vendredi 28 mars 2014

L'Enfant ou un déjeuner chez ma mère

Il y a quelque temps, je me suis retrouvé, sur un blog (le mien ? un autre ?) à parler de Jules Vallès. Je me souviens d'avoir affirmé qu'il s'agissait d'un bon écrivain. À peine cet embryon de discussion clos, je me suis rappelé que j'avais lu la trilogie de Vallès au lycée Pothier d'Orléans (grâce à Carlos et à son père, comme à peu près tout ce que j'ai lu à cette époque), et que je n'y étais jamais revenu depuis environ 40 ans ; je pérorais donc dans le vide, comme il doit, je le crains, m'arriver plus souvent qu'à mon tour.

Aujourd'hui, j'étais attendu chez ma mère à midi précise, à Fontaine-le-Dun, à 127 km de chez moi si j'en crois les instances gépéessiennes. Elle et nous autres, les héritiers, avions à trois heures rendez-vous chez un notaire quelconque pour régler la succession de mon père, laquelle ne soulevait ni contestation ni grande masse d'argent (Pauvre je suis de ma jeunesse / De pauvre et de petite extrace / Mon père jamais n'eut grand richesse…) ; et, de fait, on n'y a passé que le strict minimum de temps, lequel, à mon avis, était tout de même du temps envolé, perdu, gâché, stupide… (j'ai encore des adjectifs, mais enfin…).

À un moment, chez ma mère, dans cette maison qui aurait dû être celle de mes parents, mon regard distrait balayant la bibliothèque, j'ai eu la surprise de constater que s'y trouvaient les trois volumes de Vallès ; collection France Loisirs, évidemment. (Ma mère a longtemps été une “fan” de ce système de vente par correspondance ; moi-même, je leur suis redevable d'avoir lu tous les romans de Simenon ; et ils ont même, vers 1999 ou 2000, proposé dans leur catalogue un livre que j'avais écrit, et pour lequel je n'ai jamais vu arriver le premier centime. – On s'en fout.)

J'ai extrait de son rayonnage L'Enfant, qui n'avait pas dû en bouger depuis fort longtemps : le volume datait de 1987, soit trois ans avant que Catherine et moi… Mais justement, voilà l'étonnement. À cette époque (pénible…) de ma vie, je rentrais chaque week-end dans la grande maison de Sologne, afin, d'une certaine manière, de m'y rouler en boule et d'oublier ce qui s'était passé les quatre jours précédents. Mais je sens que je diverge… Je voulais dire qu'il me paraît étrange que, pour une fois, ma mère ait acheté des livres intéressants, en tout cas qui pouvaient nous intéresser ensemble, et que nous n'en ayons jamais parlé (elle m'a assuré aujourd'hui, qu'elle avait lu les trois Vallès, et je la crois).

La conclusion de ce billet ridiculement long est que je lui ai demandé si je pouvais lui prendre son Enfant, qu'elle m'a dit oui, et que je l'ai rapporté ici, comme une sorte de butin discret et précieux. Je l'ouvrirai demain.

15 commentaires:

  1. Tiens ! J'avais oublié ce lascar. J'ai lu ses bouquins à une époque, encouragé par mes parents. Il faudrait que je les retrouve dans la bibliothèque familiale.

    Cela étant, quel Carlos ? Le terroriste ou le chanteur doltosien ?

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    1. Vu que vous avez eu des parents gauchistes, ça n'a rien d'étonnant. Cela étant, je vais, demain et les jours suivants, relire cet homme que j'ai oublié pendant à peu près quarante ans. J'en suis assez excité, je me demande s'il va me "reséduire", comme quand j'avais 19 ans, et si oui pourquoi. De plus, j'ai l'impression que, si Vallès me pogne (comme disent les Québécois, ce la va me conduire à relire Maxime Gorki (notamment La Mère, lue à peu près au même âge. Évidemment, malgré le beau souvenir que j'ai de ce roman, je vomis Gorki tous les matins, depuis que je sais qui il fut vraiment. Bref, je vais me retaper une flopée de lectures de vrais écrivains de gauche, de haute époque, n'ayant rien à voir avec des bagouzés ridicules du genre Sarkofrance (il est si fier que ça de ses mains, cette andouille, qu'il les photographie un jour sur deux ? – Bref…), je vais faire ce que j'ai toujours fait, je crois : ne pas m'intéresser à vos âneries politiques (politiciennes ?) et tenter de découvrir des livres que les militants modernœuds ignorent…

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    2. Sinon, à propos de Carlos, je crois bien en avoir déjà parlé : je ne vais pas y revenir…

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    3. J'ai oublié Carlos et je m'en fous, c'était ma vanne foireuse du jour.

      Belle réponse à un commentaire de passage.

      Je réponds à votre remarque sur Sarkofrance. Les photos de ses mains sont à prendre comme une marque de fabrique, pas "une fierté".

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  2. Hollande qui fat la politique du patronat, Didier Goux qui lit les écrivains gauchistes...Comment vivre dans un monde sans repères ?

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    1. Oui, hein ? On se demande jusqu'où je vais descendre !

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  3. A regarder son portrait on se dit que ça ne va pas très fort.
    Mais vous avez sans doute raison de le lire, car comme le dit Rémy Brague au sujet de son livre "Modérément moderne", avec en sous-titre "Les Temps Modernes ou l'invention d'une supercherie" (qui me paraît avoir été écrit pour vous) : "J'ai pour le socialisme un grand respect : il visait à la justice pour le prolétariat misérable. Mais ses partisans ont, dans les années 1970, abandonné cette quête, lorsqu'une partie d'entre eux a compris que le problème social était soit déjà résolu, soit insoluble, soit ne dérangeait pas les privilégiés qu'ils étaient. Aujourd'hui le Parti socialiste est devenu un parti sociétaliste qui sert à satisfaire les caprices des bobos."

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    1. C'est vrai qu'il aurait aussi le dernier Brague à lire… purée de nous ôtres, je ne m'en sortirai jamais !

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  4. Bonjour Monsieur Goux
    La lecture de "l'Enfant" de Jules Vallès m'avait été imposée, ainsi qu'à toute ma classe, par notre prof. Globalement nous avions trouvé ça chiant. Une vingtaine d'années plus tard j'ai relu ce livre et, sans le trouver aussi lapidairement "chiant", j'ai trouvé le style assez soporifique. Par contre, puisque dans un commentaire ci-dessus vous citez Maxime Gorki, et bien ayant relu son "Enfance" j'ai trouvé son style très évocateur. Gorki brosse rapidement des tableaux de la ville et des personnages de son enfance (Nijni Novgorod) qui sont autant d'instantanés très réussis.

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  5. Monsieur Goux, puisque vous avez "Noix Vomique" dans votre blogroll, que je ne peux pas commenter son article là-bas, et que ça a à voir avec votre propre article, puis-je passer par chez vous pour lui poster un commentaire ?

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    1. Mais je vous en prie, chère amie, faites donc !

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    2. Je vous remercie.
      @ Noix Vomique :
      Au titre de votre article "Ces électeurs que l'on méprise" .. je rajoute "et que l'on hait", car qui dit électeur dit "français", et "français" est un signifiant qui condense tout ce qui est haï par ce pouvoir.
      De ce fait je ne dirais pas, comme vous, que les électeurs s'abstiennent parce qu'ils "se sentent" méprisés : ils entendent très bien les insultes disant le mépris et la haine. Ils ne font qu'y répondre par cet acte en retour qu'est l'abstention. Se retenir d'agir est un acte, autant qu'aller voter.
      Et ce n'est pas Mme Rosaelle, si elle existe, qui me dira le contraire sur l'abstention et les abstentionnistes.

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    3. Y'a le frenssais, et y'a le Français.

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    4. Et nul ne peut les comparer sous peine de se voir poursuivre pour discrimination et non-respect de l'égalité des chansses. Amitiés.

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.