De sa démarche quelque peu dindonnante, Niccolò Ludeacci tourna le coin du boulevard de Clichy pour s’engager dans la petite rue rectiligne, déserte à cette heure de la matinée. De toute façon, quelles que soient les heures où il venait ici – et elles étaient nombreuses –, il n’y avait jamais grand-monde. Ce qui était heureux car le cadre supérieur qu’il était (dans une grande banque nationalisée pas encore en faillite) aurait diversement apprécié qu’une foule nombreuse et variée pût le voir pénétrer au Suçodrome.
Parvenu à quelques mètres de la porte, Niccolò Ludeacci s’arrêta pour allumer une cigarette, comme il le faisait à chaque fois : ça lui donnait le temps de vérifier qu’aucun de ses subordonnés ne se trouvait là par un malencontreux hasard. Machinalement, il vérifia la bonne tenue du noeud de sa cravate – après mainte hésitation, il avait choisi la jaune citron ornée d’une multitude de petits pingouins montés sur des skis et coiffés de bonnets rouges : très seyante, décorative tout en restant de bon goût. Il passa la main dans la masse de ses cheveux frisés, qui le faisaient ressembler à Simon & Garfunkel, mais sans Simon. On pouvait aussi penser que Simon s’était réfugié à l’intérieur de Garfunkel, si l’on en jugeait à la proéminence de sa bedaine béruréenne, qui lui servait de cache-ceinture.
Niccolò Ludeacci ne tira que quelques bouffées de sa cigarette, trop impatient d’entrer au Suçodrome. Chaque fois, au moment d’y pénétrer, il bénissait le jour, un an auparavant, où son ami Desiderio Gusto, journaliste considérablement alcoolique et néanmoins charmant, lui avait appris l’existence de ce lieu de délices tarifées et lui en avait indiqué les modalités d’accès. Depuis, il venait là au moins une fois par semaine, en général le mardi. Comme c’était un garçon posé, pour ne pas dire méticuleux, il avait soin d’alterner rigoureusement ses plaisirs : une fois le manuel à vingt euros, une fois le lingual à cinquante.
Mais, en raison d’une expérience malheureuse, il y venait toujours seul. Une fois, il avait entraîné au Suçodrome son ami sénégalais Fabien N’Golo et il l’avait bien regretté : sous prétexte qu’aucun des glory holes n’était assez large pour qu’il y introduisît son “bois bandé”, comme il disait, N’Golo avait commencé par faire un foin de cent mille diables, manqué défoncer la cloison à coups de mandrin, avant d’exiger de Ludeacci le remboursement de ses vingt euros, plus trois bières gratuites au comptoir de L’Astronef, leur bistrot favori. Une expérience éprouvante.
Niccolò Ludeacci jeta un dernier coup d’œil à droite et à gauche. En dehors d’un type occupé à lire Libé, le cul sur un capot de voiture, il n’y avait personne dans la rue. Il approcha son index boudiné de la sonnette, avec un commencement de trémulation pénienne au fond de son pantalon de tergal…
Parvenu à quelques mètres de la porte, Niccolò Ludeacci s’arrêta pour allumer une cigarette, comme il le faisait à chaque fois : ça lui donnait le temps de vérifier qu’aucun de ses subordonnés ne se trouvait là par un malencontreux hasard. Machinalement, il vérifia la bonne tenue du noeud de sa cravate – après mainte hésitation, il avait choisi la jaune citron ornée d’une multitude de petits pingouins montés sur des skis et coiffés de bonnets rouges : très seyante, décorative tout en restant de bon goût. Il passa la main dans la masse de ses cheveux frisés, qui le faisaient ressembler à Simon & Garfunkel, mais sans Simon. On pouvait aussi penser que Simon s’était réfugié à l’intérieur de Garfunkel, si l’on en jugeait à la proéminence de sa bedaine béruréenne, qui lui servait de cache-ceinture.
Niccolò Ludeacci ne tira que quelques bouffées de sa cigarette, trop impatient d’entrer au Suçodrome. Chaque fois, au moment d’y pénétrer, il bénissait le jour, un an auparavant, où son ami Desiderio Gusto, journaliste considérablement alcoolique et néanmoins charmant, lui avait appris l’existence de ce lieu de délices tarifées et lui en avait indiqué les modalités d’accès. Depuis, il venait là au moins une fois par semaine, en général le mardi. Comme c’était un garçon posé, pour ne pas dire méticuleux, il avait soin d’alterner rigoureusement ses plaisirs : une fois le manuel à vingt euros, une fois le lingual à cinquante.
Mais, en raison d’une expérience malheureuse, il y venait toujours seul. Une fois, il avait entraîné au Suçodrome son ami sénégalais Fabien N’Golo et il l’avait bien regretté : sous prétexte qu’aucun des glory holes n’était assez large pour qu’il y introduisît son “bois bandé”, comme il disait, N’Golo avait commencé par faire un foin de cent mille diables, manqué défoncer la cloison à coups de mandrin, avant d’exiger de Ludeacci le remboursement de ses vingt euros, plus trois bières gratuites au comptoir de L’Astronef, leur bistrot favori. Une expérience éprouvante.
Niccolò Ludeacci jeta un dernier coup d’œil à droite et à gauche. En dehors d’un type occupé à lire Libé, le cul sur un capot de voiture, il n’y avait personne dans la rue. Il approcha son index boudiné de la sonnette, avec un commencement de trémulation pénienne au fond de son pantalon de tergal…
Serait-ce un roman autobiographique?
RépondreSupprimerOn le reconnaît tout de suite avec sa cravate à chier...
RépondreSupprimer"Desiderio Gusto, journaliste considérablement alcoolique et néanmoins charmant...."
RépondreSupprimerMonsieur Goux, je vous trouve plus que charmant... (l'Irremplaçable n'a rien à craindre , rassurez-là..)
Une fidèle lectrice
Et au fait qu'il manque de couilles.
RépondreSupprimeril fallait lire "rassurez-la" ... ( quand je whiskyte - un seul pour le moment-, les touches m"échappent
RépondreSupprimer...)
une fidèle lectrice
Un manuscrit encours pour Gérard de V. ?
RépondreSupprimerNaïf : non, un roman "ferroviaire", comme j'en ponds six par an depuis le Précambrien.
RépondreSupprimerCatherine : mais elle est très jolie, cette cravate !
Fidèle lectrice : Rendez-vous sous notre réverbère habituel...
Signé : un fidèle auteur.
On s'en tape : on s'en tape.
Fidèle lectrice : un seul whisky ? Nonsense !
Signé : Fidèle buveur.
Appas : oui, Monsieur. Il me manque 40 feuillet, à écrire e deux jours : ça ira. ensuite, il faudra réfléchir à l'histoire de celui qui doit être rendu le 15 septembre.
La vie de l'Écrivain en bâtiment est un interminable Relais H...
non, présentement j'attaque le troisième...
RépondreSupprimerUne fidèle lectrice
Bon, ça va !
RépondreSupprimerFidèle pochtron.
A la fin, N'Golo tonne et gronde à l'Astronef ?
RépondreSupprimer:-))
[Très drôle ! J'espère ne jamais vous tomber sous la plume azerty ! :-)) ].
Rassurez moi, ce Niccolò Ludeacci n'est pas un ivrogne ?
RépondreSupprimerInterminable Relay. Un camarade rewrita à un époque quelques Exécuteurs. Il faut être solide pour venir à bout de morceaux pareils. Et disposer d'une collection fournie de "Action Armes & Tir" à moins d'en connaître le contenu par cœur. Ah le capo di capo, la cervelle et tout ça....
RépondreSupprimerA, merci, Desiderio. C'est toujours bon d'avoir des nouvelles des copains, même en vacances
RépondreSupprimerCet homme était un virtuose vergien : depuis son enfance, en effet, il était comme habité par un don hors du commun qui, à son corps défendant, animait à intervalles réguliers cet appendice, chez les autres appelé à des fonctions beaucoup plus triviales, de mouvements incontrôlables mais néanmoins fort artistiques qui relevaient parfois du génie –n’ayons pas peur des mots ! –
RépondreSupprimerEt dans ces moments de grâce, son pédicule pénien se mettait à vivre sa propre vie… et ce n’était que frémissements soyeux, frissons hésitants, oscillations ivres, vacillements gracieux, valses nobles, interludes mélodieux, trémolos admirables, impulsions célestes ….. Niccolo devenait alors royal, d’essence divine, violemment transcendant, suprêmement magistral !
Et le tergal, arrogant, se pavanait…
Désolée, Didier, d'avoir osé donner une suite à ta prose....elle a du m'inspirer
@ Appas - on ne les rewritait pas, on les traduisait, nuance. Et on se prête toujours au jeu. On va peut-être même en écrire un. Mais Mack Bolan ne va pas au suçodrome, lui, pas le temps. Il aurait plutôt tendance à creuser des gros trous avec son Automag ou son Desert Eagle - et des plus petits avec son Beretta 93-R.
RépondreSupprimerLe monsieur, sur la photo de ce billet éminemment classieux, sait-il qu'il risque de se faire aspirer, recta, le globe oculaire ?
RépondreSupprimerPoireau : tant que je n'ai pas rencontré Mlle Ciguë, vous êtes à l'abri !
RépondreSupprimerNicolas : grands dieux non ! qu'allez-vous imaginez ?
Appas : L'Exécuteur était également dans l'écurie de Villiers.
Olivier : vous noterez que, dès que vous avez le dos tourné, ils se dévergondent salement...
Anonyme (qui a bien tort de le rester) : c'est prometteur ! Prochain exercice : le même, mais avec un peu de nichons et de foufounes.
Adoré Floupette : les "Exécuteurs" traduits ? Au début, peut-être, mais ils ont rapidement dû êtyre écrit en français ex nihilo. Tout comme la série de science-fiction Blade (j'en ai moi-même écrit une dizaine).
RépondreSupprimerTraduits, je vous dis. J'en termine un demain... Voici où j'en suis : "Le porte-flingue ouvrit la bouche et fit entendre un petit cri étranglé, tout en cherchant frénétiquement à récupérer son arme. Trop tard. Une balle Parabellum lui avait déjà transpercé le front."
RépondreSupprimerEt encore un petit trou...
Très décevant, Didier, que tu n'aies su percer mon anonymat!
RépondreSupprimerUn peu de nerf, diantre, le brigadier mondain que tu es ne saurait rester ainsi bredouille.
Allez cherche, cherche!
Ah, ah...
RépondreSupprimerLa subtilité éclate dans tous les mots... que l'on habille pour cacher leur signification ordinaire.