Ernesto Sabato, 24 juin 1911 – 30 avril 2011. |
On finirait par croire qu'ils le font exprès, tous ces candidats au centenariat qui se précipitent dans leur tombe alors que la ligne d'arrivée est à deux pas, avec l'air affolé d'un candidat qui, après avoir bûché ses matières durant des mois, finit par s'enfuir à toutes jambes au moment de franchir le seuil de la salle des examens.
À part ça, Ernesto Sabato est un écrivain argentin, l'un de ceux qui, pour d'obscures raisons, m'avaient totalement échappé lors de mon immersion sud-américaine du milieu des années soixante-dix. Il est notamment l'auteur d'une trilogie romanesque, dite “de Buenos Aires” : Le Tunnel, puis Héros et Tombes, et enfin L'Ange des ténèbres. À la suite d'une probable mais peu explicable panne de cerveau, je viens, ce matin, d'entrer dans ce triptyque par son panneau central : n'en ayant lu qu'une quarantaine de pages, je n'en dirai rien aujourd'hui, sinon que j'ai envie de poursuivre.
Je me posais une question : alors que l'on connaît plusieurs écrivains chimistes (Primo Levi, Italo Svevo…), y eut-il des écrivains physiciens, en dehors de notre Portègne ? Car physicien, Sabato le fut pleinement : dans l'immédiat avant-guerre, à Paris (il faudrait aussi se demander s'il existe un seul écrivain sud-américain qui n'ait pas vécu à Paris), il partageait son temps entre ses travaux à l'Institut Curie (le jour) et les facéties montparnassiennes des surréalistes canal historique (la nuit). Il a ensuite poursuivi ses travaux sur la relativité à l'université de La Plata, où il était professeur, avant d'opter définitivement pour la littérature, en 1945 – excellente date pour tout remettre à plat. Bien des années plus tard, atteint d'une grave maladie oculaire, il cessera d'écrire pour se consacrer désormais à la peinture, car chacun sait qu'un aveugle est beaucoup plus à l'aise face à une toile que devant un clavier, ainsi que l'a illustré, de ce côté-ci de l'océan, notre irremplaçable Jean-Edern. Il n'empêche que, ces yeux devenus inutiles, il aurait pu les fermer deux mois plus tard et entrer ainsi dans notre petit panthéon, déjà si peu fréquenté.
Il y a eu plein d'écrivains physiciens. Si je peux rendre service (avec Google...).
RépondreSupprimerAh, non ! Ceux-là (à part Pascal et Descartes, que j'avais honteusement oubliés…) sont des physiciens qui ont écrit des livres de physique : ce ne sont pas des écrivains physiciens, au sens ou Levi et Svevo sont des écrivains chimistes.
SupprimerComme c'est intéressant ! Et quel manque de bol pour votre "petit panthéon" !
RépondreSupprimerIl faut reconnaître qu'on ne s'y bouscule guère…
SupprimerIl y a D'Alembert, qui était aussi mathématicien et philosophe. Et Aristote mais sa contribution à la physique n'était pas indispensable. Démocrite a eu l'intuition de l'existence des atomes mais n'était pas physicien. J'ai appris récemment que Voltaire se piquait de physique à ses moments perdus.
RépondreSupprimerEn fait, je pensais exclusivement à l'époque moderne, et même contemporaine, c'est-à-dire celle de la spécialisation des savoirs, et notamment des sciences.
SupprimerEtes-vous certain qu'Italo Svevo était chimiste ? Je le croyais petit négociant.
RépondreSupprimerVous avez tout à fait raison ! Mais alors, avec quel écrivain l'ai-je confondu ? Qui est donc mon mystérieux chimiste ? C'est agaçant…
SupprimerVassili Grossman ?
SupprimerLe cas de Grossman (grand écrivain par ailleurs) est douteux puisque, après avoir en effet suivi des études de chimie, il est finalement devenu ingénieur ; et encore, pas très longtemps.
SupprimerGoethe, l'auteur du Traité des couleurs. L'optique est un domaine qui appartient à la physique. On peut citer aussi Schelling ou Novalis. Il semble que le romantisme allemand se soit intéressé à la science.
RépondreSupprimerJ'oublie toujours les Allemands…
SupprimerLe syndrome de la droite parlementaire française…
RépondreSupprimerToujours rien en vue sur Jorge-Luis Borges ? Il a pourtant brossé pas mal de papier en tant que bibliothécaire, aveugle de surcroît...
RépondreSupprimerC’est bizarre, ce besoin qu’ont les écrivains argentins de finir aveugles...
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