samedi 30 octobre 2010

Modernœud se shoote à l'hélium (et le monde devient soudain plus gentil)

J'ai vu ça hier soir, en queue de journal, sur France 2, et c'était également annoncé sur Midi libre.com : parce que nos modernœuds que rien ne fatigue jugent intolérable la détention prolongée de MM. Ghesquière et Taponier en Afghanistan, ils avaient décidé d'agir, en ce vendredi, à Montpellier, et ils l'ont fait à leur manière, à la seule manière désormais qu'ils puissent concevoir. À midi et demie (pour pouvoir passer au journal de 13 h, supposé-je avec l'esprit nauséabond qui me caractérise), une poignée de Festivus graves et recueillis se sont attroupés place de la Comédie (oh ! comme les noms parlent, parfois...) pour lâcher vers le ciel 304 ballons que l'on imagine multicolores, porteurs d'un message d'espoir : libérez-les !

On pourrait commencer par faire remarquer à ces épouvantails éplorés que leur message d'espoir n'en est pas un : c'est une supplique, rien de plus ni de moins. Modernœud ne sait plus rien faire d'autre que sangloter et demander pardon, mais au moins il le fait en couleurs vives et bariolées. Du reste, comment pourrait-il s'y prendre autrement pour exprimer sa tristesse face à un monde aussi méchant, quand chaque amorce de phrase qu'il tenterait de prononcer risquerait fort de se révéler stigmatisante pour les Afghans, les musulmans, les damnés de la terre, les victimes de l'impérialisme américain, etc. ? Ne prenons pas de risque inconsidéré : lâchons nos ballons et congratulons-nous d'avoir encore des âmes si propres et si belles dans un monde gris et sale. Et joignons-y un petit message d'espoir, hein, ça ne fait jamais de mal. Et maintenant que nos ballons sont partis faire leur travail de purification de la planète, si on allait se manger une petite assiettée de tofu ?

Je m'étonne toujours un peu que ces zombis à dents blanches ne voient pas l'incroyable obscénité de leurs “actions”. Parce qu'enfin il me semble bien me souvenir, moi, qu'il n'y a pas encore si longtemps les ballons se lâchaient au moment des foires, des fêtes foraines, des carnavals, ou même simplement dans les cours d'école et les réjouissances villageoises. Ce qui revient à dire qu'hier, à Montpellier, Modernœud a fêté les dix mois de captivité des deux journalistes. Il les a fêtés.

Accessoirement, il a aussi contribué à augmenter leur valeur d'échange, rendant un peu plus compliquée et délicate la tâche de ceux qui, en ce moment même, sans rien dire, sans ballons dans les mains ni rollers aux semelles, s'emploient à les faire libérer. L'Armée des ombres contre le troupeau en couleurs...

15 commentaires:

  1. « Modernœud ne sait plus rien faire d'autre que sangloter et demander pardon, mais au moins il le fait en couleurs vives et bariolées. »

    Bien résumé. Et comme cela donne inévitablement envie à des êtres normaux de leur donner des coups de pied dans le ventre, ils sanglotent de nouveau en demandant pardon à nouveau, et se mordent ce qui leur reste de queue à l'infini. Le communisme était triste et gris, nos Modernes sont joyeux et colorés, et pourtant ils sont encore un cran au-dessous, dans les cercles de l'enfer de l'humain qui s'oublie.

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  2. "(..)c'est bien à un vaste mouvement néo-animiste que l'on assiste, au sens où l'animisme repose sur la toute-puissance des idées et que ce sentiment de toute-puissance provient, chez ceux qui en sont pénétrés, d'une estimation très exagérée de leurs propres actes."

    Muray, à propos de Florence Aubenas


    Et sinon, le journal de septembre, bientôt en ligne ?

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  3. Georges : le pis est que cela ne les empêche même pas de se réclamer du communisme.

    Le Plouc : pas de quoi, pas de quoi...

    Malavita : Lundi matin, en principe (je parle du journal de septembre).

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  4. Il sera assez facile de retrouver un de ces penseurs magiques manifester quelques semaines plus tard en faveur des tortues maritimes ..... ?

    Ben voui, un truc mortel pour ces bestioles (sorte de sous-marin biologique) est de bouffer du plastique, sac, et autres ballons gonflables !

    Salauds de talibans, ils tuent nos tortues des mers !

    Bref, faut être sacrément gonflé !

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  5. Modernœud n'a pas encore inventé le ballon biodégradable ? Vous m'étonnez, là !

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  6. si comme les sacs à poubelle, en maïs transgénique !

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  7. Il est des lâchers de ballons naïfs et émouvants, par exemple dans Le petit ballon rouge, de Berthe Sylva :

    Et toute la bande joyeuse s'en va
    Vers le marchand de ballons rouges
    "J'en veux un, maman!.. Celui-là..."
    "Allons... tiens... prends! Petite folle!
    Et tiens-le bien!" - "Merci maman!"
    "Tu l'as lâché!" le ballon s'envole.
    "Je devrais te gronder sévèrement."
    "Ohi non, ne gronde pas, petite mère jolie,
    Je l'ai fait exprès... J'ai choisi le plus beau...
    Regarde... il s'en va vers ma soeur chérie,
    Ma chère petite soeur qu'est dans le ciel là-haut."

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  8. Sauf que Berthe Sylva ne prétendait pas libérer des otages avec.

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  9. Magnifique billet comme nous les aimons mon Cher !!

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  10. Dans mes souvenirs, la première fois qu'on a lâché des ballons dans une manifestation non joyeuse, c'était lors de la marche blanche de 96 (affaire Dutroux, ballons blancs) Ballons pour l'enfance et les âmes envolées, blancs pour l'innocence. Qui se souvient du film de Lamorisse "Le ballon rouge" ? Des ballons se réunissent pour envoler un petit garçon poursuivi par des méchants.
    J'ai vu un lâcher de ballons bleus dans un cimetiere, pour l'enterrement d'un aviateur.

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  11. Suzanne, je crois que vous avez raison, pour Dutroux. Enfin, disons que j'ai le même souvenir.

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  12. Comme c'est juste et bien écrit!
    Ils ont "fêté"!
    Les 5 qui végètent quelque part dans le désert mais qui ont le malheur de ne pas être journaleux n'ont pas droit à leur lâcher de ballons benettoniens.
    Ah les risques du métier! On lâche des ballons pour les médecins, lespompiers, les flics caillassés quotidiennement en France? Risques du métier, qu'ils disent...
    Il y a métier et métier!

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.