En 1603, septembre, le maréchal François de Bassompierre, qui ne l'est pas encore, maréchal, se trouve en Hongrie, sous les murs de Bude (Buda), au milieu des armées de l'empereur : il s'agit de reprendre la ville aux Turcs qui l'occupent ; il a 24 ans. Dans ses mémoires, dont j'ai eu le plaisir, hier, chez Michel Desgranges, d'une lecture musardée faite à haute voix devant la table de salle à manger ; dans ses mémoires, donc, Bassompierre raconte comment, à l'issue d'une bataille, en parcourant le champ avec le prince de Joinville, ils tombèrent sur le maréchal de camp général de l'empereur, Christophe Herman de Rossworn, tranquillement assis sur des cadavres de Turcs : les bancs étaient rares, à cette époque, sous les murailles de Bude, il n'était donc pas illogique de transformer les Turcs morts en ottomanes. Incontinent, les deux Français prennent à leur tour place sur cet empilement de chair et d'os mahométans et se mettent à deviser comme de vieux amis.
Amis, ce Rossworn et lui ne l'étaient pourtant point au départ, puisque, à la suite d'une pénible affaire de viol perpétré par le maréchal de camp général, celui-ci manqua d'avoir la tête tranchée sur ordre de M. de Bassompierre père. Mais enfin, on se raccommode ; et c'est ensemble que, l'armée turque s'étant repliée pour l'hiver, on prend la route de Prague.
Arrivés dans cette ville, Rossworn, sorte de DSK avant l'heure, avise Bassompierre qu'il connaît un bourgeois, père de deux filles ravissantes, et tout disposé à céder les pucelages de ces jouvencelles moyennant le paiement de deux cents ducats ; à entendre Rossworn, l'affaire est conclue, les termes en sont clairs, il n'y a plus qu'à se présenter chez le bourgeois en question.
Une fois sur place, Bassompierre comprend vite que le marché n'est en rien topé, ne serait-ce qu'aux protestations véhémentes et indignées du Praguois. Notre mémorialiste est tout prêt à se retirer, mais Rossworn ne l'entend pas de cette oreille : un marché, même n'existant que dans son imagination enfiévrée, reste un marché. Saisissant le bourgeois au col et lui appliquant la pointe de sa dague sur la carotide, il tient à son compagnon à peu près ce mâle langage : « Veuillez consommer dès à présent votre jouissance avec l'une de ces donzelles, pendant que je tiens ce drôle à merci ! Ensuite, je prendrai mon tour avec l'autre… »
Bassompierre lui ayant fait observer qu'il avait peu de goût pour forcer les pucelles, lesquelles n'en mènent pas large dans leur coin, Rossworn trouve la parade : « Fort bien, mon ami ! Veuillez donc me remplacer à la dague cependant que je besognerai ! » (C'est l'esprit, non les mots : je n'ai pas le livre sous les yeux…) Bassompierre, à qui l'amitié commande, ne peut faire moins que d'obtempérer. Rossworn s'empare de l'une des deux filles, tandis que l'autre se met à pousser les cris suraigus d'une poularde ayant aperçu la casserole ; si bien que, derrière les croisées, une foule peu satisfaite commence de s'attrouper (environ quatre cents d'après le mémorialiste, que je soupçonne d'exagérer). De peu satisfaite, elle devient vociférante puis agressive ; si bien que, forfait non consommé, nos deux violeurs potentiels sont obligés de fuir à toutes jambes sous les jets de pierre d'une populace peu joueuse – et peu s'en fallut qu'ils n'y laissassent la vie.
Christophe Herman de Rossworn devait finir décapité un an plus tard.
Et voilà ! Vous stigmatisez encore le peuple qui se laisse manipuler par la bourgeoisie.
RépondreSupprimerMais pas du tout !
SupprimerOn peine un peu à saisir le sens du propos. Y aurait-il une leçon à tirer de tout ceci ?
RépondreSupprimerUne leçon ? Pas que je sache, non.
SupprimerSi on veut vraiment en tirer une, ce serait que le Turc mort est confortable à qui veut s'asseoir un moment.
SupprimerC'est quoi la leçon, c'est quoi la morale de l'histoire, qu'est-ce qu'on doit comprendre, qu'est-ce que vous voulez dire exactement, quels sont vos présupposés, qu'est-ce que vous sous-entendez, vous avez des idées derrière la tête, d'où parlez-vous, qu'est-ce que ça cache, y a-t-il un message subliminal…
SupprimerFaut tout leur expliquer., faut tout avouer, faut vider son sac.
Foutue époque.
Rassurez-vous, Georges, avec vous on sait toujours ce que vous voulez dire, car cela se résume à une séance de renforcement du moi probablement prescrite par votre psy.
SupprimerHeureux d'avoir pu participer.
Et surtout, oui surtout, d'où parlez vous ?
SupprimerC'étaient des blogueurs de droite, eux aussi ?
RépondreSupprimerN'insultez pas la vieille noblesse, je vous prie !
Supprimer"Christophe Herman de Rossworn devait finir décapité un an plus tard."
RépondreSupprimerQuelle perte immense pour les bonnes manières !
On peut d'autre part subodorer que, de cette mort, la natalité extra-conjugale européenne s'est trouvée affectée.
Supprimerla leçon a tirer de tout ça c'est que les moeurs ont changé, la vie est devenue sacrée donc on n'oserait plus s'asseoir sur des cadavres, meme en temps de guerre, puisque la convention de geneve et les droits de l'homme l'interdisent De plus a cette époque, les villageois ont empeché un viol tandis que de nos jours les femmes se font agresser et violer dans le métro sans que personne ne réagisse puisque la plupart des gens ont peur d'y laisser sa peau, n'étant plus aussi affutés physiquement que leurs ancètres et étant persuadés qu'aucun paradis ni enfer ne les attend après la mort
RépondreSupprimerJe ne sais pas ce qu'en disent les conventions de Genève, mais moi je dis que vous nous faites chier avec votre typographie de merde.
SupprimerD'après les meilleures sources, il semble que la Convention de Genève n'aborde pas la délicate question des Turcs morts servant d'ottomanes. En revanche, Georges a raison de le souligner, elle est sans pitié avec les génocideurs de typographie.
SupprimerRossworn n'est plus mais le DSK est toujours vivant.
RépondreSupprimerTiens, vous avez (maladroitement) magyarisé mon prénom...
RépondreSupprimerAh, oui, c'est amusant ! Je me suis pourtant relu deux fois, bon sang…
SupprimerVlad Țepeș lui préférait les emplaer ou leurs clouer leurs turbans sur la tête, il savait s'amuser ce petit gars.
RépondreSupprimerS'il repasse par ici, Michel Desgranges nous le confirmera sans doute : il me semble que, dans ses mémoires, durant le siège dont je parle, Bassompierre parle de prisonniers empalés, par les chrétiens.
SupprimerTiens, j'ai trouvé quelque chose qui s'applique bien à Polo, c'est de SImon Leys : « Car l’ignorance, l’obscurantisme, le mauvais goût, ou la stupidité ne résultent pas de simples carences, ce sont autant de forces actives, qui s’affirment furieusement à chaque occasion, et ne tolèrent aucune dérogation à leur tyrannie. »
RépondreSupprimerEcœuré par vos récupérations absurdes, Simon Leys a préféré mourir. Vous devriez l'imiter et laisser la place aux forces vives de la nation. Les vieux cons sont des pollueurs.
Supprimer"Les forces vives de la nation"… magnifique !
SupprimerOn peut bien comprendre qu'un Turc aux moeurs légères puisse servir d'ottomane! Il est vrai qu'il existait déjà les "chiottes" à la turque, mais précisément on ne peut s'y asseoir!
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