ci l'auraient été par
    des obsèques religieuses. J'en veux pour preuve les multiples
    témoignages que j'a i reçus à la suite de votre article;
    4° Le refus des prières publiques n'interdit aucunement
    les prières privées pour un défunt. L a charité que vous invoquez vous invite même à les lui accorder, afin qu'une grâce de
    pardon lui soit donnée par le Dieu miséricordieux qui seul,
    vous le reconnaissez, peut « décider où commence la faute, où
    s'achèvent les mérites ».
    A ces quelques remarques, je me fais également un devoir
    de joindre pour vous-même, Monsieur, l'expression de mes
    sentiments distingués.

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  3. Je me demande si le sieur Greene, exerçant, entre autres, la profession de "écrivain illustre converti au catholicisme", dans les années d'après-guerre, n'est pas allé sonner à la porte du sus-dit archevêque, pour demander la faveur de funérailles religieuses pour sa "sulfureuse" consœur.
    Qu'en pensez-vous?

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  4. Même avec Google, c'est dur ! Tout ce que j'ai trouvé, c'est : " En réponse au cardinal Feltin, qui avait refusé le rite catholique demandé par le troisième mari de Colette, Graham Greene indigné, écrivit une lettre ouverte, tissée de sarcasmes."

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  5. La sotte intervention de Graham Greene la voilà, mais c'est en engliche, démerdez vous pour la passer dans un traducteur honnête (je ne vais pas tout vous mâcher).
    Graham Greene's letter was fatuous and impertinent.

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  6. On avance : c'est dans Le Figaro Littéraire du 14 août 1954... mais impossible de mettre la main sur cette fichue lettre ouverte au cardinal Feltin ! Je vous passe le relais, vous devriez retrouver ce numéro plus facilement que moi.

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  7. Trouvé des extraits , c'est toujours ça ! ( traduits de l'anglais grâce à Google Translate) :

    " La semaine dernière, dans l'hebdomadaire Figaro Littéraire, le romancier britannique Graham (The End of the Affair) Greene, catholique converti, a pris à partie le cardinal archevêque de Paris Feltin pour sa décision. Green a écrit :

    "C'est le droit de tous les catholiques baptisés d'être accompagnés au tombeau par un prêtre. Nous ne pouvons pas perdre ce droit - comme on peut perdre la citoyenneté d'un pays temporel - en commettant un crime ou un délit, car aucun humain ne peut juger une autre . . .

    « Deux mariages civils sont-ils si impardonnables ? La vie de certains de nos saints offre des exemples encore pires. Certes, ils se sont repentis. . . ."

    « Votre Éminence a donné... l'impression que l'Église poursuit les erreurs de l'autre côté du lit de mort... Est-ce pour avertir vos ouailles du danger de traiter le mariage à la légère ? danger de condamner les autres trop facilement..."


    Traduction en direct
    Commentaires

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  8. Un grand merci – groupé - pour votre aide précieuse ! Me voilà soulagé… jusqu'à la prochaine fois.

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  9. D'après le lien de realist, il s'agirait du FL du 7/81954... introuvable.

    Le plus énervant, c'est qu'on trouve très facilement l'intégralité de la réponse du cardinal Feltin :
    https://www.chapitre.com/PRESS//figaro-litteraire-le-n-435-du-21-08-1954,6820924.aspx

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    Réponses
    1. C'est bon, c'est bon, calmez-vous, respirez par le nez, profondément…

      Vous voyez ? Ça va déjà mieux !

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    2. Non, ça ne va pas mieux ! Je ne supporte pas que la réalité me résiste !

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  10. Putin que c'est con la religion...

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  11. Ma maman chérie adorait Colette et ses chats. Je dois avoir des photos de l'enterrement. Faut que je creuse.

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  12. Et le monsieur Feltin, prélat de son état, a été un habitué de la chose.
    En 1963, il a refusé l'enterrement religieux d'Edith Piaf pour cause de "péché public".

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.