mardi 15 mars 2016

CNRS – SS

La couverture est si laide qu'on ne la trouve même plus sur Amazon : c'est le moindre défaut du livre. Peu importe par quels méandres j'en suis venu à rouvrir l'Histoire de la littérature française d'Albert Thibaudet : ce qui compte ce soir c'est la rage dans laquelle me met cette édition qu'en a donnée le CNRS en 2007. Si, à 17 ans, je m'étais mis en tête de ronéoter un fanzine gauchiste, je vous jure qu'il aurait contenu dix fois moins de fautes d'impression au centimètre carré que cette déjection parvenue entre mes mains. Je ne sais pas ce que valent les fonctionnaires de la science qui ronronne au profond de cette institution d'État, mais s'ils sont du même niveau de conscience professionnelle et d'aussi consternante compétence que leurs voisins de palier qui prétendent éditer des livres, il serait urgent de les passer par les armes. Pas une page, dans cet étron imprimé, où ne s'étale la preuve qu'aucune personne non mongolienne n'a jamais relu le texte de Thibaudet qu'on se proposait d'imprimer à vos frais de contribuables ; beaucoup de phrases finissent par en devenir parfaitement incompréhensibles. La ponctuation se livre à à une gigue si folle qu'elle paraît commandée par la baguette du Woland de Boulgakov. Si CNRS éditions décidait – que Dieu nous protège de cette catastrophe – d'éditer l'œuvre de Proust, la première phrase ressemblerait sans doute à ceci : Longtemps, me suis couché de bonne, heure. Au nom de quelle indulgence coupable laisse-t-on vivre les responsables de forfaits semblables ? Par quelle faiblesse incompréhensible refuse-t-on de rétablir la question médiévale pour des gens qui soumettent ainsi leur propre langue à la torture ? Et pourquoi la police ne met-elle pas tout en œuvre pour retrouver, et nommer bien haut, les responsables d'un aussi ignoble forfait ? Naguère, dans une nation ultramarine, un régime jeune et dynamique eut l'idée de rassembler dans un stade ses indécrottables opposants, afin de les passer plus commodément au fil de l'épée : ne pourrait-on, de même, regrouper ces assassins typographiques, et leurs chefs avec eux, dans un quelconque Bataclan parisien, avant de prier les habituels nettoyeurs de l'endroit d'y venir faire leur office ?

39 commentaires:

  1. En 2007, dîtes-vous ? Je n'avais pas saisi de suite, tellement l'affaire paraît monstrueuse ! Mais alors les responsables sont toujours vivants, prêts à répondre de leurs crimes. Il est urgent d'écrire une lettre ouverte et de la faire signer par tout le gratin littéraire.
    A l'abordage et pas de quartiers !

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    1. C'est ça : tuons-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.

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  2. Le drame du fichier OCR (reconnaissance optique des caractères) non relu.

    Ils prennent un ancien volume de l'Histoire de la littérature française, en découpe les feuillets, passent les feuillets à la machine, la machine identifie les lettres (avec beaucoup de confusions selon la typographie, surtout au niveau de la ponctuation : la moindre tache sur le papier devient un signe), et cela finit en fichier Word qu'il faut loger dans un fichier InDesign. Sans qu'un correcteur soit passé par là (ou alors, le correcteur est un stagiaire qui ne sera jamais relu ou qui maîtrise mieux l'espagnol ou le roumain que le français).

    Mais cela arrive aussi chez de très bons éditeurs qui, toutefois, corrigent le fichier de l'OCR (mais des erreurs persistent très souvent, deux exemples trouvés récemment chez deux éditeurs respectés et respectables : force devient farce, tendre devient rendre).

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    1. L'explication est convaincante, mais ne saurait constituer une excuse !

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  3. Qu'on les pende, tous, haut et court !

    Je vois que le "fruit sec" a encore du mordant !

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  4. Je n'ai pas lu cette Histoire de la Littérature, en revanche j'ai ses chroniques parues à la NRF, jusqu'à sa mort en 36 et éditées par Gallimard, dans la collection Quarto.
    Et j'ai vraiment aimé !

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    1. J'ai lu ce volume également (je dois même encore l'avoir). Son Histoire est très intéressante, mais souvent à son corps défendant ; c'est-à-dire en ce qu'elle dit des goûts d'une époque déjà presque centenaire : tel écrivain démesurément grossi, tel autre passé presque sous silence, etc. Ce qui, bien entendu, ne signifie pas qu'il a tort et nous raison.

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  5. " Je ne sais pas ce que valent les fonctionnaires de la science qui ronronne "

    Un peu d'indulgence, tout le monde peut se tromper...

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  6. On commence par supprimer la peine de mort, la question, la roue et dès lors les cancrelats en profitent.
    Il faut rétablir sinon le gibet, restons réalistes, mais au moins le pilori.
    Il n'est pas impossible sur ce point délicat que les Lyonnais n'aient des choses à nous apporter qui ne soient définitives.
    Sinon pourquoi vous attaquer à Thibaudet ?
    C.Monge

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  7. On compatit mais il nous manque des extraits pour comprendre tout.

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  8. Monsieur Goux, je vous jure que je n'ai jamais travaillé au CNRS de toute ma vie.
    Les lettres, je les trie mais ne les corrige pas.

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    1. Ça va, vous pouvez rejoindre vos camarades dans les rangs.

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  9. Ha.dix sept ans.
    Je me souviens de ces bizus qui distribuaient leurs ronéos aux AG, heu... Assemblées Guénerales du lycée E.Delacroix.Que des noms en ISTE. Jolie bande de fumistes.on montaient en courant au troisième. on arrivaient essouflés mais hilares, remplissant en vitesse quelques sacs poubelles de cinquante litres au chiottes des extremités du lieu. Puis, en comptant jusqu'à trois, ouvrir soudainement les fenêtres basculantes, et synchroniser notre bombardement sur cette assemblée de refaiseurs de monde qui captaient l'attention de nos gonzesses. C'était trop bien la politique.
    Vous aurait je mouillé ?

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  10. Hilarant. Il me semble d'ailleurs que le gars de la photo sourit derrière sa moustache.
    J'ai tenté de lire le livre de Thibaudet sur Maurras mais ce ne sont pas les coquilles qui m'ont arrêté : n'aurait-il pas lui-même, déjà, une écriture assez vaseuse ?

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    1. Vous êtes trop sévère, je pense. Même si son style a parfois quelque chose d'un peu râpeux, il écrit beaucoup plus élégamment que les universitaires d'aujourd'hui.

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  11. De Thibaudet, il faut lire le Gustave Flaubert. Un livre de référence.


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    1. Je l'ai relu juste avant l'histoire de la littérature. J'ai été assez satisfait de constater que l'espèce de hiérarchie que Thibaudet indiquait, au sein de l'œuvre de Flaubert, était la même que la mienne. En gros : supériorité de L'Éducation sentimentale sur Madame Bovary et infériorité d'Hérodias par rapport aux deux autres des Trois contes.

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  12. Malheureusement, ce ne sont pas que les glands du CNRS... je suis en train de rencontrer les mêmes difficultés dans ma lecture de Tobacco Road...

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  13. l'Histoire de la littérature française d'Albert Thibaudet? Qu'est-ce qu'il y a là dedans? question naïve: quelle est la différence entre une histoire de la littérature française et une anthologie? Est-ce un truc d'éditeur pour vendre deux fois les mêmes extraits libres de droits à des pigeons ou existe-t-il vraiment des différences de fond? Avec tous mes Lagarde & Michard, et mon Suzanne Julliard, est-ce suffisant ou bien dois-je faire un détour par M. Thibaudet....

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    1. Enfin, mon ami : ça n'a rien à voir ! Une anthologie de la littérature est un choix de textes, pris chez les écrivains que l'auteur considère comme les plus importants ; une histoire c'est… eh bien, c'est une histoire, quoi !

      Celle de Thibaudet, je me répète, est intéressante en raison de la personne même de Thibaudet, mais aussi en raison de son éloignement dans le temps (années trente du siècle passé), qui entraîne des éclairages différents, des changements de proportions entre les écrivains, etc. Mais enfin, ce n'est nullement une lecture indispensable.

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    2. oui je comprends plus ou moins, mais j'imagine que dans l'histoire il y a tout plein d'extraits et un éclairage proposé par le bonhomme et très probablement dans l'ordre chronologique...dans une anthologie, idem la différence est que les extraits peuvent regrouper par thème mais sont tout de même très souvent agencés de manière chronologique...bref pour moi, ce sont des trucs d'éditeur, c'est vendre 2 fois la même lessive sous un emballage différent...La seule chose est que l'histoire prétend à une certaine globalité...Bon, mon idée dans tout cela c'est bonnet blanc & blanc bonnet...

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    3. Vous vous trompez du tout au tout. Par exemple, à part deux ou trois vers çà et là, il n'y a aucun extrait de textes dans le livre de Thibaudet. Il faudrait vérifier, mais je crois me souvenir qu'il n'y en a pas davantage dans de Kléber Haedens. Pas de partitions non plus dans Une histoire de la musique de Rebatet.

      En revanche, dans l'Anthologie de la poésie française de Revel, il n'y a que des poèmes et aucune "histoire".

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    4. Lors de mes études lycéennes terminées en 1955, tout le monde utilisait l' "Histoire de la littérature française" d' un certain Gustave Lançon (qui se terminait par un superbe " Gardons espoir !"...Déjà, le déclinisme!); je me demande ce qu'on utilise aujourd'hui...en supposant qu'on utilise quelque chose.)

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    5. (suite Le plus curieux est que j'ai cherché sur Internet qui était ce Gustave Lançon, dont l' "Histoire de la littérature française" a tout de même servi de manuel de base pour tous les lycéens français pendant une bonne trentaine d'années, et tout ce que j'ai trouvé, c'est une rue Gustave Lançon au Pertuis (dont je suppose qu'il était originaire) - ce qui prouve qu'il a quand même existé.

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    6. Cela tient peut-être à ce que vous avez confondu deux Gustave : Lançon et Lanson

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    7. Maintenant, il reste à savoir qui est ce Gustave Lançon, assez célèbre pour avoir une rue à son nom à Pertuis...

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    8. Et dire que j'ai encore son bouquin, bien visible dans ma bibliothèque, et que j'ai eu la flemme d'aller vérifier...

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  14. Je peux savoir de quoi on nous parle exactement ?

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    1. Si on y réfléchit, il est vrai que l'Église catholique ne demande pas à ses ouailles de comprendre le mystère de la Sainte Trinité avant de chanter Amen !

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  15. J'ai bien ri en lisant tous ces commentaires.
    C'est trop mignon, on a vraiment l'impression d'être à l'école; Didier en maitre de classe, avec nous, les garnements dissipés !

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    1. Ils feront moins les malins quand il s'agira de faire signer leur carnet de notes par leurs parents n°1 et n°2…

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  16. Même déconvenue avec cet éditeur. La grande histoire du latin de Jürgen Leonhardt, ouvrage passionnant, rendu à peine lisible par une traduction aberrante. Le traducteur, qui se sent obligé de farcir les pages de notes souvent redondantes et ridicules, est visiblement inadapté à la tâche qu'on lui a confiée : il ne comprend pas un mot de latin et n'a pas même des rudiments de linguistique historique. Il faut deviner quel pouvait bien être le texte qu'il a défiguré. Il est vraiment lamentable de lire ses notes où il a ramassé des informations prises un peu n'importe où, à la va vite, souvent sur internet, pour tenter de traduire des termes techniques qu'il ne comprend pas. Et la typographie, la correction du texte sont telles que votre Thibaudet.

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