mercredi 28 avril 2021

L'Arche de Noëlle


 Féminiser les noms de métiers est évidemment une très-excellente chose : qui aurait le front d'en douter ? Quelle cervelle (féminisation de l'antique et rébarbatif “cerveau”) dégagerait des vapeurs assez méphitiques pour oser remettre en cause une si formidable avancée, égalitaire et citoyenne à s'en pisser parmi ?

Seulement, le travail ne sera qu'à demi fait si l'on s'en tient là. Il est grand temps, frères bipèdes, d'étendre  cette bienheureuse mesure à tout le champ du vivant, de répandre sur tout le règne animal – on verra dans un troisième temps pour les végétaux, les champignons et les cailloux – les rafraîchissants bienfaits de cette onde égalitaire.

Que Dame rhinocéros se transforme donc dès aujourd'hui en une superbe rhinocérosse, pendant que, sous les mers, demoiselle calamar deviendra une fière calamare et que, sous la ramée, la promise du corbeau se métamorphosera en corbelle – et ainsi de suite. Bien entendu,  pour ne pas risquer une accusation de gynocentrisme, il conviendra de faire de même dans l'autre sens.

Ainsi, que l'otarie mâle qui fait tourner des ballons sur son nez devienne illico un otari, que le mari de la baleine massive se fasse balein et celui de la noire panthère panther (je laisse aux linguistes le soin de déterminer si l'on devra prononcer ce nouveau vocable panté ou si l'on gardera l'ancienne prononciation).

Le cas de la fourmi est un peu particulier. Il conviendrait, je pense, de parler désormais d'un fourmi et d'une fourmie, afin que les deux membres du couple soit correctement genrés. Et puisqu'on parle de la fourmie, il va de soi que le mâle de sa partenaire de fable devra se muer en un cigal.

Une fois ces indispensables réformes langagières admises et utilisées par tous-z'et-toutes, on peut être assuré que les relations entre les différentes espèces animales s'en trouveront délicieusement et définitivement apaisées, ainsi qu'on le constate déjà entre les diverses races humaines-qui-n'existent-pas, depuis qu'elles ont découvert le baume féminisant et se l'appliquent sur les muqueuses tous les matins après la douche.

Et demain, si nous ne le voyons pas nos enfants le verront, on s'émerveillera de ce que la guéparde et l'antilop pourront se croiser dans la savane sans plus jamais se regarder en chiennes de faïence.

18 commentaires:

  1. A ce sujet, connaissez-vous le cri du mâle de la fourmi ? Il cronde !

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  2. Je me suis bien marrée 😀
    Par contre je suis bien embêtée avec tourterelle, puisque le tourtereau est leur bébé.
    Tourteril ça le ferait ?
    Hélène

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    1. À ne pas confondre avec la tourtelle, femelle du crabe tourteau.

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    2. La femelle du crabe tourteau ? Z'êtes certain de ça ? Nan pasque y'en a des qui disent que ce serait plutôt un gloubi-boulga qui s'apparente très vaguement à une boisson houblonnée.

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  3. Moi j'en pince pour le langoust et la homarde !

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    1. Oh, marde alors !

      (Variante : je lève mon verre au marc d'alors.)

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  4. D'accord. Mais "des chevales" ou "des chevauses" ?

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  5. Et pour l'araignée et la loutre comment on fait ?
    Bibi

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  6. Et c’est ainsi qu’un nouveau tube naîtra en été, « é qué s’appelério »
    tous les acariens, toutes les acariennes 🎶🎶
    Hélène

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  7. Et je propose monsieur flamant bleu...

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  8. Merci pour ce clin d’oeil caustique sur les ravages de l’imbécillité ambiante. Cette féminisation débile s’applique-t-elle aussi aux animaux dont le nom de la femelle existe déjà mais sans rapport apparent avec celui du mâle ? Exemple : le lièvre ; la hase...En l’occurrence, le rapport vient de l’origine germanique du mot.

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  9. Cette proposition est naturelle et tombe à point. Il conviendrait néanmoins de faire un pas de plus pour prendre en compte la problématique du genre dans sa totalité pour éviter d'avoir un nouveau pas à franchir un douloureux nouveau pas dans les prochaines années.

    Par exemple, entre l'homme et la femme, nous avons la tafiole (disons un homme peu viril peut-être homosexuel), la tarlouze (l'homme peu viril assurément homosexuel) et ainsi de suite en passant par les trans, opérés ou non. C'est à étudier ces différentes nuances que nous pouvons admirer la richesse de notre langue qui a tout prévu mais nous ne pouvons pas la réduire en traitant le cas de nos amis animaux.

    Vous parlez des guépards et des guépardes mais comment pourrions qualifier les genres intermédiaires d'autant que guépière pourrait porter à confusion ?

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  10. Et les hermaphrodites alors ?
    Hélène

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  11. Beaucoup plus simple et radical : on décrète que tout ce qui s'appelle "masculin" s'appellera désormais "féminin", et réciproquement. Juste 2 mots à inverser, on ne change rien au reste (" homme" "il", etc.s"appelleront des mots féminins, " femme", "elle", etc.des mots masculins), et rien d'autre ne bouge: les féministes seront contentes, et nous, on s'en fout,on ne demande rien.

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.