jeudi 19 juin 2008

Nostradamus s'est planté

« Ce matin, Boris Vian est mort d'une crise cardiaque, en assistant à la projection d'un film tiré de J'irai cracher sur vos tombes. De ce brio rayonnant, subtil, timide, poétique, je me demande ce qu'il restera. Combien a-t-on vendu d'Automne à Pékin ? Célèbre pour de fausses raisons (Saint-Germain, le jazz, la trompette et son bouquin à scandale), ses petits livres tendres et fous couleront à pic, oubliés. Dommage. »

Matthieu Galey, Journal, 23 juin 1959.


C'est le risque, quand on se lance dans les prédictions de ce genre : la postérité parfois vous ramasse - au moins la postérité immédiate. Car si Boris Vian est en effet un écrivain de troisième rayon, on ne peut pas dire que ses livres ont coulé à pic, loin de là : les lycéens moyennement intelligents de ma génération (et moi tout le premier) ne juraient que par eux. Je ne sais pas si leur cote a faibli aujourd'hui, mais elle était au plus haut, alors.

Boris Vian m'a enthousiasmé à 16 ans - ce dont je suis loin d'être fier -. Relu 15 ans plus tard, il s'est méchamment pris les pieds dans les barreaux de mon échelle de valeurs. Qu'en serait-il aujourd'hui ? Remonterait-il ? J'en doute, mais pourquoi pas ? Le petit paragraphe de Galey (avec sa malencontreuse anacoluthe finale) me donne une certaine envie de relire L'Automne à Pékin ou encore L'Herbe rouge, les deux romans dont je conserve les souvenirs les plus flous. Aurais-je l'un ou l'autre dans ma bibliothèque, je crois que je m'y plongerais immédiatement : tout est bon à qui ne veut pas travailler. Mais je sais bien que, ce soir, demain au plus tard, ce vague désir se sera déjà évaporé.

17 commentaires:

  1. "Dans la vie, l’essentiel est de porter sur tout des jugements a priori. Il apparaît, en effet, que les masses ont tort, et les individus toujours raison. Il faut se garder d’en déduire des règles de conduite: elles ne doivent pas avoir besoin d’être formulées pour qu’on les suive. Il y a seulement deux choses: c’est l’amour, de toutes les façons, avec les jolies filles, et la musique de la Nouvelle-Orléans ou de Duke Ellington. Le reste devrait disparaître, car le reste est laid, et les quelques pages de démonstration qui suivent tirent toute leur force du fait que l’histoire est entièrement vraie, puisque je l’ai imaginée d’un bout à l’autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité, en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion. On le voit, c’est un procédé avouable, s’il en fut."

    Boris Vian, La Nouvelle-Orléans 10 mars 1946.


    Je n'ai plus 16 ans depuis longtemps. Marcel

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  2. Il y a plein d'écoles et de conservatoires Boris Vian, c'est pas bon signe ça !


    iPidiblue complètement pourri parce que mal conservé

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  3. Vous avez remarqué, n'est-ce pas ? Les faux révoltés ont droit à plein d'écoles et autres lieux de vie, comme Pierre Perret et Boris Vian, et les vrais réacs comme Léon Bloy et Joseph de Maistre pas une ! Enfin si pour Joseph de Maistre une seule école élémentaire dans la rue du même nom, mais c'est pour me contrarier ... et puis c'est surtout parce qu'ils ne l'ont pas lu au ministère !

    iPidiblue a de mauvaises lectures

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  4. Pour tracer la ligne idéologique d'un pays comme la France, on pourrait s'amuser à classer les écirvains en deux colonnes, ceux qui ont droit à des lieux de vie républicains en veux-tu en voilà, et ceux qui sont interdits de lieux publics ! D'un côté les Jules Verne et Victor Hugo qui triomphent et de l'autre les ducs de Saint-Simon et les Blanc de Saint Bonnet et autres Ernest Hello !


    iPidiblue fervent de la liberté de penser en travers des idées reçues

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  5. Marcel : je précise que je parlais des romans de Vian.

    iPidiblue : tout de même, à côté de Pierre Perret, Vian est un génie. Et ne parlez surtout pas de « liberté de penser », sinon on va écoper d'un collège Florent-Pagny...

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  6. ... l'intérêt de ne jamais relire ce qui l'a été c'est de pouvoir garder un souvenir enthousiaste de livres qui risqueraient d'être fortement dépréciés par une re-lecture à un âge plus avancé. L'idée qu'on s'est faite d'un livre à un moment donné, et le souvenir qu'on en garde sont parfois tellement supérieurs à la chose originale qu'il serait dommage de gâcher cette "œuvre de création" par la triste réalité.

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  7. Ah ! oui le génie n'excuse pas tout ... moi j'aime bien les chansons de Pierre Perret, le problème n'est pas là Didier !

    Moi je ne fais pas l'éloge de "la bonne pensée" à longueur de journée !

    Croyez-vous vraiment que je serai invité à conférencer au collège Florent-Pagny ou à l'école élémentaire Vanessa-Paradis dans quelques lustres, si tout va bien ?

    iPidiblue conférencier invité sur le blog de Didier pour distraire les cancres

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  8. J'ai beaucoup aimé Boris Vian: l'arrache-Coeur, l'Herbe Rouge, j'irais craché sur vos tombe..Et enfin la lettre du Déserteur..que j'apprécie toujours autant. De même que J'aime beaucoup Pierre Perret.C'est un poête! Mais je vous le disais, les goûts et les couleurs..

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  9. Même constat ou presque que le vôtre, car je n'ai jamais aimé Vian, ni prévert, comment ne pas les associer ? Cet espèce de surréalisme facile, de poésie de bas étage sont insupportables tout simplement. Je ne mettrais certainement pas Blondin ou Aymé dans le même rayonnage comme il en est coutume.

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  10. Pardon, les doutes et les goûts leurres..

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  11. Christie : un gage !

    Ludovic : aïe ! si chacun se met à établir son palmarès, on est encore là demain ! Tenez, par exemple, je suis d'accord avec vous pour mettre grosso modo Vian et Prévert dans le même panier (j'ai d'ailleurs failli le faire, dans le billet). En revanche, je ne suis pas d'accord pour associer Blondin à Marcel Aymé, plaçant le second infiniment plus haut que le premier, que je trouve nettement surévalué.

    Et c'est là que les ennuis commencent...

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  12. Didier après consultation de Google, je me suis rendu compte que Villiers de l'Isle-Adam n'a pas même le premier collégien en culottes courtes à se farcir, pensez-vous que les Contes cruels et l'Eve Future menaçaient l'intégrité de la République ? Ou bien ne croyez-vous pas que les soi-disant défenseurs de la culture et de la littérature française membres du corps enseignant sont plutôt des êtres infiniment bornés ?

    iPidiblue mélancolique

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  13. L'anacoluthe est une rupture de construction sur le plan de la syntaxe, c'est-à-dire une transformation, au milieu de la phrase, de la construction grammaticale que le début de la phrase laissait attendre. Il peut s'agir d'une faute involontaire à l'écrit.

    L'ana(r)co-luthe finale : faire table rase de la syntaxe et de la langue?

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  14. Boris Vian est à peu près autant révolutionnaire que Grand-Corps-Malade, d'ailleurs je ne désespère pas de voir dans quelques années un conservatoire GCM, ne serait-ce que pour faire frémir Georges !
    C'est gens-là sont nés pour être récupérés ...

    iPidiblue par essence plus que par existence

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  15. Le Blondin de l'Equipe me paraît, en effet, bien meilleur (parce que pressé par le temps et l'espace) que celui des romans. L'école buissonnière m'a ennuyé à un point...
    Mais bon, ce hussard à la vie cahotique (chaotique) était un être humain. Ce qui n'est déjà pas si mal.

    Quant à Aymé, nos jeunes élèves pourraient apprendre à lire autre chose que les "contes du chat perché" (quoique les roses prennent le pas sur le bleus").

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  16. Anacoluthe célèbre : « le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court... »

    Je ne vois pas l'anacoluthe dans la phrase de Galey, mais une chute un peu raide.

    Un livre m'a ravi dans mon adolescence : « Le grand Meaulnes ». Je le relirais volontiers, sauf que je crains une terrible désillusion.

    Vian n'était pas un type très sympathique, contrairement à Pierre Perret, véritable génie populaire, d'ailleurs sans prétention. Comme Carlos, mais en plus fin, si j'ose dire, en moins « prout-prout-tralala ».

    Marcel Aymé : touchez pas à mon pote ! Blondin, sorte de Bukowski de Sarcelles, mélancolique à souhait et hâbleur... « Monsieur Jadis », les chroniques de L'Équipe surtout. J'ai appris à aimer Blondin via Nimier. Sa fin, comme Verlaine, aussi pathétique. Son génie : morceau de sucre trop tôt fondu dans un café matinal oublié au coin d'un vague comptoir par un égoutier distrait.

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  17. Yanka : « Célèbre pour de fausses raisons... ses petits livres couleront » : c'est pas une anacoluthe, ça ?

    Pour le reste, pas le temps : Chartres nous attend...

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.