L'autre nuit, sur une chaîne où je ne faisais que passer, je suis tombé, et c'est le mot, sur une interview récente de Michel Bouquet ; à mon arrivée, il parlait d'un certain Eugène, qui semblait être l'un de ses amis et pour qui il nourrissait une très audible admiration. « Eugène n'aimait rien tant que… », et puis : « Aucun homme plus qu'Eugène ne ressentait… » Et ainsi de suite ; j'attendais patiemment.
Il m'a fallu cinq longues minutes pour enfin comprendre qu'il parlait d'Ionesco. J'ai immédiatement quitté les lieux, en maudissant ce pénible vieillard, qui se croyait tenu d'adopter les plus pitoyables tics langagiers de l'époque, sans voir la discourtoisie ni le ridicule de sa pose : discourtoisie parce que, en nommant Ionesco Eugène, il nous faisait sentir que nous avions, troupeau des modestes, à nous tenir hors du cercle des intimes de l'écrivain ; ridicule car il semblait, lui, se gargariser d'avoir été admis à l'intérieur – ce qui n'a d'ailleurs rien de certain, après tout.
Et je me demandais ensuite, cependant que, sur une autre chaîne, Morgan Freeman, Tea Leoni, Robert Duvall et deux ou trois autres s'efforçaient avec un succès mitigé de sauver la planète, je me demandais à quoi pouvait bien correspondre cet effacement quasi général du nom, du nom propre, qui ne se contente déjà plus de ne toucher que les personnes : on sauve (ou on détruit…) la planète ; d'autres se demandent gravement ce qui ne va pas dans ce pays.
La planète ? Ce pays ? Ça n'existe plus, la Terre ? C'est devenu un gros mot, la France ?
Bravo Didier !
RépondreSupprimerAy non ! tout ce que vous voulez, mais ne dites pas de mal de Michel Bouquet !
RépondreSupprimerTrop tard…
SupprimerOui, enfin quelqu'un ose critiquer Michel Bouquet.
RépondreSupprimerBon dimanche à tous.
Le pis est que ce qu'il disait d'Ionesco était fort loin d'être stupide.
SupprimerQuelle est la (longue) liste de vos griefs envers cet acteur ?
SupprimerDuga
Je plussoie Marco.
RépondreSupprimerAh mais, moi aussi, je plussoie Marco !
SupprimerJe vous trouve très dur avec Michel Bouquet qui est tout le contraire d'un frimeur et d'un "m'as tu vu". Pour une fois qu'un acteur cultivé a l'occasion de s'exprimer, le stigmatiser sous ce seul angle est un peu réducteur.
RépondreSupprimerJ'espère que tous ceux qui s'adressent à vous en employant votre prénom vous connaissent aussi intimement.
Désolé
Duga
Oui, Mildred, Anna, Mat (et Emmanuel) ont raison : halte a l'hégémonie infantilisante des prénoms !
RépondreSupprimerCela dit, si l'on en est à s’acharner sur Michel Bouquet, l'un de nos derniers acteurs à soigner sa diction et à faire entendre sur une scène toutes les nuances et les subtilités de la langue française, c'est qu'effectivement, la situation est grave, sinon désespérée...
C'est devenu un gros mot, la France ? Poser la question... pour certains , ils sembleraient que oui.
RépondreSupprimerIl y a des gens qui ont besoins de se faire mousser, quand vous serez encore plus célèbre que vous ne l'êtes déjà, je dirais en parlant: "Ce cher Didier, etc,etc..."
RépondreSupprimerBon, précisons un peu les choses, donc. Il me semblait aller de soi que, si j'avais vu, mettons… Marion Cotillard ou Jean Dujardin parler d'un écrivain en le désignant par son prénom, je n'aurais pas pris la peine de le relever ; peut-être même ne m'en serais-je pas aperçu. Mais c'est justement parce que Bouquet est ce qu'il est que cela m'a désagréablement frappé. Je me suis dit quelque chose comme : « Quoi ? Même lui ? »
RépondreSupprimerC'est pénible, hein, la bloge…
SupprimerNommer par le prénom, c'est un peu comme mettre son bras autour de la personne, et qu'on l'étrangle avec une sympathie extrême.
RépondreSupprimer"Je suis proche de toi, viens là que je t'étouffe."
C'est devenu un gros mot, la France ? Certes non. Tout comme la propriété immuable de certain .
RépondreSupprimervincent
T'exagères Didier, il est super cool Michel…
RépondreSupprimerIl y a quelques années, F+ avait écrit un billet brocardant l'emploi de plus en plus fréquent de "planète" en lieu et place de "monde" :
RépondreSupprimer"Suite à une profonde mutation du vocabulaire français depuis quelques mois, je vous prie de prendre note des nouvelles dénominations officielles qu’il faudra adopter.
Vous devrez désormais parler des Championnats de la Planète de Football, du problème de la faim sur la planète, de l’homme le plus petit de la planète enregistré par le livre des records, de l’Organisation Planétaire de la Santé, du journal La Planète Diplomatique, de l’ONG Médecins de la Planète, de l’Institut de la Planète Arabe, du rayon Musique de la Planète à la Fnac, du fameux Tour de la Planète en 80 jours, de tout le bonheur de la planète que nous souhaite Sinsémilia, de vos vacances à l’autre bout de la planète, etc.
Vous n’oublierez pas non plus de réviser vos classiques : Jésus est la Lumière de la Planète, Dieu a tant aimé la planète qu’il a envoyé son fils Jésus, nous serons tous jugés à la Fin de la Planète."
Un commentateur avait apporté ces précisions intéressantes :
"Monde : Vient du latin mundus qui signifie net, propre. C’est l’équivalent du cosmos grec, lequel signifie ordre. Un monde est toujours ordonné, il n’est pas livré au hasard ou au chaos. Un monde digne de ce nom implique l’idée d’un créateur.
Planète : Emprunté au latin planeta, lui même dérivé du grec planêtês qui signifie errant. Les planètes sont des astres errants, par opposition aux étoiles fixes. En astrologie, on leur attribue une influence bénéfique ou maléfique sur la destinée humaine.
D’un côté, l’ordre et une certaine fixité, de l’autre l’errance et le mouvement. On comprend que la modernité ait choisi la seconde alternative. Le succès du mot planète ne doit rien au hasard, il implique une certaine vision du… monde."
Et un certain Didier G. avait déclaré :
"C’est bien noté : je vais m’entraîner ces prochains jours…"
http://fromageplus.wordpress.com/2009/10/27/geocentrisme/#comments
Je l'avais complètement oublié ! Il faut dire, 2009…
Supprimer"Si la France n'était pas la France, tous les Français seraient des étrangers"
SupprimerPierre DAC
Duga
Eugeneu, tu m'gèneu, mais j't'aimeu quand mêmeu
RépondreSupprimerBeaucoup !
Ben j'aime bien Michel, certes un peu acariâtre mais immense acteur, j'aime bien Marion Belpère, née à Loches Jean Dupotager me fait marrer et le taulier est un pote… Putain, je commence à aimer tout le monde, tout ça à cause de cette pas nette planète détraquée. Pfff, allez un peu de courage, je coule dans le Styx!
RépondreSupprimerPluton aux pieds bétonnés
Pluton, on voit que vous écoutez les Grosses Têtes!
SupprimerC'est le bouquet, Michel va chez Gégène !
RépondreSupprimerVoilà à quoi sert vraiment un bouvier bernois.
RépondreSupprimerDans certains pays on considère le prénom comme un nom propre au sens de propriété car le patronyme est un nom propre certes, mais qui appartient à toute la famille. En Russie, en Ukraine - par ecemple - on privilégie le prénom.
RépondreSupprimer