Pour qui espère se faire une idée de qui était Balzac, de ce qu'il représente d'unique et de presque monstrueux, dans la littérature française, lire un de ses romans n'a pas grand sens. En lire dix n'en a d'ailleurs pas beaucoup plus. Il n'y a en fait qu'un moyen, me semble-t-il : casser sa tirelire ou son Codevi, acquérir toute La Comédie humaine, et s'y plonger en apnée durant six mois (ou trois, ou douze : c'est selon la quantité de lignes imprimées que vous êtes à même d'avaler chaque jour), en commençant par La Maison du chat-qui-pelote et en ne s'arrêtant qu'à la dernière page de Séraphita. Sans doute n'est-il pas absolument nécessaire de lire tous ces romans & nouvelles dans l'ordre où Balzac les a disposés ; mais j'attends qu'on me dise quel intérêt il y aurait à le bouleverser, cet ordre. Lorsque vous aurez fini de traverser ce monde, vous le laisserez derrière vous une dizaine d'années environ. Puis, vous le parcourerez de nouveau, de nouveau dans la totalité de son étendue. Ensuite, et ensuite seulement, vous pourrez vous permettre de ne plus relire de Balzac qu'un roman par-ci, par-là, au gré de vos fantaisie et humeur. Illusion perdues, par exemple.
Elles furent, ces Illusions, mon tout premier contact avec Balzac, et elles ne furent pas perdues pour tout le monde. J'avais tout juste dix ans, je crois bien – il faudrait vérifier, fouiller le cortex googlesque, mais je n'en ai pas très envie – et le contact s'établit par le truchement d'une adaptation télévisée, dont il me semble bien qu'elle était en quatre films et ne concernait que les deux premières parties de l'œuvre. Une chose dont je suis certain, par exemple, c'est que j'avais exceptionnellement eu le droit de regarder la télévision après huit heures du soir, au motif que mes parents étaient absents (mais où pouvaient-ils bien être ?) et que je restais sous la seule garde de ma grand-mère paternelle. Elle a dû, le lendemain, dire à mon père ou à ma mère à quel point je m'étais passionné pour les amours angoumoises de Lucien Chardon et Mme de Bargeton, si bien que j'ai été autorisé à regarder aussi les trois épisodes suivants – durant lesquels mon intérêt n'a pas faibli.
Vision tellement marquante que je me souviens encore aujourd'hui, et sans avoir jamais revu ces quatre films, du nom d'un certain nombre des acteurs qui y apparaissaient. Pour Lucien c'est assez facile puisque Yves Rénier qui le campait est toujours plus ou moins en activité. Mais qui se rappelle encore François Chaumette (M. du Châtelet) ou Anne Vernon (Anaïs de Bargeton) ? Qui à part moi pour se souvenir que Bernard Noël (Etienne Lousteau) fut pour la télévision un premier et remarquable Vidocq, bien avant Claude Brasseur, et que Gainsbourg chantait la chanson du générique ? Et – revenons à Balzac – il y avait aussi, dans le rôle de Daniel d'Arthez, l'écrivain, cet acteur que j'ai longtemps confondu avec Charles Denner, et dont il me semble que le prénom est Denis – ce même comédien qui campait Henri III dans une autre adaptation télévisée, un peu plus tardive : La Dame de Monsoreau. J'ai oublié tous les autres.
Finalement, près de 45 ans plus tard, il ne reste que Balzac, ce qui est bien suffisant, notamment pour la fameuse île déserte. Et aussi la silhouette mince de Lucien, de dos, noir et blanc de rigueur, s'en retournant à pied vers Angoulême.
Elles furent, ces Illusions, mon tout premier contact avec Balzac, et elles ne furent pas perdues pour tout le monde. J'avais tout juste dix ans, je crois bien – il faudrait vérifier, fouiller le cortex googlesque, mais je n'en ai pas très envie – et le contact s'établit par le truchement d'une adaptation télévisée, dont il me semble bien qu'elle était en quatre films et ne concernait que les deux premières parties de l'œuvre. Une chose dont je suis certain, par exemple, c'est que j'avais exceptionnellement eu le droit de regarder la télévision après huit heures du soir, au motif que mes parents étaient absents (mais où pouvaient-ils bien être ?) et que je restais sous la seule garde de ma grand-mère paternelle. Elle a dû, le lendemain, dire à mon père ou à ma mère à quel point je m'étais passionné pour les amours angoumoises de Lucien Chardon et Mme de Bargeton, si bien que j'ai été autorisé à regarder aussi les trois épisodes suivants – durant lesquels mon intérêt n'a pas faibli.
Vision tellement marquante que je me souviens encore aujourd'hui, et sans avoir jamais revu ces quatre films, du nom d'un certain nombre des acteurs qui y apparaissaient. Pour Lucien c'est assez facile puisque Yves Rénier qui le campait est toujours plus ou moins en activité. Mais qui se rappelle encore François Chaumette (M. du Châtelet) ou Anne Vernon (Anaïs de Bargeton) ? Qui à part moi pour se souvenir que Bernard Noël (Etienne Lousteau) fut pour la télévision un premier et remarquable Vidocq, bien avant Claude Brasseur, et que Gainsbourg chantait la chanson du générique ? Et – revenons à Balzac – il y avait aussi, dans le rôle de Daniel d'Arthez, l'écrivain, cet acteur que j'ai longtemps confondu avec Charles Denner, et dont il me semble que le prénom est Denis – ce même comédien qui campait Henri III dans une autre adaptation télévisée, un peu plus tardive : La Dame de Monsoreau. J'ai oublié tous les autres.
Finalement, près de 45 ans plus tard, il ne reste que Balzac, ce qui est bien suffisant, notamment pour la fameuse île déserte. Et aussi la silhouette mince de Lucien, de dos, noir et blanc de rigueur, s'en retournant à pied vers Angoulême.
Denis Manuel.
RépondreSupprimeret
http://ruinescirculaires.free.fr/index.php?2006/11/27/322-cocaine-honneur-et-patrie
« Mais qui se rappelle encore François Chaumette ? »
RépondreSupprimerMoi, je l'adorais.
Pascal : Denis Manuel, voilà ! Mais je suis sûr que si je repense à lui dans un an, je serai de nouveau incapable de le nommer, et que c'est Charles Denner qui se présentera à sa place.
RépondreSupprimerEt votre lien...
Georges : oui, moi aussi : il avait une superbe tête de "méchants", cauteleux, monstre froid, etc.
Sa voix, surtout, sa voix magnifique !
RépondreSupprimerLa voix de F. Chaumette est effectivement magnifique.
RépondreSupprimerDans un autre registre, j'aime aussi beaucoup celle de [François Maistre|http://www.cinereves.com/photos/francois%20maistre%20brig%20du%20t.JPG| ]
Zut, j'ai raté le lien
RépondreSupprimerFrançois Maistre
Juste pour emmerder Nicolas.
RépondreSupprimerSi - moi !
RépondreSupprimerPareil côté souvenir.
RépondreSupprimerChaumette avait un physique impressionnant, le crane dégarni, une "machoire" et un rire souvent sarcastique qui ne présageait rien de bon pour celui à qui il souriait.
Anne Vernon, très douce et très sensuelle, elle n'aurait déparé dans aucun film américain de l'époque
Denis Manuel, toujours dans des rôles austères, de prêtre en particulier. Parallèlement, il avait une forte activité de visiteur de prison je crois.
Toute une époque...
Duga
Je le souviens de Denis Manuel qui portait très bien le haut de forme et le queue de pie !
RépondreSupprimerPascal : François Maistre chez Buñuel ! Dans Le Charme discret de la bourgeoisie, Le Fantôme de la liberté, et je crois bien aussi dans La Voie lactée.
RépondreSupprimerGeorges : impossible d'écouter votre lien pour l'instant : je suis "sur" la première par Karajan...
La Pecnaude : en fait j'ai fait exprès de parler de Chaumette pour que les vieux croûtons dans mon genre se trahissent bêtement ! Mais enfin, bon, on peut toujours s'en tirer par une cinéphilie ardente, aussi.
Duga : en fait, pour avoir relu Illusions perdues il n'y a pas si longtemps (quelques mois), je me demande si Chaumette n'était pas un peu trop grand pour le costume du piètre du Châtelet.
Geargies : tiens, comme ça, au jugé, j'aurais plutôt dit LA queue-de-pie (pas sûr des traits d'union non plus, d'ailleurs)...
Bien sûr! La ( redingote) queue de pie... Je crois que je me souviens plutôt de lui en Felix de Vandenesse , d' ailleurs. J'étais fan inconditionnel du Lys ...
RépondreSupprimerLégèrement hors-sujet mais :
RépondreSupprimerhttp://www.coucoucircus.org/series/generique.php?id=1445
François Chaumette est un comédien que je me souviens avoir vu dans d'innombrables films ou feuilletons télévisés, où il excellait effectivement dans les rôles de méchants, mais dont je m'aperçois que je suis incapable, d'emblée, de citer le moindre titre d'œuvres dans lesquelles il a joué, si ce n'est toutefois Le Chevalier de Maison Rouge, d'après Dumas... À titre de pure anecdote, je me rappelle en revanche très bien sa présence dans les gradins lors d'un combat de titans dont il ne reste aujourd'hui pas grand'chose mais dont l'annonce avait à l'époque marqué les esprits, à savoir le duel Le Pen-Lajoinie sur la défunte Cinq berluscono-mitterrandienne, duel au cours duquel les deux débatteurs, l'un hilare et suant de partout et l'autre arborant une face de plaisant abruti, s'étaient mutuellement balancé des millions de morts au visage dans une ambiance sombre et étouffante accentuée par un curieux décor de type concentrationnaire. Je crois en effet me rappeler que François Chaumette était membre, ou à tout le moins compagnon de route du PCF, ce qui, ajouté à son grand talent de comédien, contribuait peut-être pour certains de ses spectateurs à accroître l'impression de vraisemblance qu'il donnait à ses personnages de grands méchants, fussent-ils des hommes d'affaires rapaces, des banquiers véreux ou des ministres sans scrupules.
RépondreSupprimerBon...
RépondreSupprimerDans 6 mois vous nous ferez un résumé de la "Comédie Humaine".
6 mois!! 13 volumes dans la Pleiade quand même ... à moins de ne faire que ça ... et encore. ...
RépondreSupprimerGeargies, franchement, deux Pléiade par mois ce n'est tout de même pas excessif ! Et puis, j'ai prolongé jusqu'à 12 mois, dans la parenthèse...)
RépondreSupprimerEt vérification faite, La Comédie humaine ne remplit "que" 11 volumes...