mardi 25 mars 2008

El est avec nous

« Immanuel veut dire : El est avec nous. El est l'abréviation d'Elohim, un des noms de Dieu de l'Ancien Testament. Immanuel est un nom qui a fait beaucoup de chemin avant sa transcription dans le registre de l'état civil. Bien des gens s'appellent Emmanuel ou Emmanuelle. Mais dans toute l'Écriture sainte personne n'a osé confier ce nom à un être humain. Il est resté sans porteurs. C'est aussi un nom qui a fait fausse route. Les nazis l'utilisèrent pour leur slogan : "Gott mit uns", "Dieu avec nous", traduction d'Immanu El. Ils le crièrent et le prétendirent, mais Dieu n'était pas avec eux, même si, pendant un temps suffisant pour exterminer des millions de personnes, il a semblé que Dieu n'était avec personne. Alors, tandis que les bourreaux s'enivraient de l'erreur de croire Dieu avec eux, les victimes répétaient la question de David au psaume 22 : "Eli, Eli, lama azavtàni", "Mon El, Mon El, pourquoi m'as-tu abandonné ?" Entre cette phrase et l'Immanu El, entre l'étonnement de l'abandon et la certitude d'un Dieu près de soi, s'échelonnent toutes les positions de la personne de foi. Chacune d'elles, au moins une fois dans sa vie, a fait l'expérience personnelle des deux phrases. »

(Erri De Luca, Première heure.)

10 commentaires:

  1. Bien sûr j'ose avouer que c'est par les premières lignes attirée que j'ai franchi le seuil de votre éniemme billet consacré à Erri De Luca ... ce qu'à ma grande honte je n'avais bien sûr jamais fait encore ...
    Etant dotée de ce prénom, comme vous le savez, et étant dotée d'un ami juif orthodoxe lui aussi ainsi prénommé (c'est le parrain de ma fille, oui, je sais, il est des bizarreries dans la vie, mais celle-ci est une bien belle histoire), je l'avais entendu prononcer ainsi ce prénom ... et voyez comme la vie est bien faite, et comme vous oeuvrez pour l'édification des masses crétines et musicophiles de merdasses de surcroît : j'ai tellement aimé certain passage d'Erri De Luca que je vais de ce pas me rendre à ma librairie

    RépondreSupprimer
  2. Emmanuelle : mes citations quotidiennes n'ont pas d'autre but que d'inciter à la lecture de cet auteur, dont j'ignorais encore tout il y a trois ou quatre semaines.

    Gloire soit rendue à Carlos...

    RépondreSupprimer
  3. Merci de vos conseils, j'y vais tout à l'heure, à la librairie ... mais qu'est-ce que Carlos vient faire là-dedans ??? j'ai encore dû louper un épisode, moi ... Et quel Carlos ? le grand philosophe doltotolitchien, ou le grand poète marxiste ayant eu pour avocat Me Vergès ???

    RépondreSupprimer
  4. Manue : Carlos est un de mes plus anciens amis. et c'est lui qui, lors de sa dernière visite chez nous, m'a apporté un recueil de nouvelles de De Luca : Le Contraire de un.

    RépondreSupprimer
  5. Gardez le précieusement! L'ami plus que le recueil...

    RépondreSupprimer
  6. Immanuel ! Emmanuel ! tu es toute ma vie ...


    iPidiblue alias François Claude.

    RépondreSupprimer
  7. Emmanuel, deuxième prénom... Donné en toute connaissance de cause par des parents.

    (mais bon, comme l'anniversaire, aucune importance réelle)

    RépondreSupprimer
  8. Contrairement à ce qu'on entend souvent dire – et que semble reprendre ce texte –, l'utilisation de la devise « Gott mit uns » à des fins militaires n'a rien de spécifiquement nazie, puisque celle-ci figurait déjà sur la boucle des ceinturons des fantassins allemands durant la guerre de 14 – et peut-être même avant, du reste, cette devise étant en effet celle de la Maison de Prusse.

    Une rapide recherche sur le ouèbe m'apprend d'ailleurs que, durant la seconde guerre mondiale, seuls les membres de la Wehrmacht (l'armée « régulière », non exonérée pour autant de la perpétration de massacres aussi barbares que variés) avaient encore ce gri-gri à la taille, les Waffen SS arborant quant à eux une boucle sur laquelle était inscrit « Meine Ehre heiβt Treue » (« Mon honneur est ma fidélité », ou quelque chose de cette eau-là). Je serais même d'avis, pour ma part, que les nazis jugeaient en fait que « Gott mit uns » n'était acceptable que pour l'armée allemande classique, au nom de la tradition militaire prussienne, mais que leurs troupes d'élite nationales-socialistes, pétries de la mystique ésotérico-païenne du régime, se devaient d'avoir quant à elles une devise à connotation moins chrétienne.

    Car, ai-je appris ce soir, bien avant son adoption par le royaume de Prusse, cette devise avait été utilisée au XVIIe siècle comme cri de ralliement durant la guerre de Trente Ans, puis par Gustave-Adolphe de Suède ; et faisait, semble-t-il, elle-même écho au « Nobiscum Deus » (« Dieu avec nous ») des armées de l'empire romain d'Occident comme de l'empire byzantin.

    Désolé, c'était ma minute chiante...

    RépondreSupprimer
  9. Votre note Chieuvrou se lit bien plus rapidemment que vous ne le pensez. Et je ne vois rein de chaint dans ces éclaircissements historiques... Seriez vous historien d'ailleurs?

    BAV (bien à vous, voyons!)

    RépondreSupprimer
  10. Chieuvrou : non seulement vous n'êtes pas chiant, mais en plus il semblerait bien que vous ayez raison contre le Signore De Luca, lequel est à deux doigts de se faire bannir de ce blog, pour cause de foutage de gueule.

    RépondreSupprimer

La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.