Brice venait de se lever, pour remonter au journal ; il était tout juste trois heures, je suis resté seul à la terrasse de L'ambiance d'à côté, afin de finir notre troisième pichet. Passe un vieil homme, seul, aux sourcils broussailleux. C'est à ça qu'il m'a semblé le reconnaître ; à ça et à une certaine qualité de bleu dans le regard, ainsi qu'au bec du nez.
José De Broucker. Journaliste au Monde dans les années soixante ; directeur de la rédaction de La Vie catholique dans les années quatre-vingt. Entre les deux, directeur d'études au Centre de formation des journalistes (CFJ), notamment pour l'année scolaire 1977 - 1978, mon année d'entrée dans cette école.
Est-ce lui ? Presque sûr. Le laissé-je passer sans rien dire ? Impossible. Je me lève, m'avance, il tourne la tête vers moi.
- Pardon Monsieur, seriez-vous M. De Broucker ?
- Je suis l'un des messieurs De Broucker...
- José De Broucker ?
- Oui, c'est moi...
Nous avons passé une dizaine de minutes ensemble, le temps que sa femme sorte de la bibliothèque toute proche. J'ai dû lui dire au moins trois fois que j'étais fort ému de le rencontrer ; il m'a peut-être pris pour un pochtron, mais il arrivait d'une époque où ces sottises n'avaient aucune importance. Il se souvenait de quelques-uns des gens de cette "promotion", dont un ou deux de mes meilleurs amis d'aujourd'hui. Son épouse a fini par arriver et nous avons pris congé, bien poliment, alors que le passé carillonnait à toute volée à l'intérieur de mon crâne.
Et, tu vois, mon pauvre Bergouze, quand "Debrouke", ainsi qu'on l'appelait alors, m'a demandé si j'avais gardé des contacts avec certains de ma promotion, j'ai parlé d'André (il s'en souvenait), de Jean-Louis, pour lui apprendre qu'il était mort, de Luc, de Jef... et je t'ai, toi, oublié.
Lorsque lui et sa femme ont tourné le coin de la rue Baudin, tu m'as sauté à la gueule. J'ai failli courir derrière eux pour réparer. Je suis resté assis : ce n'était pas réparable.
José De Broucker. Journaliste au Monde dans les années soixante ; directeur de la rédaction de La Vie catholique dans les années quatre-vingt. Entre les deux, directeur d'études au Centre de formation des journalistes (CFJ), notamment pour l'année scolaire 1977 - 1978, mon année d'entrée dans cette école.
Est-ce lui ? Presque sûr. Le laissé-je passer sans rien dire ? Impossible. Je me lève, m'avance, il tourne la tête vers moi.
- Pardon Monsieur, seriez-vous M. De Broucker ?
- Je suis l'un des messieurs De Broucker...
- José De Broucker ?
- Oui, c'est moi...
Nous avons passé une dizaine de minutes ensemble, le temps que sa femme sorte de la bibliothèque toute proche. J'ai dû lui dire au moins trois fois que j'étais fort ému de le rencontrer ; il m'a peut-être pris pour un pochtron, mais il arrivait d'une époque où ces sottises n'avaient aucune importance. Il se souvenait de quelques-uns des gens de cette "promotion", dont un ou deux de mes meilleurs amis d'aujourd'hui. Son épouse a fini par arriver et nous avons pris congé, bien poliment, alors que le passé carillonnait à toute volée à l'intérieur de mon crâne.
Et, tu vois, mon pauvre Bergouze, quand "Debrouke", ainsi qu'on l'appelait alors, m'a demandé si j'avais gardé des contacts avec certains de ma promotion, j'ai parlé d'André (il s'en souvenait), de Jean-Louis, pour lui apprendre qu'il était mort, de Luc, de Jef... et je t'ai, toi, oublié.
Lorsque lui et sa femme ont tourné le coin de la rue Baudin, tu m'as sauté à la gueule. J'ai failli courir derrière eux pour réparer. Je suis resté assis : ce n'était pas réparable.
J'ai été fan d'une radio pendant des années. Tous les ans, pour le nouvel an, j'envoyais de petits cadeaux à mes ‘préférés’ (animateurs et autres).
RépondreSupprimerIl y avait une émission en particulier que je ne ratais jamais (j’ai même pu négocier pour avoir certains enregistrements que je garde bien précieusement). Cet animateur là a une place toute particulière dans mon cœur. Il m’a fait découvrir des choses merveilleuses (comme l’opéra par exemple)
Et bien, tous les ans, en envoyant mes petites bafouilles, je l’oubliais… Pas parce que je ne l’aimais pas, loin de là ! Mais parce qu’il était devenu bien plus qu’un animateur radio. Parce que aujourd’hui encore, en écoutant ‘And you and I’ de Yes, j’ai pensé à lui. Il est rattaché à mes plus belles découvertes musicales, il est rattaché à des moments de plaisir intense, quand la musique vous prend aux triples et vous envoie valdinguer ailleurs… loin… loin…
Comme quoi, c’est pas forcément les premiers auxquels on pense qui nous sont le plus chers. Certains sont si profondément ancrés en nous que c’est un peu comme s’ils faisaient partie de nous.
You're right, Miss ! Et il se trouve que And you and I porte aussi pour moi son poids de souvenirs, hors de toute considération musicale.
RépondreSupprimerArrêtez, je vais rougir...
RépondreSupprimer;-)
Rougissez, Chère : c'est une couleur qui sied aux femmes.
RépondreSupprimer... la preuve ! Allez, à très bientôt j'espère.
RépondreSupprimerBon ben voila... vous avez gagné, je rougi!
RépondreSupprimerVotre bungalow fait irruption ici, cela ajoute un côté puzzle au plaisir de la lecture…
RépondreSupprimerLes néons, les Léon, les "nom di d'jeu"
RépondreSupprimerSublime décadence, la danse des panses
Ministère de la bière, artère vers l'enfer
Place de Brouckère
(Dick Annegarn, Bruxelles)
... pour situer un peu les origines du broussailleux mondain catholique, et aussi, parce que, mon Dieu, que puis-je dire de plus intéressant, à mon âge et à l'heure qu'il est ?
"Certains sont si profondément ancrés en nous que c’est un peu comme s’ils faisaient partie de nous."
RépondreSupprimerMademoiselle Ciguë a dit ça très bien déjà !
:-))