vendredi 29 janvier 2021

Flamberge au vent, on se lance dans le porno !

Gravure illustrant la première scène du roman.
Dans sa biographie de Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord (Talleyrand ou le Sphinx incompris), Jean Orieux nous apprend que, dans la bibliothèque de l'évêque d'Autun, on trouvait, entre autres livres tous impeccablement reliés, le roman “libertin” intitulé Dom Bougre, portier des Chartreux, lequel titre est souvent pudiquement noté : Dom B***.

Le nom me disait quelque chose, mais assez vaguement. Je sollicitai donc l'entremise de Dame Ternette, en priant pour qu'elle ne s'effarouchât point trop de ma requête. Crainte vaine : cette brave omnisciente me conduisit tout droit à un site où, d'un clic malicieux, on pouvait télécharger une édition de 1920 – agrémentée de gravures explicites… – sous forme de PDF, ce que je fis tout aussitôt.

Au passage, grâce à la camériste de Dame Ternette, la friponne Wiki, j'appris que le roman datait de 1741 et qu'on le devait à la plume d'un avocat, Jean-Charles Gervaise de Latouche. 

Dès les premières pages, je fus édifié : “libertin” n'est pas assez dire, “pornographique” conviendrait mieux à ce roman, écrit dans cette langue si agréable, si parfaite, si allant-de-soi que les gens bien nés pratiquaient au XVIIIe siècle. Et si obscénité il y a bien, elle s'éploie dans une atmosphère si joyeuse, si optimiste, dans une telle ambiance presque “Watteau”, qu'on aurait envie de la qualifier d'innocente, voire de virginale, si ce n'était pas un peu abuser du paradoxe. En fait, pour les deux ou trois dizaines de pages que j'en ai lues, ce roman me fait penser à un autre du même siècle, mais postérieur à celui-ci de quarante ans : Le Rideau levé ou l'Éducation de Laure, de Mirabeau.

Wiki la soubrette m'assure que l'un des moines paillards que l'on rencontre dans Dom B*** serait en fait l'abbé Desfontaines (1685 – 1745) qui reste connu de nos jours comme l'un des ennemis les plus acharnés de Voltaire, et néanmoins sodomite fervent, que j'ai récemment croisé à plusieurs reprises… dans l'autre grande biographie de Jean Orieux, Voltaire ou la royauté de l'esprit, lue juste avant celle de Talleyrand. 

Et c'est ainsi que la boucle fut bouclée.

19 commentaires:

  1. Ils sont choupinous ces petits bonshommes la bite à la main, mon cousin !
    Dommage que vous ne soyez pas allé jusqu'à nous faire une citation de cette langue pornographique, si agréable, si parfaite, si allant-de-soi, qu'on en avait la langue à la bouche, comme aurait dit ma nièce !

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    1. C'était mon intention première, figurez-vous. Seulement, pas moyen de surbriller du texte, dans un pdf… et j'ai eu la flemme de recopier tout un passage…

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    2. Avec Adobe Acrobat Reader on peut utiliser "Outils" puis "Commentaire" et surligner du pdf.

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    3. Je me doutais bien que la chose est possible : je voulais simplement dire qu'elle ne l'était pas pour moi, compte tenu de ma nullité en la matière et de mon inaptitude aux acrobaties d'Adobe… dont j'ignore tout par ailleurs.

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    4. Allez avouez-le ! Vous avez préféré le choc des images au poids des mots !

      Bibi

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  2. J'ai dû entendre parler de "Dom Bougre"... mais je garde surtout de sacrés souvenirs de lecture du "Rideau levé", ainsi que d'autres œuvres de Mirabeau. A chaque niveau scolaire son point de vue, soit dit en passant: en cours d'histoire au lycée, on nous expliquait que Mirabeau était un grand orateur qui a joué un rôle à la Révolution française et qu'il a un pont à son nom du côté de Paris. Ô le grand homme! Ce n'est que plus tard, au temps des études de littérature française, que j'ai appris par la bande (!) que Mirabeau a aussi la plume friponne, pour ne pas dire plus...

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    1. Il y a un âge pour le lever de rideau, c'est comme au théâtre…

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  3. Je pense que croiser un sodomite n'est pas dangereux, si ça peut vous rassurer.

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  4. Quelle surprise, n'est-il point ?
    Surtout quand on se replonge dans la comptines que nous apprenons si gaiement à nos petites têtes blondes et qu'ils chantent si innocemment.
    Quelques unes datent de cette époque bénie.
    Comme : Au clair de la lune ou encore il court il court le furet...

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  5. Dans cette position, je mets quiconque au défi d'honorer la dame convenablement. Cette gravure demeure tout de même d'une pudeur assez pitoyable.

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    1. J'aimerais savoir à quoi va servir la pelle de terrassier

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  6. Bientôt le printemps !

    « Y a d'la joie bonjour, bonjour les hirondelles
    Y a d'la joie dans le ciel par dessus les toits
    Y a d'la joie et du soleil dans les ruelles
    Y a d'la joie partout, y a d'la ah ah ah

    Tout le jour, mon cœur bat, chavire et chancelle
    C'est l'amour qui vient avec "je ne sais quoi"
    C'est l'amour, bonjour, les demoiselles
    Y a d'la joie, partout, y a d'la joie »

    Charles Trenet aux bons soins d’Hélène

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  7. Pas tant que ça, c'est juste une bite de moine accrochée au nombril.

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  8. Cette gravure me rappelle furieusement cette scène dans L'argent. Il me se semble juste me souvenir que c'est Saccard qui est dans le fauteuil et que la dame lui fait face.
    Bordayl de moi, me revoilà reparti pour énième relecture de la série... Vous savez que vous me donnez bien du tracas mon cher Didier. C'est que je n'ai pas que ça à foutre, j'ai encore un boulot.

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    1. J'ai moi-même relu la quasi totalité des Rougon il y a peu (j'ai contourné les romans emmerdants : Le Rêve, Une page d'amour, La Faute de l'abbé Mouret ainsi que Le Docteur Pascal…). Daudet et Goncourt pourront bien continuer à traiter Zola de tous les noms, faiseur, plagiaire, etc., il les dépassera toujours de deux ou trois têtes. Disons : deux têtes pour Daudet et au moins trois pour ce pauvre Edmond.

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    2. Nous sommes d'accord pour ces quatre là. Encore que d'aucuns y ajoutent l'Œuvre, et là je m'y oppose de tout mon pauvre poids.
      Daudet ? Il me reste un peu d'affection pour ce gars-là. Sans doute un souvenir de mes petites années de collèges. Quant à Goncourt, faudrait que j'y retourne pour voir, je n'en ai plus qu'une vague teinture datant de la fin des années 80.
      J'ai une fois lu ou entendu qu'à partir d'un certain âge on ne relit plus que les trois ou quatre mêmes livres. Z'avez un avis là-dessus ?

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    3. Dans mon lointain souvenir L'Œuvre était un roman emmerdant. Je l'ai tout de même relu lors de ma dernière visite aux Rougon… et l'ai trouvé excellent.

      Le journal des Goncourt vaut la peine, mais les romans sont, à mon avis, illisibles.

      Pour ce qui est des relectures, j'en fait la triste expérience depuis que toute mémoire un peu agissante semble m'avoir définitivement quitté : en exagérant un peu, on pourrait dire que, au bout de quelques mois, tout livre lu redevient un livre neuf. Dans ces conditions, pourquoi s'embêter à en lire de nouveaux, sachant qu'on n'en retiendra à peu près rien ?

      Cela dit, je continue tout de même à en lire de nouveaux…

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.