jeudi 9 octobre 2008

Hommage, jalousie et (à venir) camembert généreusement tartiné

À Balmeyer, pour le texte ; à Dorham, pour l'environnement musical


Comment reconnaître un écrivain ? Ou, plus exactement, un possible écrivain ? À ceci qu'il fait (parfois, pas toujours) jaillir des formules qu'à première lecture vous trouvez simplement amusantes, bien trouvées, comme on dit. Ensuite, vous en parlez à votre Irremplaçable (si vous en avez une, ce qui n'est pas donné à tout le monde, loin s'en faut). Et, là, discourant, vous vous apercevez, les phrases se déroulant, que cette image qui vous a d'abord fait sourire présente des étages, des arrière-plans, des tiroirs secrets ; et que, plus vous l'évoquez, plus elle acquiert de richesse. Et, même, au risque du ridicule, de profondeur. Prenons par exemple, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, cette image de Balmeyer, parlant d'une banale gueule de bois que, comme chacun l'a fait au moins une fois dans sa vie (ou alors, sortez d'ici : vous n'êtes pas assez franchouillard et je vous envoie la police...), il a soignée "par le mal", le lendemain matin :

On aurait dit une petite voiture compressée par César qui reprenait peu à peu sa forme initiale.

Peu de mots, mais qui, à mesure qu'on se les répète, prennent forme et prolongements, exactement comme ces papiers japonais dont parle Proust, dans Du côté de chez Swann, au moment du célébrissime épisode de la madeleine, qui, d'informes qu'ils sont au départ, deviennent, trempés dans l'eau chaude, des maisons, des jardins, etc.

Cette phrase en gras que je viens de citer a ce genre de pouvoir de déploiement ; elle rend compte, avec une superbe économie de moyens, d'une réalité plus profonde qu'il n'y paraît - et sans quitter le sourire. C'est une phrase d'écrivain. Peut-être.

Une certaine jalousie me point : je vais reprendre une bière, ce sera de sa faute, à ce con.


Consommations : 1/2 bouteille de muscadet sur lie pour l'Irremplaçable ; quatre bières Goudale pour moi.

Environnement musical : Sarah Vaughan (compilation), Louis Armstrong (Good Book et extraits du concert au Town Hall de New York, 1947). Écrivant ce billet et lisant les vôtres : l'oratorio de Pâques, de J.S. Bach.

45 commentaires:

  1. Y'a pas à dire, il est fort, ce Balmeyer...

    RépondreSupprimer
  2. Vous conduisez ce soir ? Non, j'espère....

    RépondreSupprimer
  3. Milady : nos deux maisons sont éloignées d'environ dix mètres cinquante : prendre la voiture serait très déraisonnable...

    RépondreSupprimer
  4. Tel que je le connais (un peu), il doit être rouge de confusion et pris entre l'envie irrépressible de grimper au rideau et de crier que vous vous êtes mépris, ça ne peut pas être lui.
    J'avoue qu'il est très énervant et souvent !
    :-)))

    RépondreSupprimer
  5. Tout à fait vrai,
    indubitablement vrai...

    (maintenant, il va se la péter grave)

    (il aura raison)

    RépondreSupprimer
  6. Ah, ça modère encore ???

    Mais fais chier à la fin !!!

    RépondreSupprimer
  7. Bah, virez mon précédent commentaire et celui-là, je devine pourquoi !

    Mais fais chier quand même...

    (purée, vous avez trouvé plus chiant que moi)

    RépondreSupprimer
  8. Y'a pas à dire, il est fort ce Balmeyer, à recevoir des compliments de Didier Goux après l'apéro.

    L'étape suivante sera : avant l'apéro.

    RépondreSupprimer
  9. C'est drôle, comme vous j'ai été frappée par cette phrase et j'y ai repensé ensuite...

    (Ma jalousie est décuplée par ce billet... )

    (On a dit...)

    RépondreSupprimer
  10. Merci, votre billet m'est d'un grand réconfort,le Nobel m'étant passé sous le nez, hier...

    RépondreSupprimer
  11. Dorham : la modération n'est que momentanée (enfin, j'espère...).

    Nicolas : j'avais bu quatre bières : on ne peut pas vraiment appeler ça un apéro, si ?

    Zoridae : je l'ai fait exprès !

    Balmeyer : vous l'aurez l'an prochain : j'y travaille...

    RépondreSupprimer
  12. Didier,

    Donc Balmeyer serait très fort !

    Vous avez arrêté de boire après avoir récupéré votre permis : c'est une ruse pour tromper l'ennemi ?

    RépondreSupprimer
  13. Oui la comparaison d'une gueule de bois avec un voiture compréssée, est surprenante, très plausible. La seule dont je me souvienne, m'a évoqué un cerveau à l'état de hachis..., embarqué dans une tempête.
    Tant que le prix Nobel de littérature ne sera accordé le plus souvent qu'à des écrivains "bien-pensants", il a besoin d'une précision de taille : prix de la littérature morale.
    Et ce jury, est-il composé seulement de Suédois ? Même très lettrés, comment peuvent-ils se targuer de pouvoir juger des écrivains autres que ceux de langue scandinave ?
    Autre question, sur un autre sujet, cher Didier :
    « Le jour ni l'heure » à propos des photos de Renaud Camus ? Ces mots sont-ils tirés de la Bible, et leur signification, à ce propos ?
    Anna R.

    RépondreSupprimer
  14. Cette phrase...comme vous en parlez bien. Balmeyer est un bon écrivain et vous êtes un bon critique, avec des choix musicaux impeccables.
    Vous m'énervez, Monsieur Goux.
    Parce que justement quand vous m'énervez je me tais.
    Mais là...

    RépondreSupprimer
  15. Chère Emma, la réponse est ici...

    Voyons, Mère Castor, faut pas vous mettre dans des états pareils ! Reprenons donc un verre de cet excellent porto...

    RépondreSupprimer
  16. "Tant que le prix Nobel de littérature ne sera accordé le plus souvent qu'à des écrivains "bien-pensants", il a besoin d'une précision de taille : prix de la littérature morale."

    Tiens, une glissade de baignoire. Vous êtes en forme Emma...

    Vous préférez des gens qui pensent mal ? Je ne suis pas très fan de Le Clézio, loin de là, d'ailleurs... Mais je crois précisément que la morale est importante. Il ne faut d'ailleurs pas la confondre avec le moralisme.

    Par exemple, le meurtre, c'est immoral. La vie, c'est immoral. Etc...

    Pascal et Montaigne par exemple était très moraux. Mais on peut les foutre à la poubelle si vous voulez.

    RépondreSupprimer
  17. Dorham : vous êtes mesquin (faisant mine de ne pas comprendre) avec Emma et le savez ! Vous avez très bien saisi qu'elle parlait précisément de "moralisme", pour reprendre votre mot. Mais je la laisse se défendre elle-même, elle en est parfaitement capable.

    Sinon, au risque de passer pour provocateur (mais qui aurait l'idée de m'accuser d'une chose pareille ?), je dirais que les deux "Nobel" de la Paix et de Littérature ont été créés spécialement pour que les Africains puissent avoir quelques prix à aligner.

    (Si vous voulez prouver que je suis un immonde raciste, trouvez-moi un VRAI prix Nobel africain (chimie, physique, médecine, etc., c'est-à-dire un de ceux pour lesquels il faut vraiment BOSSER et TROUVER.)

    RépondreSupprimer
  18. Et en plus, Prix Nobel de la Paix, c'est bidon : personne n'a jamais TROUVE la paix dans le monde entier.

    RépondreSupprimer
  19. Merci Didier (bon sang, mais c'est bien sûr, où avais-je la tête ?)
    @Dorham : je pense que l'on s'occupe un peu trop de ce que fait l'écrivain, et qu'il reçoit un satisfecit en grande partie pour ses entreprises sociales et/ou politiques, son "engagement".
    Foutaises !!!.
    Prenons un exemple dans le pays du petit père du peuple : qui tenait le haut du pavé en matière d'écrivains ?
    Uniquement les individus qui montraient patte blanche à la nomenklatura au pouvoir. Ils étaient récompensés pour leurs bons et loyaux services à la patrie, sans être des gens de lettre très intéressants, en tant qu'écrivains. Il faut lire les démêlés de Soljénitsyne avec la Société des écrivains, et avant lui ce qui est arrivé à Ossip Mandelstam. Ceux-là ils étaient personna non grata, et tant d'autres. Alors où se trouve la difficulté à comprendre que juger un écrivain sur sa supposée vertu, c'est bien triste.
    Tiens, avant d'envoyer mon message, je vois que Didier a commencé à répondre en partie à Dorham. De toute façon, je crois que Dorham vous cherchez un peu l'occasion de ferailler avec des gens que vous estimez être dans le mauvais "camp", celui de la droite... arg. La discussion ne peut jamais aller très loin,
    dans ce cas.

    RépondreSupprimer
  20. Dorham : vous voyez, je vous avais dit qu'Emma était assez grande pour se défendre toute seule...

    Son angle d'attaque est d'ailleurs assez bon, je trouve. Je rajouterais Vassili Grossman, donr le génial Vie et Destin a bien faili rester à jamais ignoré.

    Jean-Marie-Gustave est un plumitif chiant, consensuel, journalistique : je ne sors pas de là. Et qu'il ait le prix Nobel est la meilleure preuve de ce que j'avance.

    RépondreSupprimer
  21. Le Clézio fait parti de ces écrivains que les liseurs de journaux achètent ; pas de ceux qu'on lit.

    RépondreSupprimer
  22. Emma,

    Mesquin, non, pas du tout. Si vous dites en revanche que je pinaille, vous avez raison. Mais alors, si vous avez voulu écrire "moralisme", comme l'affirme Didier, écrivez donc "moralisme" que "morale", c'est mieux.

    Je dis cela, sachant que vous appréciez, tout comme Didier, la précision ; et cette précision ne doit pas être que l'apanage de ceux qui sont ici raillés. Non ?

    De plus, j'aime ferrailler avec les gens de droite, c'est vrai, comment le nier (Didier aussi soit dit en passant aiment ferrailler avec les gens de gauche ; pourquoi ne le reprocher qu'à moi) ? Mais je ne crois pas avoir été discourtois.

    Je vous répondrai simplement que je trouve ce concept de bien-pensance extrêmement bien pensant justement, et de plus en plus démocratisé. Tout le monde l'emploie et tout le monde s'en réclame. Tout le monde rêve d'être le politiquement incorrect de l'autre. C'est systématique et donc lassant.

    Ne venez pas me parler de Le Clézio, j'ai déjà dit que je n'aimais pas cet écrivain. Je ne dirai pas qu'il est bien pensant, mais en revanche qu'il est moins profond que certains ne le pensent : il est...uniforme !

    Quant à la droite, la gauche, je ne vois pas bien ce qu'elles viennent faire ici, puisqu'on parle de littérature. J'aime Llosa à la folie et il est bien de droite, non ? J'aime James Ellroy par dessus tout : c'est un immonde réactionnaire, non ? J'aime Céline : inutile de dire quel salaud il fut. Je ne vais pas faire la liste exhaustive de tous les écrivains de droite (voire pire) que j'aime (ils sont peut-être même plus nombreux que les écrivains dits de gauche (vu que je déteste Sartre et les surréalistes par exemple)).

    Donc, ce débat n'existe pas.

    Je suis désespéré comme nombre d'entre vous par les lauréats des prix littéraires. "Le Voyage..." n'a jamais eu de Goncourt, et "Les Loups" de Mazeline il me semble l'a emporté.

    Bref, ça ne date pas d'hier. Le Nobel a néanmoins été attribué à de grands écrivains : vous parlez de Soljenitsyne ? Il a eu le Nobel... Faulkner, Beckett, St Jonh Perse, Böll, Singer, Steinbeck...tant de très grands écrivains ont remporté cette distinction qui n'est pas un prix mais avant tout un hommage. Et ils ne sont pas tous, loin s'en faut, bien pensant !

    ---

    Didier,

    je ne vois pas bien ce que l'Afrique vient foutre là dedans, vous en parlez tout seul pour me rendre tout rouge, mais bon...ça va...je ne suis pas épidermique à ce point (il serait néanmoins aisé d'expliquer pourquoi il n'y a pas de prix nobel de chimie africain par exemple) (il y a aussi très peu de nobel scientifiques asiatiques ; aucun arabe non plus il me semble) (si l'on remontait aux anciennes civilisations, quelles conclusions pourraient-on en tirer ? Pas les mêmes assurément...)

    Pour moi, les différences d'évolution de civilisation sont évidentes ; elles s'expliquent par l'Histoire. Tout simplement.

    RépondreSupprimer
  23. Dorham : il y avait une part de provocation ou, pour mieux dire, de gaminerie, de ma part. Néanmoins, c'est une question plus intéressante (et plus interdite) qu'il n'y paraît.

    Ainsi que, par exemple, celle-ci, dans notre monde "sans races" : pourquoi certaines ethnies sont-elles plus soumises à telle ou telle maladie (ou au contraire presque totalement immunisées contre elles) ? A cause de l'histoire, vous pensez ?

    RépondreSupprimer
  24. Non, la géographie, le climat, l'alimentation...etc.

    Il est démontré par exemple, que bien avant l'arrivée des colons blancs, les indiens de la cote est ont été décimés par des virus. Ces virus n,'existaient pas chez eux, ils n'avaient donc pas pu s'immuniser.

    Cela ne constitue pas une différence de race sinon, nous pouvons dire que l'homme qui vivait au temps du Christ est d'une autre nature que celui que nous sommes. ça n'a aucun sens.

    Vous avez dit un jour, je m'en rappelle encore, que la génétique est une donnée plutôt récente. Soit. Et vous avez dit que c'est précisément pour cela que nous ne pouvons l'appliquer à la question des races.

    C'est un argument très idiot et cela me surprend de votre part. Car l'avancée des science est justement là pour nous faire comprendre le monde, et nous apprendre ce que nous ne pouvions juger ou ce que nous méjugions. Copernic, Giordano Bruno et Newton sont, j'en suis sûr d'accord avec moi :)))


    (mais vous avez honteusement déplacé le débat, là)
    (vous êtes retors, mais je commence à bien vous connaître, Didier...)

    RépondreSupprimer
  25. Dorham, je n'ai jamais dit ce que vous me faites dire. Mais, là, le boulot vient de tomber et, ensuite, j'envisage de rentrer chez moi...

    Ce soir, peut-être, si j'ai le courage. Ou demain matin, faut voir...

    RépondreSupprimer
  26. Bien, je me permets encore un petit ajout, il ne devrait jamais être question de Morale, je dis morale et non moralisme, Dorham, quand on parle de littérature : car c'est obscène ! Vous qui lisez beaucoup (à en juger par tous les auteurs dont vous parlez), ne le comprenez-vous donc pas ?
    Petite précision au sujet de Soljénitsyne, il a reçu le prix Nobel, pour des raisons politiques surtout. C'est un écrivain intéressant ("Le pavillon des cancéreux" est à lire à mon avis, bien plus que le "Ivan Denissovitch" opinion personnelle), mais à part le faît qu'il a bien analysé l'état d'esprit engendré par le régime communiste, les livres qui décrivent la première guerre, sont parfois ennuyeux à mourir. Il est émouvant terriblement, mais le niveau c'est comme du bon journalisme (cf "L'Archipel du Goulag"). Donc là aussi c'est un Nobel littéraire surtout et avant tout politique.
    Je vous prie de m'excuser, pour l'histoire du "ferraillage", je reconnais n'être pas très ouverte à la discussion, quand j'écris ceci.

    RépondreSupprimer
  27. Vous êtes de mauvaise foi, faudrait que je recherche mais j'ai la flemme a donf !

    Je vous assure que vous avez écrit ça (je vous consens peut-être une légère altération de l'idée, admettons, mais c'est l'esprit général ; j'ai très bonne mémoire...)

    (ou alors non...auquel cas, je sais reconnaître mes erreurs)

    RépondreSupprimer
  28. Emma : je reviens ce soir, à la maison.

    Non, dorham : j'ai écrit "quelque chose comme ça", mais pas ça. Le "ça" en question, c'est ce que vous avez voulu comprendre. On y reviendra : là, je dois ré-enterrer Pascal Sevran...

    RépondreSupprimer
  29. Pour revenir à votre texte de départ (je ne prends pas part au débat, je travaille déjà trop toute la journée pour en plus dire des choses compliquées sur Internet), j'aime bien l'idée que le talent de l'écrivain, c'est aussi de suggérer des enrichissements, des gloses, des digressions à l'infini à ceux qui le lisent et s'approprient sa prose.
    ["Et, là, discourant, vous vous apercevez, les phrases se déroulant, que cette image qui vous a d'abord fait sourire présente des étages, des arrière-plans, des tiroirs secrets ; et que, plus vous l'évoquez, plus elle acquiert de richesse. Et, même, au risque du ridicule, de profondeur."]

    RépondreSupprimer
  30. "Il ne devrait jamais être question de Morale, je dis morale et non moralisme, Dorham, quand on parle de littérature"

    Bon, vous cherchez la petite bête, là, et tordez un peu les arguments. Mettons que nous cessions de débattre et que nous préférions, vous et moi, le dialogue. Alors, le dernier mot ne vous intéresserait ni vous, ni moi.

    Je n'ai jamais dit qu'il fallait juger la littérature via la morale, mais maintenant, je le dis. Que l'on juge la littérature via la question morale ne signifie pas qu'on la discrédite.

    Chez tout auteur, la question est présente ; nécessairement, parce qu'elle est constitutive de toute pensée humaine. Comment lire Sade sans idée de la morale ? Comment lire Nimier ? Comment lire Faulkner ? Comment lire Primo Levi ? Comment lire les penseurs ? Ce serait impossible ! Sans la morale, toute lecture est impossible, comme toute humanité est vouée à sa perte...

    (cela fait de moi je suppose un type un peu réac aussi :))) bien qu'en effet, profondément de gauche)

    En revanche, il me semble que vous jugez précisément la littérature à travers un prisme moraliste (j'insiste). C'est ce qui vous permet de déterminer, je suppose ce qui est bien pensant de ce qui ne l'est pas. Quand vous parlez de Le Clézio, ce n'est pas pour définir son oeuvre, et ainsi déterminer en quoi elle ne mérite pas le Nobel (ce que j'ai fait quant à moi en pointant son uniformité de ton, ses réflexes un peu niais et sa fausse profondeur ; aucun jugement ni moral ni moraliste là dedans) mais pour préciser qu'il s'agit là d'un bien pensant de plus qui gagne une récompense.

    Un moraliste n'aimerait pas un écrivain amoral, vous prenez le contrepied et n'aimez pas les écrivains "bien-pensant"... C'est le même procédé qui vous conduit tous deux à juger une oeuvre différemment.

    Qui amène ici la littérature sur le terrain du moralisme ? Qui ne la juge pas pour ce qu'elle est, armé des critères qui doivent lui correspondre ?

    (ceci, avec tout le respect que je vous dois, bien entendu...)

    ---

    Mais nous perdons l'idée de départ. Vous avez confondu au début (peut-être pas, j'y consens) morale et moralité. Ici, vous confondez de manière plus flagrante morale et jugement. La morale n'est pas systématique, n'est pas échelle de valeurs, sinon, elle devient précisément moralisme.
    Le moralisme, si nous tentons un début de définition (un embryon), c'est la morale dénuée de sens et d'idée (comme un prêt à penser) qui permet le jugement et la disqualification. Quand vous dites qu'il ne doit jamais être question de Morale en littérature, vous sous-entendez que si nous jugeons un écrivain amoral, nous jugeons avec lui sa littérature ?

    Si tel est le vas, alors, vous confondez bien les deux finalement...

    RépondreSupprimer
  31. Didier,

    désolé d'être long et chiant.

    Ne me faites pas plus malhonnête que je ne le suis. Si j'ai mal compris, et bien j'ai mal compris. Personne n'est à l'abri d'erreurs de compréhension...

    RépondreSupprimer
  32. Pétronille : grande lâche !

    Dorham : vous n'êtes pas si long que cela, et pas du tout chiant (ou alors c'est vraiment que je ne tiens plus l'alcool). Pour ce soir, je vous laisse avec Emma (vous êtes en de bonnes mains...), je repasse demain.

    RépondreSupprimer
  33. « Quand vous dites qu'il ne doit jamais être question de Morale en littérature, vous sous-entendez que si nous jugeons un écrivain amoral, nous jugeons avec lui sa littérature ? » : Dorham, vous me faites sous-entendre une idée que je n'ai pas. Plus précisement c'est même l'inverse exactement, que je tentais d'exprimer! Ne dit-on pas que les bons sentiments ne font pas de la bonne littérature ? Eh bien c'est ce que je voulais dire : le jugement littéraire ne devrait pas tenir compte de la catégorie Morale (qui est de la philosophie), voilà rien de plus, et rien de moins.
    Pour terminer : Céline est un bon écrivain, peut-on dire justement qu'il est "moral" ?
    Encore : je ne vous ai rien dit sur J.M. Le Clézio...
    Hier soir je n'étais pas à la maison, je ne vous ai pas répondu, mais je vois ce matin dans les commentaires après le billet de Didier sur Woody Allen, que vous reparlez du prix Nobel, avec un peu de colère rentrée, j'espère que notre discussion n'en est pas la cause.

    RépondreSupprimer
  34. Emma,

    pour le Nobel, non, ça ne me met pas en colère. Ma position là dessus est simple. 1 - je n'ai rien contre l'institution Nobel parce que c'est un hommage rendu plus qu'un prix (dans le cas de la littérature j'entends) ; 2 - Je pense que Le Clézio ne le mérite pour des raisons qui sont précisément littéraires.

    Pour la colère rentrée, exprimée à propos de Woody Allen, c'est plutôt autre chose. Disons qu'il y a accumulation des jours derniers et que j'exprimais un sentiment général (vous n'en êtes finalement pas responsables, ni vous ni Orage).

    RépondreSupprimer
  35. Bien, cela dit, je peux entrer dans le vif du sujet.

    Quand vous dites qu'on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments, vous démontrez que vous ne saisissez pas réellement ce qu'est la morale. Les bons sentiments ont quelque chose de frelatés, d'immédiats ; cela n'a rien à voir. Maintenant, j'en suis certain, vous confondez.

    Je pourrais expliquer ma démarche pour mieux me faire comprendre.

    Lorsqu'il s'agit de concepts importants, je pars d'un absolu, d'une définition stricte. Le texte de Didier ici et chez Zoridae ne fait pas différemment lorsqu'il parle de l'écrivain. Cette définition stricte lui permet de dire que si un écrivain peut être blogueur, un blogueur, lui, ne peut pas être écrivain. Sinon, il serait un écrivain qui blogue. Voyez ? Certains penseront que c'est tiré par les cheveux, mais ils auront tort. Sans absolu, aucune pensée n'est possible. Et c'est pour cela que certains ne comprennent pas ce qu'il veut dire. La différence entre Didier et moi est la suivante : Didier aime provoquer et cela l'amuse de laisser quelques uns barboter dans la gadoue (vous êtes vraiment un sale gosse, Didier).

    Bon.

    Vous parlez de philosophie. C'est un terme générique la philosophie, qui, en effet, rassemble plusieurs domaines de l'âme : la métaphysique, la Morale...etc. Mais avant tout, terme plus générique encore, la philosophie, c'est la pensée. La pensée pure.

    Donc, la Morale, c'est la pensée pure.

    Mettez en rapport les bons sentiments évoqués et la pensée ; vous voyez bien qu'il n'y a pas de rapport possible. Vous voyez bien que les bons sentiments sont une sorte d'assemblage fluctuant qui varie selon les moeurs. Les bons sentiments empêchaient les contemporains de Flaubert d'aimer Madame Bovary. Nous n'avons quant à nous plus aucun mal à lire cette oeuvre, via le prisme des bons sentiments...

    Sur ce point donc ("on ne fait pas de littérature avec des bons sentiments, je suis on ne peut plus d'accord).

    Mais sans Morale ? C'est à dire, comprenez-moi bien, sans pensée (vous dites philosophie, d'ailleurs) ? Comment lire sans penser ? Ce serait une non-lecture.

    (d'ailleurs, en insert de ce commentaire, je me demande si vous pensez réellement ce que vous dites... Pensez-vous que Socrate ait pensé avec des bons sentiments ? Nietzche ? on suppose que si tel avait été le cas, ils auraient connu une autre fin, non ?)

    Revenons à nos moutons...

    Comment lire sans pensée et sans morale alors que tous les "écrivains" (au sens strict que je partage avec Didier) se positionnent par rapport à la morale, s'exonérant ainsi des "bons sentiments". Balzac bien sur. Céline pour ce qu'il dit de la folie humaine et de la Guerre. Sade qui en prend le parfait contre-pied (pourriez-vous lire les "120 journées de Sodome" sans morale, vraiment ?). Ces écrivains, en plus d'être d'immenses stylistes, sont également pétris de Morale et c'est avec la Morale, la pensée, que nous jugeons leurs oeuvres. Parce qu'elles ont cette force, de ne pas considérer les bons sentiments mais qu'elles expriment avec une rare force de grandes questions morales, philosophiques et/ou métaphysiques.

    Si nous lisions tous en pensant, alors aucune grande oeuvre ne pourrait être vouée à l'autodafé, Sade n'aurait pas frôlé la mort et serait d'ailleurs bien plus étudié qu'aujourd'hui encore... Car en réalité, s'il y a bien un écrivain "moral" (je le dis sans provocation et très sincèrement), c'est bien Sade justement : parce que toutes ses oeuvres nous questionnent sans cesse sur ce que signifie le moralisme (religieux en particulier) et donc nous impose la Morale comme supérieure à toutes choses.

    La philosophie n'est pas cantonnée au rayon correspondant de nos bibliothèques. On peut faire de la philosophie sous sa douche, en marchant dans la rue. Tout le temps, nous pensons tout le temps, nous sommes conscience et raison. Et le regard que nous portons sur toutes choses en est corrélatif.

    Vouloir se délester de philosophie (c'est à dire de pensée) pour lire (on le fait néanmoins quand on lit de mauvais livres , héhé), c'est réclamer l'inconscience, convoquer l'irrationnel.

    J'en reviens donc à une phrase précédente : vous ne "pensez" pas ce que vous dites (le verbe penser étant utilisé dans son sens strict).

    RépondreSupprimer
  36. Dorham, vous devenez trop intelligent pour moi. Je pense être pour l'essentiel d'accord avec ce que vous venez de développer, mais il faudrait que j'y réfléchisse un peu. Et là, je peux pas, j'ai plein air.

    RépondreSupprimer
  37. Aïe, pauvre de moi, il paraît que je ne "pense" pas quand je lis, Dorham ? Comment dire : c'est en effet comme un bain dans lequel je plongerais, et les mots, les phrases, les idées de l'auteur se déroulent devant moi tels un paysage où je suis immergée. La définition d'une lecture pour moi c'est ça.

    RépondreSupprimer
  38. Emma,

    et bien...vous ne répondez pas vraiment, moi j'dis ! Mais ce n'est pas grave...

    RépondreSupprimer
  39. « Ah, et j'oubliais de vous citer cette remarque de Nabokov, dont je n'ai pas la provenance: "En tant qu'artiste et homme d'étude, je préfère le détail particulier à la généralisation, les images aux idées, les faits obscurs aux symboles évidents et le fruit sauvage à la confiture synthétique." Ceci permet peut-être de rappeler que la littérature n'a pas besoin de montrer patte blanche aux grandes autorités morales du moment, de leur faire la preuve de son universalité, pour être intéressante. »
    Ecrit par Henri Bès sur le forum de l'In-nocence, dans le très intéressant fil :
    « Nobel français... mais nomade avant tout ! »
    Anna R.

    RépondreSupprimer
  40. "On peut faire de la philosophie sous sa douche" (Dorham)

    Au prix où est l'eau chaude, je ne vous le conseille pas trop. Ou alors, à petites doses. Un aphorisme, une pensée et hop, on se rince.
    D'aucuns prétendent qu'on fait autre chose sous la douche, et que c'est dans son bain qu'on lit "Histoire de la sexualité", de Michel Foucault.

    RépondreSupprimer
  41. Emma,

    Nabokov a dit ça ?

    C'est une idiotie. Mettre "idées", "symboles évidents" et "confiture synthétique" sous le même rapport est une provocation sans intérêt.

    Etant donné la stature de l'écrivain, ce ne peut être que ça ; une provocation puérile.

    Quant à la citation de la fin, elle est hors sujet : vous persistez. La Morale telle que j'ai l'ai définie au moins trois fois précédemment n'a pas d'autorités pour la définir. Elle est absolue, universelle, indivisible en dépit de ce que les hommes espéreraient croire...(comme la pensée ou la raison)

    Comme nous parlons chacun d'une chose différente, impossible de nous entendre... Vous devriez peut-être réfléchir posément et tenter de définir vous-même ce que c'est que la morale, opérer les distinctions qui seraient utiles à la poursuite du dialogue. Sans y penser préalablement, nous n'avancerons pas... (ceci dit sans ironie et en toute sincérité).

    RépondreSupprimer
  42. Un camembert ça ne se tartine pas, ça se déguste!!!!!
    Parole de normande...

    RépondreSupprimer
  43. "Au prix où est l'eau chaude, je ne vous le conseille pas trop."

    Suzanne, je suis un salaud de pauvre, j'ai le chauffage collectif et l'eau chaude est comprise dans mes charges...en étant tantôt mesuré tantôt dispendieux, on ne dépasse pas trop le seuil et la facture finale est légère...

    (reste l'impact environnemental...)

    RépondreSupprimer
  44. Je jette l'éponge, signor Dorham...
    @ Didier : merci pour tout ce que vous écrivez sur votre blog, et pour la façon avec laquelle vous répondez toujours.

    RépondreSupprimer

La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.