Nouvelle expérience, hier, en allant à Levallois-Plage, puis, le soir, au retour : iPod aux oreilles, j'ai remplacé la musique par une lecture de Du côté de chez Swann, faite par André Dussolier – quatre coffrets de quatre CD chacun, que, n'en déplaise à certain esprit paranoïaque, je possède depuis près de dix ans, et que j'ai transférés la semaine dernière dans le bidule.
Ce furent deux trajets merveilleux. Revenant vers la maison, même les bouchons provoqués par je ne sais quels départs en vacances me furent propices, en ce qu'ils permettaient de prolonger l'écoute.
André Dussolier n'aurait-il fait que cela, dans sa carrière de comédien, qu'il aurait droit à notre éternelle reconnaissance. Dite par lui, la longue et sinueuse phrase proustienne, pleine de recoins, de demi-étages, de faux paliers, de couloirs dérobés, la phrase proustienne s'ordonne, se diversifie, les plans s'organisent comme d'eux-mêmes, les lumières secondes apparaissent, les ombres se font profondes, et néanmoins discernables les objets qui s'y trouvent dissimulés ; et la pensée elle-même de l'auteur semble se déployer avec naturel, comme précisément les petits papiers japonais qui servent à marquer l'entrée véritable dans Combray, résumée par son église Saint-Hilaire. Tout cela avec une sorte de grâce fluide, qui donne parfois l'impression surnaturelle que le liseur découvre le texte au moment exact où il nous le dit ; et la voix même de Dussolier met magnifiquement en valeur ce qu'il faut bien appeler la grande bonté de Marcel Proust, comme si elle n'était que simple émanation de celle-ci.
À toute personne qui n'a encore jamais pu, ou osé, se plonger dans l'oeuvre elle-même, je ne pourrais que conseiller, et vivement, l'audition de ces disques ; tout en exprimant le vif regret que Dussolier se soit arrêté à Swann, pour passer le relais à d'autres comédiens, bien moins proustophones que lui.
Ce furent deux trajets merveilleux. Revenant vers la maison, même les bouchons provoqués par je ne sais quels départs en vacances me furent propices, en ce qu'ils permettaient de prolonger l'écoute.
André Dussolier n'aurait-il fait que cela, dans sa carrière de comédien, qu'il aurait droit à notre éternelle reconnaissance. Dite par lui, la longue et sinueuse phrase proustienne, pleine de recoins, de demi-étages, de faux paliers, de couloirs dérobés, la phrase proustienne s'ordonne, se diversifie, les plans s'organisent comme d'eux-mêmes, les lumières secondes apparaissent, les ombres se font profondes, et néanmoins discernables les objets qui s'y trouvent dissimulés ; et la pensée elle-même de l'auteur semble se déployer avec naturel, comme précisément les petits papiers japonais qui servent à marquer l'entrée véritable dans Combray, résumée par son église Saint-Hilaire. Tout cela avec une sorte de grâce fluide, qui donne parfois l'impression surnaturelle que le liseur découvre le texte au moment exact où il nous le dit ; et la voix même de Dussolier met magnifiquement en valeur ce qu'il faut bien appeler la grande bonté de Marcel Proust, comme si elle n'était que simple émanation de celle-ci.
À toute personne qui n'a encore jamais pu, ou osé, se plonger dans l'oeuvre elle-même, je ne pourrais que conseiller, et vivement, l'audition de ces disques ; tout en exprimant le vif regret que Dussolier se soit arrêté à Swann, pour passer le relais à d'autres comédiens, bien moins proustophones que lui.
Tiens, merci pour cette bonne idée...
RépondreSupprimerJe venais dire que votre description de la phrase proustienne est aussi juste que belle.
Je comprends votre remarque au sujet des bouchons finalement propices. Proust se marie très bien avec un trajet lent. J'adore lire Proust dans le train tandis que cela m'est impossible dans le métro.
Et alors, la version de Dussolier est mieux que celle de Dave?
RépondreSupprimerAh bin voilà que vous vous mettez à paraphraser en Proust maintenant ! Remarquez que de l'oral aussi bien stylisé, ça passe très bien à l'écrit !
RépondreSupprimer:-))
[Je suis loin d'être un proustophile, je me moque même un peu parfois des proustopathes mais il faut bien reconnaître que pour du ciselé, c'est du ciselé de première main ! :-))) ]
Didier, Dussolier lit "la prisonnière", aussi (même édition)
RépondreSupprimerSuzanne
Suzanne : merci ! Je l'ignorais. Je vais voir à me commander ça...
RépondreSupprimerTrès bel hommage rendu à la "phrase proustienne"!
RépondreSupprimerCher Didier, dans votre infinie mansuétude et votre amour intangible du genre humain, vous serait-il possible de venir en aide à l'une de vos lectrices qui n'a non seulement pas "tout lu Proust" mais qui s'en est même tenue constammment éloignée pour cause de mauvaise expérience de départ, et de flemme incommensurable de s'y remettre ... ? Un transfert de fichiers serait-il envisageable ? Merci infiniment, vous savez où me trouver !
RépondreSupprimerManue : des fichiers ? Fichtre ! comme vous y allez ! Je serais bien incapable de vous transmettre des choses pareilles ! En revanche, si vous voulez, je peux vous copier sur CD l'équivalent des 200 premières pages, ce qui est bien suffisant pour se faire une idée. Mais il vous faudra patienter jusqu'à fin mars car, là (Bruni), j'entre dans une zone de fortes turbulences professionnelles et vais avoir peu de temps à moi (et donc à vous).
RépondreSupprimerJ'attendrai fin mars ... et en profiterai pour vous expliquer pour les fichiers ! je prépare ma notice ... ou alors je passe chez vous avec mon iPhone 16 GO, ça devrait suffire ... Comment ça, vous ne m'avez pas invitée ...
RépondreSupprimerManue : nous serions ravis de vous recevoir chez nous. Si vous y songez sérieusement, contactez-nous par mail privé...
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